conditions contrôlées et sans transit ou après transit, globalement et pour chaque vecteur étudié. Différentes diaspores testées germination sans transit germination après transit Cervus elaphus Sus scrofa Capreolus capreolus Calluna vulgaris 8 ± 2 % 20.8 ± 19.1 % 5.8 % * Juncus effusus 23 ± 3 % 17.1 ± 29.6 % 38.8 % Plantago media 91 ± 2 % 20.6 ± 20.7 % 7.1 % * * Prunella vulgaris 75 ± 2 % 1.8 ± 3.2 % * Rubus fruticosus ‐ 2.7 ± 4.7 % * Trifolium pratense 70 ± 6 % 11.1 ± 19.2 % *
Dans la continuité des travaux de Milotić & Hoffmann (2016a‐c), il faudrait généraliser le prétraitement (levée de dormance physique ou chimique) des diaspores testées, et tester l’effet de la présence de matière fécale et de sa qualité avec pour objectif de comparer les mécanismes endozoochore et épizoochore. Concernant l’endozoochorie, différentes caractéristiques morphologiques de la diaspore vont influer sur les métriques de la germination (forme, taille, épaisseur du tégument, perméabilité, …) en interaction avec les traits des vecteurs en termes de mode de digestion et de masse corporelle (ACL11 & 12). Milotić & Hoffmann (2016b) ont également évalué l’effet de la matière fécale sur des stades ultérieurs de développement au moment de l’établissement, de la croissance et de la floraison des plantes. Ils montrent que peu d’espèces sont affectées aux premiers stades, alors que la quasi‐totalité bénéficie de la présence de fèces plus tardivement, suggérant que les coûts liés aux processus mécaniques et chimiques dans le tube digestif (Milotić & Hoffmann, 2016a) et au moment de la germination (Milotić & Hoffmann, 2016c) peuvent être compensés à des stades ultérieurs de croissance, les plantes profitant de l’environnement enrichi du site de déposition avec une croissance et une floraison améliorées pour certaines espèces au moins.
CH3F ‐ La dispersion secondaire
On a pu montrer sur la figure 27 que des mécanismes de dispersion secondaire étaient envisageables suite à une dispersion primaire par endozoochorie (dispersion par les communautés de coléoptères coprophages), par épizoochorie dans le pelage (transfert entre conspécifiques, épizoochorie sous les sabots) ou bien par barochorie (épizoochorie sous les sabots). Les diaspores de la banque du sol peuvent également être remobilisées localement lors des activités de fouissement ou de souille des sangliers ou bien intégrées avec de la terre dans le pelage.CH3F1 ‐ Diplochorie et coléoptères coprophages
Alors que la diplochorie impliquant les bousiers a été documentée en milieux tropicaux et considérés comme un cas de dispersion orientée puisque dirigeant les diaspores dans des sites protégés et favorables à la germination, peu d’études existent sur le sujet en milieux tempérés. Le déplacement secondaire par les bousiers peut être bénéfique si l’environnement (matière fécale) de germination est nocif (Milotić & Hoffmann, 2016c) et que ces coléoptères peuvent en extraire les diaspores en premier lieu mais aussi qu’ils les transportent à distance ou vers des profondeurs favorables. Attirés rapidement par la matière fécale odorante, ils la désagrègent avant qu’elle ne durcisse et piège les diaspores. D’hondt et al. (2008) ont montré que le taux de germination d’espèces dispersées par endozoochorie était supérieur si on interdisait l’accès aux bousiers, un effet donc négatif des bousiers présents sur l’établissement des plantules. Ce résultat est interprété par l’absence de
bousiers de type rouleurs (roller) et la présence d’espèces (large tunneler, Geotrupes sp.) au sein de l’assemblage local de bousiers qui creusent de grands et longs tunnels et déposent ainsi les diaspores en profondeur.
Dans une expérimentation multi‐site du réseau ALTER‐Net (ACL21p) regroupant 10 pays et 17 sites d’étude dans le Paléarctique occidental, nous étudions le rôle de différents assemblages de bousiers sur la décomposition de la matière fécale et la dispersion secondaire des diaspores, le long d’un gradient biogéoclimatique Pour notre site dans le Loiret (site 4, fig. 39), nous avons évalué les assemblages de bousiers sur 3 types de fèces (mouton, vache et cerf), et si l’on compare à D’hondt et al. (2008), nos assemblages ne comprennent ni bousiers rouleurs, ni bousiers forant de grands et profonds tunnels mais essentiellement des espèces qui séjournent et déstructurent les fèces sur place (dweller) et des espèces forant de petits tunnels peu profonds (small tunneler) laissant suggérer un effet bénéfique de la dispersion secondaire. Les assemblages comprennent 7, 20 et 17 espèces différentes pour mouton, vache et cerf respectivement, pour un total de 21 espèces différentes au total.
Figure 39. Gradient biogéoclimatique de l'expérience
multi‐site sur le rôle des assemblages de bousiers sur la décomposition de la matière fécale et la dispersion secondaire des diaspores.
CH3F2 ‐ Diplochorie et épizoochorie sous les sabots
Pour ce mécanisme de dispersion secondaire, toutes les diaspores libérées au sol sont susceptibles d’être prises en charge du moment qu’elles collent aux sabots des animaux. La diversité des modes de dispersion des diaspores retrouvées sous les sabots du sanglier confortent cette hypothèse (ACL7). L’épizoochorie sous les sabots est rarement étudiée, quelques études en Europe ont pourtant montré que ce n’était pas un mécanisme anecdotique pour au moins 4 vecteurs (cerf, chevreuil, sanglier et bison). Schulze et al. (2014) ont étudié l’épizoochorie sous les sabots de bisons d’Europe (Bison bonasus) et ont récolté 1082 diaspores provenant de 32 plantes, représentant 34% des plantes disponibles sur le site. Polygonum aviculare, Agrostis capillaris et Betula spp. sont les 3 espèces les plus fréquentes, représentant plus de 80% des diaspores récupérées. Les plantes retrouvées sont principalement des plantes avec une forte longévité dans la banque du sol (ACL13). Nous montrons que 88% des sangliers échantillonnés portent des diaspores sous leurs sabots contre 94% dans le pelage (ACL7). Un quart des espèces retrouvées concernent des diaspores identifiées seulement sous les sabots des ongulés sauvages. Par ailleurs, le sanglier transporte significativement plus de diaspores que cerf et chevreuil. Heinken & Raudnitschka (2002) arrivent à des conclusions assez similaires avec 60% des chevreuils qui transportent des diaspores sous leurs sabots et 89 % des sangliers, avec un nombre plus important et plus variable de diaspores chez le sanglier que chez le chevreuil. Nous verrons dans le chapitre suivant que les mécanismes de dispersion externe, épizoochorie dans le pelage et sous les sabots exercent un filtre significatif sur le pool de plantes régional.