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Professeur à l’Université de marne-la-Vallée – Membre de l’Académie des Sciences morales et politiques

Partout et toujours existent des religions et des gouvernements, mais c’est seulement dans notre culture que les deux sont séparés.

Sans doute le caractère transcendant de la divinité joue-t-il un rôle important dans cette spécificité, mais l’importance accordée à la liberté aussi, ce qui explique que la séparation des ordres se trouve affirmée chez les Hébreux, chez les Grecs et chez les Chrétiens.

Il m’a été demandé de parler d’histoire. Il faut dire, pour commencer, que toutes les cultures sont religieuses, sachant bien que les religions sont diverses : nous avons une religion transcendante, alors que dans les autres sociétés ou civilisations, les religions sont immanentes. Je voudrais essayer de vous montrer, à partir de faits historiques et donc de la façon la plus objective et factuelle possible, le rôle joué par la transcendance. Le fait que nos religions soient transcendantes joue un rôle important dans la séparation des ordres. Quand je parle de sécularisation, je n’entends pas la laïcité. Pour moi, les deux choses sont différentes quoique naturellement liées. Je pense, en effet, que la laïcité est un pas de plus après la sécularisation. Pour l’instant, je ne parlerai donc que de sécularisation parce que c’est vraiment là l’origine de tout.

L’ancêtre de la séparation des ordres : l’Archontat (VIIème siècle avant J.C.)

Ce qu’il faut bien voir au départ, et c’est un fait qu’on ne connaît pas assez, c’est que ce qu’on appelle la séparation des ordres (au Moyen Âge, on parlait de « la séparation des glaives ») est apparu longtemps avant le christianisme. A Athènes, au VIIème siècle avant Jésus-Christ, apparaît la séparation du politique et du sacré (ce qui est tout à fait incroyable) avec ce qu’on appelle la création du système de l’archontat.

À ce moment-là, à Athènes, une aristocratie bruyante essayait d’évincer la royauté comme c’est la loi du genre. L’objectif n’était pas de supprimer l’autorité politique, mais de distinguer l’autorité politique de l’autorité religieuse, donc de couper le pouvoir en deux.

On a donc laissé le roi en fonction mais en le privant de légitimité politique, simplement revêtu qu’il était de fonctions sacrées. Et puis on a créé deux archontes qui, en général, étaient issus de la noblesse et qui se partageaient l’autorité politique et militaire. Autrement dit, vous voyez apparaître au VIIème siècle avant Jésus-Christ, donc très tôt, un roi relégué aux affaires religieuses – il s’occupe du sacré – et puis une histoire politique singulière qui se développe seule, sans le sacré, sans la religion. Ce qui est étonnant, c’est que les deux pouvoirs qui autrefois étaient confondus, n’ont été remis en cause ni l’un ni l’autre.

On les a laissés mais on les a mis à distance l’un de l’autre. C’est comme cela que l’histoire commence. Je crois que là se situe vraiment l’une des origines, ou peut-être même l’origine la plus étonnante de notre civilisation.

Les aristocrates athéniens, par cette décision tout à fait impression-nante, ont défini le pouvoir politique comme quelque chose d’humain.

Je souligne bien : d’humain, pour bien montrer la séparation d’avec le divin. Distinguons bien les choses : ce qui est divin, c’est ce qui est absolu et ce qui est humain, c’est ce qui est relatif. Puisque nous sommes des êtres finis, le pouvoir politique devient relatif, ce qui n’enlève rien à sa nécessité. Le pouvoir politique ne peut pas être supprimé sans que la société sombre dans l’anarchie. Il y a eu des civilisations très anciennes (les esquimaux anciens, par exemple) qui ont pu se passer de pouvoir politique mais c’est là une situation extrêmement rare. Dans l’ensemble, l’autorité politique n’est pas relative quant à son existence car, je le répète, on ne peut pas s’en passer. Elle n’est pas toujours agréable, bien sûr, et l’on préfèrerait parfois s’en débarrasser, mais c’est impossible. La politique devient relative quant à sa dévolution, parce qu’on ne va pas chercher un dieu pour exercer le pouvoir. Cela change tout quant à l’étendue restreinte de ses fonctions. Le pouvoir politique ne prend pas tout, puisque, notamment, il ne s’occupe pas du sacré.

La naissance de la Démocratie

Le sacré, au départ, qu’est-ce que c’est ? Ce sont les fins dernières, mais il n’y a pas que cela car le pouvoir politique, dès lors qu’il fut séparé de la religion de l’époque qui n’était pas du tout la même que la nôtre (mais c’était quand même une religion), ce pouvoir politique devait respecter l’exigence absolument permanente – et c’est cela

qui est incroyable - de ne pas tout englober puisqu’il y avait un ou deux archontes nantis de l’exécutif en face d’un roi sacré. C’est là, tout simplement, parlons clair, l’origine de la distinction des ordres, donc, au fond, l’origine de tout ce dont nous parlons aujourd’hui. La plupart de mes étudiants s’imaginent que la laïcité est née avec la Révolution, en 1793. Erreur ! Elle est beaucoup plus ancienne que cela car sa véritable naissance se situe à partir de l’archontat, au VIIème siècle avant J.C.

Convenons donc que l’Europe n’a pas attendu le christianisme pour détacher le pouvoir du sacré. Les Grecs ont écrit leur histoire en présupposant qu’il y avait eu cette séparation et, évidemment, lorsqu’ils ont commencé à écrire beaucoup, au temps de Périclès, ils nous ont légué une littérature absolument formidable sur ces temps lointains de l’archontat. On trouve cette idée dans les tragédies, et même les comédies - souvent assez liées entre elles d’ailleurs – du V°

siècle, par exemple le Grand Prêtre dit à Œdipe, dans Thèbes ravagée par la peste : Nous ne t’égalons pas aux dieux, tu es notre roi tu n’es pas notre dieu. Nous voyons simplement en toi le premier des mortels pour conjurer les malheurs de la vie. Nous avons ici une culture religieuse grecque fondée sur l’immanence, comme d’ailleurs toutes les cultures du monde - à part la nôtre - encore aujourd’hui. A partir du moment où cette religion est fondée sur l’immanence, un homme peut prétendre avoir un statut semi-divin. Il n’y a donc plus de différence radicale entre des hommes et des dieux.

Vous avez des héros, par exemple Achille, qui sont des demi-dieux.

Dès lors le pouvoir ne va plus s’incarner dans un demi-dieu (ce qu’on appelle un héros chez les Grecs). L’âge classique athénien, (l’âge de Périclès), va inventer ce qu’on appelle encore aujourd’hui la politique.

La politique, c’est le gouvernement de la « polis », de la ville, de la cité. Le gouvernement, est le fait d’un homme ayant autorité sur ses semblables pour empêcher le développement du chaos dans la cité. Le gouvernement existe partout (chez les Chinois, chez les Indiens, chez les Américains du Sud, chez les Américains du Nord autrefois etc.) mais la politique qui apparaît en Grèce - bien décrite par Aristote, tout à fait au début du IVème siècle, juste après la mort de Socrate - c’est l’art et la manière de gouverner non pas n’importe qui mais des hommes libres.

Relevons alors une belle contradiction dans les termes lorsqu’on

prétend gouverner des hommes qui restent libres, car, si l’on est gouverné, c’est qu’on n’est pas libre, et si l’on est libre, c’est qu’on n’est pas gouverné. Et pourtant, c’est cette politique qui va naturellement engendrer la démocratie. Cela n’a pu exister que parce que le sacré et le politique ont été séparés, sinon, c’eût été simplement impossible.

Et cela n’a pu naître en Grèce que parce qu’il y avait eu auparavant l’archontat car, si vous donniez tous les pouvoirs à un homme simplement mortel, y compris les pouvoirs sacrés, vous ne pourriez plus gouverner des hommes libres. La séparation des pouvoirs a ainsi permis la naissance de la démocratie. Il est extrêmement important de voir que cette forme de sécularisation est née trois siècles avant qu’Aristote ne précise et définisse ce qu’il appelle la politique.

Permanence d’Aristote

Nous sommes tous les enfants d’Aristote dont je suis évidemment une « groupie » comme vous l’avez certainement compris. Je pense, en effet, qu’on n’a pas inventé grand-chose depuis Aristote et Platon, même si je reconnais exprimer là une manière de voir assez person-nelle. Aristote, quand il décrit le gouvernant, le présente comme un homme du commun et c’est pour cela même qu’on peut dire qu’il est le premier à conceptualiser la démocratie. Pour lui, le gouvernant est un homme comme nous, nullement meilleur que nous. On aimerait bien avoir quelqu’un de supérieur comme gouvernant, parce qu’il serait sans doute plus efficace et parce qu’on lui obéirait plus volontiers. Si l’on avait un dieu au pouvoir, on lui obéirait volontiers, mais Aristote dit quelque chose comme : je tourne mon regard partout et je ne vois pas cet homme supérieur. C’est curieux, dans notre vie il y a beaucoup de gens divers, formidables, mais pas d’homme supérieur. Propos évidemment ironique. Il dit encore à peu près ceci : je tourne mon regard un peu plus loin, au-delà des frontières de la Grèce, et même plus loin que les frontières de l’Ionie, c’est-à-dire vers la Turquie actuelle, je regarde, je regarde, et je vois que, chez les Indiens - c’est-à-dire les gens des Indes actuellement - il y a des hommes supérieurs.

Tout cela est ironique : Eux ont des hommes supérieurs, alors ils leur obéissent, bien sûr. Mais nous, malheureusement, nous, pauvres types, nous n’en avons pas. Cela veut dire en fait : eux sont assez crétins pour penser qu’il y a des hommes supérieurs. Mais nous, nous sommes quand même plus malins : nous savons que cela n’existe pas.

Donc, voyez-vous, toute la sécularisation part de là. On pense qu’il n’y a pas d’hommes supérieurs, pas d’homme divin. On va donc traiter la chose politique comme une affaire purement humaine. Et cela va se retrouver ensuite chez les Chrétiens qui ont repris beaucoup de choses des Grecs. La démocratie développée par Aristote se justifie par cette égalité irréductible entre les hommes. Peut-être est-ce regrettable, dit-il, mais c’est comme ça, pas d’hommes supérieurs, nous sommes tous pareils. Bien sûr, il y aura toujours des premiers de promotions, des Miss France, et toutes sortes de choses de ce genre, mais pour Aristote nous sommes tous égaux pour le bon sens qui, comme dit un vieil aphorisme, est « la chose du monde la mieux partagée ». Nous sommes donc tous égaux pour savoir ce qui vaut mieux pour notre pays. La démocratie est assise sur cette base-là. Il n’y aurait pas de démocratie si l’on pensait que seules les élites peuvent gouverner. Une telle idée relève sans doute de la technocratie bruxelloise et il faut faire avec, mais pour un vrai démocrate, c’est le bon sens, la conscience morale, la conscience personnelle, la connaissance des hommes qui doivent prévaloir.

Toutes ces qualités permettent de prendre les bonnes décisions, notamment en politique. Ce ne sont pas les grands diplômes ou

« l’intelligence des sphères » qui comptent. Vous voyez ce que je veux dire quand je parle d’intelligence des sphères, c’est celle de l’énarque : est-ce le meilleur critère pour gouverner ? Pas du tout ! D’ailleurs, juste en passant (pour vous montrer qu’Aristote avait raison - car je défends mon héros) si vous regardez la France des années 70, vous vous apercevez que toutes les élites étaient marxisantes : marxistes, staliniennes, trotskistes, tout ce que vous voudrez, et le peuple était tellement peu marxiste qu’il venait tout juste de voter Pompidou-Poher au premier tour. Finalement, qui est-ce qui se trompait dans cette affaire ? C’était l’élite, évidemment. Autrement dit, l’intelligence des sphères ne donnait rien pour ce qui concerne la possibilité de trouver les bonnes décisions. Tout cela pour vous dire que la démocratie n’est pas du tout fondée sur la compétence mais sur le bon sens.

La tentation théocratique.

Avec le judaïsme, on retrouve la sécularisation même si l’on pourrait penser, quand on ne connaît pas l’Ancien Testament, que les prophètes et les rois sont de même nature. Ce n’est pas le cas. Naturellement, il

y a des tentations théocratiques et, on va le voir, dans le christianisme même, et la question est de parvenir à distinguer les tentations et ce qui est légitimé par la loi écrite ou non (la règle, la doctrine). Tout ce qui se passe à l’extérieur, ce ne sont que des perversions graves que je ne veux pas minimiser et dont il faut évidemment avoir le souci constant de se défaire.

Après les Grecs, l’apparition d’une religion transcendante, (le judaïsme et le christianisme sont en fait une seule et même religion, en dépit de différences très larges entre elles) permet de comprendre le développement de la scission entre le politique et le sacré dans nos régions. Pourquoi ? Parce qu’à partir du moment où apparaît, pour la première fois dans l’Histoire l’idée de transcendance, un fossé sépare désormais le divin de l’humain. Jusqu’ici, les religions étaient immanentes. On ne peut pas mettre un Dieu transcendant à la tête de l’État. Alors je m’attends à entendre la question : pourquoi est-ce que l’islam fait cela ? L’islam ne met pas du tout un Dieu transcendant à la tête de l’État. On pourrait dire, à la limite, mais ce serait très discutable, qu’Israël pratique en ce moment une religion théocratique, mais en islam, ce n’est pas le cas. En terre d’islam, on observe plutôt anarchie et absolutisme de la loi. Ce n’est pas Dieu qui est mis à la tête de l’État en islam, c’est la loi qui est au pouvoir, ce qui est très différent.

Chez nous, en Occident, la distinction du politique et du sacré s’explique donc par le fait que Dieu est tellement haut qu’il ne peut pas s’installer ici-bas, et aussi par le fait que l’ordre humain est placé dès le début dans sa propre sphère. Dans le Nouveau Testament, on trouve cela dans le fameux « rendre à César ce qui est à César » dont on pourrait discuter l’interprétation ainsi que celle de toute l’histoire du Christ, sa comparution devant Pilate, sa condamnation à mort, etc., qui montrent que la royauté spirituelle est dans un ordre différent :

« mon royaume n’est pas de ce monde » car je ne m’occupe pas des affaires terrestres.

La politique temporelle a suivi son destin singulier dont elle est naturellement responsable, mais elle s’est accomplie selon son propre destin. Pendant le Moyen Âge, la Renaissance, et jusqu’à la fin du XIXème siècle, la pensée occidentalo-chrétienne a contribué à la sécula-risation des pouvoirs en dépit naturellement des excès qui eurent lieu pendant toute cette période, et qui, évidemment, ne doivent pas être minimisés. Les politiques européennes ont certes connu des tentatives

de théocratie comme, par exemple, sous les Carolingiens. On a assisté aussi à une tentative ou tentation de théocratie par les papes exigeant avec plus ou moins de succès de mettre au pas les pouvoirs temporels.

Distinction des Ordres et sécularisation.

Dans cette atmosphère où se développe cette tendance à l’identifi-cation des ordres, on voit grandir, à côté, les théories de la distinction des ordres directement inspirées au départ par la pensée évangélique.

Par exemple, chez Thomas d’Aquin1, au Moyen Âge, le monde social s’en va tout seul, comme 2le chat de Kipling3, et n’a plus besoin d’être dirigé par le sacré, comme ce fut le cas chez Augustin, huit siècles avant. Le pouvoir temporel peut devenir, pour Thomas d’Aquin, autre chose que le mal et l’injustice. Chez Augustin, ce pouvoir était tellement lesté de péchés qu’on ne pouvait rien en tirer. La politique, pour Thomas, est capable de déployer un ordre juste sans penser au sacré et de permettre le bonheur des hommes. Pourquoi ? Parce que l’ordre temporel existe par lui-même, même s’il a été voulu par Dieu, et peut ensuite courir sur son orbite, un peu comme le monde que le Dieu du christianisme, du judaïsme d’abord, a créé au départ pour lui dire ensuite : « allez, maintenant, débrouillez-vous tout seuls. Moi, je me retire ». C’est cela l’idée de création pour le judaïsme : Dieu s’en va en laissant le monde inachevé. Le Dieu du christianisme laisse à l’homme un monde inachevé, et ensuite s’en va en lui disant : « à toi de finir ; de nommer les animaux, de mettre l’harmonie là où j’ai laissé encore un peu de chaos, et de te débrouiller, mon fils ». Si la démocratie n’est apparue qu’en Occident, c’est bien parce que nous avons eu cela au départ, même si les choses ont bien changé et si cette religion n’occupe plus la même place dans notre société. Il n’empêche que c’est elle qui a structuré le continent car on sait que c’est la première théorie politique de la distinction des ordres qui annonce la laïcité moderne. Je parle de laïcité pour la France, sinon, pour les autres peuples c’est plutôt sécularisation qu’il faut dire. Cette première théorie a été élaborée au

1. Thomas d’Aquin (1224-1274) Religieux dominicain, maître de la scolastique et de la théologie catho-lique (le thomisme) tentant de concilier l’église cathocatho-lique et la philosophie d’Aristote.

2. Saint Augustin (354-430) Philosophe et théologien, un des 4 pères de l’Eglise latine, né à Thagaste (Soukh Ahras) Algérie.

3. Conte de Rudyard Kipling (1902) en forme de parabole sur l’idée de liberté. Le chat se promène tout seul et tous les lieux se valent pour lui alors que le chien et le cheval sont entièrement dépendants d’un maître.

XIVème siècle par deux personnages, Guillaume d’Ockham4 et Marsile de Padoue5. On voit par exemple Marsile de Padoue - dans son livre Le défenseur de la Paix encore rédigé en latin - reprocher à la papauté de s’immiscer illégitimement dans les affaires politiques de son temps.

Et on voit Guillaume d’Ockham, de la même façon, dire : mais repré-cisons les rôles de l’Église et de l’État, des rôles qui n’étaient pas mélangés et pour lesquels les deux auteurs proposent une œuvre de partage. Au nom de quoi? Au nom de l’Évangile, car ils vont puiser aux sources de leur religion, comme d’ailleurs le feront tous les auteurs, comme Bartholomé de Las Casas6 à l’époque des Indiens, au XVIème siècle, qui va chercher les textes fondamentaux et dit: « Nous nous sommes séparés de ces textes, nous avons fait le contraire de ce qu’on nous disait, revenons aux textes et faisons ce que les textes nous disent. Ainsi Marsile de Padoue et Guillaume d’Ockham retournent à l’Évangile, et disent : attendez, le Christ n’a jamais donné à Pierre un pouvoir temporel ! Il lui a donné seulement un pouvoir spirituel, ce qui est complètement différent. Le Christ n’a donc pas pris autorité sur

Et on voit Guillaume d’Ockham, de la même façon, dire : mais repré-cisons les rôles de l’Église et de l’État, des rôles qui n’étaient pas mélangés et pour lesquels les deux auteurs proposent une œuvre de partage. Au nom de quoi? Au nom de l’Évangile, car ils vont puiser aux sources de leur religion, comme d’ailleurs le feront tous les auteurs, comme Bartholomé de Las Casas6 à l’époque des Indiens, au XVIème siècle, qui va chercher les textes fondamentaux et dit: « Nous nous sommes séparés de ces textes, nous avons fait le contraire de ce qu’on nous disait, revenons aux textes et faisons ce que les textes nous disent. Ainsi Marsile de Padoue et Guillaume d’Ockham retournent à l’Évangile, et disent : attendez, le Christ n’a jamais donné à Pierre un pouvoir temporel ! Il lui a donné seulement un pouvoir spirituel, ce qui est complètement différent. Le Christ n’a donc pas pris autorité sur