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Chapitre IV : Etude de l’absorption intestinale des principes actifs

3. Les chambres d’Ussing :

Nous développerons un peu cette technique, utilisée dans la réalisation du présent travail. Les chambres d’Ussing encore appelées chambres de perméation ou cellules d’Ussing, représentent un système ex vivo actuellement utilisé à grande échelle dans l’étude du transport de molécules à travers différents tissus membranaires [118]. Cette technique a été mise au point par Hans Ussing et ZEHRAN en 1951 pour l’étude du transport actif du chlorure de sodium comme source de courant électrique dans un petit circuit isolé de la peau de grenouille [116,117, 119]. Plus tard ce modèle a été utilisé pour étudier le transport d’ion à travers différentes membranes.

Cette technique est de nos jours la plus utilisée, car elle permet d’étudier quantitativement le passage d’une substance de concentration connue à travers la paroi intestinale et présente des avantages par rapport à la culture cellulaire, et perfusion intestinale (figure n°36).

Figure 36 : Les différentes techniques d’étude du passage des xénobiotiques à travers la membrane biologique.

2.1 Principe de la méthode :

Le principe de la méthode consiste à placer un morceau de tissu intestinal préalablement prélevé sur animal entre deux demi-chambres en plexiglas de manière à délimiter 2 compartiments : un compartiment muqueux et un compartiment séreux.

Le compartiment muqueux, en contact avec la bordure en brosse des cellules épithéliales et d’autre part le compartiment basolatéral ou séreux, en contact avec la couche musculaire du tissu basolatérale strippé. L’ensemble de la chambre d’Ussing est alimenté par un fluide biologique tamponné à pH 7,4 (Ringer Bicarbonate Krebs).

Un mélange de gaz constitué à 95% d’oxygène et 5% de dioxyde de carbone barbote le milieu tamponné 95%/5% (O2/CO2) [119].

Le bullage assure également le brassage permanent du milieu d’incubation dans les deux compartiments. La technique décrite permet d’étudier quantitativement le passage d’une substance de concentration connue à travers la paroi intestinale. La substance active à tester est déposée dans le compartiment donneur et la quantité du principe actif passée à travers la membrane est dosée dans le compartiment accepteur par des prélèvements séquentiels de volume connu. La muqueuse doit être oxygénée au cours de l’expérience afin d’assurer la viabilité membranaire [120]. (Figure n° 37)

Figure 37 : Schéma du principe de chambre de perméation d’Ussing.

La capacité de la substance à traverser la membrane peut ainsi être évaluée. D’après la littérature, les tissus animaux, notamment l’intestin de rat, sont couramment utilisés pour les études de transport moléculaire ou de variabilité d’absorption entre les différentes régions intestinales. La perméabilité de différents composés utilisant l’intestin de rat comme modèle pour les cellules d’Ussing a été corrélée avec la perméabilité in vivo chez l’homme [120].

2.2 Les critères de viabilité de la préparation intestinale [119] :

En fin de manipulation, la viabilité du tissu peut se tester par la prise de son potentiel électrique grâce à des électrodes au Calomel. Ce potentiel peut varier entre -2 et 20 mV, où au

moyen de certains produits chimiques qui agissent sur les transporteurs ou les canaux ioniques membranaires.

Ceux sont généralement des agents activateurs ou inhibiteurs spécifiques des systèmes de transport membranaires (électrolytes ou molécules) administrés du côté muqueux ou séreux, qui réagissent sur le courant de court-circuit et permettent de vérifier, au terme de l'expérience, l’état fonctionnel de l'épithélium intestinal. Parmi ces agents on peut citer : Le carbachol, et la bumétanide.

Lors de l’étude de passage dans les chambres d’Ussing, un certain nombre de paramètres biologiques ou physico-chimiques peuvent être utiles :

2.3 Les paramètres étudiés :

La chambre d’Ussing permet simultanément de mesurer en permanence les paramètres électriques caractéristiques de la préparation intestinale : la différence de potentiel (ddp) et le courant de court-circuit (Icc), grâce à un appareillage appelé clamp de voltage.

Afin de mesurer correctement les paramètres électriques caractéristiques du tissu intestinal étudié, avant le montage de la préparation intestinale et en présence de la solution de Ringer, il est nécessaire de compenser, grâce au clamp, les résistances du système (fluide et jonctions électriques), car cette dernière à une valeur du même ordre de grandeur que celle de la résistance du fragment intestinal. En circuit ouvert, la différence de potentiel du tissu intestinal (exprimée en millivolts) reflète l’asymétrie des charges électriques de part et d’autre du fragment intestinal.

Elle est mesurée par un millivoltmètre grâce à deux électrodes de calomel reliées aux deux demi-chambres par deux ponts d’agar saturés en KCl baignant dans les compartiments muqueux et séreux opposés. La différence de potentiel (ddp) spontanée tissulaire est annulée en fermant le circuit à l’aide d’électrodes en argent connectés à un microampèremètre et reliées aux demi-chambres par deux autres ponts d’agar. On mesure ainsi un courant de court-circuit (Icc) exprimé en microampères par unité de surface intestinale exposée. La chambre d’Ussing permet d’évaluer l’intégrité physicochimique du segment intestinal analysé, car, dans un tel système in vitro, on peut appliquer à l’épithélium intestinal la loi d’Ohm.

 Le flux:

Le passage intestinal des électrolytes est quantifié en termes de flux (J) qui est exprimé en quantité de substance transportée par unité de surface intestinale exposée et par unité de temps.

J = (Q / t.A)

Où :

J = le flux exprimé en quantité de substance transportée par unité de surface intestinale

exposée et par unité de temps.

Q = la différence des quantités de la substance à étudier en un intervalle de temps t = l’intervalle de temps

A = la surface intestinale exposée

Après installation du système, un temps de stabilisation variable selon le tissu est nécessaire pour que le flux devienne constant.

Dans la pratique, le flux unidirectionnel (muqueux-séreux : Jims, ou séreux-muqueux : Jism) d’un ion ou d’une molécule (i), c’est-à-dire la quantité de produit (i) en nanomoles passée à travers la membrane de 1 cm2 de surface en une heure, est déterminé en dosant le perméant dans le compartiment receveur à intervalles réguliers de temps (t2 – t1) selon la formule suivante :

Ji ms = [(Qt2 – Qt1) / (A x (t2 – t1)]

= (∆Q / ∆t) x 1/A

D’où :

Ji ms = flux unidirectionnel muqueux-séreux

Qt2 = quantité de i dans le compartiment récepteur au temps t2 Qt1 = quantité de i dans le compartiment récepteur au temps t1

A = surface du tissu exposé au passage du produit en cm2 t1 = temps de départ de la mesure du flux en heure

t2 = temps de fin de la mesure du flux en heure. Il est exprimé :

– pour un soluté en mM/cm 2/h ;

– pour un ion en μA/cm 2/h ou en μEq/cm2

Le flux est fonction de la concentration du produit (i) dans le compartiment donneur. Pour comparer les capacités de passage entre des molécules, il faut s’affranchir de la valeur de la concentration (C) en calculant la perméabilité. Certains auteurs l’expriment en termes de perméabilité apparente (Papp), car un tissu (ou même une monocouche cellulaire) ne peut être assimilé à une membrane idéale dont la structure serait invariable dans le temps et dans l’espace.

 La perméabilité apparente :

Le coefficient de perméabilité apparente (Papp) qui illustre la capacité de la molécule à passer au travers de la membrane cellulaire.

Elle est évaluée à partir du flux mesuré à l’état stationnaire, et est exprimée en centimètres par seconde (cm/s-1).

On peut écrire : Papp = Ji/C. Papp = (ΔQ/Δt) x 1/A.C

Où : Papp = perméabilité apparente en centimètres par seconde (cm/s).

ΔQ/Δt (mM/s) = est la vitesse de passage de la molécule vers le compartiment

basolatéral.

C = concentration initiale de la molécule dans le compartiment apical en nanomoles/cm (mM/cm3).

Ji = flux mesuré en nanomoles/cm 2/h. A = surface exposée du tissu en cm2.