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3. C OUPLAGE SILICE / ELASTOMERE

3.1 G REFFAGE DE LA SILICE PAR UN AGENT DE COUPLAGE OU DE RECOUVREMENT

3.1.3 Caractérisation et détermination du taux de greffage

Avec ou sans présence d’humidité, on peut noter l’existence de molécules de silane adsorbées sur les silanols de la silice par liaisons hydrogène à basse température. Les silanes peuvent également s’auto-condenser entre eux entrainant la formation d’oligomères. Cette réaction d’auto-condensation est cependant plus lente que la réaction de greffage du silane sur la silice [11].

Goerl et al [11] ont souligné la difficulté de greffer toutes les fonctions éthoxy du TESPT sur la surface d’une silice de précipitation. En effet, si on s’appuie sur une distance entre fonctions hydroxyle de 5 Å en surface de la silice, il parait impossible de greffer les 6 fonctions éthoxy du TESPT en considérant une longueur maximale de liaison Si-O de 1,72 Å. On peut supposer, en considérant ces distances, que 2 fonctions éthoxy (une de part et d’autre de la molécule de TESPT symétrique) peuvent réagir sur la silice. Ces valeurs restent cependant théoriques et d’autres auteurs suggèrent une réactivité plus importante du TESPT avec 4 éthoxy greffés sur les 6 [34].

3.1.3 Caractérisation et détermination du taux de greffage

Si le greffage de la silice par des molécules de silane est étudié depuis plusieurs années par analyses thermogravimétriques, spectroscopie infrarouge ou RMN solide, l’étude de ce greffage au sein d’un mélange élastomère, est beaucoup moins abordée dans la littérature. En effet, la détermination du taux de greffage de la silice par le silane dans un mélange, où des réactions avec la matrice ont lieu, s’avère être une mesure bien plus complexe.

Les silices traitées sont classiquement étudiées en analyse thermogravimétrique (ATG) afin d’obtenir un taux approximatif du silane en surface de la silice [31, 35, 36]. Ramier et al [35], étudient des silices greffées par un agent de recouvrement (OCTEO), en solution. Les mesures sont effectuées sous azote ou sous air, lors d’une rampe de température de 5 °C/min. La perte de masse et sa dérivée ont été déconvoluées afin de déterminer les différentes pertes de masse liées au greffage et à la condensation des liaisons hydroxyle (Figure 15). Néanmoins les dégradations s’effectuant dans des plages de température très rapprochées, la déconvolution est approximative, tout comme la mesure du taux de greffage qui en résulte. Les auteurs ont également étudié en analyse thermogravimétrique, des silices extraites d’un mélange silice/SBR/agent de recouvrement. Cependant, les mêmes problèmes de déconvolution se présentent ; la dégradation du SBR lié masque la dégradation due aux fonctions hydroxyle ou à l’agent de recouvrement. De plus, cette méthode de caractérisation ne donne pas d’indications relatives au recouvrement de la surface de silice. En effet en présence de silanes multifonctionnels, le recouvrement peut s’être effectué de manière « horizontale » en greffant une seule couche de silane sur la surface de la silice mais également de façon verticale par auto-condensation des silanes entre eux [14]. D’une manière similaire, des mesures d’analyse élémentaire [29] des éléments soufre, carbone et hydrogène ont été réalisées pour mesurer le taux de greffage silice/silane. Néanmoins, ces mesures se heurtent à des problèmes similaires à ceux de l’ATG quant à la détermination précise du taux de greffage ou du type de recouvrement observable.

37 Figure 15 : Pertes de masse pour une silice greffée par un agent de recouvrement (OCTEO) (a) et sa dérivée

déconvoluée (b) [35]

Des mesures de RMN du solide CP/MAS (Cross Polarization / Magic Angle Spinning) du 29Si ont été également réalisées par plusieurs auteurs afin de caractériser le greffage des silices par le silane [30, 37-39]. La RMN du silicium, en phase solide, permet de distinguer les différents groupements silanol et les liaisons siloxane en surface de la silice. Sae-oui et al [38] ont étudié l’influence du traitement d’une silice par du TESPT. Les spectres RMN sont présentés en Figure 17. On y observe 3 pics, Q4, Q3, et Q2 représentatifs des atomes de silicium, respectivement, liés à 0, 1 et 2 fonctions –OH (Figure 16). On constate que le traitement de la silice par le silane, entraine la modification de ces pics ainsi que la création de nouveaux ; T1, T2, T3 représentatifs des atomes de silicium liés respectivement à 1, 2 ou 3 liaisons siloxane. L’intensité des pics Q3 et Q2 diminue tandis que l’intensité du pic Q4 est plus élevée après le traitement (Figure 17). Ces variations ainsi que l’apparition des pics Tn sont dues au greffage des silanes sur les fonctions hydroxyle de la silice ; il y a donc eu formation de liaisons siloxane au détriment des fonctions silanol. Lee et al [39] mettent en évidence l’influence de la température de réaction sur le taux de greffage silice/silane par la mesure du ratio des intensités (Q2+Q3)/Q4. Ce ratio diminue, de 2,85 à 2,37 lors de l’augmentation de la température de 80 °C à 120 °C. Comme présentée précédemment, la réaction de greffage est donc favorisée par l’augmentation de la température.

Figure 16 : Structure schématique des configurations T et Q [39] a

38 Figure 17 : Spectres RMN CP/MAS 29Si d’une silice non traitée (a) et d’une silice traitée avec du TESPT (b) [38]

La spectroscopie infrarouge est une technique de caractérisation utilisée par plusieurs auteurs afin de mettre en évidence l’existence du greffage silane/silice, et parfois également utilisée pour quantifier le taux de greffage [24, 32, 34, 40]. Vilmin et al [32] ont étudié les réactions entre les charges de silice et le TESPT en phase gazeuse, par spectroscopie IR operando permettant l’analyse de la surface des charges pendant la réaction de greffage. Les spectres IR du système silice/TESPT ont été déterminés lors d’une montée en température de 25 à 180 °C. La Figure 18 présente les spectres IR obtenus par soustraction des réponses silice traitée/silice pure aux différentes températures appliquées. Les spectres montrent des bandes caractéristiques des vibrations en élongation et en déformation des liaisons C-H entre 2978 et 2865 cm-1 ainsi qu’entre 1453 et 1394 cm-1. Ces bandes correspondent aux liaisons C-H des groupements CH2 et CH3 des molécules de silane. Avec l’augmentation de la température, l’intensité de ces bandes caractéristiques diminue. Vilmin et al [32] expliquent cette variation par la perte de groupements éthoxy via l’élimination de molécules d’éthanol libérée lors du greffage des silanes en surface de la silice. On peut également observer sur les spectres les bandes caractéristiques des fonctions hydroxyle des silanols à environ 3360 cm-1 pour les silanols liés par liaisons hydrogène et à 3738 cm-1 pour les silanols isolés. La diminution de la bande à 3360 cm-1 et la valeur négative du pic à 3738 cm-1 suggèrent la présence de silanes greffés. La libération d’éthanol au cours de la montée en température a également été relevée lors de cette étude.