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Chapitre 2. Continuum de traitement en santé cardiovasculaire

2.2 Le changement des habitudes de vie

Le changement des habitudes de vie est principalement une intervention de prévention primaire conduite avant l’apparition d’une maladie cardiovasculaire. Par des notions d’éducation au sujet des facteurs de risque comportementaux et la promotion de comportements favorisant la santé, l’individu (et la population) peut favorablement intégrer à sa vie quotidienne l’activité physique, la saine alimentation, la perte de poids, la cessation tabagique, la gestion du stress, et la consommation raisonnable d’alcool.

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Activité physique

Les différentes lignes directrices s’entendent sur le fait que la pratique d’activité physique est la pierre angulaire de la prévention des maladies chroniques, dont les maladies cardiovasculaires. Elles en font d’ailleurs la recommandation.64, 72, 73 Le

tableau V de l’article présenté en Annexe A résume les différentes modalités d’exercice à cet effet. Globalement, les recommandations suggèrent un minimum de 30 minutes d’activité physique d’intensité modérée à élevée et ce, 5 à 7 jours par semaine. Cela pourrait se traduire par l’atteinte de 10 000 pas / jour, tel que mesuré avec un podomètre.74 Notons que l’entraînement musculaire (contre résistance)

n’est pas contre-indiqué pour les personnes ayant un diagnostic d’hypertension et semble également efficace pour réduire les facteurs de risque cardiovasculaires dans leur ensemble, à l’exception de l’obésité.75 Dans tous les cas, il est suggéré

d’adapter le choix du type d’activité physique aux préférences des patients pour une meilleure adhésion à cette nouvelle habitude de vie, et si possible, recevoir l’encadrement d’un kinésiologue.64, 76

Saine alimentation

Adopter une saine alimentation est une approche reconnue pour prévenir et améliorer la santé cardiovasculaire. Que ce soit par le maintien ou la réduction du poids (masse grasse) ou l’amélioration du profil métabolique (lipidémie/glycémie), plusieurs avenues sont possibles pour changer ses habitudes alimentaires avec succès.76 Il est d’abord recommandé d’être encadré par un nutritionniste et de

consommer une quantité modérée de calories (correspondant aux besoins individuels).64, 73 Le Programme éducatif canadien en hypertension recommande

d’adopter le régime Dietary Approaches to Stop Hypertension (DASH),72

ressemblant aux recommandations du Guide alimentaire canadien.77 Un apport

réduit en sodium est recommandé pour prévenir et traiter l’hypertension artérielle (< 2000 mg / jour).72 La diète de type méditerranéenne a démontré des évidences

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l’adhésion à un nouveau mode alimentaire, il est fortement suggéré de respecter les valeurs et préférences des patients.64, 76 Les lignes directrices canadiennes pour la

gestion des dyslipidémies suggèrent d’éviter la consommation de gras « trans » et de limiter la consommation de gras saturés pour réduire le risque cardiovasculaire, bien que le niveau d’évidences soit de qualité modérée. Ces éléments sont respectés par le régime DASH, le guide alimentaire canadien et la diète méditerranéenne. Les suppléments d’acide gras oméga-3 peuvent être utilisés par les patients ayant une dyslipidémie, mais ils doivent être informés que leur utilisation n’est pas associée à une réduction du risque d’événements cardiovasculaires.64

Récemment toutefois, une étude observationnelle d’ampleur internationale a révélé que la consommation de gras dans l’alimentation n’était pas associée aux maladies cardiovasculaires, incluant la mortalité cardiovasculaire, qui serait davantage associée à la consommation élevée de glucides.79 Peut-être assisterons-nous à une

mise à jour des lignes directrices dans les prochaines années?

En prévention primaire, une revue de la littérature a publié des suggestions simples d’activité physique et d’interventions nutritionnelles à intégrer dans le quotidien des gens désirant maintenir leur santé cardiovasculaire (Annexe A).76 On y mentionnait

des exemples démontrant comment modifier son environnement dans la cuisine pour éviter d’outrepasser ses signaux de satiété, et ainsi manger à sa faim et prévenir l’embonpoint et l’obésité. Il était également mention de l’utilisation d’un podomètre pour documenter son nombre de pas au quotidien et motiver le dépassement de soi, et ainsi pratiquer davantage d’activité physique. Les suggestions de cette étude fournissent de façon concrète une synthèse des interventions possibles proposées par les grandes lignes directrices.

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Exemples d’impact de la modification des habitudes de vie

En prévention secondaire, une étude de type interventionnelle a combiné un programme d’activité physique régulière et une saine alimentation chez 51 hommes sédentaires vivant avec le syndrome métabolique (Annexe B).80 L’objectif était

d’évaluer les changements sur la fonction cardiaque, notamment la fonction diastolique ventriculaire gauche avant et après ce programme d’une durée d’un an. Les résultats ont démontré que les hommes ont perdu du poids, amélioré leur profil métabolique, amélioré leur tolérance à l’effort et également, leur fonction diastolique ventriculaire gauche. Soulignons d’ailleurs qu’à l’évaluation initiale, une dysfonction diastolique ventriculaire gauche (DDVG) a été documentée chez 85% des participants. À noter que cette étude s’ajoute aux autres évidences actuelles suggérant que la DDVG pourrait être réversible à la suite d’une intervention autant non-pharmacologique, pharmacologique que chirurgicale. Bien que les mécanismes de résolution de la DDVG ne soient pas encore tous élucidés, il s’agirait de moduler les causes les plus fréquentes, soit l’obésité et les anomalies métaboliques. La modification des habitudes de vie incluant la nutrition ou l’activité physique, ou les deux, serait la clé du succès pour une perte de poids sécuritaire et durable.

Cessation tabagique

La cessation tabagique est probablement le comportement le plus important à modifier pour la prévention des maladies cardiovasculaires. Facteur de risque bien connu pour la plupart des maladies cardiovasculaires et ses facteurs de risque, il est fortement recommandé de cesser de fumer sur tout le continuum de prévention cardiovasculaire.37, 64, 65, 72, 73, 81-83 Il est également recommandé que les intervenants

de la santé soient familiers tant avec les méthodes non pharmacologiques que pharmacologiques, favorisant la désaccoutumance au tabac, qu’ils le sont avec la gestion des autres facteurs de risque cardiovasculaires (ex. : gestion de l’hypertension artérielle).81 Bien que son utilisation ne fasse pas l’unanimité, l’usage

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de la cigarette électronique est une option s’ajoutant aux médicaments et différents programmes destinés aux patients désirant (ou devant) arrêter de fumer.81, 84

Gestion du stress et du sommeil

L’étude INTERHEART a confirmé l’importance du stress psychologique comme facteur de risque cardiovasculaire.85 Il a été démontré que l’anxiété généralisée est

réciproquement associée à la dépression majeure et au diabète.73 Parallèlement, un

patient souffrant de dépression à la suite d’un infarctus du myocarde présente un pronostic défavorable,64 et la dépression a été associée à une non-persistance aux

traitements pharmacologiques (dans un contexte de diabète).86 Les professionnels

de la santé devraient évaluer si ce facteur de risque est présent chez leurs patients.64

De plus, en explorant avec eux des techniques de gestion du stress, les patients acquerront des outils pour améliorer leur qualité de vie et ainsi, réduire ce facteur de risque cardiovasculaire. Des thérapies cognitives et comportementales, incluant des techniques de relaxation, peuvent être recommandées.37, 72 En prévention tertiaire,

il a même été démontré qu’un entraînement personnel de gestion du stress était associé à une diminution des douleurs angineuses et une amélioration de la qualité de vie chez les patients ayant une cardiopathie ischémique.37 Une bonne gestion du

stress favorisera un sommeil de qualité; il est recommandé de dormir 6 à 8 heures par nuit pour bénéficier d’une prévention primaire des maladies cardiovasculaires.64

Consommation d’alcool modérée

L’association entre la consommation d’alcool excessive et les maladies cardiovasculaires est claire dans la littérature.20, 64, 72, 73 Pour les hommes, il est

recommandé de ne pas prendre plus de deux à trois consommations par jour, alors que pour les femmes, la limite est d’une à deux consommations par jour.72, 73

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Perte de poids

Le surplus de poids est considéré comme un facteur de risque métabolique des maladies cardiovasculaires, modifiable via l’adoption de saines habitudes de vie dont l’activité physique, la saine alimentation, une consommation d’alcool modérée, une bonne gestion du sommeil et du stress. L’obésité viscérale serait particulièrement délétère.87 Plusieurs effets positifs sont reliés à la perte de poids

intentionnelle sur le système cardiovasculaire, tant au niveau fonctionnel, électrophysiologique que circulatoire.88 Spécifiquement, une perte de poids est

associée à plusieurs changements hémodynamiques comme : 1) l’amélioration de la fonction diastolique et systolique ventriculaire gauche, 2) la diminution de la masse du ventricule gauche, 3) la diminution du volume sanguin circulant, 4) la diminution du volume d’éjection systolique et du débit cardiaque, 5) la diminution des pressions veineuses au niveau pulmonaire, 6) la diminution de l’œdème périphérique et, 7) la diminution de la tension artérielle. Toutes les lignes directrices canadiennes suggèrent le maintien du poids santé ou la perte de poids en adoptant un programme encadré d’activité physique et une saine alimentation.64, 72, 73 Des

médicaments et des chirurgies sont également disponibles pour induire une perte de poids chez un patient obèse présentant des facteurs de risque cardiovasculaires. Ces interventions seront présentées plus loin dans ce chapitre.