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Capacité d’apprentissage sociale des variants du gène for

CHAPITRE II : Influence d’une variabilité génétique intra spécifique au

Expérience 1 Capacité d’apprentissage sociale des variants du gène for

Cette première expérience analyse si la transmission sociale d’une préférence d’oviposition s’effectue entre individus homozygotes pour le même variant allélique du gène for ou entre individus homozygotes de variants différents.

Matériel et Méthodes

Les deux lignées sélectionnées rover et sitter sont maintenues et élevées séparément au laboratoire sur milieu axénique standard à température constante de 21°c avec un cycle jour/nuit de 12h/12h. Pour cette expérience et les suivantes, le protocole expérimental de transmission d’une préférence d’oviposition est utilisé (description du protocole page 38).

Des groupes de 8 femelles démonstratrices possédant le même variant allélique du gène for sont entrainées pendant 8 heures à pondre sur un milieu spécifique par l’odeur (banane ou fraise) à

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l’aide d’un conditionnement opérant associatif olfactif. Un test préliminaire a été effectué pour vérifier que les deux variants rover et sitter montrent des performances d’apprentissage à l’issu de ce conditionnement (test de Wilcoxon : rover : (moyenne± SEM) 0.49± 0.073, N= 69, z= 5.17, P< 0.001;

sitter : 0.63± 0.78, N= 70, z= 6.23, P< 0.001). Les démonstratrices conditionnées sont placées avec 4

observatrices naïves rover ou sitter en présence de deux milieux d’agarose sans odeur et de même qualité. Pendant 4 heures les femelles peuvent interagir entre elles et pondre sur les deux sites d’oviposition disponibles. Démonstratrices et observatrices sont ensuite séparées et testées pour leur préférence de ponte entre deux milieux odorants banane et fraise (Figure 19).

Figure 19 : Schéma du protocole de transmission sociale de préférence d’oviposition avec un groupe homogène de démonstratrices rover ou sitter. Les ronds jaunes représentent les milieux d’agarose avec l’odeur de banane, les ronds roses ceux avec l’odeur de fraise et les ronds blancs les milieux sans odeurs. La lettre Q indique dans quel milieu est placée la quinine pendant la phase de conditionnement des démonstratrices. Pendant cette phase les observatrices naïves sont placées dans un tube séparé sur milieu nutritif standard.

La transmission sociale d’une préférence d’oviposition est étudiée dans quatre conditions :  entre démonstratrices et observatrices rover (RD – RO)

 entre démonstratrices et observatrices sitter (SD – SO)  entre démonstratrices rover et observatrices sitter (RD – SO)  entre démonstratrices sitter et observatrices rover (SD – RO)

Dans chaque condition, 50% des replicats présentent des démonstratrices conditionnées à éviter le milieu avec l’odeur de banane et 50% des autres présentent des démonstratrices conditionnées à éviter le milieu avec l’odeur de fraise.

Résultats et Discussion

Les femelles naïves rover et sitter montrent une différence nette dans leur propension à acquérir l’information sociale de préférence d’oviposition, indépendamment du fond génétique de leurs démonstratrices. Les observatrices sitter n’apprennent la préférence de ponte ni des

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démonstratrices sitter ni des démonstratrices rover (test de Wilcoxon : SD-SO: N= 224, z= -0.423, P= 0.672 ; RD-SO : N= 124, z= 0.88, P= 0.379 ; Figure 20) contrairement aux observatrices rover qui apprennent des deux variants alléliques (test de Wilcoxon : RD-RO : N= 92, z= 2.011, P= 0.035 ; SD-RO : N= 95, z= 2.982, P= 0.03 ; Figure 20).

Figure 20: Performances d’apprentissage social d’une préférence d’oviposition des observatrices pendant la phase de test. Les barres oranges représentent les observatrices rover placées pendant la phase de transmission sociale avec des démonstratrices rover (RD-RO) ou avec des démonstratrices sitter (SD-RO). Les barres bleues représentent les observatrices sitter placées avec des démonstratrices rover (RD-SO) ou avec des démonstratrices

sitter (SD-SO). Les barres d’erreur indiquent les erreurs standards à la moyenne. * : P< 0.05.

Ces résultats indiquent une utilisation de l’information sociale pour choisir le site de ponte de la part des femelles observatrices rover et non des femelles observatrices sitter. L’acquisition de cette préférence d’oviposition des observatrices rover provenant de démonstratrices du même variant allélique ou possédant des allèles différents peut signifier une absence de discrimination entre les individus du même variant allélique rover et les individus sitter. Les femelles sitter peuvent transmettent leur information personnelle de choix d’oviposition mais ne semblent pas pouvoir l’acquérir socialement dans ces conditions expérimentales. L’absence de transmission sociale de la préférence d’oviposition lorsque les observatrices sont des femelles sitter peut aussi être liée au contexte social. Cette seconde hypothèse est corroborée par des études précédentes qui montrent l’importance de ce dernier sur le comportement des individus sitter lors de processus d’apprentissage spatial ou olfactif (Foucaud et al. 2013; Kohn et al. 2013). Des études complémentaires sont cependant nécessaires pour déterminer si les femelles observatrices sitter ont une réelle incapacité à acquérir socialement une préférence d’oviposition ou montrent une stratégie d’utilisation de l’apprentissage social spécifique.

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Figure 21: Performances d’apprentissage d’une préférence d’oviposition des démonstratrices pendant la phase de test. Les barres oranges représentent les démonstratrices rover placées pendant la phase de transmission sociale avec des observatrices rover (RD-RO) ou avec des observatrices sitter (RD-SO). Les barres bleues représentent les démonstratrices sitter placées avec des observatrices rover (SD-RO) ou avec des observatrices sitter (SD-SO). Les barres d’erreur indiquent les barres d’erreur standards à la moyenne. *** : P< 0.001. Test de Wilcoxon de rangs signés : RD-RO: N= 92, z= 3.417, P< 0.001 ; SD-RO : N= 95, z= 4.024, P< 0.001.

On dénote au niveau des démonstratrices rover et sitter ayant interagi avec des femelles sitter naïves une forte préférence d’oviposition pendant la phase de test, signifiant que l’absence de transmission sociale dans ce cas-ci n’est pas due à un problème d’apprentissage de ces dernières (test de Wilcoxon: SD-SO : N= 226, z= 9.242, P< 0.001 ; RD-SO : N= 100, z= 4.72, P< 0.001 ; Figure 21). Leurs performances sont de plus supérieures à celles des démonstratrices des deux variants alléliques placées avec des observatrices rover (test de Mann-Whitney : NRD-SO&SD-SO= 326, NRD-RO&SD-RO= 187, z= -4,088, P< 0.001). Il semble que la transmission sociale de préférence d’oviposition fasse perdre aux démonstratrices cette information, confirmant les résultats trouvés dans l’étude de vidéo tracking sur les interactions s’effectuant pendant la phase de transmission sociale (Chapitre II, Partie 1 page 57).

Afin de poursuivre l’étude de la relation entre les variants du gène for et l’influence du contexte social sur l’utilisation des informations venant de congénères, une seconde expérience est réalisée où les observatrices sont placées avec un groupe de démonstratrices mixte rover et sitter pouvant avoir des informations différentes.

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Expérience 2 : Influence de l’hétérogénéité sociale sur la transmission du choix