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Chapitre I Introduction

I.3 Cardiomyopathie et canalopathie

I.3.1 Description et classification

Depuis 1956, la définition de ce que sont les cardiomyopathies ainsi que leur catégorisation n’a cessé de se préciser (Arbustini E, 2013), d’une part, en raison de l’amélioration des techniques non invasives de visualisation du cœur et, d’autre part, en raison d’une compréhension plus approfondie de leur étiologie. Ainsi, en 2006, l’« American Heart Association » (AHA) proposa une nouvelle catégorisation des types de cardiomyopathie et définit les cardiomyopathies comme « un groupe hétérogène de maladies du myocarde associées à un dysfonctionnement mécanique et/ou électrique, qui, habituellement, se caractérisent par une hypertrophie ventriculaire inappropriée ou une dilatation, et d’origine étiologique variée, mais fréquemment génétique. Les cardiomyopathies sont

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soit confinées au cœur ou font partie de désordres systémiques généralisés, souvent menant à l’arrêt cardiaque ou à des troubles liés à l’insuffisance cardiaque progressive.» (Maron BJ, 2006) Contrairement aux définitions précédentes, la base génétique est clairement mentionnée dans la définition de ce que sont les cardiomyopathies.

D’après la définition de l’AHA, les cardiomyopathies peuvent être classées suivant deux catégories, à savoir les cardiomyopathies « primaires » ou « secondaires ». Contrairement aux cardiomyopathies secondaires, les cardiomyopathies primaires ne surviennent pas de manière concomitante à un trouble systémique généralisé, c’est-à-dire affectant plusieurs organes. Les cardiomyopathies primaires peuvent être sous-divisées suivant leur cause, à savoir génétique, mixte (génétique et non-génétique), ou encore acquise. La plupart des cardiomyopathies sont des pathologies monogéniques pour lesquelles la transmission familiale est importante. Il existe cependant une très grande variabilité dans l’expression clinique des cardiomyopathies mono géniques en raison des différences dans le style de vie et l’environnement dans lequel évoluent les familles présentant la même mutation ainsi que la variation génomique qu’elles présentent.

En 2008, la Société européenne de cardiologie (ESC) proposa une définition quelque peu similaire à la définition de l’AHA, mais plus orientée sur l’aspect morphologique du cœur et nuançant de manière plus importante la distinction entre cardiomyopathie primaire et secondaire. Chacun des types de cardiomyopathie (hypertrophique, dilatée, etc.) est sous-divisé selon qu’il soit d’origine génétique ou non.

I.3.2 Cardiomyopathie dilatée

D’après la définition de l’AHA, la cardiomyopathie dilatée (DCM) est une cardiomyopathie primaire ayant une origine mixte dont la prévalence est de l’ordre de 1 : 250 (Burke MA, 2016). Il s’agit de la troisième cause la plus importante de défaillance cardiaque et la première cause de transplantation cardiaque.

I.3.2.1 Origine

La majorité des cas ont une origine génétique avec 20 à 35% d’ordre familial à transmission autosomique dominant. Cependant, quelques cas récessifs sont reliés à la transmission du chromosome X et à la transmission maternelle. Il existe également des cas sporadiques survenant après l’exposition à un ensemble de facteurs hétérogènes. Il peut s’agir d’exposition à des agents toxiques, à des virus ou des bactéries. La prise de stupéfiants et d’alcool ou encore des désordres métaboliques et nutritionnels peuvent aussi être à l’origine de cas de DCM. La plupart des cas

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sporadiques surviennent en raison d'une infection virale qui, souvent, cause une myocardite (inflammation du myocarde). La pénétrance de la maladie peut être très variable, soit en raison de l’âge ou du bagage génétique de l’individu. Il a déjà été montré que la pénétrance pouvait se révéler incomplète dans des cas de DCM familiale monogénique. En raison de la variabilité dans les manifestations cliniques et dans le développement de la pathologie, il est difficile de pouvoir établir une liste de l’ensemble des gènes pouvant potentiellement être impliqués dans le développement de la DCM. À ce jour, environ 60 gènes auraient un rôle dans le développement de la DCM (Arbustini E, 2013).

Dans le cas des DCM ayant une origine génétique, les gènes mutés codent pour diverses protéines aux fonctions variées (Hershberger RE, 2010). Il peut s’agir de protéines intervenant dans la formation du cytosquelette (telles que les lamines A et C), des protéines ayant un rôle dans la fonction contractile (telle que la myosine) et la transmission de la contraction. Certaines d’entre elles sont aussi impliquées dans le maintien de l’architecture nucléaire (Prélamine-A/C) ou ont une fonction mitochondriale. La plupart des cas génétiques (15 à 20%) sont cependant dus à la présence de mutations sur le gène TTN codant pour la titine avec une pénétrance complète autour de l’âge de 40 ans.

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Figure 9 Gènes impliqués dans le développement de la DCM et l’emplacement des protéines qu’ils codent. Les mutations sur le gène codant la protéine titine (TTN) sont responsables de la

majorité des cas de DCM. Figure reprise de (Burke MA, 2016).

I.3.2.2 Pathophysiologie

La cardiomyopathie dilatée est diagnostiquée au moyen d’une échocardiographie qui permet de révéler une dilation du ventricule gauche accompagnée de dysfonctionnements systoliques, à savoir une diminution de la fraction d’éjection4

et de raccourcissement5 ainsi qu’une diminution de la force de contraction du ventricule gauche. L’épaisseur des parois ventriculaires gauches demeure cependant normale. La modification structurelle du myocarde engendre aussi des arythmies et celles-ci peuvent être à l’origine de troubles du système de conduction.

I.3.3 Les canalopathies associées à la cardiomyopathie

Suivant la définition des cardiomyopathies énoncées par l’«American Heart Association » en 2006, les canalopathies sont un sous-type de cardiomyopathie primaire. Cependant, elles n’ont pas été retenues comme cause possible de cardiomyopathie dans la définition de 2008 de l’ESC, étant

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Pourcentage du volume sanguin éjecté du ventricule gauche à chaque battement cardiaque.

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donné que les mutations présentes sur les canaux ioniques ne semblaient pas être à l’origine de modifications structurelles du myocarde. Cependant, des cas de canalopathies liées à d’autres pathologies aussi bien cardiaques que non cardiaques ont été rapportés (Roston TM C. T., 2017). Des mutations sur des canaux ioniques ne sont pas seulement à l’origine de troubles de la rythmicité, mais peuvent être impliquées dans des phénotypes plus complexes manifestant une modification structurelle du myocarde, comme notamment la cardiomyopathie (Tableau 2).

Tableau 2 Gènes de canaux ioniques impliqués dans des canalopathies et associés au développement de cardiomyopathies. Les gènes sont SCN5A (code pour le canal sodique

Nav1.5), KCNQ1 (code pour le canal potassique voltage-dépendant, sous-famille Q membre 1), RYR2 (code pour le récepteur cardiaque de la ryanodine) et HCN4 (code pour le canal ionique activé par l’hyperpolarisation, contribuant au courant If). LVNC : non-compaction ventriculaire

gauche, ARVC : cardiomyopathie arythmogène du ventricule droit, DCM : cardiomyopathie dilatée. Tableau adapté de (Roston TM C. T., 2017).

SCN5A KCNQ1 RYR2 HCN4 LVNC (Nakashima K, 2013) (Ohno S, 2014) Milano et al. (2014) (Campbell MJ, 2015) (Roston TM G. W., 2017) ARVC (Tiso N, 2001) Roux-Buisson et al. (2014) DCM (McNair WP K. L., 2004), (McNair WP S. G., 2011) (Xiong Q, 2015) Nair et al. (2012) (Gosselin- Badaroudine P, 2012) (Cheng J, 2010)

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