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La Cité de Montréal, la paroisse de Montréal et le secteur où s’est

Réalisation : Amélie Roy-Bergeron d’après Dany Fougères, Histoire de Montréal et de sa région, Québec, Presses de l’Université Laval, 2012, coll.« Régions du Québec », n˚ 21, p.370

Outre ses fonctions agricoles, majoritaires lors de sa création en municipalité, la Paroisse de Montréal accueillait, au plaisir de certains des Montréalais les plus nantis, des villas et des activités de loisirs telles les randonnées au cœur de vastes espaces verdoyants et la chasse sportive, comme en témoignent les activités menées par le Montreal Hunt Club. D’ailleurs, encore dans les années 1880, le pavillon principal du

33 club se trouvait sur l’actuelle avenue De Lorimier près de Sherbrooke avant de déménager à Côte-des-Neiges en 18981.

Dans le vaste territoire de la municipalité de paroisse de Montréal, la population croît à un rythme soutenu entre 1855 (année de création de la municipalité) et 1901 (cinq ans après la création de De Lorimier), passant de 5 000 à 120 000 personnes en un peu moins de 50 ans2. En lien avec cette croissance démographique, l’occupation du territoire à des fins agricoles cède graduellement le pas à des hameaux villageois qui, au fil de leur croissance (d’abord inorganisée), expriment le désir de s’organiser légalement sous la forme d’une municipalité distincte. Une telle reconnaissance est possible suite à l’envoi d’une requête aux autorités coloniales dans laquelle est démontrée la présence d’une certaine densité (c’est-à-dire d’un nombre déterminé de bâtiments sur un espace restreint). C’est ainsi que se sont formés plusieurs villages, dont nos deux villages « primaires » que sont Côte-Saint-Louis (1846), dans la partie centre de la municipalité de paroisse, et Côte-Visitation (1870), dans la partie nord-est. L’expression « village primaire » renvoie au fait que c’est à l’intérieur du territoire de chacun d’eux que de nouveaux villages sont créés dans la seconde moitié du XIXe siècle, pour finalement former aujourd’hui le quartier du Plateau Mont-Royal que l’on connait.

1 Musée McCord, « Montreal Hunt Club (P161) », Musée McCord, 2017, http://collections.musee-

mccord.qc.ca/scripts/explore.php?Lang=2&tableid=18&elementid=44__true. Consulté le 9 janvier 2018.

2 Les données sont tirées des recensements du Canada-Uni de 1851 et du Canada de 1901 (Bibliothèque

34 1.1 Les villages du Plateau Mont-Royal

Invariablement, les noyaux de population qui voient le jour sur le territoire de la municipalité de paroisse s’installent le long des côtes (c’est-à-dire les grands chemins) ou près des ruisseaux. C’est le cas notamment de la proto-industrie qu’est la tannerie des Bélair, située au croisement des actuelles rues Mont-Royal et Henri-Julien. D’abord une entreprise familiale, la tannerie va rapidement jouer un rôle attractif, favorisant la naissance d’un noyau villageois, le village de la tannerie des Bélair — identifié ainsi par Jacques Viger lors de son dénombrement de 1825, dans lequel il note la présence de 116 personnes réparties en 24 demeures3. Tout juste au nord, le territoire accueille une autre activité économique, soit celle de l’exploitation de carrières. En effet, le sol du Plateau Mont-Royal regorge à cet endroit de pierre calcaire grise, qui est utilisée pour la construction de plusieurs bâtiments de Montréal, alors en pleine expansion. Les ouvriers employés à extraire la pierre des carrières s’établissent aussi à proximité de leur lieu de travail. Au milieu du XIXe siècle, ces deux noyaux villageois se constituent en village — le village de Côte-Saint-Louis. Cette entité couvre un immense territoire au nord de Montréal, s’étendant d’ouest en est du mont Royal au chemin Papineau, et au nord jusqu’à la paroisse du Sault-au-Récollet, dont la limite correspond aux environs de l’actuelle rue Jean-Talon. En 1861, un nouveau noyau villageois prend forme dans la partie sud de Côte-Saint-Louis et s’en détache pour être légalement reconnu comme municipalité de village : Saint-Jean-Baptiste. Cette nouvelle entité est prise en étau entre Montréal, au sud, et Côte-Saint-Louis, au nord, profitant grandement de sa situation géographique. En effet, les résidents peuvent retirer tous les avantages de la proximité de la ville (c’est-à-dire accès à celle-ci à une distance de marche4), sans en

3 Bibliothèque et Archives nationales du Québec, Dénombrement du Comté de Montréal fait en 1825

par MM Louis Guy et Jacques Viger, 1825, P694.

4 Nous pouvons aussi mentionner qu’à partir de 1864, le tramway hippomobile relie le village de Saint-

35 avoir les contraintes réglementaires comme les restrictions sur les matériaux des bâtiments (la construction de maisons en bois, moins dispendieuses, est permise à Saint-Jean-Baptiste) ou les activités économiques jugées trop polluantes ou trop dangereuses dans la grande ville (telles les tanneries)5. Néanmoins, l’accès à certains services municipaux comme l’eau courante devient nécessaire. Les dirigeants décident de conclure une entente avec Montréal, qui a déjà un réseau d’eau en service. Des fontaines publiques d’approvisionnement, alimentées par les conduites montréalaises, sont installées dans Saint-Jean-Baptiste, qui sera annexé à Montréal en 1886.

Le territoire restant, au nord de l’avenue du Mont-Royal actuelle, continue de s’urbaniser, et émergent alors graduellement de nouveaux noyaux villageois, comme on peut le voir sur la carte 1.2. En 1878, une nouvelle entité se forme : le village de Saint-Louis-du-Mile-End, entre les rues actuelles Hutchison et Henri-Julien6. Traversé par le chemin Saint-Laurent, le village sera le théâtre d’une croissance fulgurante : sa population passe de 2400 à 37 000 entre 1888 et 1910 — lors de son annexion à Montréal7. La portion restante de Côte-Saint-Louis, au nord de l’avenue Mont-Royal et entre les rues Henri-Julien et Papineau est, quant à elle, annexée à Montréal en 1893.

pas à la portée de toutes les bourses, et le service n’est pas des plus efficaces, les chevaux ayant parfois des difficultés à grimper la côte pour atteindre la rue Sherbrooke, surtout en hiver.

5 Jean Louis Lalonde, op. cit., 1985 ; «Saint-Jean-Baptiste (ville/village)», dans Justin Bur et al.,

Dictionnaire historique du Plateau Mont-Royal, Écosociété., 2017, p. 376.

6 De façon plus précise, la frontière entre les villages de Saint-Louis-du-Mile-End et Côte-Saint-Louis

est la ruelle entre les rues Henri-Julien (Robin à l’époque) et Drolet.

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