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CHAPITRE 3- La gestion de l’immigration : politiques, pratiques et stratégies

3.1 Loi sur l’Immigration et la protection des réfugiés

3.1.3 Carte de résident permanent

Par ailleurs, une autre mesure (de contrôle et d’identification) a été instaurée avec la loi et s’applique exclusivement aux résidents permanents. Il s’agit de la carte de résident permanent, communément appelée « Carte feuille d’érable ». Cette carte a une durée de validité de cinq ans et est émise à tous les résidents permanents, moyennant des frais de 50 $ – qui sont directement ajoutés aux frais de traitement qui sont de 550 $ pour un travailleur qualifié149. Cette carte est une attestation de statut qui constitue une preuve de la résidence permanente et qui vient remplacer l’ancien Formulaire IMM 1000 – un document qui attestait du statut de résident permanent après avoir été validé à un point d’entrée et qui était « valide à vie » ou jusqu’à ce que la personne devienne un citoyen canadien. La carte de résident permanent sert de document de voyage – en plus du passeport délivré par le pays d’origine – à tous les résidents permanents qui ont quitté le Canada et qui veulent entrer à nouveau, puisque les compagnies aériennes exigent de ces derniers qu’ils aient cette carte en leur possession au moment de l’embarquement.

En outre, la carte de résident permanent utilise une technologie très sophistiquée. Elle est faite de plusieurs couches de polycarbonates, un composite plastique à la fois léger et

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Aujourd’hui, les frais d’examen de la demande sont de 550 $. À cela, l’on doit ajouter des frais relatifs au droit d’établissement qui sont de 490 $. Il est à noter que, le 2 mai 2006, Citoyenneté et Immigration Canada (CIC) a diminué de moitié ces frais d’établissement qui étaient alors de 975 $. À ce sujet, consulter la Fiche de renseignements no 18, « Frais. Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés », préparée par Citoyenneté et Immigration Canada (2002i). Enfin, soulignons qu’au bout de cinq ans, le résident permanent devra renouveler sa carte moyennant des frais de 50 $.

durable utilisé principalement dans le domaine commercial (Browne 2005:424). Cette carte contient une photographie gravée au laser et des renseignements nominatifs tels que la date de naissance du détenteur, la nationalité, le numéro d’identification du client fourni par Citoyenneté et Immigration Canada, le genre (ou sexe), la couleur des yeux et d’autres données non sécurisées lisibles à l’œil nu (Browne 2005:424). De même, d’autres informations personnelles sont encryptées dans une bande magnétique et peuvent être consultées seulement par des fonctionnaires autorisés (Browne 2005:424). En effet, la carte de résident permanent contient plus d’un méga-octet de données numériques stockées dans une bande magnétique de 16 millimètres – ce qui correspond à environ 500 pages (Browne 2005:424). Tous les éléments du dossier informatique du détenteur sont ainsi encodés dans cette bande magnétique, notamment les informations contenues dans la Fiche IMM 1000 ou la confirmation de résidence (Browne 2005:424). Il est à noter que Citoyenneté et Immigration Canada envisage, éventuellement, d’encoder dans cette carte certaines données biométriques, notamment les empreintes digitales (Browne 2005:424)150. Par ailleurs, sur cette bande magnétique est apposé un hologramme représentant le visage du détenteur de la carte et la phrase « Propriété du gouvernement du Canada » – un dispositif de sécurité que l’on dit « anti-contrefaçon » (Browne 2005:424).

Ainsi, en partant des analyses de Simone Browne (2005), tout en dégageant de nouvelles pistes, il est possible d’affirmer que la carte de résident permanent institue un clivage entre les individus formant la nation canadienne, confirmant, d’une manière à la fois symbolique et effective, que les résidents permanents sont considérés comme des

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Citoyenneté et Immigration Canada, en collaboration avec l’Agence des services frontaliers du Canada, a procédé à la mise à l’essai de la biométrie sur le terrain en 2006 et 2007. Dans ce cadre, des données (empreintes digitales et photographies) ont été amassées dans certains bureaux des visas (Seattle et Hong Kong), à l’aéroport de Vancouver et à deux points d’entrée (Douglas et Pacific Highway). Consulter, à ce sujet, le rapport d’évaluation de Citoyenneté et Immigration Canada, « Projet de planification de la biométrie. Mise à l’essai de la biométrie sur le terrain » (2007).

« autres parmi nous ». En effet, la carte de résident permanent témoigne à la fois de leur inclusion – puisqu’il s’agit d’un document émis par le gouvernement canadien attestant de leur statut au sein de la nation –, mais aussi de leur exclusion – car cette carte, comme il a été souligné, est conditionnelle et qu’elle ne remplit pas la même fonction d’appartenance, à la fois juridique et symbolique, que le passeport puisqu’elle n’est pas un document de voyage et que c’est le passeport délivré par le pays d’origine du résident permanent qui est utilisé à cet effet. En ce sens, la carte est bel et bien un instrument de gestion de l’inclusion/exclusion comme l’affirme Browne (2005:425), elle est un mécanisme permettant de rendre compte de la manière dont des catégories d’individus sont produites.

On peut ainsi penser que la carte de résident permanent joue également un rôle dans la fabrication de « l’immigrant parfait ». Elle oblige, en effet, le résident permanent à se produire lui-même comme un « immigrant parfait » à travers la production du formulaire de renouvellement ou de remplacement de la carte. Je soutiens que ce dernier doit non seulement attester, à travers ce formulaire, qu’il a rempli son obligation de résidence, mais qu’il est également un travailleur assidu et stable, qu’il dispose d’un domicile fixe, que ses allées et venues hors du Canada sont toutes justifiées et qu’un garant151 – actif sur le marché du travail et non retraité – peut venir attester de la « qualité » du résident permanent. Ainsi, la carte de résident permanent n’a pas pour seule fonction de réguler la mobilité, les déplacements et l’accès au Canada à travers un contrôle « policier », elle sert également, comme le soutien Browne (2005:428), à créer des identités; faisant en sorte que l’individu se voit alors contraint de vivre en fonction de (ou en conformité avec) l’identité inscrite dans cette carte (Browne 2005:429). En somme, la carte de

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Il est à noter que cette obligation de disposer d’un garant pour présenter une demande de carte de résident permanent sera révoquée par décret (C.P. 2008-1010) le 5 juin 2008.

résident permanent est à la fois une technologie politique qui produit le sujet (et l’objet) du contrôle migratoire et un moyen d’assurer ce contrôle152.

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