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Caractérisation de la sécheresse : les indices qui permettent de l’appréhender

Chapitre 1 Changements climatiques et production agricole au Mali

3. Les manifestations du changement climatique au Mali

3.2. Caractérisation de la sécheresse : les indices qui permettent de l’appréhender

Pour caractériser la sécheresse on retrouve dans la littérature une multitude d’indices qui ont été développés. Un indice de sécheresse est une représentation numérique de l’intensité des sècheresses et il est calculé à partir d’un ensemble d’indicateurs.

Les indicateurs de sécheresse sont des variables qui décrivent les conditions de sècheresse (les précipitations, la température, l’écoulement fluvial, le niveau des nappes et des réservoirs, l’humidité du sol et le manteau neigeux). Le manuel fournie par l’OMM (2016) présente les indices de sécheresse et compare leurs avantages et inconvénients. Dans ce chapitre, nous

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présentons16 ici trois indices de sécheresse qui sont les plus utilisés dans les études en économie agricole. Il s’agit du Palmer Drought Severity Index (PDSI) développé par Palmer (1965), le Standardized Precipitation Index (SPI) développé par McKee et al. (1993) et le Stardandized Precipitation Evapotranspiration Index (SPEI) de Vicente-Serrano et al. (2010).

 Palmer Drought Severity Index (PDSI)

Développé par Wayne Palmer en 1965, l’indice de sévérité de la sécheresse de Palmer (PDSI) utilise des données de précipitations, de températures et de la teneur du sol en eau pour mesurer la sécheresse. Il est fondé sur un modèle de « l'offre et de la demande » de l’eau. Élaboré principalement pour déceler les sécheresses qui ont une incidence sur l’agriculture, le PDSI a également servi à détecter et suivre les sécheresses qui ont d’autres types d’impacts. S’il est vrai que le PDSI est un point départ important des études portant sur l’élaboration des indices de sécheresses, il comporte cependant des limites : il ne tient pas compte des ressources hydrologiques de surface pouvant influencer les conditions de sécheresse, comme les cours d’eau, les réservoirs, la couverture neigeuse ou le gel du sol. Une autre limite est qu’il ne tient pas compte des changements pouvant survenir dans l’utilisation des ressources en eau. Sur le plan empirique, il est reproché à l’indice de Palmer d’être fondé sur des paramètres qui ont été déterminés de manière empirique et principalement testés aux États- Unis. Cela limite son utilisation dans d'autres régions et empêche les comparaisons géographiques basées sur le PDSI (voir Akinremi et al. , 1996, Heim 2002). De plus l’échelle temporelle est de 9 mois ce qui crée un retard dans la détection de la sécheresse. Wells et al. 2004 a résolu ce problème en développant une variante du PDSI : les indices Palmer auto- calibrés. Ils sont spatialement comparables et ils rendent compte des événements d’humidité et sécheresse extrêmes à des fréquences qui correspondent aux conditions rares.

Où est l’indice de Palmer pour le mois i

est l’indice de Palmer pour le mois i-1

16Les indicateurs et les indices présentés décrivent les caractéristiques hydrométéorologiques des sècheresses,

sans considérer les facteurs socio-économiques et environnementaux qu’il est parfois nécessaire de prendre en compte pour évaluer et anticiper les conséquences et les impacts.

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est le « Moisture Anomaly index » ou indice de l’anomalie en humidité dont la formule est donnée par où K est un facteur de poids, P est la précipitation observée en mm et PC est la précipitation en mm de CAFEC (c’est-à-dire Climatically Appropriate for

Existing Conditions). .

Dans cette équation , , , sont des coefficients climatiques à estimer pour le mois de l’année j et PE, PR, PRO et PL sont exprimés en millimètre et représentent respectivement l’évapotranspiration potentielle, la recharge du sol potentielle, le ruissellement potentiel, la perte d’eau potentielle dans le sol. La table 1.2 donne la classification de l’indice PSDI d’après Palmer.

Table 1. 2: Classification de l’indice PSDI d’après Palmer

Valeurs du PSDI Conditions hydro-climatiques

4.0 et plus Extrêmement humide

3.0 à 3.99 Très humide 2.0 à 2.99 Modérément humide 1.0 à 1.99 Légèrement humide 0.5 à 0.99 Très légèrement humide 0.49 à -0.49 Proche de la normale 1.0 à 1.99 Légèrement sec 2.0 à 2.99 Modérément sec 3.0 à 3.99 Sévèrement sec

4.0 et plus Extrêmement sec

Source: NOAA

 Standardized Precipitation Index (SPI)

Le SPI développé par McKee et al. (1993) est déterminé à partir de techniques statistiques qui permettent de quantifier l’écart des précipitations d’une période par rapport aux précipitations moyennes historiques de la période qu’ils s’agissent des déficits (sécheresse) ou des surplus (inondation). Le principe de calcul du SPI est basé sur la comparaison des précipitations d’une période donnée (3, 6, 12 ou 24 mois) avec des données historiques de précipitation. Par exemple un indice SPI pour détecter une sécheresse sur une période de 6 mois (de Juin à Novembre) d’une année donnée consistera à comparer les données de précipitations de ce semestre avec l’ensemble des données de précipitations de tous les semestres allant de Juin à Novembre pour toutes les années de la longue série de données.

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Le calcul du SPI a pour point de départ une fonction de densité de probabilité Gamma obtenu sur l’histogramme qui représente la distribution des précipitations pendant la période de référence. Cette fonction de densité de Gamma est ensuite utilisée pour déterminer la probabilité cumulée d’un niveau de précipitation particulier correspondant à l’échelle de temps choisi. Le résultat est enfin transformé en une distribution normale de moyenne 0 et de variance 1 ce qui permet d’obtenir les valeurs de SPI exprimées en écart type par rapport à la médiane.

Où P est la précipitation d’une période (par exemple 6 mois) en mm, Pm est Précipitation moyenne historique de la période (par exemple de tous les semestres) en mm, est L’écart type historique des précipitations de la période en mm.

McKee et al. (1993) établissent une classification pour définir l’intensité des sécheresses à l’aide du SPI (Table 1.3). Une sécheresse sévit lorsque le SPI est consécutivement négatif et que sa valeur atteint une intensité de –1 ou moins et se termine lorsque le SPI devient positif.

Table 1. 3: Classification de l’indice SPI d’après McKee et al.

Valeur du SPI Conditions hydro-climatiques

2.0 et plus Extrêmement humide

1.5 à 1.99 Très humide

1.0 à 1.49 Modérément humide

- 0.99 à 0.99 Légerement humide

-1.0 à -1.49 Modérément sec

-1.5 à -1.99 Sécheresse sévère

-2.0 et moins Extrêmement sec

Source: McKee et al. (1993)

Le SPI est relativement simple à calculer, spatialement consistent, temporellement flexible (en ce sens qu’il permet de déterminer les déficits de précipitations pour différentes échelles). De plus, le SPI n’est pas influencé par les effets d’échelle car il calcule une valeur standardisée partant de la moyenne de long terme du trend. Toutes ces propriétés du SPI sont en effet ses avantages comparé à plusieurs autres indices de sécheresse à l’instar du PDSI (Blanc 2010 ; Khan, 2008). Cependant la critique faite au SPI s’appuie sur deux hypothèses liées au fait

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qu’il s’appuie uniquement sur les précipitations (i) la variabilité des précipitations est supposée être très supérieure à celle des autres variables climatiques comme la température et l’évapotranspiration potentielle et (ii) les autres variables sont supposées être stationnaires (Vicente-Serrano, 2012). Le Standandized Precipitation Evapotranspiration Index que nous présentons plus en détails ci-dessous corrige les limites sus mentionnées.

 Standandized Precipitation Evapotranspiration Index (SPEI)

Le SPEI développé par Vicente-Serrano et al. 2010, permet de rendre compte de la disponibilité en eau comme le PDSI et le SPI. Il est construit à partir de la différence entre les précipitations et l'évapotranspiration potentielle avec une distribution Log-logistique. L’évapotranspiration étant la combinaison de perte d’eau du sol c’est à dire l’évaporation et de perte d’eau du couvert végétal c’est-à-dire la transpiration (Maman et al. 2003).

Le SPEI est basé sur la différence ( ) entre les précipitations ( ) et l’évapotranspiration ( ) 17au cours d’un mois ( ) :

Cette différence reflète donc le déficit ou le surplus en eau pour le mois considéré. Par la suite, toutes les différences mensuelles sont cumulées suivant l’échelle temporelle ( considérée (par exemple K peut être égale à 2 mois, 6 mois …) pour données.

Le SPEI et le SPI sont fortement corrélés (Vicente-Serrano et al. 2012). Ainsi le classement du SPI (valeur de l’indice Vs intensité de sécheresse) peut s’appliquer au SPEI.

Le SPEI est de plus en plus préféré au SPI et au PDSI en raison des avantages qu'il présente (Vicente-Serrano, 2012). Le premier avantage de l’indice SPEI est qu’il combine les effets des températures et des précipitations et c’est ce qui le distingue de l’indice SPI dont la principale critique est d’être calculée uniquement à partir des précipitations. Un autre avantage du SPEI est qu’il permet l'identification du début et de la fin de la sécheresse et la comparaison des épisodes de sécheresses selon leurs gravités dans le temps et dans l’espace. Ceci est particulièrement important dans la mesure où le climat est un phénomène complexe et dynamique. De plus, au-delà d’être facile à calculer, le SPEI peut être déterminé pour

17 L’évapotranspiration est fonction des températures (ETP). Le calcul de l’ETP peut être consulté dans Vicente- Serrano et al. 2010

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différentes échelles temporelles (1 à 3mois, 6 mois, 12 à 24 mois) suivant la procédure que le SPI. À cet égard, le SPEI est capable de décrire un large éventail de conditions hydro- climatiques et c’est ce qui le diffère de l’indice PDSI qui bien que rendant compte de la disponibilité en eau, ne peut être calculé que pour une période relativement longue (entre 9 et 12 mois). Enfin, le SPEI est un indice standardisé, et en cela il permet la comparaison entre différentes conditions hydro-climatiques c'est-à-dire la comparaison du climat entre différentes zones géographiques. Le Table1.4 résume ces trois indices.

Table 1. 4: Présentation des différents indices de sécheresse

Indicateurs de sécheresse

PDSI SPI SPEI

C ar ac té ri st iq ue s Auteurs Palmer, W.C (1965) . T B. McKee, N. J. Doesken J.Kleist (1993) SergioM.Vicente- Serrano, Santiago

Beguería, Fergus Reig, Borja Latorre (2010) Paramètres d’entrée Précipitations

Evapotranspiration

Précipitations Précipitations

Température Principaux avantages  Valeurs de sortie facile à

obtenir

 Simple à calculer  temporellement flexible possibilité de calculer l’indice sur des échelles différentes

 spatialement consistent :

possibilité de

comparaison

 Résultats comparables car normalisation lors du calcul

 Prise en compte des températures

 déterminé pour

différentes échelles temporels (1 à 3mois, 6 mois, 12 à 24 mois) Principales limites  Nécessité de disposer

une série complète de données

 Complexité des calculs  L’échelle temporelle est de 9 mois d’où le retard dans la détection de la sécheresse

 Les précipitations sont les seules valeurs d’entrée

 Nécessité de disposer une série complète de données

Sources http://hydrology.princeto n.edu/data.pdsi.php http://drought.unl.edu/M onitoringTools/Downloa dableSPIProgram.aspx http://spei.csic.es/

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La sécheresse comme les autres manifestations du changement climatiques impact l’agriculture. Pour évaluer l’impact de nombreuses méthodes sont proposées dans la littérature.

4. Méthodes d’évaluation des impacts du changement climatique sur