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Toutes les fonctionnalités déjà évoquées, exceptée la centrifugation, sont à nouveau testées dans une cellule de rhéologie simple cône étanche. Le joint est réalisé de façon permanente car nous voulons absolument éviter les fuites. Le cône est donc fixe et aucun axe ne sort de la cellule. Comme pour la campagne précédente, aucun test de rhéologie n’est possible. Par contre, une nouvelle fonctionnalité est implémentée : l’injection de liquide dans la cellule. Elle va permettre de contrôler la fraction volumique de liquide lors d’une production en boucle fermée. Elle va aussi servir à faire des essais d’imbibition capillaire dans la géométrie cône-plan, principale expérience scientifique prévue pour MAXUS 6. Le piston-doseur alimentant la cellule en liquide a été conçu par EADS-ST. Elle injecte le liquide par un canal indépendant, concentrique à celui de la mousse (figure 4.13). Pour que l’injection soit la plus homogène possible, trois bagues d’injection, différemment percées, sont testées (figure 4.14). Les trous font respectivement 500 et 800 μm de diamètre.

Observation vidéo

Cône

Canal mousse Canal liquide

Figure 4.13 : cellule de rhéologie et détail des canaux de l’injecteur (extraite d’un rapport de EADS-ST, 2004)

Figure 4.14 : bagues d’injection à trous ou à rainure (extraite d’un rapport de EADS-ST, 2004)

Une illumination de la cellule est faite d’un côté de l’échantillon et l’intensité transmise est récoltée par une caméra CCD (figure 4.15). Cette illumination est générée par un panneau de diodes électroluminescentes dont le rayonnement est homogénéisé par un diffuseur (verre dépoli). Nous nous intéressons alors au front d’imbibition en variant le débit d’injection (de 4,5 à 70 mL.min-1) et la bague utilisée.

Le remplissage de la cellule n’a posé aucun problème et les mousses produites par le mélangeur turbulent sont toujours homogènes. L’utilisation de la boucle fermée a donné de moins bons résultats de remplissage qu’aux vols précédents, et la fraction volumique de liquide n’est toujours pas passée sous 0,1. Cela montre que la centrifugation, utilisée aux vols précédents, est indispensable pour créer des mousses homogènes par circulation en boucle fermée. Pour la même raison, le nettoyage s’est avéré moins efficace, malgré une augmentation à 8 sorties possibles pour la mousse, dont 5 sont visibles en figure 4.15 (tubes).

En ce qui concerne l’imbibition, le liquide injecté se propage radialement de manière isotrope pour les plus faibles débits, comme on peut le voir sur la couronne extérieure grise de la figure 4.16.

Figure 4.15 : cellule de rhéologie illuminée pour suivre l’imbibition (extraite d’un rapport de EADS-ST, 2004)

Doigts de liquide pur Imbibition capillaire isotrope (radiale)

15 mm 4 mm

Figure 4.16 : injection de liquide avec la bague trouée à 800 μm, pour un débit de 45 mL.min-1

, après 12 s de micropesanteur (extraite d’un rapport de EADS-ST, 2004)

Au delà d’un débit de 10 mL.min-1, des instabilités commencent à apparaître autour de la bague d’injection, quelle que soit la géométrie de cette dernière (figure 4.14). Il s’agit en fait de liquide pur, puisque les doigts apparaissent blancs en transmission, montrant qu’il n’y a pas de diffusion dans ces régions (la zone noire centrale est l’ombre du cylindre d’injection). D’autre part, la géométrie cône-plan favorise ce comportement car la hauteur est très faible autour de la bague d’injection, en dessous du demi mm. Seules une ou deux bulles se trouvent donc confrontées à une grande vitesse d’injection. Elles sont donc certainement repoussées par l’écoulement de liquide, jusqu’à une distance où assez de bulles s’y opposent. Le réservoir de liquide ainsi créé imbibe alors le reste de la mousse. Il est dommage de ne pas avoir disposé de la mesure de la conductance électrique pour vérifier l’hypothèse du liquide pur dans cette région. Des essais sur Terre nous ont cependant permis, avant MAXUS 6, de la confirmer et de choisir un débit approprié pour la minimiser. En ce qui concerne le type de bague utilisé, les doigts d’instabilité sont minimisés pour les trous de 800 μm de diamètre,

IV.E.3. Imbibition unidimensionnelle forcée d’une mousse

La seconde expérience scientifique à bord de l’A300-0G est très similaire à celle de la campagne précédente. La méthode de production de la mousse est la même, dans une cellule parallélépipédique de mêmes proportions, conduisant à un rayon des bulles homogène de 1,5

mm. La principale modification est l’ajout d’un tube d’injection en haut de la cellule,

permettant d’imbiber uniformément la mousse à différents débits (figure 4.17). Ce tube est horizontal et percé de 8 trous de 500 μm de manière à ce que le liquide injecté soit réparti sur

toute la largeur de la mousse. Il est alimenté par un tube situé le long de l’épaisseur de la cellule (à droite sur la figure 4.17). Avant chaque nouvelle parabole, la mousse imbibée est remplacée, simplement en poussant l’ancienne hors de la cellule avec la nouvelle (tube en haut à gauche sur la figure 4.17).

Tube d’injection

Mousse

Figure 4.17 : cellule d’imbibition forcée ; détail du tube d’injection (extraite d’un rapport de EADS-ST, 2004)

Les débits utilisés s’étalent de 5 à 50 mL.min-1. Bien sûr, une imbibition libre a également lieu en bas de la cellule, à l’interface liquide / mousse. Nous avons vu avec la campagne précédente que, pour ces conditions, le liquide imbibe environ une hauteur de 5 cm durant une parabole. Il est donc nécessaire d’avoir une hauteur de mousse importante afin que les deux fronts ne se rencontrent pas. Nous la fixons à 20 cm.

Comme pour l’imbibition libre, l’évolution temporelle du front pour chacun des débits est extraite de vidéos. Cependant, j’utilise cette fois le logiciel Foamfront, développé par I.T.CONCEPT dans le but de suivre un front de drainage sur vidéo numérique.

Il s’agit en fait d’un analyseur d’image qui suit le déplacement spatial d’une transition de niveau de gris. Il me faut donc au préalable transformer les vidéos analogiques enregistrées pendant les vols paraboliques en vidéos numériques. Une série de photographies issues d’une des vidéos, au débit 40 mL.min-1, est montrée en figure 4.18.

2 cm

Figure 4.18 : évolution des fronts d’imbibition de 0 à 15 s de micropesanteur pour un débit de 40 mL.min-1

Sur ces images, on se rend compte d’un problème d’homogénéité de la source lumineuse, caractérisée par des traits horizontaux. En haut, cela perturbe l’analyse puisqu’une zone d’ombre de 3 cm est présente sous le tube d’injection –ce dernier est visible en haut de la première photographie– y rendant impossible la mesure. Cette erreur de conception, détectée tardivement, ne permet de mesurer le front qu’aux débits ≥ 20 mL.min-1

et peu de vidéos sont exploitables. Sur la figure 4.19, je trace l’évolution du front d’imbibition pour des débits 20 ; 30 et 40 mL.min-1 en micropesanteur, et au débit 7 mL.min-1 en phase de 1,8g et sur Terre. Cette dernière courbe est issue des données de Saint-Jalmes et al.[1]. Les parties sans points de mesure correspondent à l’ombre sous le tube d’injection, à des défauts d’enregistrement, ou à des instabilités gravitationnelles précédant la phase de 1,8g, dues à l’orientation de la cellule.

Les résultats en micropesanteur montrent une dépendance en loi de puissance dont l’exposant ne dépend pas du débit (entre 20 et 50 mL.min-1) et vaut 0,48 ± 0,05. Cette valeur est un peu en dessous de celle attendue théoriquement, égale à 0,6 (II.F.1.a). Cette différence peut être due au manque de données pour les temps courts ou bien à une concentration en DOH trop faible pour se trouver dans le cas des interfaces rigides. En effet, le résultat théorique pour des interfaces mobiles donne un exposant 0,5 (II.F.1.b). D’autre part, le facteur de la loi de puissance pour des interfaces rigides doit varier avec le débit avec un exposant 0,2 (II.F.1.a) –la valeur pour des interfaces mobiles n’est pas connue– Je le trouve égal à 0,22.

0 20 40 60 80 100 120 0 4 8 12 16 20 2 P osi ti o n du f ron t (m m) Temps de vol (s) 4

Figure 4.19 : imbibition de mousse dans l’A300-0G en micropesanteur puis hyperpesanteur (triangle, rond et carré respectivement à 20, 30 et 40 mL.min-1) ; en hyperpesanteur seule à 7 mL.min-1 (croix) ; drainage sur

Terre à un débit surfacique identique (ligne continue, données issues de Saint-Jalmes et al.[1])

Pour évaluer le régime étudié, je calcule la mobilité interfaciale M, définie en (2.35). Pour la solution de TTAB/DOH utilisée, je trouve comme viscosité de cisaillement de surface, moyennée sur plusieurs mesures, 5.10-6 N.s.m-1, en utilisant l’ISR1 (cf. III.B.4). Cette valeur est du même ordre de grandeur, quoi que légèrement supérieure, à celle rapportée par Pitois et al.[1] pour les concentrations utilisées (cf. IV.B.3). Ainsi, M = 0,3 dans le cas le moins favorable où ε = 0,36. Cela signifie qu’on est sûr de se trouver en dessous de cette valeur au front d’imbibition. On se situe donc bien dans le régime des interfaces rigides (cf. II.E.3.a). Pour le vérifier autrement, il est possible de mesurer M à partir des résultats expérimentaux. En redimensionnant l’équation (2.47) par (2.42), avec une tension de surface de 30 ± 0,5

mN.m-1, mesurée par la technique de la goutte montante (cf. III.B.1.b), il vient :

3/5 1/5 2/5 t Q .K , p=085 (4.1)

C3-d étant dans ce cas la section transversale de la cellule (30 cm2). Le facteur de la loi de puissance pour le débit est obtenu par ajustement (0,133). La perméabilité vaut donc 0,01. L’équation (2.38) permet de trouver M = 0,2 ; bien représentative des interfaces rigides.

Pour la phase de 1,8g la courbe représentée sur la figure 4.19 montre une imbibition à un débit de 7 mL.min-1 –qui égale un débit surfacique de 4.10-3 cm.s-1 pour la section de notre cellule– Le comportement linéaire est bien caractéristique d’une domination des effets gravitationnels sur les effets capillaires (cf. II.E.3.a). La pente vaut 9 –notons que les pentes après les paraboles valent environ 11–

Je la compare à la pente pour un essai de drainage forcé sur Terre de même débit surfacique, issue de l’article de Saint-Jalmes et al.[1]. Elle vaut 6 et le rapport vaut 1,5 ce qui n’est pas très éloigné du 1,8attendu par le calcul avec l’équation (2.36).

Pour quantifier l’accord théorie / expériences, Saint-Jalmes et al.[3] ont réalisé des simulations numériques pour les conditions expérimentales de ces vols paraboliques et du vol MAXUS 6, dont je vais parler juste après. Le seul paramètre ajustable est la perméabilité, dont deux valeurs extrêmes sont envisagées. Pour le débit de 20 mL.min-1, l’accord est meilleur pour K = 0,0067 alors que pour 40 mL.min-1 il est meilleur pour K = 0,011. L’ensemble des résultats serait donc meilleur pour une perméabilité K intermédiaire, ce que je trouve en effet plus haut. En ce qui concerne la phase d’hyperpesanteur à 1,8g –pour la phase bruitée suivant immédiatement la phase de micropesanteur, différente de celle représentée en figure 4.19, pour laquelle l’accélération est mieux stabilisée– la simulation rend bien compte des résultats expérimentaux.

Temps de vol (s) Position du front (cm) Expériences Simulations K = 0.009 K = 0.0067

Figure 4.20 : position du front au cours du temps de vol parabolique simulée a) et expérimentale b) pour différents débits et pour deux perméabilités extrêmes (simulation) pour les campagnes A300-0G 37 et MAXUS 6

IV.F. Campagne en fusée-sonde : MAXUS 6