• Aucun résultat trouvé

Cancers de l’appareil génital féminin :

hormonale orale

II. Contraception et cancer :

2. Cancers de l’appareil génital féminin :

2.1. Cancer du col utérin :

En 2012, plus de 3 000 nouveaux cas de cancer du col utérin ont été recensés en France, et plus de 1 100 femmes en sont mortes [72]. Ces chiffres sont régulièrement en baisse depuis plusieurs années dans les pays développés. La mortalité due à ce cancer a en effet largement profité des campagnes de dépistage des lésions précancéreuses et de l’infection au papillomavirus (HPV). Il a été prouvé au début des années 2000 que ce virus est à l’origine de 99,8 % des cancers du col de l’utérus [76]. Cependant, la plupart des infections à HPV guérissent spontanément sans dégénérer. Par ailleurs, le vaccin anti-HPV disponible depuis peu devrait encore faire baisser l’incidence de ce cancer dans les années à venir.

L’influence de la contraception hormonale dans le développement de ce cancer a longtemps été controversée. Les études réalisées présentaient des conclusions contradictoires, notamment en raison de nombreux biais inhérents au sujet [75]. En premier lieu, la prise de la pilule est souvent associée à une activité sexuelle plus intense mais sans utilisation systématique d’une protection mécanique. Hors la transmission du papillomavirus se fait principalement par voie sexuelle. D’autre part, les femmes sous contraception bénéficient d’une surveillance médicale plus importante et de frottis plus fréquents.

En 2003, une large étude analysant 28 publications et regroupant 12 531 femmes atteintes montre une augmentation durée-dépendante de l’incidence des cancers du col utérin chez les femmes prenant une contraception hormonale [77]. Selon cette méta-analyse, le risque relatif de cancer du col est de 1,1 (IC 95 % 1,1-1,2) pour moins de 5 ans de prise, 1,6 (IC 95 % 1,4-1,7) pour 5 à 9 ans, et 2,2 (IC 95 % 1,9-2,4) pour 10 ans et plus.

50

Une nouvelle analyse de 24 études a été publiée en 2007, regroupant 19 573 femmes atteintes [78]. Elle conclut également que l’utilisation de la pilule pendant plus de 5 ans majore le risque de cancer du col (RR : 1,9 ; IC 95 % 1,69-2,13), mais indique également que ce risque décline à l’arrêt de la pilule et revient égal à celui des non-utilisatrices au bout de 10 ans.

Les œstrogènes et la progestérone de synthèse agiraient en favorisant l’expression des gènes de certains papillomavirus et en stimulant la prolifération des cellules du col. Cette dernière action est mise en œuvre par des éléments hormonaux dépendants du génome viral et par l’activation de récepteurs hormonaux [73]. La pilule aurait donc un rôle essentiellement promoteur de l’infection à HPV. Les hautes doses d’hormones sont, là encore, plus nocives, ce qui incrimine particulièrement les anciennes pilules.

L’utilisation de la pilule est donc un facteur favorisant le développement de lésions dues au papillomavirus au niveau du col de l’utérus. Cependant, d’autres facteurs plus problématiques entrent également en ligne de compte, comme les grossesses multiples, le nombre élevé de partenaires sexuels différents et le tabac. Il n’est actuellement pas recommandé aux femmes porteuses du papillomavirus d’arrêter de prendre la pilule, mais seulement d’être régulièrement suivies par leur gynécologue.

2.2. Cancer de l’endomètre :

En France, le cancer du corps de l’endomètre a atteint de nouveau plus de 7 000 femmes en 2012, et a fait plus de 2 000 victimes [72]. Ces chiffres sont cependant nettement en baisse depuis une vingtaine d’années, probablement grâce à l’utilisation de la contraception. En effet, selon la grande majorité des études, la prise d’une contraception orale réduit le risque de cancer de l’endomètre d’environ 50 % [79]. De plus, cet effet protecteur persiste 10 à 20 ans après l’arrêt de la prise de la pilule.

La durée de prise de la pilule a un impact sur l’ampleur de la protection assurée. Ainsi, il faudrait au moins 5 ans de contraception hormonale pour que le risque relatif de cancer de l’endomètre diminue, ce risque relatif étant au plus bas après plus de 10 ans de contraception.

51

Le cancer de l’endomètre est le plus souvent associé à un contexte d’hyperoestrogénie relative (obésité, dystrophie ovarienne, âge, ménopause). Les œstrogènes stimulent en effet naturellement la division cellulaire et le développement de la muqueuse utérine, comme dans la phase proliférative du cycle menstruel.

La prévention de ce cancer est surtout due à l’influence du progestatif sur l’endomètre, car il réprime l’hyperplasie et la prolifération des cellules de la muqueuse utérine. Comme dans la phase lutéale du cycle menstruel, le progestatif, malgré la présence d’œstrogènes, induit un arrêt de la division cellulaire des glandes et du stroma endométrial, et une conversion de l’utérus en un tissu sécrétoire [73]. Cette action est observée quelle que soit la composition de la contraception hormonale utilisée. Le type et le dosage du progestatif ne semblent avoir aucune influence sur le bénéfice attendu.

Chez les patientes ayant des antécédents familiaux de cancer de l’endomètre ou des facteurs de risque, la prise de la pilule augmente donc significativement les chances de ne pas développer ce type de cancer.

2.3. Cancer épithélial de l’ovaire :

Le cancer épithélial de l’ovaire touche plus de 4 600 femmes en France chaque année, et a conduit à plus de 3 100 décès en 2012 [72]. Ce cancer, particulièrement agressif, est souvent découvert tard et reste de mauvais pronostic. Il touche essentiellement les femmes ménopausées, en moyenne vers l’âge de 70 ans.

Comme pour le cancer de l’endomètre, une baisse de l’incidence de ce cancer grâce à la pilule a été soupçonnée dès les années 1970. De nombreuses études ont été menées depuis, et ont confirmé cette présomption. En 2008, une méta-analyse a déterminé un risque relatif compris entre 0,69 et 0,81 selon le type de population visée [80]. En outre, cette étude a permis de renforcer le lien entre la réduction du risque de cancer de l’ovaire et la durée de prise de la pilule, car, selon ses résultats, le risque relatif diminue de 20 % par tranche de 5 ans d’utilisation d’une contraception hormonale. La composition qualitative ou quantitative de la pilule ne semble pas avoir une influence significative.

Plusieurs hypothèses ont été avancées pour expliquer cet effet protecteur. Tout d’abord, l’inhibition de l’ovulation entraînée par la pilule diminuerait le nombre de microtraumatismes à la surface de l’épithélium ovarien, qui se répètent normalement chaque mois. D’autre part,

52

la contraception freine la sécrétion des gonadotrophines qui auraient un rôle promoteur dans la transformation maligne des cellules ovariennes. Par ailleurs, d’après des études expérimentales, la progestérone favoriserait l’expression du gène p53 suppresseurs de tumeur et inhiberait la prolifération des cellules ovariennes chez le mouton, ou induirait leur apoptose. Une dernière hypothèse, plus récente, met en cause un gène HOX régulé par les hormones stéroïdiennes et qui agirait dans l’initiation des cancers de l’épithélium [73].

Aucune de ces hypothèses n’est pleinement satisfaisante, et plusieurs de ces mécanismes sont probablement imbriqués. Il est cependant certain qu’une longue utilisation de la pilule, tout comme un grand nombre de grossesses ou le fait d’avoir allaité constituent autant de chances de ne pas développer de cancer épithélial de l’ovaire.