• Aucun résultat trouvé

Le cens, mesure de l’influence sociale

Le droit de suffrage, attribut de l'indépendance

1.2 Le cens, mesure de l’influence sociale

Dans la période qui suit, c'est-à-dire celle qui va de l'Empire à la fin de la Monarchie de Juillet, c'est toujours l'indépendance qui est stigmatisée pour distinguer l'électeur et fonder la participation politique. Simplement, celle-ci, sous l'effet de doctrines politiques hostiles au principe de la souveraineté nationale, est plus qu'auparavant fonction de la position socio-économique, puisque celle-ci suffit, désormais, à la qualifier. Alors que sous la Révolution, la propriété des électeurs se combinait avec leur sélection préalable par l'ensemble des citoyens des assemblées primaires, la Restauration pose la propriété comme fondement nécessaire, mais surtout suffisant, du nouvel ordre politique ; ce faisant, elle rompt durablement l'ancienne continuité entre sphères civile et politique, ce qui induit une conception sensiblement différente de la citoyenneté.

1.2.1 Vers une radicalisation de la notabilité des électeurs

Le système électoral de la Restauration est encore aujourd'hui un système présenté à part de l’histoire moderne du suffrage, en raison des fondements idéologiques de la monarchie, dont le principe d’une souveraineté de droit divin annihile toute possibilité de représentation politique172. Il a été étudié d’un point de vue politique comme une des institutions qui fondent la première monarchie parlementaire de l’histoire de France173 et

172 Guillaume Bacot, “La représentation politique : le tournant de la Monarchie de Juillet”, Droits. Revue française de théorie juridique, 6, 1987.

173 Cf. L. Miginiac, Le régime censitaire en France, spécialement sous la Monarchie de Juillet, 1900 ; Jean Berger, Etude de la législation électorale de 1820, thèse pour le doctorat, 1903 ; S. Kent, Electoral procedure under Louis-Philippe, New-Haven, 1937 ; Paul Bastid, Les institutions politiques de la monarchie parlementaire française (1814-1848), Paris, 1954.

d’un point de vue plus social, comme un moyen de propagande efficace mis au service du gouvernement174 ; en revanche, comme construction autour de laquelle les divers courants politiques, libéral conservateur et ultra-royaliste se sont empoignés, on trouve moins de travaux175. En effet, les débats pourtant très fournis et d’une grande richesse conceptuelle n’ont pas fait l’objet d’un travail de synthèse comparable à celui qui a été effectué, d’une manière aussi large que diversifiée, sur la période révolutionnaire. Ils sont pourtant connus des historiens de cette période — dont certains n’ont pas manqué, d’ailleurs, d'en souligner l’importance176. Mais tout se passe comme si ne se trouvaient, dans ces disputes interminables sur l’organisation électorale de la monarchie censitaire, que les relents d’un traditionalisme intéressant peu l'histoire de la société politique moderne. Et il est vrai qu’il peut paraître d’un intérêt historique moindre, au regard des périodes révolutionnaires comme celles de 1789, 1830 ou 1848, de s’attarder sur ce que l’on considère généralement comme une parenthèse dans la construction de la citoyenneté moderne, comme un retour en arrière sans conséquences graves puisqu’il n’a fait que freiner l’institution d’un suffrage universel et d’une IIème République qu’on a tendance à trouver déjà là en 1789. Reste que si la gestation de l’idée républicaine se retrouve en effet plus dans les débats de la période révolutionnaire que dans ceux de la Restauration, il n’en demeure pas moins que cette dernière a tout de même, avec ses (ou en dépit de) conceptions politiques pour le moins conservatrices, mis en place ce que les révolutionnaires n’avaient jamais songé, osé ou réussi à instaurer : une élection directe des députés par un corps électoral unifié, double innovation institutionnelle sur laquelle les régimes suivants ne reviendront plus.

La période transitoire de l'Empire

174 Cf. Charles Roussel, “La candidature officielle sous la Restauration, une élection en 1820”, Revue politique et parlementaire, février 1899, n° 56 ; Alexandre Pilenco, Les moeurs électorales en France, le régime censitaire, Paris, 1928 ; Paul Fauchille, “Comment on faisait les élections en 1815”, Revue de Paris, 1901, ainsi que

“Comment se préparaient des élections en 1818”, Revue de Paris, juillet 1902 ; F. Sauvé, Les dessous d’une élection législative en 1824, Paris, 1904 ; et enfin, C. H. Pouthas, “Les listes électorales sous la monarchie autoritaire et leur utilisation (Comité des sciences historiques)”, Bulletin d’Histoire moderne et contemporaine, 1961.

175 En dehors d’études très spécialisées, il n’existe aucune synthèse sur l'ensemble des débats de 1817 et 1820 qui voient pourtant, à trois ans de distance, les mêmes orateurs s’empoigner sur les mêmes notions, les mêmes questions ; il n’y a guère que Pierre Rosanvallon, qui s’intéresse à cette période depuis longtemps, pour avoir effectué un premier travail, au demeurant très éclairant, sur les débats de la Restauration concernant la question du suffrage, dans Le sacre du citoyen..., op. cit., pp. 209-249 (partie II : “Le répertoire des expériences”, chapitre 2 : “L’ordre capacitaire”).

176 Cf. Pierre Rosanvallon qui considère que la préparation de la loi du 5 février 1817 “donna lieu à l’un des plus importants débats politiques de la Restauration” (Le sacre du citoyen..., op. cit., p. 209).

La Constitution de l’an VIII, rédigée par Sieyès, tout en élargissant la base électorale et en supprimant tout critère censitaire, en réduit en fait considérablement la portée : les citoyens177 choisissent en leur sein ceux qu’ils jugent dignes de figurer sur des “listes de confiance”178 communales, lesquels à leur tour choisissent ceux qui figureront sur les listes départementales, lesquels enfin désignent ceux qui figureront sur les listes d’éligibles aux fonctions publiques nationales ; mais en dernier ressort c’est, au sommet de cette hiérarchie, un corps non élu (le Sénat et le Premier consul) qui décide qui, parmi les 6 000 élus de la liste nationale, deviendra membre du Corps législatif. Le droit de suffrage, ainsi réduit à un simple “droit de présentation”, aboutit en définitive à complètement détourner les “vrais principes du gouvernement représentatif” sur lesquels Napoléon Bonaparte affirmait pourtant avoir fondé la Constitution de l’an VIII179. Se trouve appliquée de manière exemplaire la fameuse formule de Sieyès, selon laquelle “l’autorité doit venir d’en haut et la confiance d’en bas”180 ; autrement dit, et pour reprendre une formule de l’époque sur la nature du “vrai gouvernement représentatif”, “tout se fait donc au nom du peuple et pour le peuple ; rien ne se fait directement par lui : il est la source sacrée de tous les pouvoirs, mais il n’en exerce aucun”181.

Bonaparte, mécontent de cette construction qu’il juge absurde, revient par le senatus-consulte du 16 thermidor an X, à un système électoral plus proche de ceux de la période révolutionnaire, c’est-à-dire à la fois plus démocratique mais aussi plus sélectif ; c’est ainsi que tout en ouvrant les assemblées cantonales (premier degré) à tous les citoyens domiciliés dans le canton182 et en redonnant au principe électif plus d’influence183, il renoue avec des critères censitaires pour l‘accès au degré supérieur de

177 C’est-à-dire tout homme âgé de 21 ans et domicilié depuis un an dans l’arrondissement ; seuls étaient exclus les domestiques, faillis, interdits judiciaires, accusés et contumaces.

178 P.-L. Roederer est le rédacteur de la loi du 13 ventôse an IX (4 mars 1801) qui régit le système des listes de confiance.

179 Cf. Jean-Louis Halpérin, “Élections”, in Jean Tulard (dir.), Dictionnaire Napoléon, Fayard, 1989.

180 Sieyès, Notes concernant la Constitution de l’an VIII, cahier Observations constitutionnelles dictée au citoyen Boulay de La Meurthe, manuscrits conservés aux Archives nationales et cités par Pierre Rosanvallon, Le sacre du citoyen..., op. cit., pp. 199-200.

181 Cabanis, Quelques considérations sur l’organisation sociale en général, et particulièrement sur la nouvelle Constitution, Paris, 25 frimaire an VIII (16 décembre 1799).

182 Y compris — semble-t-il et selon Pierre Rosanvallon — les domestiques, ce qui ne s’était jamais pratiqué jusqu’alors. Cf. Le sacre du citoyen..., op. cit., p. 202. Il convient cependant de nuancer cette affirmation, au vu de ce que l'on sait de la notion très problématique de domicile, dont la définition du Code civil ne permet pas de dire si elle autorise ou non les domestiques à se prévaloir d'un "domicile politique", comme le requiert le senatus consulte. Cf. supra, la note 187 p. 94 consacrée à la Constitution de 1793 et à la situation particulière qu'elle crée pour les domestiques.

183 Le choix fait par le Sénat et le gouvernement s’opérant sur un corps d’éligibles plus restreint que dans la constitution de l’an VIII, on peut en effet trouver qu’il y a, dans cette diminution de la marge de manoeuvre des autorités, une augmentation de celle des électeurs.

l’élection (collèges électoraux de département, auxquels n’ont accès que les 600 plus imposés du département)184. C’est finalement à un simulacre de démocratie qu’aboutit ce système qui ôte toute influence aux électeurs ; mais, et c'est un point important que souligne Jean-Louis Halpérin, “l’Empire avait fait triompher l’idée selon laquelle le droit de vote devait être réservé à environ 100 000 notables”185. Idée qui traverse tout le système électoral de la Monarchie censitaire.

Ce sont ces collèges électoraux de l’Empire qui élisent, en 1815, la fameuse

“Chambre introuvable” de la monarchie restaurée186 ; et c’est dans la même logique, quoique poussée à son terme, que s’inscrivent les doctrinaires pour justifier la mise en place de la première loi électorale du nouveau régime. Cherchant non plus à concilier mais à opposer la qualité (des “véritables” électeurs) à la quantité (de la multitude des citoyens), ceux-ci imposent pour la première fois une élection directe des députés par les électeurs, excluant du même coup tous les citoyens des anciennes assemblées primaires.

Il n’y a plus de souveraineté nationale, ni de droit de vote à proprement parler. Leur succède, pour "terminer la Révolution", un système électoral fondé sur les notions de

“capacité politique” et de “souveraineté de la raison”, dans lequel la propriété joue, plus que jamais, un rôle central dans la désignation de l'électeur.

La discussion sur la mise en place d’un nouveau système électoral débute dès le mois de décembre 1815, donnant l’occasion aux divers courants politiques de la

"Chambre introuvable" de s’exprimer sur leurs conceptions de la représentation politique ; se dégagent, à cette époque, deux grandes tendances, bien exprimées par les interventions de Villèle au nom des ultra-royalistes d’une part, et de Royer-Collard au nom de la tendance “ministérielle”, chargée d’exprimer la volonté du roi, d’autre part.

184 Sans parler du fait qu’une fois élus, les membres de ces collèges électoraux le restent toute leur vie ; les élections ne consistent plus, pour les électeurs des assemblées cantonales, qu’à remplacer les élus décédés.

185 Cf. Jean-Louis Halpérin, “Élections”, op. cit. ; et Jean-Yves Coppolani, Les élections en France à l’époque napoléonienne, Paris, Albatros, 1980.

186 Chambre “introuvable”, avait commenté Louis XVIII, tant sa composition idéologique allait au-delà de toute espérance pour un roi post-révolutionnaire : le “parti ultra”, composé de députés acquis aux idées extrémistes de Louis de Bonald et du comte d’Artois, futur Charles X, avait en effet obtenu 350 voix sur 402 aux élections de 1815 (selon les chiffres fournis par Jean-Jacques Chevallier, Histoire des institutions et des régimes politiques de la France de 1789 à nos jours, Paris, Dalloz, 1972 (4ème éd.), pp. 168-171) ; ceux-ci, depuis la “leçon cinglante”

des Cent jours, poussaient le Roi à une politique systématiquement contre-révolutionnaire, à tel point que Louis XVIII se trouvant débordé sur sa droite et refusant d’être “le roi de deux peuples”, se verra contraint pour gouverner selon ses voeux (et sous l’influence du triptyque Molé, Pasquier, Barante), de la dissoudre le 5 septembre 1816. Voir Achille de Vaulabelle, Histoire des deux Restaurations, jusqu’à la chute de Charles X, Paris, 1847, tome IV, pp. 238-250.

Le comte Jean-Baptiste-Séraphin-Joseph de Villèle est à cette époque considéré comme le chef de la majorité ultra-royaliste de la Chambre187. Face à lui, Royer-Collard, le plus prestigieux des hommes du groupe doctrinaire 188, est un ancien avocat qui a déjà acquis une certaine influence sous la Révolution, au sein de laquelle il se comporte comme un modéré : “ses opinions n’avaient rien d’excessif et n’allaient pas plus loin que l’égalité devant la loi et l’intervention d’une représentation de la nation dans le vote de l’impôt.”189 Tout le débat consiste à comprendre ce que souhaite la Charte de 1814. Car si son article 40 établit bien que “les électeurs qui concourent à la nomination des députés ne peuvent avoir droit de suffrage s’ils ne payent une contribution directe de 300 francs, et s’ils ont moins de trente ans”, elle ne précise pas s’il s’agit de donner le suffrage seulement aux “électeurs” ou s’il est possible d’accorder un droit indirect aux simples

“citoyens” ; ni s’il est possible d’introduire d’autres seuils de sélection au-delà du paiement des 300 francs, en interprétant celui-ci comme un minimum.

Au terme de débats longs et houleux, la "Chambre introuvable" conserve le principe d’une élection à deux degrés. Celle-ci a en effet l’immense avantage, en maintenant un droit d’élection pour les plus petits propriétaires, de favoriser l’emprise locale, “le naturel patronage” des propriétaires terriens que sont la plupart des ultra-royalistes qui

187 Né en 1773, d’une famille noble et ancienne de Toulouse, ancien officier du corps royal de la marine, Villèle a été un fervent opposant de la Déclaration de Saint-Ouen, au nom d'un retour complet au régime antérieur à la Révolution. Revenu à une position plus modérée, élu député de Haute-Garonne, il cherche à faire des royalistes

"un parti compact, homogène et discipliné, dont il serait le chef”. Paul Thureau-Dangin, Royalistes et républicains..., op. cit., p. 194. En février 1816, il est, comme il se doit, à la tête de la commission, elle-même à la tête de l’opposition au gouvernement.

188 Groupe plutôt que parti, les doctrinaires n’ayant “aucune communauté de doctrine” Paul Langeron, Royer-Collard, Un conseiller secret de Louis XVIII, Paris, 1956, p. 130. Ils sont appelés ainsi en raison de “leur langage sentencieux, leur habitude de recourir à la théorie, le détachement qu’ils manifestaient à l’égard du pouvoir, le dédain affiché des contingences”. Gabriel Rémond, Royer-Collard, son essai d’un système politique, thèse pour le doctorat, Paris, 1933, pp. 23-24. Selon François Guizot, c’était “un parti du bon sens et du sens moral, un parti des honnêtes gens et des esprits modérés, voulant le respect de tous les droits divers et le développement à la fois libre et régulier de toutes les forces saines de l’humanité” (Guizot, cité par Paul Langeron, Royer-Collard..., op. cit., pp. 130-131). S’ils se réunissent, c'est “sur certaines idées générales”, telles que la légitimité, l’acceptation de la Révolution et le rejet unanime de la souveraineté nationale : “Ils ont consacré les efforts de leur vie, même après la révolution de Juillet, à séparer la cause de la royauté de celle de l’ancien régime et la cause de la liberté politique, telle qu’ils l’entendaient, de celle des idées révolutionnaires. La légitimité et la Charte, telle aurait pu être leur devise, comme celle de Royer-Collard. Pour appliquer leur politique, il leur fallait un gouvernement ; ils essayèrent et même ils réussirent à en fonder un qui a duré trente ans, le gouvernement des classes moyennes” (E. Spuller, Royer-Collard, Paris, 1895, p. 136.) Les trois hommes du “parti” qui, selon le mot de Beugnot , “pouvaient tenir sur un canapé” sont, avec Royer-Collard, Jordan, Serre, et Broglie. Tous interviennent dans le débat sur la loi d’élection.

189 Biographie universelle ancienne et moderne, nouvelle édition, publiée sous la direction de M. Michaud, Paris, 1843. En avril 1797, élu député au conseil des Cinq-Cents par l’assemblée électorale de la Marne, Royer-Collard s'est lié assez intimement avec Corbière, Camille Jordan et Quatremère de Quincy ; au lendemain du 18 fructidor, épargné par la répression, il est chargé de former un conseil royaliste ayant pour mission de correspondre avec le Roi. Professeur d’histoire de la philosophie à la faculté des lettres, où il développe la philosophie écossaise, puis conseiller d’Etat en service extraordinaire, il est étroitement associé au projet de loi sur la presse, ainsi qu’à l’ordonnance qui change tout le système de l’instruction publique. Ayant cessé toute fonction publique pendant les Cent jours, il retrouve sa place au Conseil d’Etat lors du retour de Louis XVIII, qui le nomme Chevalier de la Légion d’Honneur et président de la commission de l’instruction publique (août 1815) ; élu député du département de la Marne, il siège au centre gauche.

composent la majorité de la Chambre190. Au premier degré, seront admis tous les contribuables payant 50 francs de contributions, tandis qu’au second degré ne parviendront que ceux qui payent 300 francs191. Ce texte, adopté par la Chambre des députés dans la séance du 6 mars 1816, échoue sous la pression du roi, devant la mécontente profondément le roi ; le projet, qui ne quitte pas les cartons ministériels, ne sera jamais soumis à la Chambre des pairs193. Car à la suite de ce que les ultra-royalistes considèrent à juste titre comme leur victoire, la Chambre est brusquement dissoute ; et c’est dans une enceinte profondément renouvelée, composée de députés

190 Parmi une multitude de discours sur ce sujet, voir celui exemplaire, d’Humbert de Sesmaisons, dans la séance de la Chambre des députés du 6 mars 1816, qui explique pourquoi la loi électorale doit faire en sorte qu’une partie des collèges électoraux du second degré soit composée des plus forts contribuables du département, parce que les petits “éliront de préférence les plus imposés, parce qu’on n’est jamais jaloux que de ce que l’on peut atteindre, et l’on ne peut atteindre que ce dont on est le plus rapproché. Les plus imposés seront donc nécessairement choisis, et c’est ce que nous voulons. Alors vous verrez entrer dans les collèges électoraux de riches propriétaires qui seront les véritables représentants de la masse et de la propriété de l’arrondissement, car ils auront été élus par tous les petits propriétaires.”

191 Avec cette réserve que le tiers du nombre prévu sera composé des plus imposés, et que le dixième sera pris par le Roi “parmi les habitants du département qui ont rendu des services à l’Etat” et qui remplissent les conditions d’éligibilité. Article 11 du Titre II du projet de loi électorale de Vaublanc adopté dans la séance du 6 mars 1816.

192 Ces ordonnances prévoyaient une élection à deux degrés, le collège d’arrondissement élisant des candidats, et le collège de département élisant au moins la moitié des députés parmi ces candidats ; le premier collège était composé d’électeurs de 21 ans, et le second, d’électeurs du même âge mais choisis sur la liste des plus imposés du département. En outre, et conformément à l’acte du 22 février 1806, les membres de la légion d’honneur pouvaient être adjoints aux collèges d’arrondissement, ainsi qu’au collège de département s’ils remplissaient les conditions censitaires fixées par la Charte de 1814. A la suite de cette première ordonnance, et ayant constaté “qu’un assez grand nombre de collèges électoraux se trouvaient en ce moment incomplets”, le roi avait autorisé les préfets à adjoindre aux listes électorales, et conformément à l’acte du 16 thermidor an X (toujours, donc, dans l’intention de se “rapprocher autant qu’il sera possible, tant de la Charte que des formes précédemment en usage”), 20 membres au collège de département, dont 10 parmi les 30 plus imposés du départements, et 10 autres “parmi ceux de nos sujets qui ont rendu des services à l’Etat”.

193 C’est à une “société d’élites”, de notables, caractéristique de la structure sociale de la monarchie censitaire que se réfèrent les ultra-royalistes de la “Chambre introuvable”, lorsqu’en 1816 ils défendent le principe d’un cens électoral relatif à la position sociale des notables dans leur communauté locale (le département) : plutôt qu’un cens égal sur tout le territoire, ils préconisent en effet de confier le second degré des élections aux plus

193 C’est à une “société d’élites”, de notables, caractéristique de la structure sociale de la monarchie censitaire que se réfèrent les ultra-royalistes de la “Chambre introuvable”, lorsqu’en 1816 ils défendent le principe d’un cens électoral relatif à la position sociale des notables dans leur communauté locale (le département) : plutôt qu’un cens égal sur tout le territoire, ils préconisent en effet de confier le second degré des élections aux plus