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1.2 Calnexine

1.2.5 Caractérisation de la calnexine dans divers organismes

L’examen des effets sur la cellule de la délétion d’un gène dans différents organismes constitue une excellente façon de déterminer l’implication de la protéine qu’il encode dans diverses voies cellulaires. Dans le cas de la calnexine, cette approche est compliquée dans certains organismes par la présence du paralogue calréticuline qui possède certaines fonctions redondantes à celles de la calnexine. De plus, la délétion du gène encodant la calnexine entraîne des phénotypes très diversifiés selon les organismes.

Les souris homozygotes pour la délétion du gène de la calnexine présentent plusieurs défauts. D’abord, environ la moitié d’entre elles meurent dans les premiers 48h suivant la naissance, et les causes de cette mort restent à élucider. Les souris survivantes sont remarquablement plus petites que leur congénères, montrent rapidement des signes d’ataxie et arrêtent progressivement de bouger. Ce problème moteur est associé à une perte dramatique des grandes fibres nerveuses myélinées, mais le lien exact avec la calnexine reste non résolu [108]. Des cellules de souris déficientes pour la calnexine montrent, tel que décris précédemment, une légère augmentation de la résistance à l’apoptose induite par la thapsigargine [100]. Par ailleurs, une récente étude suggère que les fibroblastes de souris déficientes pour la calnexine ont une activation constitutive de l’UPR plus élevée que des cellules sauvages [109]. De même, dans des cellules lymphoïdes humaines (CEM),

l’absence de la calnexine provoque une hausse de l’expression des chaperones calréticuline et BiP [99]. Ces mêmes cellules montrent aussi une légère résistance à l’apoptose induite par la thapsigargine, mais ne semblent pas avoir de défauts au niveau de la structure du RE et de sa capacité à stocker le calcium [99].

Chez le nématode Caenorhabditis elegans, les défauts imputables à la délétion de la calnexine apparaissent sous un stress de haute température. En effet, sous cette condition, ainsi que sous plusieurs autres stress du RE, les vers homozygotes pour la délétion ont une fertilité réduite et l’embryogénèse ainsi que le développement de la larve sont compromis. Puisqu’une nette augmentation du transcrit de la calnexine est observée lors de stress du RE, les auteurs de cette étude suggèrent que chez C. elegans, la calnexine joue un rôle important dans les fonctions chaperones induites par le stress [110]. Il est intéressant de noter que l’absence de la calnexine ne résulte pas en une hausse de l’expression de la calréticuline [111]. Cependant, tout comme pour les cellules de mammifère, une double délétion calnexine-calréticuline semble être compensée par une augmentation de la quantité de certaines protéines chaperones, notamment BiP et PDI. Ceci suggère que l’absence de la calnexine chez C. elegans induirait un signal de l’UPR [111].

La délétion de la calnexine dans la drosophile cause des défauts majeurs seulement dans l’œil. En effet, elle semble jouer un rôle de premier plan dans la biosynthèse de la rhodopsine, ainsi que dans la modulation du calcium cytosolique des cellules photorécepteur. Toutefois, mentionnons qu’il existe chez la drosophile deux autres homologues de la calnexine et une copie de la calréticuline; ces derniers compensent possiblement pour la perte de fonction de la calnexine partout ailleurs dans l’organisme [112].

Jusqu’à ce jour, le microorganisme eucaryote Dictyostelium discoideum est le seul unicellulaire à posséder à la fois une copie de la calnexine et de la calréticuline. La délétion de ces gènes est viable, et provoque une faible baisse additive du taux de croissance cellulaire, suggérant une certaine redondance de fonction. Cette absence de calnexine et de calréticuline cause cependant un défaut majeur dans la capacité des cellules à phagocyter. Les auteurs de cette étude suggèrent que cela est imputable à un problème dans la maintenance de l’homéostasie du calcium dans le RE et le cytosol [113].

L’homologue de la calnexine chez la levure S. cerevisiae (Cne1p) diffère grandement de ceux retrouvés chez les mammifères et chez S. pombe. D’abord, elle ne possède du motif 1 répéré présent dans le domaine-P et deux copies du motif 2. De plus, elle est ancrée à la membrane mais dépourvue de queue cytosolique, et elle ne lie pas le calcium [114]. La délétion génomique de CNE1 n’est pas létale, et n’entraîne aucun phénotype évident chez S. cerevisiae [114]. Seulement sous stress thermique, il semble que la transcription de BiP et PDI soit augmentée dans les levures dépourvues de calnexine [115, 116].

La calnexine de S. pombe possède toutes les caractéristiques propres à la calnexine des mammifères, notamment les deux motifs répétés quatre fois en tandem et la queue cytosolique [46, 117]. Son expression est augmentée suite à un stress thermique, à un traitement à l’ionophore de calcium A23187 ou au déoxyglucose, mais pas en présence de tunicamycine [46, 117]. De façon importante, notre laboratoire et le groupe de Dave Thomas ont montré que la calnexine est essentielle à la viabilité chez S. pombe [46, 117]. Il s’agit donc du seul organisme caractérisé à ce jour dans lequel cette protéine est nécessaire à la survie des cellules. Surprenamment, la calnexine d’Aspergillus niger peut complémenter cette délétion, mais pas la calnexine de chien [117, 118]. Aussi, la délétion de la calnexine peut être complémentée par un mutant comprenant seulement sa portion

luminale [46, 117]. Finalement, notre laboratoire a créé plusieurs mutants de délétion de la calnexine, et nous avons établi que le plus petit mutant permettant la viabilité comprend les 52 derniers acides aminés luminaux en C-terminal, le domaine transmembranaire et la queue cytosolique [90]. La suite des études sur la délétion de la calnexine est décrite dans le chapitre 4.

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