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Repr´esentations lin´eaires des groupes finis

8.2 Les caract`eres d’un groupe fini G

Pour ´etudier les repr´esentations irr´eductibles d’un groupe fini, et plus g´en´era-lement la d´ecomposition d’une repr´esentation donn´ee, on se ram`ene en fait `a des fonctions `a valeurs dansC: les caract`eres.

D´efinition 19 Le caract`ereχ, ouχρd’une repr´esentationρ:G→GL(V)est la fonction

χ:G−→C

g 7−→χ(g) := trace(ρ(g))

Exemple: Le caract`ere d’une repr´esentation de degr´e1est elle-mˆeme. Attention, en g´en´eral, le caract`ere d’une repr´esentation de degr´e plus grand que1n’est pas une application multiplicative, car en g´en´eraltrace(AB)6= trace(A) trace(B)!

Le caract`ere de la repr´esentation r´eguli`ere, not´eerG, est donn´e par:

χrG(g) =

(|G|sig = 1 0sinon

En effet, la multiplication parg 6= 1est une permutation sans point fixe deG.

Proposition 13 Les propri´et´es suivantes sont vraies pour tout caract`ereχdeG:

1. χ(1) = deg(ρ).

2. χ(g−1) =χ(g)pour toutg ∈G.

3. χ(hgh−1) = χ(g)pour tout g, h ∈ G(on dit que χ est une fonction cen-trale).

4. χρ⊕ρ0ρρ0.

5. Deux repr´esentations ´equivalentes ont mˆeme caract`ere.

Preuve:

1. χ(1) = trace(IdV) = dim(V).

2. Il existe une forme hermitienne surV invariante parG; dans une base or-thonorm´ee les matrices donnant l’action deGsont unitaires donc v´erifient M−1 =Mt. Donctrace(M−1) = trace(M).

3. R´esulte de la propri´et´etrace(AB) = trace(BA).

4. Dans une base adapt´ee, les matrices donnant l’action deGsurV ⊕V0 sont

“par blocs”

∗ 0 0 ∗

et la trace est la somme des traces des blocs.

5. C’est la mˆeme chose que 3.

On va voir que la propri´et´e 5. a une r´eciproque: deux repr´esentations qui ont mˆeme caract`ere sont isomorphes. C’est l’un des r´esultats les plus importants de ce chapitre.

Comme dans les chapitres pr´ec´edents, on munit l’espaceC[G]des fonctions f :G→Cd’un produit hermitien< f1, f2 >d´efini par:

< f1, f2 >= 1

|G|

X

g∈G

f1(g)f2(g).

Dans le cas des groupes commutatifs, les caract`eres (multiplicatifs) deG for-maient une base orthonorm´ee de cet espace hermitien. Nous allons voir que, dans le cas g´en´eral, les caract`eres des repr´esentations irr´eductibles de G forment une base orthonorm´ee du sous-espace des fonctions centrales.

D´efinition 20 On dit que f : G → Cest une fonction centrale, si f(hgh−1) = f(g)pour tout g, h ∈ G. En d’autre termes, f est constante sur les classes de conjugaison deG.

Th´eor`eme 15 (Relations d’orthogonalit´e des caract`eres irr´eductibles) Soitχ et χ0 les caract`eres associ´es `a deux repr´esentationsρ, ρ0 irr´eductibles deG. On a:

< χ, χ0 >= 1

Preuve: SoitV etV0 les espaces des repr´esentationsρetρ0. Nous allons utiliser le Lemme de Schur, et pour cela interpr´eter < χ, χ0 >comme la dimension de l’espaceHomG(V, V0).

L’espace Hom(V, V0) est aussi une repr´esentation de G. En effet, si φ ∈ Hom(V, V0), on d´efinitg.φpar:(g.φ)(v) = g.φ(g−1.v)(qui signifie plus pr´ecis´ement ρ0(g)(φ(ρ(g−1)(v)))). Notons ψson caract`ere. Remarquons queg.φ =φsignifie queφ∈HomG(V, V0).

Etant donn´ee une repr´esentation´ W quelconque deG, on voit facilement que le sous-espaceWG:={x∈W |g.x=xpour toutg ∈G}v´erifie

WG =P(W), o`uP est l’endomorphismeP = |G|1 P

g∈Ggop´erant sur W. Celui-ci est une pro-jection carP2 = P. Comme toutes les projections,trace(P) = dim(Im(P)) = dim(WG).

Revenons `a la repr´esentation de G d´efinie sur Hom(V, V0). D’apr`es ce qui pr´ec`ede,

La trace de cette matrice, obtenue en sommant les termes diagonaux, i.e. ceux des coefficients associ´es `a(i, k) = (j, l), est:

ψ(g) = X Vi sont deux `a deux non isomorphes, alors

χ=X

i

niχi, ni =< χ, χi >, et < χ, χ >=X n2i.

2. La repr´esentation de caract`ereχest irr´eductible, si et seulement si< χ, χ >=

1. De plus, si deux repr´esentations ont le mˆeme caract`ere alors elles sont isomorphes.

3. Le caract`ererGde la repr´esentation r´eguli`ere se d´ecompose suivant:

rG=X

dim(χ)χ

o`u la somme porte sur l’ensemble des caract`eres des repr´esentations irr´eductibles deG. En particulier, desni est non nul et vaut1. DoncV est irr´eductible.

Siχ=χ0, alors< χ, χi >=< χ0, χi >donc, d’apr`es ce qui pr´ec´ede,ni =n0i et les repr´esentations associ´ees sont ´equivalentes.

On applique ce qui pr´ec`ede `arG; mais

En comparant les dimensions, on obtient

|G|=X

dim(χ)2.

Remarque 4 La derni`ere formule, pour un groupe Gab´elien, exprime que Ga exactement|G|caract`eres multiplicatifs (|G|= 12+ 12 +· · ·+ 12).

Exemple: S3: on connait deux repr´esentations de degr´e1, la triviale et la signa-ture. On a aussi une repr´esentation, clairement irr´eductible, de degr´e 2, donn´ee par le groupe des isom´etries du triangle. Comme6 = 22 + 12 + 12, le groupeS3 n’a pas d’autres repr´esentations irr´eductibles.

A4: Le groupeA4 a un sous-groupe distingu´eK d’ordre4:

K = {1,(1,2)(3,4),(1,3)(2,4),(1,4)(2,3)}. Les trois repr´esentations de degr´e 1 de A4/K ' Z/3Z se rel`event en trois repr´esentations de degr´e 1 de A4. Le groupe des isom´etries positives du t´etra`edre r´egulier fournit une repr´esentation irr´eductible de degr´e3deA4. Comme12 = 32+ 12+ 12+ 12, on les a toutes.

S4: Ce groupe a un seul sous-groupe distingu´e K. Le quotient S4/K est isomorphe `aS3. On peut ainsi relever la repr´esentation de degr´e2deS3. Outre la repr´esentation triviale et la signature qui sont de degr´e1,S4a deux repr´esentations irr´eductibles de degr´e3, qui sont donn´ees par le groupe des isom´etries du t´etra`edre r´egulier (op´erant sur ses sommets) et le groupe des isom´etries positives du cube, op´erant sur les quatre diagonales.

On peut montrer que les caract`eres des repr´esentations irr´eductibles deG for-ment une base de l’espace des fonctions centrales. Celui-ci a une base naturelle, bijectivement associ´ee `a l’ensemble des classes de conjugaison deG. Un groupe G a donc autant de repr´esentations irr´eductibles que de classes de conjugaison, sans qu’il y ait une correspondance naturelle entre ces deux ensembles. Sauf pour le groupe sym´etrique..

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