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1.3 L A SCLÉROSE EN PLAQUES

1.3.2 Les causes et facteurs de risque

Les causes exactes menant au développement de la SP étant encore méconnues, deux modèles théoriques tentent d’en expliquer l’étiologie. De par la nature inflammatoire de la SP, l’hypothèse « outside-in » est la plus populaire. Cette théorie explique qu’une activation inadéquate des leucocytes périphériques, en particulier ceux des lignées lymphocytaires, est responsable de l’initiation de la pathologie. Le modèle « outside-in » est supporté par l’association de nombreuses variations génétiques (principalement des gènes liés à l’inflammation) au risque de développer la SP de même que la réponse des patients aux médicaments anti- inflammatoires (Haines et al., 1998; Hafler et al., 2007; Schmidt et al., 2007; Ramagopalan et al., 2011; Sawcer et al., 2011; Beecham et al., 2013; Vargas and Tyor, 2017). De plus, l’étude post-mortem des plaques de démyélinisation montre une forte association entre le degré d’inflammation et le nombre d’axones sectionnés (Trapp et al., 1998). Le développement d’infections causées par différents virus et bactéries a également été associé à un risque accru de rechute, renforçant le rôle important du système immunitaire dans la SP (Compston and Coles, 2008). Toutefois, la présence de certaines irrégularités ou inconsistances allant à l’encontre du modèle « outside-in » suggèrent l’existence d’un modèle alternatif, l’hypothèse « inside-out » (Trapp and Nave, 2008; Stys et al., 2012). Ce deuxième modèle explique que des phénomènes de neurodégénération initient la pathologie et que la réponse inflammatoire serait en fait une conséquence de

la mort des oligodendrocytes et des neurones. Parmi les évidences appuyant cette hypothèse, on retrouve le fait que malgré la réduction du statut inflammatoire provoquée par la médication ou des greffes autologues de moelle osseuse, les patients atteints des formes progressives de la SP voient quand même leurs symptômes s’aggraver (Stys et al., 2012). De plus, chez les individus ayant la forme cyclique, les plaques corticales de même que celles nouvellement formées dans la matière blanche sont très pauvres en leucocytes sanguins (Peterson et al., 2001; Henderson et al., 2009). Ces résultats suggèrent que la réponse inflammatoire est secondaire ou dispensable très tôt dans la forme cyclique de la SP et chez les patients atteints des formes progressives. Considérant la grande variabilité des manifestations de la SP entre les individus atteints, il est fort probable que les causes exactes de la pathologie empruntent un peu aux deux hypothèses. En attendant d’avoir les réponses exactes, les études épidémiologiques ont permis d’identifier plusieurs facteurs de risques fusionnant des prédispositions génétiques à certains facteurs environnementaux.

Les premières contributions de la génétique aux risques de SP sont vues dès la naissance. En effet, le sexe et l’ethnicité ont été rapportés comme ayant une forte influence sur le développement de la SP à l’âge adulte ; comparativement aux hommes, de deux à trois fois plus de femmes sont diagnostiquées avec la SP. Il est intéressant de noter que le ratio homme:femme tend à augmenter avec les années, un phénomène qui demeure inexpliqué à ce jour (Orton et al., 2006). Tous sexes confondus, les individus d’origine caucasienne et africaine ont une prévalence de loin supérieure aux hispaniques et asiatiques (Ramagopalan and Sadovnick, 2011; Wallin et al., 2012; Langer-Gould et al., 2013). La composante génétique de la SP est aussi associée à une certaine hérédité. En effet, plus une personne partage son bagage génétique avec un individu atteint de SP, plus son risque de développer la maladie augmente (Figure 1.20) (Willer et al., 2003; Compston and Coles, 2008; Ramagopalan and Sadovnick, 2011). Parmi les facteurs génomiques identifiés jusqu’à maintenant, on retrouve certains polymorphismes à l’intérieur de gènes fortement liés à l’inflammation, par exemple HLA-DR, IL2RA, et VCAM1 (Haines et al., 1998; Hafler et al., 2007; Schmidt et al., 2007; Sawcer et al., 2011; Beecham et al., 2013). Récemment, une mutation dans le gène NR1H3, identifiée chez les individus provenant de deux familles ayant un fort taux de SP, a été associée à la forme progressive de la maladie (Wang et al., 2016b). La réplique de la communauté scientifique à la suite de cette découverte suggère cependant l’adoption d’une certaine prudence face à ces résultats (Consortium., 2016; Minikel and MacArthur, 2016; Wang et al., 2016a). Des mutations dans le gène CYP27B1, une enzyme qui transforme le précurseur de la vitamine D en son métabolite actif, la 25-hydroxy-vitamine D (ici nommée vitamine D), ont aussi été identifiées dans plusieurs cas familiaux de SP (Ramagopalan et

est d’ailleurs l’un des liens puissants unissant les causes génétiques de la SP aux facteurs environnementaux.

FIGURE 1.20 – Contribution de la composante génétique au risque de

Notre principale source de vitamine D provient de la transformation des précurseurs endogènes ou exogènes via une réaction catalysée par les rayons UV du soleil. Il est connu depuis plusieurs années que le risque de développer la SP augmente avec la latitude, un phénomène qui peut s’expliquer par une réduction du niveau d’exposition aux rayons UV en s’éloignant de l’équateur (Compston and Coles, 2008; Ascherio et al., 2012; Ascherio, 2013; McKay et al., 2016). De plus, chez des individus atteints de SP, les niveaux sanguins de vitamine D corrèlent inversement avec l’apparition de nouvelles lésions ou de crises (Ascherio, 2013). En lien étroit avec l’exposition au soleil, le mois de naissance des enfants dans les pays « nordiques » semble lui aussi influencer le développement de la SP (Staples et al., 2010; Torkildsen et al., 2012). D’ailleurs, le taux d’exposition aux rayons UV des mères ainsi que leur consommation de vitamine D sont inversement liés au risque que leurs enfants développent la SP (Staples et al., 2010; Mirzaei et al., 2011). Bien que la contribution précise de la vitamine D au développement de la SP soit encore sous investigation, une étude récente a démontré que plusieurs gènes associés à l’incidence de la SP, en particulier ceux qui codent pour des protéines inflammatoires, contiennent des éléments de réponse à la vitamine D (Booth et al., 2016). Considérant que la vitamine D a aussi été impliquée dans d’autres maladies auto- immunitaires et que plusieurs populations leucocytaires expriment son récepteur, sa participation à la SP semble être surtout au niveau des cellules immunitaires (Hayes et al., 2015; Booth et al., 2016; Dankers et al., 2016). Outre la vitamine D et l’exposition au soleil, la présence du virus Epstein-Barr (Epstein-Barr virus, EBV) est aussi un facteur de risque important de la SP (Ascherio and Munch, 2000; Ascherio and Munger, 2007; Levin et al., 2010). Il est estimé que plus de 95% de la population est infectée par EBV, lequel reste asymptomatique chez la majorité des individus (Ascherio and Munger, 2007). Même si la présence seule de EBV est associée à la SP, le développement de la mononucléose infectieuse, une condition rare pouvant être provoquée par EBV, augmente de deux à trois fois le risque de voir apparaître la maladie (Thacker et al., 2006). Similairement, l’augmentation des niveaux sanguins d’anticorps anti-EBV élèvent de plusieurs fois le risque de développer la SP (Munger et al., 2011). Il est intéressant de noter que d’autres virus courants comme le virus simplex humain, le virus de la rougeole et celui de la rubéole ne semblent pas avoir une aussi forte influence que l’EBV sur l’incidence de la SP (Ascherio and Munch, 2000; Ascherio and Munger, 2007). Les liens mécanistiques permettant à l’EBV de promouvoir l’apparition de la SP sont activement étudiés. Certaines pistes intéressantes pointent vers une diminution du seuil de tolérance des lymphocytes en présence d’EBV (Ascherio et al., 2012). Les autres facteurs de risques environnementaux ayant été rapportés sont la cigarette et l’obésité pendant l’enfance, mais leurs contributions directes à la SP sont toutefois

progression de la SP (Hempel et al., 2017). Ces résultats suggèrent que les facteurs contribuant à l’initiation de la SP sont différents de ceux qui encouragent la progression de la maladie.

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