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Identifi´es en 1991 par S. Iijima sous la forme d’un sous produit de synth`ese des fuller`enes (mol´ecules poly`edriques C60), les nanotubes de carbones suscitent, en raison de leurs exceptionnelles propri´et´es physiques et chimiques, un int´erˆet grandissant. Les domaines d’applications sont tr`es diversifi´es, allant de la m´ecanique `a la nanochimie, en passant par la nano´electronique.

3.2.1 Description et proc´ed´es de fabrication

Fig. 3.12: Structure et dimensions typiques d’un nanotube de carbone. Les liaisons entre atomes de carbone forment des mailles hexagonales. Le rapport h/r de l’ordre 300 (soit environ 10 fois sup´erieur `

a celui des pointes) d´efinit le facteur d’amplification du champ ´electrique, qui favorise l’´emission par effet de champ des ´electrons.

Un nanotube de carbone est typiquement un cylindre de graph`ene (pavage de mailles hexagonales constituant une feuille de graphite) referm´e sur lui mˆeme. Le fermeture est rendue possible par l’in- troduction de d´efauts topologiques (le d´efaut de base ´etant un pentagone) introduisant une courbure dans la structure. Sa longueur peut atteindre plusieurs microns alors que son diam`etre varie de 1 `a 10nm. Il existe principalement deux types de nanotubes : les nanotubes simple paroi, qui sont consti- tu´es d’une seule feuille referm´ee sur elle mˆeme, et les nanotubes multi-feuillets, qui sont constitu´es de cylindres emboˆıt´es les uns dans les autres. Un effet structurel important pour les propri´et´es ´elec- troniques est associ´e `a l’orientation des hexagones de la maille du tube. En effet le tube poss`ede une chiralit´e sp´ecifique, selon l’angle d’enroulement associ´e aux hexagones (angle entre l’axe du cylindre et une direction de r´ef´erence qui s’appuie sur un cˆot´e d’un hexagone), ce qui se traduit par des propri´et´es conductrices, semi-conductrices, ou isolantes. Cette propri´et´e g´eom´etrique ainsi que le comportement des couches ´electroniques, proche de celui des couches d’un m´etal, en fait un objet particuli`erement int´eressant pour l’´emission de champ. Suivant le proc´ed´e de synth`ese, deux modes d’auto-assemblage

des tubes, exclusifs l’un de l’autre, se produisent. Dans le premier mode les tubes s’emboˆıtent les uns dans les autres et donnent naissance `a des structures multi-feuillets. Dans le second mode, des tubes mono-feuillet s’assemblent en faisceau. Dans cette derni`ere structure les liaisons entre les atomes de carbone de chaque tube sont similaires `a celles pr´esentes entre les feuillets du graphite. Une description tr`es g´en´erale de la structure et des propri´et´es des nanotubes de carbone peut ˆetre trouv´ee `a l’adresse suivante : http://www.onera.fr/conferences/nanotubes.

Fig.3.13: Typologie des nanotubes dans les cathodes d´evelopp´ees par le CEA/LETI (photos de gauche) et Thales/TRT (photos de droite), et test´ees au laboratoire. Dans la structure du LETI, qui int`egre une grille d’extraction, la croissance des tubes (r´ealis´ee par CVD) est non orient´ee, au contraire de la structure r´ealis´ee par Thales (par PECVD). (Cr´edits : CEA/LETI et LAAN/TRT)

Les cathodes `a nanotubes que nous avons utilis´ees ont ´et´e d´evelopp´ees par le CEA/LETI, et par le Laboratoire d’Analyse en Nanostructures de Thales Research and Technology (TRT). La Figure 3.13 pr´esente des photos des diff´erentes configurations. Dans le premier cas il s’agit de structures non orient´ees de type ”fagots”, dans le second cas de nanotubes dont la croissance est orient´ee perpendicu- lairement au substrat regroup´es sous la forme de ”bosquets”, constitu´es chacun d’une dizaine de tubes voisins. TRT produit ´egalement, pour des applications sp´ecifiques aux tubes hyperfr´equences, et sui- vant une technologie similaire, des dispositifs constitu´es d’une ”fˆoret” de tubes uniques r´eguli`erement espac´es. Cette configuration atteint une efficacit´e maximale, chaque tube pouvant ´emettre un courant environ 3 fois sup´erieur `a celui d’un bosquet.

La croissance des tubes fabriqu´es par le LETI s’effectue par d´ecomposition d’un gaz d’ac´etyl`ene (C2H2) sur des plots de catalyseur (Nickel) inscrits dans rectangle de dimension 5× 10µm et dispos´es

sur un substrat en silicium (couche r´esistive), `a basse temp´erature (de l’ordre de 500◦C) (proc´ed´e CVD, Chemical Vapor Deposition). Ce mode de croissance procure aux tubes une orientation al´eatoire. L’application du champ extracteur va provoquer un redressement d’un certain nombre de ces tubes, qui participent alors `a l’´emission. Un avantage de cette disposition est de permettre le remplacement des tubes ´eventuellement d´et´erior´es au cours de l’´emission par des tubes inactifs jusque l`a. La Figure 3.13 montre l’alignement de 3 de ces unit´es au centre de grilles d’extraction, int´egr´ees au composant `a l’instar des cathodes `a micropointes. La distance entre les centres des deux grilles encadrant un groupe ´etant d’environ 25 µm (Figure 3.14), la zone centrale des unit´es ´emissives est soumise `a un champ plus faible que les bords. La juxtaposition d’un certain nombre de ces motifs permet de former des

Fig.3.14: Vue sch´ematique des couches de la cathode `a nanotubes du LETI. Une couche de silice isole les grilles des contacts cathodiques. La couche ballast en silicium permet l’uniformisation de l’´emission comme dans le cas des micropointes. (Cr´edits : CEA/LETI)

pixels d’environ 350µm de cˆot´e, comme dans le cas des cathodes `a micropointes. Une surface de 1 cm2 correspond `a 1024 pixels r´epartis en 32 lignes et 32 colonnes. En raison d’un facteur d’amplification de champ tr`es important (le rapport hauteur sur rayon est de l’ordre de 300) une tension d’extraction entre les grilles et les tubes d’environ 40 V suffit `a provoquer l’´emission. La structure de grille est beaucoup plus ouverte que dans le cas des pointes : les bords de grille sont `a 5µm des bords de plots, alors que le sommet des tubes est `a environ 0.7µm sous le plan de grille. L’une des cons´equences de cette particularit´e g´eom´etrique est l’influence non n´egligeable du potentiel de l’anode (vers laquelle sont acc´el´er´es et collect´es les ´electrons) sur le champ extracteur total, de l’ordre de 10V/µm, auquel le potentiel d’anode contribue `a hauteur de 10 `a 30%.

La croissance des tubes produits par TRT est effectu´ee en phase vapeur, dans un m´elange d’´ethyl`ene C2H2 et d’ammoniac NH3, port´e `a une temp´erature d’environ 700◦C, et partiellement ionis´e grˆace `a

l’imposition d’un champ ´electrique perpendiculaire au substrat. Il s’agit du proc´ed´e PECVD (Plasma Enhanced Chemical Vapor Deposition).

Fig. 3.15: Etapes principales de la croissance des tubes r´ealis´ee par Thales. Le chauffage `a 700◦C permet la fragmentation du catalyseur. Le carbone provenant de la d´ecomposition du gaz d’´ethyl`ene s’agr`ege sous les gouttes de Nickel repouss´ees au sommet des tubes. La croissance est perpendiculaire au substrat grˆace `a l’application d’un champ ´electrique. (Cr´edits : LAAN/TRT)

Le gaz se d´ecompose et la structure graphitique croˆıt sur des plots de catalyseur (gouttes de Ni) (Figure 3.15), dont la disposition et les dimensions sont parfaitement contrˆol´ees par un proc´ed´e de lithographie `a haute r´esolution par faisceau d’´electrons. La pr´esence du champ ´electrique perpendicu- laire au substrat permet d’obtenir une croissance orient´ee suivant les lignes de champ, et de produire une r´epartition de tubes rectilignes dont on peut voir deux exemples sur la Figure 3.13. Dans un cas les tubes de 5 µm de hauteur sont espac´es de 10 µm. Dans l’autre cas les tubes sont rassembl´es par

paquets d’une dizaine d’´el´ements, comme dans le composant que nous avons essay´e.

Dans ce dernier cas, la grille d’extraction n’est pas int´egr´ee au composant, contrairement au dispo- sitif du LETI. On utilise une grille maintenue `a 100 µm des tubes et qui, pour des raisons de rigidit´e m´ecanique, poss`ede une ´epaisseur de 100 µm et une transparence assez faible, de l’ordre de 10 %, en raison des mailles carr´es de 20µm au pas de 25 µm qui la constituent. La distance de 100 µm par rapport aux tubes n´ecessite alors d’appliquer une diff´erence de potentiel d’environ 1000V pour initier l’´emission. Dans le cas des composants du LETI cette tension seuil est environ 10 fois plus faible, pour une distance de s´eparation grille-tube inf´erieure d’un facteur 10 ´egalement.

Dans les structures propos´ees par les deux laboratoires les tubes sont du type multifeuillets, et leur diam`etre est de l’ordre de 50nm.

3.2.2 Principe physique et fonctionnement des cathodes `a nanotubes

Comme les micropointes, les nanotubes ´emettent les ´electrons par effet de champ (Jonge et al., 2004; Filip et al., 2001; Gr¨oning et al., 2000). Les mod`eles th´eoriques de l’´emission s’inspirent largement de la th´eorie de Fowler-Nordheim et aboutissent `a des caract´eristiques courant-tension pour un monotube proche d’une loi du type Fowler-Nordheim (Jonge et al., 2004), en faisant l’hypoth`ese d’une distribution des ´electrons semblable `a celle d’un m´etal. Filip et al. (2001) ont montr´e que ce mod`ele est d’autant plus pertinent que le rayon du tube multifeuillets augmente. D’apr`es ces auteurs l’´emission se produit majoritairement dans le feuillet le plus externe. Le calcul de la densit´e d’´electrons subissant l’effet tunnel n´ecessite la connaissance de la forme de la barri`ere de potentiel `a l’interface avec le vide. Dans la mesure o`u la g´eom´etrie de l’extr´emit´e des tubes est incertaine (ferm´ee ou ouverte), l’approche standard consiste `a faire l’hypoth`ese d’une barri`ere triangulaire comme dans le cas d’une interface m´etal-vide. Bien qu’adapt´ee `a une surface m´etallique plane, cette approche est justifi´ee par le fait que vue par les ´electrons, la surface d’´emission peut en g´en´eral ˆetre consid´er´ee comme plane, sauf dans le cas de courbures extrˆemes.