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III. Les bactériophages ARN F-spécifiques

2.1. La charge globale de surface

2. Propriétés de surface des phages ARN F-spécifiques

2.1. La charge globale de surface

2.1.1. Notion d’interface virale

Une nouvelle définition de la surface virale a été proposée en 2008 en ce qui concerne

les bactériophages ARN F-spécifiques MS2, Qβ, GA et SP (Langlet et al., 2008). En effet, ces

travaux ont montré qu’une partie du génome viral était accolé à la face interne de la capside

et que les propriétés physico-chimiques du génome pouvaient ainsi s’exprimer à travers les

pores et influencer les propriétés physico-chimiques de la capside. Ceci a été confirmé par

Dika et al. (2012) qui ont travaillé sur des bactériophages MS2 et des VLP (Virus Like Particle,

ou capside théoriquement dépourvue de génome) de phage MS2 et démontré une différence

de comportement en termes d’agrégation et de mobilité électrophorétique. Une particule

virale interagirait donc avec son environnement à travers une interface, notion qui permet de

prendre en compte la souplesse de la particule d’un point de vue mécanique mais également

sa perméabilité hydrodynamique.

2.1.2. Détermination de la charge de l’interface virale

Les protéines constitutives de la capside sont composées d’acides aminés pouvant

exprimer une charge au niveau de leur chaîne latérale ainsi qu’à leurs extrémités. Cette

charge est notamment due aux groupements carboxyles et amines. Au niveau de la chaîne

latérale des acides aminés, les groupements (NH

2

, COOH, SH…) définis par leur pKa

(constantes d’ionisation), peuvent s’ioniser en fonction des valeurs de pH du milieu, donnant

ainsi une certaine charge globale à la protéine. Le point isoélectrique (pI) d’une particule

défini le pH en dessous duquel la particule présentera une charge globale positive et

au-dessus duquel la particule sera chargée négativement (Figure 8). Trois approches ont été

utilisées ces dernières années pour déterminer le point isoélectrique de particules virales. Il

s’agit de méthodes permettant d’avoir une approche qualitative comme le calcul théorique et

la détermination expérimentale par électrophorèse, ou de méthodes quantitatives avec la

détermination expérimentale à partir de données de mobilité électrophorétique. Bien que des

différences soient mesurées en fonction de la méthode de détermination, de manière

générale on peut estimer que l’interface des particules virales à des pH voisins de la

neutralité est chargée négativement (Michen et Graule, 2010).

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Figure 8. Représentation schématique de l’état d’ionisation des protéines en fonction du

pH (Michen et Graule, 2010).

• Méthodes qualitatives de détermination du point isoélectrique

La détermination du point isoélectrique peut se faire par le biais d’un calcul théorique

ou par des mesures expérimentales de focalisation isoélectriques ou d’électrophorèse. (i) Le

calcul théorique des charges interfaciales peut être réalisé à partir des pKa des acides aminés

des protéines de la capside. Ceci implique de ne prendre en compte ni les liaisons

peptidiques, ni le repliement des protéines, ni a fortiori l’influence des charges du génome. Ce

mode de détermination du pI donne des valeurs supérieures à 7. Par exemple, pour les

phages ARN F-spécifiques ce calcul conduit à des valeurs comprises entre 8,2 pour le phage

MS2 et 9,7 pour le phage GA (Langlet, 2008). (ii) La détermination expérimentale des pI par

focalisation isoélectrique ou électrophorèse donne, des valeurs inférieures à celles obtenues

lors du calcul théorique. Par exemple, d’après cette méthode de détermination, le point

isoélectrique du phage MS2 se situe entre 3,5 et 3,9 (Overby et al., 1966; Zerba et al., 1982;

Penrod et al., 1995) et celui du phage Qβ serait de 5,3 (Overby et al., 1966). Toutefois, ces

techniques nécessitent un marquage par immuno-fluorescence ou immuno-radiomarquage

et donc l’utilisation de molécules pouvant modifier en partie les propriétés

physico-chimiques de la particule virale, dont sa charge. Ces modes de détermination du point

isoélectrique permettent uniquement de qualifier la surface de positive ou négative en

fonction du pH (Michen et Graule, 2010). Afin d’obtenir des informations quantitatives sur la

charge virale d’autres mesures peuvent être envisagées.

Point

isoélectrique

Charge globale

positive

Charge globale

neutre

Charge globale

négative

pH environnemental

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• Méthodes quantitatives de détermination du point isoélectrique

Afin d’avoir une approche quantitative de la charge de surface des particules virales, la

mobilité électrophorétique de particules non marquées a été étudiée en mesurant leur vitesse

de migration lorsqu'elles sont soumises à un champ électrique. Cette vitesse de migration

rapportée au champ électrique permet d’estimer la mobilité électrophorétique (µ). Le pI

correspond au pH pour laquelle la mobilité électrophorétique est nulle. Dans une solution de

NaNO

3

à 1 mM et pH 6, Langlet et al. (2008) observent que la mobilité électrophorétique du

phage Qβ est plus négative que la mobilité électrophorétique du phage MS2 (µQβ < µMS2),

les valeurs sont respectivement d’environ -3.10

-8

m

2

.V

-1

.s

-1

et -2.10

-8

m

2

.V

-1

.s

-1

à pH 6. En

maintenant le pH à 6 et en augmentant la force ionique (NaNO

3

à 100 mM), leur mobilité

électrophorétique augmente (la valeur absolue de µ diminue) et la différence entre ces deux

bactériophages est moins marquée puisque les deux valeurs sont voisines de -1.10

-8

m

2

.V

-1

.s

-1

(Figure 9). Lorsque la force ionique augmente ou lorsque le pH diminue, des phénomènes

d’agrégation apparaissent (Langlet et al., 2008) et l’interprétation des valeurs de mobilité

électrophorétique devient délicate.

Ainsi, même si les données de la littérature sont encore très fragmentaires, elles

mettent en évidence une différence de mobilité entre les phages MS2 et Qβ à faible force

ionique pour un pH de 6. Ces travaux ont permis de déterminer des valeurs de points

isoélectriques de 3,1 pour le phage MS2, de 2,1 pour le phage GA, de 2,7 pour le phage Qβ et

de 2,1 pour le phage SP.

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Figure 9. Mesures de mobilité électrophorétique pour les phages ARN F-spécifiques dans

du NaNO

3

à faible (1mM) et forte (100 mM) force ionique (Langlet et al., 2008).