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CHAPITRE 2 DISPOSITIFS ET DIAGNOSTICS EXPÉRIMENTAUX

2.2 CHAMBRES DE COMBUSTION

2.2.2 Chambre dédiée à la combustion turbulente

Au vu de la bibliographie, l’investigation de l’interaction flamme-paroi en régime turbulent est difficile à cause des conditions d’accès dans les moteurs. Une configuration expérimentale alternative a donc été développée pour les besoins de cette étude. Elle s’appuie sur une chambre de combustion adaptée à la caractérisation de l’interaction

flamme-paroi puis gaz brûlés-paroi, dans des conditions proches de celles rencontrées dans les moteurs.

2.2.2.1 Développement du dispositif expérimental

Cahier des charges

On souhaite mettre en œuvre une chambre de combustion qui soit représentative de l’interaction flamme-paroi puis gaz brûlés-paroi dans les moteurs à allumage commandé, en termes :

- de géométrie : la chambre doit être représentative d’un cylindre de moteur à pistons, - de fonctionnement : la combustion doit être instationnaire et initiée par étincelle,

- de régime de combustion : on cherche à reproduire un régime de flammes plissées voire épaissies, comme dans les moteurs (cf. Fig 6.29),

- d’aérodynamique interne : la combustion doit se propager dans un écoulement structuré et fortement turbulent,

- de répétitivité : les fluctuations cycliques doivent être réduites au maximum,

- d’interaction flamme-paroi : on cherche à étudier finement l’interaction frontale et latérale d’une flamme avec une paroi.

D’après l’étude bibliographique (cf. Chapitre 1), les paramètres physiques doivent atteindre un certain ordre de grandeur pour se rapprocher des conditions moteur. Si l’on considère un régime de 1000tr/min pour un moteur à allumage commandé, l’écoulement réactif doit atteindre à l’instant d’interaction flamme-paroi un certain niveau :

- de temps de combustion : environ 10–15ms, - de pression maximale : environ 1MPa, - de vitesse moyenne : environ 5–10m/s, - de taux de rotation : environ 30tr/s,

- d’intensité de turbulence : environ 2–3m/s, - de flux thermique pariétal : environ 1MW/m².

Le cahier des charges tient compte également des contraintes métrologiques. Des mesures couplées doivent permettre de caractériser l’interaction flamme-paroi à l’aide de divers diagnostics : flux de chaleur, pression, champ de vitesse, position du front de

flamme… Ces mesures doivent être locales et simultanées pour permettre une caractérisation précise des phénomènes observés en proche paroi. Pour cela, de larges accès optiques sont requis, de façon à rendre visible tout le volume de la chambre.

Solutions technologiques

Une chambre à volume constant est privilégiée, ce qui représente bien les conditions de combustion dans un cylindre au PMH. Pour se rapprocher des conditions instationnaires dans les moteurs à pistons, le fonctionnement de la chambre est mono-coup. L’enceinte de 246cm3 est dépourvue de volumes morts. Pour cela, un soin particulier est apporté au dimensionnement des pièces et à leur ajustement. L’intérêt de cette configuration est que l’évolution de pression est déterminée entièrement par le dégagement de chaleur et les pertes thermiques, sans autres phénomènes parasites. Les diagnostics optiques sont rendus possibles grâce à trois hublots en quartz (K–UV), transparents aux UV et dimensionnés pour une pression de service de 4MPa. Les parois opaques sont réalisées en acier, de sorte qu’il y a continuité du matériau autour des fluxmètres en acier : ainsi l’instrumentation n’influence pas l’interaction flamme-paroi. En effet, [Sotton, 2003] a montré que les pertes thermiques et la distance de coincement sont perturbées lorsque le matériau de paroi change localement.

Fig. 2.5 : Vue partielle 3D de la chambre

En termes d’écoulement, l’option retenue consiste à étudier la combustion d’un prémélange gazeux en rotation. Pour se rapprocher d’un cylindre de moteur à pistons, la

chambre est cubique avec un toit d’angle 120° typique d’une culasse (cf. Fig. 2.5). Le remplissage est effectué via deux orifices situés sur le toit comme dans un cylindre à deux soupapes d’admission, produisant un mouvement de rotation bidimensionnel a priori. Le prémélange air-carburant est admis à l’aide de deux injecteurs à gaz (Orbital, Synerject) (cf. Fig. 2.6). [Malheiro, 2002] en donne la loi de débit en fonction des pressions amont et aval ; il montre que ce type d’électrovanne est particulièrement adapté à la combustion car sa soupape d’éjection se ferme en cas de surpression dans l’enceinte. Chaque injecteur fournit un débit statique de 2,15g/s sous une pression amont de 0,6MPa tant que la pression aval reste inférieure à la pression critique, proche de 0,3MPa. L’utilisation d’un remplissage à débit bloqué fournit une aérodynamique structurée particulièrement répétitive. Commande d’injection Conditions amont (Pression d’injection) Conditions aval (Contre-pression)

Fig. 2.6 : Injecteur à gaz (Orbital, Synerject)

Après instrumentation, la chambre permet d’envisager des diagnostics multiples : mesure de pression, flux thermique, visualisations, fluorescence, vélocimétrie… Pour des raisons d’encombrement et d’instrumentation, on est amené à positionner la chambre de sorte que le toit n’est plus tourné vers le haut comme sur le schéma (cf. Fig. 2.7).

Fig. 2.7 : Vues réelle et schématique de la chambre instrumentée Injecteurs Fluxmètres x y z Latéral Fluxmètres Électrodes Central

Conclusion sur la représentativité des conditions moteur

En définitive, les multiples contraintes liées à la combustion instationnaire et aux diagnostics mis en œuvre dans la chambre éloignent quelque peu notre configuration de celle d’un cylindre de moteur.

En termes de pertes de chaleur aux parois, le volume globalement cubique de l’enceinte offre un rapport surface/volume plus faible que dans un cylindre ; les matériaux utilisés mettent en jeu du verre, ce qui peut aussi altérer les pertes thermiques à l’échelle de la chambre. Ces éléments qui distinguent notre configuration d’un cylindre de moteur affectent principalement le bilan énergétique global de la chambre. Ils ne portent donc pas préjudice à l’objectif principal, qui consiste à étudier localement l’interaction flamme-paroi.

En termes d’aérodynamique interne, l’absence de piston fait que le mouvement principal n’est pas altéré globalement, alors qu’une aérodynamique similaire dans un cylindre serait décomposée en structures plus petites par la course du piston. Mais si l’on étudie l’interaction flamme-paroi, on s’intéresse principalement aux conditions rencontrées en proche paroi par l’écoulement réactif ; or, cet écoulement réactif en proche paroi est comprimé durant l’expansion de la flamme. La pression initiale est alors multipliée par le rapport des températures de flamme et de gaz frais, i.e. 6–8 : ce taux de compression est un peu inférieur à celui d’un moteur à allumage commandé, généralement proche de 10. La combustion du mélange à partir du centre de la chambre

joue donc le rôle d’un piston sur les structures turbulentes en proche paroi, en réduisant leur taille. Par conséquent, l’absence de piston n’affecte que le comportement global de l’écoulement et de la combustion. Le déroulement de l’interaction flamme-paroi dans notre configuration est localement identique à ce qui se produit dans un cylindre au voisinage du PMH, où le volume est pratiquement constant.

En conclusion, la chambre de combustion est représentative des conditions moteur dans la mesure où elle permet de reproduire les pertes thermiques et l’interaction flamme-paroi instationnaire rencontrées dans un cylindre de moteur à pistons.

2.2.2.2 Mise en œuvre du dispositif expérimental

Mélanges étudiés

Pour observer l’effet de richesse, le phénomène est étudié pour deux mélanges de méthane-air : richesse 1 et 0,7. Une première différence entre ces deux mélanges réside dans l’énergie chimique qu’ils contiennent : le mélange à Φ=1 est presque 50% plus énergétique que le mélange à Φ=0,7. Par ailleurs, la vitesse fondamentale de flamme du mélange à Φ=1 est environ le double de celle du mélange à Φ=0,7. Par conséquent, le mélange méthane-air stœchiométrique a une puissance de flamme laminaire,

H Y S

Qlu l fuel∆ , environ triple de celle du mélange pauvre considéré. En plus du mélange stœchiométrique, l’étude du mélange pauvre permet donc d’appréhender une combustion moins énergétique, où l’effet de l’écoulement sur la dynamique de la flamme est accentué. De ce fait, la richesse détermine deux points de fonctionnement distincts en termes de régime de combustion.

Points de fonctionnement étudiés

En termes d’aérodynamique, l’injection du prémélange est faite à partir du vide jusqu’à 0,2MPa, ce qui dure 125ms. Pour cela, les injecteurs sont alimentés par un réservoir de pression initiale 0,6MPa. Pendant la durée d’injection, la pression du réservoir varie de moins de 5%, ce qui permet aux injecteurs de rester à débit quasiment constant. Pour observer l’effet de l’écoulement turbulent sur la combustion, deux instants d’allumage t* sont envisagés :

- l’allumage dès la fin d’injection, à t*=125ms ; au niveau des parois, la vitesse moyenne et l’intensité de turbulence sont alors respectivement d’environ 15m/s et 3m/s,

- l’allumage 30ms après la fin d’injection, à t*=155ms ; au niveau des parois, la vitesse moyenne et l’intensité de turbulence sont alors respectivement d’environ 8m/s et 1,5m/s.

Le champ aérodynamique est donc localement deux fois plus intense pour l’allumage à t*=125ms qu’à t*=155ms, ce qui détermine deux points de fonctionnement distincts en termes de régime de combustion (cf. Fig 6.29).

Interactions flamme-paroi étudiées

Pour observer l’interaction flamme-paroi en configuration frontale et latérale, deux fluxmètres sont positionnés sur une même paroi (cf. Fig. 2.7). Le fluxmètre central est situé au milieu de la paroi dans le plan vertical médian (x,y) et reçoit l’écoulement parallèlement à sa surface, principalement en situation de coincement latéral. Le fluxmètre latéral est situé dans le plan vertical (x,y) passant par un injecteur et reçoit l’écoulement avec une incidence par rapport à sa surface, de sorte que le coincement peut être ponctuellement frontal.

L’aérodynamique générée dans la chambre de combustion permet donc d’étudier les deux configurations d’interaction flamme-paroi qui concernent les surfaces libres d’un cylindre de moteur à pistons.