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1.2 Physique des écoulements en turbomachines

1.3.2 Classification des pertes

T ∂ui ∂xiτij + λ T2 ∂T ∂xi (1.13)

ce qui établit la relation entre la génération de pertes et les frottements visqueux d’une part et transferts thermiques d’autre part. L’auteur montre également que dans ces termes il existe une perte liée aux champs laminaire et turbulent ; avec une notation RANS (chapitre 2), la production d’entropie s’écrit alors :

¯ ρs Dt = 1 ˜ T ∂ ˜ui ∂xi ˜ τij+ ¯ρε  +λ + λt ˜ T2 ∂ ˜T ∂xi (1.14) avec ε la dissipation turbulente, λtla conductivité thermique turbulente.

1.3.2 Classification des pertes

Les pertes font l’objet d’une classification selon le mécanisme dont elles sont issues. Dans les turbo-machines transsoniques, les pertes aérodynamiques sont essentiellement issues de la dissipation visqueuse dans les couches limites ou dans les zones de cisaillement, des processus irréversibles tels que les ondes de choc et les transferts de chaleur. Les pertes par transfert de chaleur ne sont pas évoquées ici en raison du caractère adiabatique du module étudié. De même, on n’évoquera pas ici les pertes de mélange liées à de l’injection d’air à la paroi de l’aubage ou au bord de fuite pour refroidir l’aube, ni les pertes dues aux imperfections de la structure mécanique (rugosité, sectorisation,...)

Ainley et Mathieson [3], Dunham et Came [30] puis Kacker et Okapuu [54] ont proposé une version modifiée de modélisation du terme de pertes de pression totale en plusieurs termes selon la nature des pertes étudiées :

Y = YP + YBF + YC+ YES+ YT J (1.15) avec :

– YP : les pertes de profil

– YBF : les pertes de bord de fuite – YC : les pertes par ondes de choc

– YES: les pertes liées aux écoulement secondaires (ou endwall loss) – YT J : les pertes de tourbillon de jeu

Ce découpage est en partie arbitraire car on peut aisément inclure les pertes de tourbillon de jeu dans les écoulements secondaires, et inclure les pertes de bord de fuite dans les pertes de profil. De même, les écoulements secondaires ou les onde de choc peuvent fortement affecter la couche limite sur le profil de l’aubage et donc interagir sur les pertes de profil. Ces corrélations ont été validées sur des grilles d’aubes de turbines et donc ne sont pas nécessairement adaptées à notre cas d’étude, mais on peut s’appuyer sur cette décomposition pour décrire les différents mécanismes physiques de pertes et comprendre leur origine. Enfin, ces corrélations théoriques ont été appliquées à l’aubage DBP de notre configuration, les résultats sont présentés en annexe C.

1.3.2.1 Pertes de profil

FIG. 1.13: Définition des éléments géométriques pour les corrélations de pertes (Kacker et Okapuu [54]).

Les pertes de profils sont bidimensionnelles. Les pertes de profils sont liées à la couche limite et plus précisément aux frottements des couches vis-queuses sur la paroi des aubages. On définit la force de frottement :

f = µ∂u ∂y |y=0

Le frottement est directement corrélé au gradient de vitesse dans la couche limite. Il diminue no-tamment avec l’épaisseur de couche limite. En ré-gime turbulent, le gradient de vitesse est plus grand qu’en régime laminaire, le frottement est donc plus important. Bien prédire et modéliser la nature de la couche limite est donc un élément important de la prévision des pertes de profil. Cela passe éventuellement par la modélisation de la transition laminaire-turbulente. D’autre part, la présence d’un décollement modifie significativement la nature du frottement à la paroi (le gradient de vitesse subit une inversion). Le décollement entraine un épaississement de la couche limite et un cisaillement im-portant augmentant le processus de mélange ce qui augmente le niveau de pertes (modifiant également l’écoulement au niveau du bord de fuite).

L’angle d’incidence va avoir une influence sur la position de la transition. La courbure des profils (forme du profil) couplée avec les accélérations/décélérations va augmenter les risques de décollement. La corrélation [54] montre que ces pertes de profil sont dépendantes de l’angle métal en entrée β1, l’angle de l’écoulement en sortie α2, l’épaisseur maximale du profil 2D et la corde tmax

c . YP = f  β1, α2,tmax c  (1.16)

Pertes de bord de fuite (ou de culot) Ces pertes sont directement liées à l’épaisseur du bord de fuite, et par conséquent peuvent être associées à la formation des sillages. Les pertes de bord de fuite contribuent pour un tiers aux pertes de profil [27]. Il apparait que la prévision de ces pertes est essentiellement liée à ce qui se développe au niveau du bord de fuite. Le processus de mélange visqueux qui est présent ensuite dans le sillage est presque négligeable.

Pour prédire ce terme, Denton propose une corrélation basée sur le niveau de pression statique agissant au niveau du bord de fuite P sBF, l’épaisseur du bord de fuite t, la taille du col géométrique w et les caractéristiques de la couche limite juste avant le bord de fuite (épaisseur et moment de la couche limite

δBF, θBF).

YBF = f (P sBF, t, w, θBF, δBF) (1.17) Un décollement sur l’extrados avant le bord de fuite modifiera notablement ce coefficient.

1.3. Mécanismes de pertes sur les aubages 1.3.2.2 Pertes par ondes de choc

Une onde de choc est une discontinuité forte génératrice d’entropie donc de pertes. A la traversée d’un choc faible, la variation de pression est limitée donc les pertes sont négligeables au contraire d’un choc fort.

FIG. 1.14: Structures de bord de fuite d’un aubage de turbine transsonique (Denton [28])

D’autre part, les effets de compressibilité af-fectent les pertes de profil et notamment les pertes augmentent avec le nombre de Mach, et l’augmen-tation s’intensifie dès que l’écoulement s’approche du régime transsonique. En 1990, Denton [28] ex-plique que, au niveau du bord de fuite, la présence du réseau d’ondes de chocs augmente significati-vement les pertes de bord de fuite en raison d’une forte dissipation visqueuse dans la zone décollée si-tuée entre le bord de fuite et l’onde de choc forte (figure1.14). Plus le profil est épais, plus les pertes par ondes de choc sont importantes mais la forme du bord de fuite n’a aucune incidence. L’écoule-ment est détendu juste après le bord de fuite puis est recompressé au point de confluence des pres-sions intrados et extrados.

La corrélation théorique de Kakcker et Okapuu prend en compte les pressions statiques entrée sortie p1

p2, les nombres de Mach et les rayons de la géométrie R.

YC = f  M1,moyeu, M1, M2,p1 p2, Rmoyeu Rcarter  (1.18) Enfin l’interaction onde de choc-couche limite affecte la nature de la couche limite (décollement local) et produit ainsi des pertes.

1.3.2.3 Pertes secondaires

Ces pertes sont liées aux écoulements secondaires qui se développent au sein du canal inter-aubes et donc à son caractère tridimensionnel (contrairement aux autres sources de pertes précédemment évo-quées). Denton [26] parle également d’"endwall losses" (pertes de moyeu-carter) car elles sont directement liées à ces parois supérieure et inférieure sur lesquelles la présence d’une couche limite génère des tour-billons secondaires. Il inclut d’ailleurs sous ce terme toutes les pertes générées au niveau des moyeu-carter dans le domaine. Les origines de ces pertes sont multiples : charge de l’aubage, accélération du fluide lié à la déflection de l’écoulement, couche limite amont, taille de la structure... mais il n’existe pas de consensus de la littérature sur un mécanisme dominant pour les pertes secondaires (Benner [9]). Denton rappelle que les écoulements secondaires sont par nature non visqueux et donc ne créent pas de pertes a priori même si en même temps ils sont le résultat de cisaillement visqueux dans les couches limites.

Sharma et Butler [85] privilégient la formation des tourbillons pour expliquer l’origine des pertes secondaires. Les tourbillons en fer à cheval et de passage transportent des particules de fluide de faible énergie de la couche limite des parois moyeu-carter dans l’écoulement sain. Ils montrent alors que ce sont d’une part les caractéristiques de la couche limite à l’amont du bord d’attaque de l’aubage qui vont piloter l’intensité des pertes dans le passage et d’autre part la prise en compte du niveau de pénétration du

tourbillon dans la veine c’est-à-dire la taille de la structure à la sortie du passage (caractère 3D), qui va permettre d’expliquer le transport des pertes dans le passage.

Ils estiment également que les pertes secondaires contribuent à la hauteur de 30 à 50 % des pertes totales sur un aubage de turbine. Les pertes par mélange visqueux sont négligeables devant les autres sources de pertes pour les tourbillons. De plus, dans le cas particulier d’un rotor, lors d’un passage d’une paroi mobile à une paroi fixe, la couche limite est significativement modifiée et renforce les tourbillons. Lors de la destruction des tourbillons, notamment dans les rangées d’aubes suivantes, l’énergie cinétique induite par leur destruction est dégradée en chaleur mais ce mécanisme est encore mal compris.

Le terme de pertes secondaires développé par Dunham et Came est dépendant de la corde réelle, de la hauteur de veine h, des angles de l’écoulement à l’amont et à l’aval de l’aube α. Sharma et Butler ont intégré les caractéristiques de la couche limite à l’amont (facteur de forme H) ainsi que le taux de pénétration des tourbillons dans la veine (via le taux de convergenceρ1U1

ρ2U2 et la distance moyenne parcourue dans la direction de l’écoulement S) et le relient à un coefficient de frottement sur l’aube Cf.

YS= f s ρ1U1 ρ2U2, α2− α1, S h, Cf, U1 U2, H ! (1.19)

Pertes de tourbillon de jeu On peut tout d’abord signaler l’importance des pertes liées au tourbillon de jeu, qui engendre une perte d’énergie utile, c’est-à-dire une perte de travail et de taux de détente réalisé. Denton explique que l’écoulement de jeu subit un mélange avec l’écoulement principal, processus qui est irréversible, ce qui génère alors de l’entropie. Il montre également via une corrélation théorique que les pertes liées au tourbillon de jeu sont principalement générées à l’aval de la rangée d’aubes et non dans le jeu lui-même. La corrélation de Dunham and Came [30] montre que ces pertes prennent en compte la hauteur de veine h, la corde c, la charge de l’aubage CL, le pas inter-aubes p, la taille du jeu k et les angles d’entrée et de sortie de l’écoulement α.

YT J = f h c, p c, k c, CL, α1, α2  (1.20) 1.3.2.4 Pertes d’interaction

Les processus de pertes présentés précédemment concernent des pertes intrinsèques à la rangée d’aubes. Ainsi, les interactions instationnaires peuvent également entraîner des pertes. Elles ont été déjà brièvement évoquées précédemment lors de la déformation puis la destruction des structures tourbillonnaires sous les effets visqueux (Chaluvadi [73]), les interactions onde de choc-couche limite, le découpage des sillages,... Ces phénomènes sont alors générateurs de turbulence.

Hodson et Dawes [45] ont étudié les pertes générées par le passage de sillages instationnaires. Il est apparu que la convection de segments de sillages dans le passage inter-aubes pouvait générer des variations importantes de pression totale et température totale dues à des variations de pression statique instationnaires ∂p∂t. En revanche ces variations sont apparues quasi-isentropiques : la production de pertes est très faible dans ce processus. De même, les pertes par mélange visqueux associées aux sillages sont deux fois plus importantes dans un champ instationnaire mais il faut noter qu’elles n’apportent qu’une faible contribution aux pertes totales. Hodson conclut donc que les sillages transportent l’entropie (donc également les pertes). Dans le passage inter-aubes, la convection des sillages entraine une redistribution des pertes dans l’espace avec une concentration sur l’extrados. En revanche, ces processus instationnaires génèrent des pertes supplémentaires limitées.

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