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Dans un premier temps, nous avons considéré un comportement purement élastique, en tenant compte de l’inhomogénéité des constantes élastiques. Le calcul a convergé en 10 itérations pour atteindre un résidu sur l’équilibre mécanique de ζ = 1,2×10-7, et des contraintes moyennes inférieures à 10-3 MPa. De très légères oscillations des contraintes proches des interfaces ont été détectées (par ex. Figure IV.10a), engendrées par les très faibles marches résiduelles sur l’interface (Figure IV.10d).

Conformément à la solution d’Eshelby, les contraintes et déformations sont uniformes dans la plaquette, avec des contraintes principales de l’ordre de 1,5 GPa. Nous avons tracé sur la Figure IV.10 la répartition spatiale de la densité d’énergie élastique (§ Tableau II.7). De manière globale, la martensite concentre l’essentiel de l’énergie élastique, avec une valeur d’environ 5×107 J/m3, du même ordre de grandeur que la densité prédite par le modèle d’Eshelby (Figure IV.9a). D’autre part, la répartition dans la matrice est hétérogène et anisotrope : la plus forte densité d’énergie élastique est localisée aux bords de la plaquette dans l’interface diffuse (maxima à ∼ 1,5×108 J/m3), alors qu’elle décroît à ∼ 2×107 J/m3 sur les faces. Ces résultats sont en accord avec les sections précédentes puisqu’ils caractérisent une accommodation des déformations libres par les faces de la plaquette, correspondant ainsi à des plans d’accolement acceptables.

À partir des champs de contraintes, nous avons calculé l’énergie d’interaction entre la plaquette de variant 1 et des germes des 23 autres variants (Annexe III) susceptibles d’apparaître en chaque point du système.

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(d)

Figure IV.10: Densité d’énergie élastique (J/m3) générée par une plaquette de martensite αααα’ orientée suivant (3,9

1 0)δδδδ dans les plans (a) (100)δδδδ (b) (010)δδδδ et (c) (001)δδδδ passant par le milieu de la plaquette (d). Les lignes de niveaux à ϕϕϕϕ = 0,05 et ϕϕϕϕ = 0,95 sont représentées en (a)-(c) pour délimiter l’interface diffuse. En (d) la ligne de niveau ϕϕϕϕ = 0,5 représente le précipité.

Sur la Figure IV.11, nous avons reporté cette énergie d’interaction entre la plaquette et un germe du même variant (1). Les zones d’interaction favorable correspondant aux valeurs négatives de Eint sont distribuées en couronne le long des bords de la plaquette (Figure IV.11a). Au contraire, les faces sont défavorables à l’apparition du même variant, comme en témoignent les zones où Eint > 0, apparaissant en blanc sur les coupes (100)δ, (010)δ et (001)δ passant par le milieu de la plaquette Figure IV.11c-e. Cette zone d’exclusion s’étend perpendiculairement aux faces.

Il faut souligner que les valeurs atteintes sur les bords sont de l’ordre de -5×108 J/m3, plus fortes d’un ordre de grandeur que les densités d’énergie élastique locales dans la matrice, indiquant que la force motrice d’origine élastique est localement très forte et promouvrait l’agrandissement de la plaquette dans le plan d’accolement, par germination sympathique ou par croissance. Rappelons que la forme imposée à la plaquette provenait de la minimisation de l’énergie dite totale au §IV.2.2 (en absence néanmoins de toute force motrice chimique) où le coût de l’énergie d’interface limitait l’extension de la plaquette.

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(c) (d) (e)

Figure IV.11 : Densité d’énergie d’interaction (J/m3) entre la plaquette de variant 1 et des germes de même variant, dont les deux orientations possibles sont représentées par les carrés orange et bleu (équivalent à la plaquette préexistante). En (a) les iso-surfaces rouges du plus foncé au plus clair correspondent à -2××××108, -108 et -5×××10× 7 J/m3 respectivement. Coupes dans les plans (c) (100)δδδδ (d) (010)δδδδ et (e) (001)δδδδ passant par le milieu de la plaquette (b).

En présence d’une force motrice chimique non nulle, il est probable que des calculs dynamiques (par la méthode des champs de phase par exemple) prédiraient la croissance continue d’une plaquette, même en présence d’énergie d’interface. On obtient des résultats similaires pour les variants dont les plans d’accolement présentent des désorientations faibles avec le plan de la plaquette (≤ 32°) (variants surlignés en bleu dans le Tableau AIII.a de l’Annexe III et encadrés sur les Figures AIV.a-b-c-d de l’Annexe IV). On peut rapprocher ces résultats de certaines micrographies (Figure III.12) qui suggèreraient un allongement des plaquettes primaires par apparition de nouvelles entités aux extrémités.

Pour les variants présentant de plus fortes désorientations, les énergies d’interaction sont différentes. En premier lieu, les niveaux sont plus faibles d’un facteur 2 par rapport au premier groupe de variants : les maxima sont de l’ordre de -2×108 J/m3. Ces valeurs restent cependant toujours plus grandes d’un ordre de grandeur que les densités d’énergie élastiques locales. En second lieu, leurs distributions spatiales sont plus complexes, comme le montre la Figure IV.12. En effet, si les bords sont toujours des endroits propices à l’apparition de germes, les maxima ne sont plus distribués de manière homogène sur tout la circonférence, mais restent localisés autour d’une direction qui est propre à chaque variant du groupe (Annexe IV).

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(c) (d) (e)

Figure IV.12 : Densité d’énergies d’interaction (J/m3) entre la plaquette de variant 1 et des germes de variant 14 (voir Annexe III), dont les deux orientations possibles sont représentées par les carrés bleu et orange. En (a) les iso-surfaces rouges du plus foncé au plus clair correspondent à -2××××108, -108, -2,5××××107 et -1,5××××107 J/m3 respectivement. Coupes dans les plans (c) (100)δδδδ (d) (010)δδδδ et (e) (001)δδδδ passant par le milieu de la plaquette (b).

Par ailleurs, les zones d’exclusion ne sont plus orientées perpendiculairement mais suivent un axe qui dépend de la nature du variant (Figure IV.12e). Nous avons également reporté sur la

Figure IV.13, les maxima des énergies d’interaction pour les différents variants en fonction de l’angle θ que font leurs plans d’accolement théoriques (§IV.1.2) avec le plan de la plaquette. Les deux groupes de variants repérés par leurs distributions spatiales d’énergie d’interaction se distinguent nettement. En reliant les fréquences de germination aux énergies d’interaction, ces calculs suggèrent que les variants dont les plans d’accolement sont proches de celui de la plaquette auraient la plus grande probabilité d’apparaître dans son prolongement.

Si ces calculs semblent montrer que la nucléation auto-catalytique est possible grâce aux interactions élastiques, on peut néanmoins s’interroger sur leur validité dans la mesure où les niveaux de contraintes atteints (de l’ordre du GPa) sont supérieurs aux limites d’élasticité macroscopiques, assez basses, mesurées dans ces alliages [GOL 75][HEC 00B].

Figure IV.13: Énergie d’interaction entre la plaquette de variant 1 et des germes de 24 variants cristallographiques de la phase αααα’ en fonction de la

désorientation entre leurs plans d’accolement respectifs (Annexe IV).

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Cas visco-plastique