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COLLABORATION REQUIS

1. MATERIEL ET METHODE

2.1. Caractéristiques des systèmes de surveillance One Health existants

Les 41 systèmes identifiés ont été caractérisés par rapport aux 38 variables. Les facteurs favorisant ou au contraire freinant la collaboration ont été identifiés. Au niveau de la gouvernance des systèmes de surveillance, la collaboration est facilitée par l’existence d’une règlementation encadrant la collaboration ou le fait que les secteurs soient supervisés par une même instance. Au contraire, une mauvaise allocation des ressources et les contraintes règlementaires en termes de considérations éthiques et de propriété des données représentent un frein à la collaboration. Au niveau de la réalisation des activités de surveillance, l’existence de mécanismes pour favoriser l’échange de données et de bonnes relations interpersonnelles entre acteurs favorisent la mise en œuvre de systèmes One Health, tandis que le manque de communication entre les acteurs et la mauvaise qualité ou le manque de standardisation des données la freinent. A tous les niveaux, un fort accent est mis sur la nécessité de développer l’organisation la plus appropriée pour s’assurer l’engagement des acteurs. Les résultats complets sont présentés dans l’article Bordier et al. 2018b, disponible en annexe.

2.2. Caractérisation de la collaboration pour la surveillance One Health

La caractérisation de la collaboration pour la surveillance One Health a été obtenue grâce à l’analyse des 41 systèmes existants dont les résultats ont ensuite été soumis à élicitation d’opinions d’experts.

Quatre-vingt-quatre experts ont accédé au questionnaire parmi lesquels neuf n’ont répondu qu’à la première section concernant leurs informations personnelles. Seules les réponses des 75 répondants ayant répondu à la première et la seconde sections ont donc été considérés pour la suite. Parmi ces 75 experts, 57 % d’entre eux travaillaient dans un établissement d’enseignement, de recherche ou un institut technique, 21 % au sein des autorités nationales, 17 % dans une organisation intergouvernementale, 9 % dans le secteur privé et 1 % dans une organisation non gouvernementale (ONG). Certains pouvaient travailler simultanément dans plusieurs institutions. Les répondants étaient principalement des vétérinaires (67 %) avec une expertise en épidémiologie (60 %), biologie, économie ou zootechnie. Six médecins ont également participé au questionnaire. La population de participants sans formation médicale (humaine ou animale) était constituée de biologistes ou scientifiques biomédicaux (6), épidémiologistes (14), économistes (2), juriste (1) et scientifique dans le domaine animal (1). En tout, 55 % des participants avaient plus de cinq ans d’expérience en surveillance et 55 % en lien avec le concept One Health. Plus spécifiquement, 41 % d’entre eux justifiaient de plus de cinq ans d’expérience dans le domaine de la surveillance One Health.

Le rapport complet des résultats de l’élicitation d’opinions d’experts est disponible en annexe 3.

2.2.1. Dimensions de collaboration dans les systèmes de surveillance One Health

La collaboration au sein d’un système de surveillance One Health peut tout d’abord être décrite en matière de dimensions de collaboration. Ainsi, nous avons défini quatre dimensions :

- Collaboration entre des institutions travaillant dans différents secteurs d’activité (santé

animale, santé humaine, santé des plantes, sécurité sanitaire des aliments, qualité sanitaire des eaux, etc.) ou opérant dans le même secteur d’activité mais avec des champs de compétences différents (par exemple deux institutions en charge de la sécurité sanitaire des aliments mais responsables de maillons différents de la chaine alimentaire).

- Collaboration entre les professions opérant dans les secteurs public ou privé (gestionnaire du risque, instituts techniques ou de recherche, laboratoires, opérateurs de la chaîne alimentaire, praticiens vétérinaires, médecins, etc.).

- Collaboration entre acteurs exerçant des disciplines différentes (médecine vétérinaire,

médecine humaine, épidémiologie, écologie, entomologie, économie, anthropologie, toxicologie, etc.)

- Collaboration entre les niveaux de prise de décision (société civile, autorité locale, autorité

centrale, autorité régionale et internationale).

En fonction du système de surveillance, la collaboration peut exister dans une ou plusieurs dimensions, plus ou moins chevauchantes, comme représentée dans la figure 2.

Figure 2. Différentes dimensions de collaboration dans un système de surveillance One Health. D’après la majorité des experts interrogés (93 %), toutes les dimensions sont potentiellement pertinentes dans un système de surveillance One Health et la mise en œuvre de collaborations dans ces dimensions dépendra du contexte et de l’objet de la surveillance ou de l’activité de surveillance

concernée. En revanche, certaines dimensions semblent plus importantes que d’autres du point de

vue des experts. Ainsi, la dimension de collaboration minimale dans un système One Health apparaît être la collaboration entre secteurs (pour 88 % des répondants), suivie de la collaboration entre disciplines (75 %), puis entre niveaux décisionnels (49 %). Pour 69 % des répondants, la collaboration entre secteurs et entre disciplines est nécessaire pour qu’un système de surveillance puisse être considéré One Health. Certains participants (13 %) considèrent au contraire que la collaboration entre secteurs est suffisante même si une seule discipline est mobilisée (par exemple entre épidémiologistes travaillant dans le secteur humain d’une part et animal d’autre part). En revanche, ils considèrent que

la collaboration entre plusieurs disciplines opérant au sein d’un même secteur n’est pas suffisante

pour satisfaire à la définition du concept One Health. Enfin, un expert a souligné le fait que toutes les dimensions proposées sont également pertinentes dans n’importe quel système de surveillance et ne sont pas spécifiques de la surveillance One Health.

2.2.2. Modalités de collaboration pour la réalisation des activités de surveillance dans les systèmes de surveillance One Health

Pour la réalisation des activités de surveillance (de l’élaboration des protocoles de surveillance à

la dissémination des résultats), la collaboration peut intervenir à une ou plusieurs étapes du processus de surveillance et avec une intensité variable.

Pour décrire les modalités de collaboration, nous avons fait le choix de nous référer uniquement à la collaboration entre secteurs pour des raisons de lisibilité et parce que cette dimension a été

identifiée comme la dimension essentielle dans un système de surveillance One Health par les experts. En revanche, ceci n’exclut pas que d’autres dimensions puissent être mobilisées dans les modalités que nous décrivons. De plus, les différentes modalités de collaboration possibles à chaque étape de la surveillance sont présentées dans un ordre d’intensité de collaboration grandissante mais qui n’est pas directement corrélée à une augmentation de la performance de la surveillance. Comme nous le discuterons après, il n’y a actuellement pas de preuve pour avancer que plus les efforts collaboratifs sont intenses plus le système est performant et efficace.

La nature des modalités de collaboration définies sur la base des systèmes One Heath existants et

soumise à opinion d’experts est décrite dans le questionnaire en annexe 2.

Parmi les experts ayant répondu au questionnaire, 45 % ont identifié des activités de surveillance qui n’étaient pas mentionnées et où cependant il était important de considérer la collaboration. Tout d’abord, il a été suggéré que les activités de prélèvements, d’analyse de laboratoire et de gestion des données soient clairement distinguées à l’étape du recueil des données. De plus, il a été proposé de considérer l’échange de données et l’échange de résultats comme deux modalités de collaboration distinctes. Enfin, la collaboration en termes de communication interne et externe des résultats apparaissait manquante si elle n’était pas spécifiquement incluse dans la dissémination des résultats. Un expert a souligné que la planification ne pouvait pas être considérée comme une étape indépendante où la collaboration pouvait avoir lieu car elle couvrait toutes les étapes de la surveillance. Selon nous, même si des collaborations en termes de coordination peuvent être mises

en œuvre tout le long du processus de surveillance, une modalité propre à la collaboration lors de

l’élaboration des protocoles de surveillance doit être conservée pour tenir compte de la collaboration

possible pour le choix des dangers sanitaires et des matrices spécifiques à surveiller, le type de données commémoratives à recueillir, etc. Pour éviter toute confusion, nous avons donc remplacé le terme « planification » par « élaboration des protocoles » pour souligner le fait que cette étape concernait la collaboration pour la conception des protocoles de surveillance et non pour la coordination (non couverte à ce stade de notre étude). Enfin, 27 % des participants ont proposé des modalités de collaboration relatives à l’allocation des ressources, la définition de la stratégie et de l’objectif de la surveillance, la coordination, la mise en œuvre des mesures de gestion, etc. Nous reconnaissons que la collaboration est également importante à prendre en considération dans ces domaines mais ces derniers relèvent de la gouvernance de la collaboration que nous ne traitons pas à ce stade de notre étude, dédié à la collaboration pour la réalisation des activités de surveillance.

De plus, 29 % des répondants ont été en mesure d’identifier des modalités de collaboration manquantes à certaines étapes du processus de surveillance. Plusieurs commentaires proposaient d’identifier si l’échange de données était ponctuel ou continu et si les données étaient échangées dans

leur totalité ou seulement partiellement. Un expert a proposé de distinguer, à l’étape de la

planification, si la consultation entre secteurs avait lieu en amont de la conception des protocoles dans chaque secteur ou a posteriori, une fois les protocoles définis, pour rechercher des synergies. Un certain nombre de commentaires soulignait que les modalités proposées n’étaient pas assez intégrées et ne répondaient pas à certains aspects du concept One Health. L’objectif de cette étude étant d’aboutir à une liste exhaustive des modalités de collaboration possibles dans un système de surveillance One Health tel que nous l’avons précédemment défini, nous n’avons pas pris en compte ces commentaires. De même, certains commentaires relatifs à la gouvernance de la collaboration n’ont pas été considérés ici pour les raisons explicitées dans le paragraphe précédent.

La nature des modalités de collaboration pour les activités de surveillance révisée sur la base des

Tableau 3. Modalités de collaboration possibles pour la réalisation des activités de surveillance dans un système One Health.

Etape du processus de réalisation de la surveillance

Modalités de collaboration possibles

Elaboration des protocoles de surveillance

Elaboration réalisée par un secteur pour tous les dispositifs sectoriels

Elaboration réalisée séparément dans chaque secteur puis consultation intersectorielle pour recherche de synergies

Consultation intersectorielle puis élaboration indépendante dans chaque secteur

Elaboration réalisée conjointement par les différents secteurs

Elaboration réalisée par une entité multisectorielle unique pour tous les dispositifs Recueil des données

(réalisation des prélèvements et des analyses)

Recueil réalisé par un secteur pour tous les dispositifs sectoriels

Harmonisation des pratiques entre les secteurs mais recueil réalisé indépendamment dans chaque secteur

Activités conjointes entre les secteurs pour le recueil des données

Recueil réalisé par une entité multisectorielle unique pour tous les dispositifs

Stockage et gestion des données

Stockage et gestion des données réalisés par un secteur pour tous les dispositifs sectoriels

Harmonisation des pratiques entre les secteurs mais stockage et gestion réalisés indépendamment dans chaque secteur

Activités conjointes entre les secteurs pour le stockage et la gestion des données

Stockage et gestion réalisés par une entité multisectorielle unique pour tous les dispositifs

Partage des données Echange* de données brutes (complètes ou partielles) dans le

cas d’évènements inhabituels

Echange* de données brutes (complètes ou partielles) de façon ponctuelle

Echange* des données brutes (complètes ou partielles) en continu

Analyse et interprétation des données

Analyse et interprétation réalisées indépendamment dans les différents secteurs (avec ou sans harmonisation des pratiques) puis comparaison par un seul secteur

Analyse et interprétation de toutes les données réalisées par un seul secteur

Analyse et interprétation réalisées indépendamment (avec ou sans harmonisation des pratiques) puis comparaison conjointe par les différents secteurs

Analyse et interprétation réalisées conjointement par tous les secteurs

Analyse et interprétation réalisées par une entité multisectorielle unique pour tous les dispositifs

Partage des résultats de surveillance

Echange* de résultats (complets ou partiels) dans le cas

d’évènement inhabituels

Echange* de résultats (complets ou partiels) de façon ponctuelle

Echange* de résultats (complets ou partiels) en continu Dissémination des résultats aux

décideurs

Dissémination de tous les résultats dans des activités sectorielles indépendantes

Dissémination de tous les résultats par chaque secteur de façon indépendante

Dissémination de tous les résultats conjointement par les différents secteurs

Dissémination de tous les résultats par une entité multisectorielle unique Communication interne et

externe des résultats

Communication de tous les résultats dans des activités sectorielles indépendantes

Communication de tous les résultats par chaque secteur de façon indépendante

Communication de tous les résultats conjointement par les différents secteurs

Communication de tous les résultats par une entité multisectorielle unique

2.2.3. Modèles d’organisation multisectorielle dans les systèmes de surveillance One Health

L’analyse de l’organisation des systèmes de surveillance existants en matière de coordination et

d’efforts collaboratifs déployés a permis de distinguer trois modèles possibles d’organisation multisectorielle pour la surveillance One Health, qui sont décrits ci-après :

- Modèle 1 :

Un premier secteur coordonne un ou plusieurs dispositifs de surveillance dans des domaines appartenant à sa juridiction. Les résultats de la surveillance sont transmis à un second secteur dans des délais compatibles à la mise en œuvre de mesures de gestion dans un ou des domaines appartenant à sa juridiction. Le second secteur peut influencer l’élaboration de la surveillance afin de s’assurer que les résultats produits soient cohérents avec ses attentes. A titre d’exemple, on peut mentionner la surveillance de l’efflorescence des algues marines surveillée par le ministère de l’Environnement dont les résultats vont être transmis au ministère de la Santé et au ministère de l’Agriculture pour que ces derniers puissent prendre les mesures appropriées de gestion du risque dans leurs juridictions, respectivement les lieux de baignade et les sites de production ou de pêche de coquillages (Malone and Culver, 2008). - Modèle 2 :

Un premier secteur coordonne un ou plusieurs dispositifs dans un ou des domaines sous la

juridiction d’un second secteur. Ce second secteur utilise les résultats de la surveillance pour

mettre en œuvre des mesures de gestion dans le(s) domaine(s) sous sa juridiction. Le second

secteur peut influencer l’élaboration de la surveillance afin de s’assurer que les résultats produits soient cohérents avec ses attentes. A titre d’exemple, on peut mentionner un système de surveillance coordonné par le ministère de la Santé qui collecte des données

d’antibiorésistance dans les fermes et les abattoirs. Le ministère de l’Agriculture utilise ces

données de surveillance pour établir et évaluer les mesures de gestion pour réduire l’utilisation des antibiotiques dans les productions animales (CIPARS, 2015).

- Modèle 3 :

Deux secteurs coordonnent des dispositifs de surveillance dans des domaines appartenant à leur juridiction respective. Les données ou résultats de la surveillance produits par un secteur sont utilisés par l’autre secteur pour mettre en place des mesures de gestion adaptées dans le ou les domaines appartenant à sa juridiction, et vice-versa. A titre d’exemple, on peut mentionner la surveillance de la rage, conduite par le ministère de la Santé dans la population

humaine d’une part et par le ministère de l’Agriculture dans la population canine d’autre part.

Chaque ministère coordonne le dispositif de surveillance dans sa juridiction et informe l’autre lors de détection de cas positifs pour qu’il puisse gérer le risque dans la population dont il a la charge (Lapiz et al., 2012).

Les résultats de l’élicitation d’opinions d’experts nous ont permis d’identifier un quatrième modèle, proche du second modèle décrit précédemment :

- Modèle 2bis :

Un premier secteur coordonne un ou plusieurs dispositifs dans un ou des domaines sous la

juridiction d’un second secteur. Ce premiersecteur a également la charge de mettre en œuvre

les mesures de gestion dans tous les domaines. Le second secteur procure les informations nécessaires au premier secteur pour l’élaboration des protocoles de surveillance. Par

exemple, le ministère de la Santé peut avoir la charge d’un programme pour la surveillance du virus West Nile chez l’homme, les animaux et l’environnement. Il reçoit l’aide du ministère en charge de l’Agriculture et celui du ministère de l’Environnement pour élaborer les protocoles de surveillance mais conduit les activités de surveillance et met en œuvre les mesures de gestion dans les trois domaines sans collaboration étroite avec les autres ministères. Ce type de modèle n’a pas été identifié par notre revue systématique de littérature.

Les quatre modèles sont schématisés dans la figure 3.

Figure 3. Modèles possibles d’organisation multisectorielle pour les systèmes de surveillance One Health.

Afin de répondre à la définition d’un système de surveillance One Health, ces quatre modèles ont en commun de démontrer des efforts collaboratifs entre au moins deux secteurs et de produire une valeur ajoutée en termes de maîtrise des risques par rapport à une situation où ces efforts collaboratifs seraient inexistants. Au sein de ces modèles peuvent ensuite se mettre en place différentes modalités de collaboration pour la gouvernance et la réalisation des activités de surveillance, d’intensité variée, telles que décrites dans le paragraphe 2.2.

Pour plus de lisibilité, nous avons pris le parti de décrire ces modèles en nous référant uniquement à la dimension collaborative entre secteurs et en nous restreignant à deux secteurs impliqués. En revanche, comme mentionné précédemment, ceci n’exclut pas l’existence d’autres

dimensions de collaboration (entre disciplines, professions et niveaux décisionnels) ou l’implication