3. L A METHODOLOGIE DE RECHERCHE ADOPTEE ET LES DIFFICULTES RENCONTREES
3.1 Le choix de la méthodologie
3.1.1 L’observation de terrain
Ne connaissant nullement le Grand-‐duché de Luxembourg avant d’aborder ce travail de recherche, ma première démarche fut naturellement de me procurer et de lire la documentation disponible traitant de la société et des usages linguistiques du pays. Ensuite seulement put débuter l’observation de terrain à proprement parler, et j’optai pour une démarche de type ethnographique. Il me sembla en effet pertinent -‐ si non indispensable -‐ de commencer une telle étude sociolinguistique par une observation attentive -‐ voire une imprégnation -‐ des comportements sociolinguistiques des individus résidant ou évoluant dans la zone concernée. Ainsi, après avoir étudié durant quelques jours les pratiques observables en termes de multilinguisme dans l’enceinte de la ville de Luxembourg et dans ses environs, je pus commencer de me concentrer sur les usages ayant cours au sein même de l’Université. Je passai ainsi de nombreuses heures à observer ainsi qu’à m’entretenir avec un maximum d’individus évoluant dans les différents espaces de l’institution. Souhaitant dresser un état des lieux aussi complet que possible des usages linguistiques -‐ et notamment de la place qu’occupe le français parmi les autres langues -‐ au sein de l’Université, mon étude devrait porter sur différents champs d’utilisation des langues en présence au sein de l’institution. Les champs ayant été retenus sont la communication, l’administration, l’enseignement et la recherche et les publications.
3.1.2 Les questionnaires
Si je prévis à l’origine, afin de recueillir des données les plus objectives possibles, d’assister personnellement à divers enseignements afin d’observer les pratiques linguistiques ayant cours au sein des différentes Facultés et de comparer ces dernières aux descriptifs officiels des enseignements, je dus renoncer à ce type de méthodologie. Il est en effet évident qu’une telle démarche nécessite un temps de travail conséquent, puisqu’il importe alors de se rendre dans un maximum de cours possible et, idéalement, de s’y rendre à plusieurs reprises. Ne disposant que de deux mois pour effectuer mon recueil de données, j’optai donc en accord avec ma directrice de recherche pour une méthodologie différente. On notera par ailleurs qu’en plus d’être fastidieuse et chronophage, la méthode mentionnée plus haut ne m’eut permis d’obtenir des données suffisamment fiables, la présence du chercheur dans un environnement censé être « authentique » faussant la spontanéité de la situation et des individus étudiés.
La quantité d’informations à recueillir pour pouvoir dresser un état des lieux satisfaisant étant importante, j’optai donc, entre autres, pour une méthode de recueil de données par questionnaire. J’élaborai ainsi un questionnaire trilingue que je mis en ligne sur le serveur de l’Université du Luxembourg afin, pensais-‐je, d’en faciliter la diffusion22. Après un premier contrôle d’une ébauche par le
rectorat de l’Université, toutes les versions de ce questionnaire23 furent soumises à
une révision. Elles furent ainsi contrôlées par mes deux directeurs de mémoire à Luxembourg comme à Grenoble, puis par trois locuteurs natifs afin d’en garantir la parfaite correction orthographique et grammaticale. Le questionnaire à destination des étudiants se compose de 16 questions fermées et 3 questions ouvertes. Le questionnaire à destination des enseignants comporte quant à lui 20 questions fermées et 2 questions ouvertes. 114 étudiants et 27 enseignants répondirent à ces questionnaires. On ne pourra pas considérer que les données recueillies seront suffisamment représentatives, mais elles permettront
22 Nous verrons plus loin (cf. 3.2.4 infra) que je rencontrai toutefois un certain nombre d’obstacles
techniques et structurels venant paralyser ma démarche.
23 Six au total, le questionnaire se déclinant en deux versions, l’une à destination des étudiants et
l’autre à destination des enseignants, et les deux versions étant proposées dans les trois langues officielles de l’Université (à titre d’exemple, la version française des questionnaires est présentée en Annexes 1 et 2).
néanmoins de dessiner les tendances prévalant au sein de l’institution, ces dernières pouvant ensuite être confrontées aux chiffres officiels fournis par l’Université. En raison de difficultés techniques, je ne suis pas en mesure d’indiquer le nombre d’étudiants et d’enseignants ayant reçu mon questionnaire. Il est néanmoins certain que l’envoi à l’intégralité d’entre eux n’a pu être effectué. L’un de mes plus grands regrets est également qu’en raison de difficultés techniques ainsi que de problèmes d’autorisation à l’accès aux banques de données de l’Université, aucun étudiant inscrit à la Faculté de Droit, d’Economie et de Finance n’a reçu ce questionnaire. Ainsi, les données concernant cette Faculté font défaut dans l’analyse de la situation. Je fis par ailleurs le choix d’inviter mes informateurs à répondre à mes questionnaires de manière anonyme afin de susciter chez eux une plus grande liberté d’expression, espérant ainsi recueillir des données aussi objectives que possible. Je complétai l’observation de terrain et le recueil de données par voie de questionnaire par des entretiens individuels.
3.1.3 Les entretiens
Afin d’ajouter une dimension qualitative à un recueil de données plus
quantitatif, et afin à la fois d’en apprendre plus sur l’évolution des pratiques au sein
de l’institution et d’obtenir un discours officiel sur mon objet d’étude, je décidai d’effectuer un certain nombre d’entretiens avec divers responsables de l’Université du Luxembourg. Plusieurs entretiens semi directifs furent ainsi menés, sept d’entre eux ayant été enregistrés à l’aide d’un dictaphone avec l’accord préalable de mes interlocuteurs. Les enregistrements (d’une durée totale de cinq heures et trente minutes environ) furent ensuite dactylographiés dans leur intégralité selon les normes couramment utilisées dans le domaine de la sociolinguistique. Les citations apparaissant au cours de ce travail sont pour la plupart issues des transcriptions de ces enregistrements, et les références indiquées renvoient aux numéros de lignes indiqués en marge des transcriptions. Les propos restitués l’ont été en conservant aussi fidèlement que possible leur forme d’origine. Je me suis toutefois permis d’effectuer quelques corrections grammaticales ainsi que de supprimer d’éventuelles répétitions afin de rendre la lecture plus fluide, les versions originales non altérées de ces transcriptions étant toutefois consultables
en annexe de ce travail24. L’intégralité des entretiens enregistrés et transcrits se
déroula en français25. Le choix d’entretiens semi directifs me sembla le plus
approprié. Il me permit d’obtenir les informations souhaitées tout en laissant mes interlocuteurs libres de m’apporter des informations supplémentaires comme de me faire part d’anecdotes susceptibles de m’éclairer dans la compréhension de la situation. Un entretien qui me fut accordé spontanément prit la forme d’un entretien libre puisqu’il fut réalisé sans que je n’aie préalablement confectionné de grille, et il me fut ainsi parfois difficile de recentrer la conversation afin d’obtenir les informations véritablement souhaitées. Un grand nombre d’entretiens plus informels furent également menés, qui ne furent pas enregistrés.