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Chapitre I : Introduction bibliographique

Partie 1. Réduction de l’oxyde nitreux (N 2 O)

7. Catalyses d’oxydations de substrats organiques

Le but de cette partie est d’aborder quelques exemples de catalyses permettant de réaliser

des réactions d’oxydation convoitées en synthèse organique. La recherche de méthodes faciles et

efficaces pour produire des molécules à haute valeur ajoutée présente un intérêt économique

majeur. C’est pourquoi l’optimisation des procédés actuels en les rendant moins couteux et moins

risqués tout en utilisant des réactifs doux, abondants et des catalyseurs est en cours. Dans le cas où

N

2

O est l’oxydant, il est possible de transférer son atome d’oxygène via des réactions souvent

radicalaires en utilisant des métaux de transition. En effet après la coupure de la liaison N-O lors

de la réduction de N

2

O, l’atome d’oxygène sera coordiné aux centres métalliques pour former un

intermédiaire à fort potentiel oxydant, capable parfois d’arracher un atome d’hydrogène, et d’autres

fois de transférer directement l’atome d’oxygène. Dans ce cadre, les propriétés des centres

métalliques et des intermédiaires réactionnels sont influencées par leurs environnements. La

compréhension de ces mécanismes contribue à l’optimisation des systèmes existants. De la même

façon que précédemment, cette thématique peut être détaillée en séparant la réactivité en milieu

hétérogène de celle en milieu homogène.

Réactivité en milieu hétérogène

La chimie en milieu hétérogène a permis cette fois de réaliser deux des réactions parmi les

plus difficiles en chimie organique, à savoir l’oxydation d’alcanes et de composés aromatiques. La

réaction de référence est certainement l’oxydation du benzène en phénol en utilisant les zéolites.

80

31

Il est aussi possible de citer l’oxydation du méthane en méthanol avec comme catalyseur un zéolite

de Fe (Fe-ZSM-5).

81

Parmi les sites contenant du fer, il est proposé que certains soient des ions Fe

isolés et que d’autres soient des centres dinucléaires de Fe notés (Fe

II

)α. La spectroscopie

Mössbauer suggère que ces composés semblent avoir des propriétés très proches du site actif de la

Méthane MonoOxygénase soluble (s-MMO), métalloenzyme comportant elle aussi un site

dinucléaire de fer capable d’oxyder le méthane. Les tests de catalyses sont réalisés en flux continu

avec un mélange de gaz comportant 78 % de He, 20 % de CH

4

et 2 % de N

2

O. Il a alors été

démontré que la réaction d’oxydation de CH

4

par N

2

O catalysée par Fe-ZSM-5 est quasi catalytique

en dessous de 200°C et catalytique au-dessus, avec les meilleurs résultats obtenus à 275°C. La

désactivation des surfaces a lieu à cause de la formation de charbons plus importantes en dessous

de 200°C. La sélectivité en faveur de la production du méthane (vs la formation de diméthyléther)

a été améliorée en ajoutant de l’eau en phase vapeur. Il est proposé que le mécanisme permettant

la formation du méthane utilise un intermédiaire Fe

III

-oxyl généré après réduction du N

2

O (Figure

10, A)).

Figure 10. A) Mécanisme simplifié pour l’oxydation catalytique du méthane en méthanol par Fe-ZSM-5, B)

mécanisme proposé pour l’oxydation de l’éthane en éthanol en utilisant la structure Fe(dobdc).

Un autre matériau permettant d’oxyder l’éthane de façon non catalytique a été développé

par l’équipe de J. R. Long (Figure 10, B)).

82

Ils s’agit de la structure de Fe

II

à haut spin Fe

2

(dobdc)

(dobdc

4-

= 2,5-dihydroxo-1,4-benzenedicarboxylate). Ce matériau fixe et réduit N

2

O en N

2

à 60 °C

(Figure 10, (1-N

2

O)) pour former l’intermédiaire Fe

IV

-oxo (4) proposé par TD-DFT. Ce dernier

serait capable d’arracher un atome d’hydrogène (voie radicalaire) et de transférer l’atome d’oxygène

sur l’éthane pour former de l’éthanol. (4) serait ensuite dégradé en un mélange d’espèces où soit de

l’éthanol resterait coordiné, soit une espèce Fe

III

-OH se formerait. Ces résultats montrent alors que

d’autres structures que celles de types zéolites réduisent N

2

O et peuvent valoriser le transfert de

l’atome d’oxygène sur des substrats généralement inertes.

N

2

O

N

2

CH

4

CH

3

OH

(1-N

2

O) (4)

A) B)

H

3

C-CH

3

H

3

C-CH

2

-OH

dobdc

4-

=

32

Réactivité en milieu homogène

L’oxydation de substrats organiques a aussi été étudiée en milieu homogène en utilisant des

catalyseurs à base de fer, cuivre, cobalt, molybdène, et ruthénium principalement.

28

Le transfert de

l’atome d’oxygène a alors été observé sur des phosphines,

83–86

alcènes,

83,87

aldéhydes,

88

nitriles

89

ou

encore monoxyde de carbone.

90

Des formations de liaisons C-C ont aussi pu être observées avec

des magnésiens

91

et alcènes.

92

Quelques exemples de catalyse sur diverses fonctions organiques

sélectionnées pour leurs efficacités sont résumés Tableau 6. Parmi les oxydations de phosphines,

un exemple récent utilise un complexe de cobalt zéro valent (Tableau 6, (A)). Dans ce cas, il a été

possible d’oxyder sélectivement des phosphines secondaires (très réactives et inflammables),

tertiaires et des diphosphines, en présence d’alcènes. Ces réactions sont menées à des températures

allant de 25 à 70 °C dans le THF, en utilisant 2 bars de N

2

O et 5 % mol de catalyseur. La cinétique

est cependant assez lente (17 TON en 16 h) car le complexe se dégrade s’il est mis en présence de

N

2

O uniquement. L’étude de la réactivité avec des piégeurs de radicaux a écarté la formation de

telles espèces lors de la réactivité. Comme c’est le cas dans la plupart des catalyses de réduction de

N

2

O, il est proposé que l’étape limitante soit sa coordination.

Entrée Réaction Catalyseur TON Réf.

(A) 13-17

85

(B) 30

88

(C) 1380

92

(D) 20

87

Tableau 6. Exemples de réactions d’oxydation de substrats organiques par N

2

O catalysées par des complexes

de coordination.

Une autre possibilité de réactivité est l’oxydation d’aldéhydes en acides (Tableau 6, (B)).

Cette réaction, catalysée par un complexe de Co

II

est possible dans des conditions très douces (1

bar N

2

O, TA) et 30 TON sont obtenus en 24 h. Deux produits sont formés lors de la catalyse :

33

l’alcène (environ 5 TON) et l’acide (environ 25 TON). Le troisième exemple (Tableau 6, (C))

présente quant à lui une forte activité avec un TON élevé. Il s’agit d’une réduction d’alcène couplée

à la formation d’une liaison C-C catalysée par une porphyrine de Fe. Ici jusqu’à 1380 TON sont

obtenus en 14 h à TA avec 1 bar en N

2

O. L’addition de bases telle que OH

-

ou MeO

-

a permis

d’améliorer grandement la réactivité. Une dernière possibilité est l’oxydation de benzoate de

cholestérol par le complexe dioxo(tétramésitylporphyrinato)ruthénium(VI) (Tableau 6, (D)).

L’oxydation de l’alcène en face α est réalisée proprement avec une sélectivité supérieure à 99 %. Il

aura cependant été nécessaire d’utiliser des conditions bien plus dures que dans les exemples

précédents (10 bars en N

2

O, 140°C) pour atteindre 20 TON.

En conclusion de cet état de l’art, il apparait que N

2

O puisse être un réactif de choix pour

réaliser des oxydations sélectives de divers substrats organiques en utilisant des métaux de

transition. Le principal point faible pour le développement de tels systèmes à plus grande échelle

provient de la lenteur de la réaction et de la stabilité des espèces. C’est pourquoi la recherche de

catalyseurs plus efficaces et stables est toujours en cours. Il reste cependant plusieurs challenges

pour la réactivité de cette petite molécule. En effet, la réduction catalytique directe en N

2

avec

réducteur sacrificiel connait seulement les deux exemples énoncés plus tôt. Il pourrait alors être

intéressant de développer cet axe en utilisant d’autres réducteurs sacrificiels ou sources d’électrons

comme par exemple en ayant recours à l’électrocatalyse.

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