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ORGANISMES HLM AU SEIN DU CIRCUIT DE FINANCEMENT DU LOGEMENT SOCIAL

ICF Atlantique ESH SNCF

2. CHOISIR ET RECUEILLIR LES MATÉRIAUX D’ENQUÊTE

Au sein des trois intercommunalités présentées dans la section précédente, une enquête de terrain a été menée entre septembre 2012 et janvier 2015. Cette enquête a eu pour objectif de décrire le circuit de financement du logement social, de comprendre les positionnements des acteurs en son sein et de rendre compte de l’organisation des champs HLM locaux. Pour ce faire, elle a reposé sur le croisement de matériaux qualitatifs et quantitatifs. Il s’agit principalement de la retranscription d’entretiens semi-directifs réalisés auprès d’élus locaux et de salariés d’acteurs impliqués dans le circuit de financement du logement social, de données quantitatives sur les logements sociaux existants et en projet, de productions relevant de la « littérature grise » ainsi que de notes et photographies prises lors de visites de terrain. Les objectifs du rassemblement et de l’analyse de ces matériaux, ainsi que les modalités selon lesquels ils ont été rassemblés, sont présentés ci-dessous.

2.1. Décrire la production et les modes de production des organismes HLM : statistique, visites de terrain et « littérature grise »

Deux types de matériaux sont principalement mobilisés dans la thèse de façon descriptive. Il s’agit d’une part de plusieurs sources statistiques et d’autre part de documents aux statuts divers, pouvant être considérés comme relevant de la « littérature grise ». Ces sources permettent de décrire le contexte socio-économique dans lequel interviennent les organismes HLM, mais aussi les spécificités de leur patrimoine et de leur production. En amont de l’enquête par entretiens, elles permettent de repérer des tendances qui peuvent être par la suite discutées avec les acteurs. En aval, elles donnent la possibilité de confirmer des observations ponctuelles et, ce faisant, de faciliter la montée en généralité. Il est nécessaire d’ajouter à ces deux principales ressources la réalisation, entre 2013 et 2015, de visites de terrain dans des quartiers où les organismes HLM enquêtés ont produit des logements. Celles-ci ont pour but d’envisager les caractéristiques architecturales et urbaines de la production, qui ne sont pas étudiées en tant que telles dans la thèse, mais peuvent être mises en relation avec des processus de régulation ou des stratégies de production.

Concernant les sources statistiques, trois précisions s’imposent. En premier lieu, si elles sont principalement exploitées dans une perspective « intensive », c’est-à-dire pour explorer des relations de causalité entre un nombre restreint de phénomènes concrets, il arrive que ces données fassent l’objet de traitements sur des échantillons exhaustifs. Elles sont alors mobilisées dans la perspective de fournir des éléments contextuels.

Il paraît important de noter, en second lieu, qu’il a été difficile d’accéder à ces sources statistiques et que leur exploitation est contrainte par des règles de confidentialité strictes. Mon

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expérience rejoint celle de plusieurs observateurs, qui ont souligné une difficulté particulière sur ces points dans le secteur du logement1. Cette difficulté est particulièrement nette en ce qui

concerne l’activité des organismes HLM. Ainsi, T. Bert et S. Baietto-Buysson2 soulignent que,

même pour les administrations qui assurent le contrôle réglementaire de l’activité de ces organismes, l’accès fiable et continu à des données représente une difficulté. Trois facteurs peuvent notamment contribuer à expliquer cette situation. Il existe d’abord une forte hétérogénéité des statuts des détenteurs de sources statistiques, qui disposent chacun de règles de diffusion plus ou moins formalisées. Cela oblige à multiplier les contacts et les négociations pour y accéder. Les sources statistiques publiques existant actuellement et pouvant renseigner quant à l’activité des organismes HLM sont de plus relativement récentes : elles datent pour la plupart du milieu des années 2000 ou du début des années 2010. Cela implique qu’il n’est d’une part pas toujours possible de réaliser des traitements sur longue période, et, d’autre part, qu’il n’existe pas nécessairement une habitude de transmission de ces données à des chercheurs. Enfin, dans la mesure où certaines de ces données concernent le patrimoine des organismes HLM, elles posent des problèmes de confidentialité : elles peuvent permettre de calculer le loyer d’un ménage ou de connaître la production d’un organisme HLM, brisant ainsi le « secret professionnel »3 dont s’entourent ces

acteurs ou révélant des informations considérées comme « sensibles » politiquement. Pour ces raisons, les exploitations des sources mobilisées dans la thèse sont interdites à l’échelle du logement, mais aussi, ce qui représente une difficulté réelle pour mon argumentation, à celle du patrimoine d’un opérateur.

Un troisième enjeu concernant les sources statistiques réside dans les périmètres des différentes enquêtes mobilisées, qui ne se superposent pas. En effet, dans la mesure où il n’existe pas une définition stricte du logement social en France (cf. Introduction), les enquêtes s’appuient sur des définitions ad hoc, correspondant à leurs propres objectifs (cf. Tableau 6). Ainsi, un logement social financé ou acquis après 1977 mais non conventionné sera comptabilisé dans le répertoire du parc locatif social (RPLS), mais pas dans l’inventaire réalisé au titre de la loi SRU. Au contraire, des logements appartenant à une personne physique et conventionnés suite à une intervention de l’agence nationale pour l’habitat (ANAH) apparaîtront dans l’inventaire SRU mais pas dans le RPLS. Cela a principalement deux conséquences : il est d’une part nécessaire de prendre en compte les conditions d’élaboration de la source statistique au moment de son interprétation et il est d’autre part difficile, voire impossible, de comparer des exploitations provenant de sources différentes ou de réaliser des appariements entre plusieurs sources, ce qui permettrait de croiser leurs informations. De façon à faciliter la lecture des figures, je précise systématiquement, lorsqu’elles ont pour individus des logements, le type de logements dont il s’agit.

1 ANAH, 2012, La connaissance des marchés locaux de l’habitat. Les principales sources d’information existantes et leurs limites

d’utilisation, Paris, p. 9.

2 Bert, T. et Baietto-Beysson, S., 2010, Rapport sur les dispositifs de contrôle des acteurs du logement social, Paris, Inspection générale des finances et Conseil général de l’environnement et du développement durable.

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Tableau 6. Périmètre des enquêtes statistiques mobilisées

SISAL

Logements et logements-foyers conventionnés, c’est-à-dire financés à l’aide d’un PLUS ou d’un PLAI ou d’un PLS ou dans le cadre de l’ANRU ou privés et ayant joui d’une aide financière de l’agence nationale pour l’habitat (ANAH).

RPLS

Logements sur lesquels les organismes HLM, les SEM, la société anonyme Sainte-Barbe, l’association foncière logement et ses filiales et certains organismes agrémentés

détiennent un droit réel immobilier ou dont ils sont usufruitiers.

Inventaire SRU

Logements locatifs appartenant aux organismes HLM, à l'exception, en métropole, de ceux construits ou acquis et améliorés à compter du 5 janvier 1977 et ne faisant pas l'objet d'une convention ; autres logements conventionnés et dont l'accès est soumis à des conditions de ressources ; logements appartenant à certaines personnes morales ; logements ou lits de la plupart des logements-foyers (pour personnes âgées, handicapées, jeunes travailleurs, travailleurs migrants, etc.) ; logements financés par l’État ou les

collectivités locales occupés à titre gratuit, à l’exception notamment des logements de fonction.

Recensement de la

population

Logements appartenant à des organismes HLM ou à d’autres bailleurs et soumis à la réglementation HLM pour la fixation de leur loyer.

Élaboration personnelle. Source : enquête.

1.1.1. Le répertoire des logements locatifs des bailleurs sociaux (RPLS) et le système d’information pour le suivi des aides au logement (SISAL)

Des données issues de deux systèmes d’information sont principalement exploitées dans la thèse (cf. Tableau 7). Il s’agit dans les deux cas de données pouvant être considérées comme exhaustives. Il m’a été possible d’obtenir des extractions de ces bases au format brut, c’est-à-dire contenant la description de chacune des unités statistiques traitées.

Sont exploitées en premier lieu des données issues du répertoire des logements locatifs des bailleurs sociaux (RPLS)1. Cette base de données remplace depuis 2011 l’enquête sur le parc locatif

social (EPLS), réalisée entre 1987 et 2010. Elle a pour objectif « de dresser l’état global du parc de logement locatifs » des organisations gestionnaires de logements sociaux au 1er janvier d’une année,

mais ne concerne pas les logements-foyers de personnes âgées, de personnes handicapées, de jeunes travailleurs, de travailleurs migrants et les résidences sociales2. Elle est gérée par le service

de l’observation et des statistiques (SOeS) du Commissariat général au développement durable (CGDD), qui dépend du ministère chargé du développement durable. Il s’agit d’une source qui présente des avantages nombreux en termes de fiabilité et de facilité d’exploitation, car sa vocation est directement la production de statistiques.

1 RPLS a été créé par la loi MOLLE, votée en 2009. Le décret n°2009-1485 du 2 décembre 2009 décrit les informations contenues dans le répertoire et les modalités de leur diffusion.

2 SOeS, 2011, « Répertoire des logements locatifs des bailleurs sociaux (RPLS) : Sources et méthodes », site internet : http://www.statistiques.developpement-durable.gouv.fr/sources-methodes/enquete-

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Tableau 7. Caractéristiques des bases de données RPLS et SISAL et des extractions exploitées dans la thèse

Répertoire des logements locatifs des bailleurs sociaux (RPLS)

Système d’information pour le suivi des aides au logement (SISAL)

Service gestionnaire

Service de l’observation et des statistiques du commissariat général au développement durable

Bureau de connaissance sur le logement et l’habitat, au sein de la direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages

Type Base de données dont la vocation est la

production de statistiques

Base de données issue de la transformation en statistiques de données de gestion

Contenu des bases transmises

Caractéristiques des logements des organismes HLM, des sociétés d’économie mixte et de certains autres bailleurs

Caractéristiques et plan de financement des logements locatifs sociaux et des logements financés à l’aide d’un PSLA dont la construction ou la rénovation a été financée dans l’année, hors zones ANRU

Individus Logements Opérations

Qualité de l’information

Exhaustive

Renseignée par les organismes HLM puis consolidée par le service gestionnaire de la base de données

Exhaustive

Renseignée et mise à jour par les services gestionnaires de l’aide à la pierre, mais non consolidée

Années

exploitées 2014 2008-2014

Contenu exploité

Caractéristiques des logements sur

lesquels des ESH et des OPH détiennent un droit réel immobilier ou dont ils sont usufruitiers

Caractéristiques et plan de financement des logements locatifs sociaux financés à l’aide d’un PLUS ou d’un PLAI par un OPH ou une ESH dont la construction a été financée dans l’année, hors zones ANRU

Élaboration personnelle. Source : enquête.

Les données du RPLS sont exhaustives à l’échelle nationale depuis le 1er janvier 2012. Tous

les organismes gestionnaires de logements sociaux ont en effet, depuis cette date, l’obligation de transmettre aux services déconcentrés de l’État un ensemble d’informations, définies à l’article R. 411-3 du CCH, concernant les caractéristiques de leur parc. Ces données doivent être transmises logement par logement, et non plus pour un ensemble de logements situés à la même adresse, comme c’était le cas dans EPLS. Ces données font l’objet d’une vérification par les services déconcentrés, qui les transmettent ensuite au SOeS. Celui-ci s’assure à nouveau, avant de les intégrer au système d’information national, de leur cohérence.

J’exploite dans cette thèse les données les plus récentes à ma disposition, au 1er janvier 2014.

Je n’ai retenu dans l’échantillon analysé que les logements détenus par des ESH ou des OPH (cf. Introduction), soit 4 205 693 logements. Pour chacun de ces logements, RPLS renseigne quant à leurs caractéristiques, et en particulier quant à l’identité de leur propriétaire, la date de leur construction, le type de leur financement initial, leur statut au regard du conventionnement, leur loyer et, de façon plus ou moins précise en fonction des logements, leur localisation. La base permet

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donc de décrire avec précision les caractéristiques de parcs de logements sociaux à différentes échelles.

Parallèlement, des données issues du système d’information pour le suivi des aides au logement (SISAL) ont été mobilisées. Ce système d’information est géré par le bureau de connaissance sur le logement et l’habitat, au sein de la direction de l’habitat, de l’urbanisme et des paysages (DHUP), qui dépend du ministère chargé du développement durable et du ministère chargé du logement1. Il s’agit d’un fichier issu de la transformation en statistiques de fichiers de

gestion : dans le cas présent, le fichier rassemble des données recueillies par les services instructeurs des aides à la pierre. Ces services, qui sont les services déconcentrés de l’État ou ceux des collectivités locales lorsqu’elles sont délégataires des aides à la pierre, instruisent les demandes d’agrément et de financement formulées par les organisations produisant ou rénovant des logements sociaux. Ils renseignent à cette occasion des informations, à l’échelle de l’opération, sur les caractéristiques des logements concernés et leur financement, mais pas systématiquement sur leur localisation au sein des communes.

Les données renseignées au moment de la demande de financement sont prévisionnelles. SISAL a cependant la particularité d’être dynamique : une fois que des informations sont transmises à l’infocentre, elles peuvent être modifiées. Les services instructeurs sont ainsi invités à supprimer les opérations n’ayant pas abouti, mais aussi à renseigner les évolutions du plan de financement et les étapes opérationnelles (date du permis de construire, de la mise en service ou du conventionnement), au fur et à mesure de la vie de l’opération2. Cela signifie que deux extractions

de SISAL à des moments différents peuvent renvoyer, à propos de la même opération, des informations différentes. Les données sur lesquelles je m’appuie ont été extraites en mai 2014 : elles représentent donc une « photographie » des informations disponibles à ce moment, mais ne peuvent renseigner sur la situation réelle de toutes les opérations, certaines ayant pu évoluer sans que l’information ne soit renseignée au moment de l’extraction, tandis que d’autres ont pu évoluer depuis. Ces données doivent donc être interprétées avec précaution.

D’après plusieurs interlocuteurs, les données contenues dans SISAL peuvent être considérées comme exhaustives et fiables à l’échelle nationale à partir de 2006. Cependant, les données auxquelles j’ai accès excluent les opérations situées dans des opérations relevant de l’Agence nationale de la rénovation urbaine (ANRU), qui sont intégrées à SISAL par une voie spécifique.

Il est à noter que les données issues de ces deux bases font aussi l’objet de publications annuelles, qui présentent des chiffres-clés concernant les évolutions des caractéristiques du parc de logement social et de la production des organismes HLM, aux échelles nationale et locale. Ces publications sont principalement réalisées par le SOeS ou la DHUP, ainsi que par les services déconcentrés de l’État. Quand c’était possible, les exploitations proposées dans cette thèse ont été consolidées en les comparant à celles proposées dans ces publications.

1 Ministère chargé du logement, 2014 « Le système d’information pour le suivi des aides au logement », site internet, http://www.financement-logement-social.territoires.gouv.fr/sisal-a1332.html (consulté le 21 avril 2016).

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1.1.2. Autres sources statistiques mobilisées

Deux autres sources statistiques sont mobilisées de façon ponctuelle dans la thèse. Il s’agit d’une part de données issues du recensement de la population, principalement de 2012, réalisé par l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE). Elles permettent principalement de présenter les situations démographiques et socio-économiques au sein des terrains d’enquête, et de renseigner quant à certaines caractéristiques des parcs de logement locaux. Elles constituent un outil de contextualisation.

D’autre part, je mobilise ponctuellement pour les communes de la communauté d’agglomération du Val-de-Bièvre et de la communauté urbaine de Bordeaux les inventaires de logements sociaux réalisés dans le cadre de l’application de l’article 55 de la loi SRU. Ces inventaires listent l’ensemble des logements considérés comme sociaux par la loi (cf. Tableau 6) et proposent des renseignements sur certaines de leurs caractéristiques techniques et de financement. Les modalités de recueil de ces informations en font des sources particulièrement fiables (cf. Encadré 1). Cependant, l’exploitation systématique de ces données est rendue difficile par le fait que le champ des communes enquêtées n’est pas exhaustif et qu’il peut changer d’une année sur l’autre. En effet, seules les communes soumises à l’article 55 de la loi SRU et celles dont les taux de logements sociaux sont proches ou inférieurs aux taux réglementaires sont enquêtées. Il n’est donc pas possible de réaliser à l’aide de l’inventaire SRU des traitements à des échelles intercommunales et il est souvent difficile de réaliser des comparaisons dans le temps. Pour ces raisons, je n’ai pas cherché à obtenir les inventaires SRU exhaustifs dans les terrains d’enquête, me contentant des synthèses diffusées à l’échelle départementale par les services déconcentrés de l’État (en Gironde et dans le Val-de-Marne) et des informations proposées par l’État depuis 2015 dans le cadre de la démarche « Transparence SRU ».