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3 Etude des joints soudés: caractérisation microstructurale

3.4 Reproduction de la microstructure de la zone adoucie

3.4.3 Campagne de dilatométrie sur l’acier Grade 92

Dans un deuxième temps, il est donc nécessaire de vérifier si ce cycle thermique est applicable aux joints soudés en acier Grade 92 de l’étude, en première approximation. Ces joints soudés résultent de l’assemblage de deux tubes en acier Grade 92 mis en position bout à bout.

Au cours de la campagne d’essais de dilatométrie, les différentes transformations de phases se produisant au cours du cycle de soudage ont été analysées, et en particulier, l’évolution de la microstructure au cours du cycle vu par la zone intercritique a été examinée.

3.4.3.1 Procédure expérimentale

Le dispositif expérimental est décrit en annexe.

La géométrie des échantillons de dilatométrie est présentée sur le schéma de la Figure 3-52.

Figure 3-52 : plan des éprouvettes de dilatométrie.

Les éprouvettes ont été prélevées dans l’épaisseur du tube soudé en acier Grade 92, selon l’axe radial. Les cycles thermiques ont été appliqués au matériau de base détensionné (2h à 760 °C). Comme cela a été montré dans le chapitre I, les paramètres microstructuraux, tels que les tailles de sous-grains, la densité de dislocations, les tailles de précipités, entre le métal de base détensionné et non détensionné, sont similaires.

Les premiers essais de dilatométrie ont montré un retard important de la température mesurée par le thermocouple par rapport à la température de consigne, et ainsi une diminution progressive de la vitesse de chauffage mesurée au cours de l’essai. Afin de rendre plus efficace le chauffage de l’éprouvette par rayonnement pour les essais suivants, les éprouvettes de dilatométrie ont ensuite

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été préoxydées à 550°C pendant 2h dans un four, à la pression atmosphérique. Une coupe transversale d’une éprouvette a été examinée. Aucune zone ferritique traduisant l’occurrence possible de la décarburation, n’a été observée.

Plusieurs types de cycles ont été réalisés. La vitesse de chauffage appliquée pour ces différents cycles correspond à la vitesse de chauffage imposée par l’opération de soudage sur les différentes zones de la ligne de fusion et estimée à partir de la mesure des thermocouples sur la ligne de fusion, soit 65°C/s. On fait l’hypothèse que la vitesse de chauffage dépend peu du matériau ou des conditions de soudage. On suppose pour cela que le Grade 91 et le Grade 92 possèdent des propriétés thermiques similaires.

Un premier essai a été réalisé jusqu’à une température maximale proche de 1200°C, température à laquelle l’acier est entièrement austénitique. Cet essai a été dépouillé par la règle des leviers afin ensuite d’observer l’évolution de la transformation de phase au cours du chauffage et d’en déduire des valeurs de Ac1 et Ac3, ainsi que la cinétique de transformation de la martensite revenue en

austénite, pour la vitesse de chauffe considérée.

Dans un deuxième temps, une série de cycles interrompus a été effectuée. La vitesse de refroidissement imposée à ces cycles est très rapide afin de réaliser une trempe. Elle vaut -200°C/s. Cela permet en outre de figer la microstructure et notamment l’état de précipitation du carbone. Ces essais ont ensuite permis de relier la dureté à la fraction d’austénite transformée à une certaine température maximale atteinte.

3.4.3.2 Résultats

L’évolution de la fraction de phase austénitique formée est présentée sur la Figure 3-53.

La courbe de dilatométrie du premier essai est présentée sur la Figure 3-54. Elle décrit l’évolution de la dilatation relative dL/Lo de l’échantillon en fonction de la température. Un palier de 10 secondes a été imposé au cycle afin de pallier au retard de la diffusion thermique dans l’éprouvette. Malgré la pré-oxydation de l’éprouvette et l’application d’un palier de température, la température de l’éprouvette n’a pas atteint 1300°C. La température maximale était de 1214°C. La transformation étant complète à cette température, cet essai a été conservé pour la suite de l’étude. La vitesse de chauffage est constante jusqu’à 1100°C. Elle diminue progressivement jusqu’à la température maximale.

149 Température (°C) 880 900 920 940 960 980 1000 1020 1040 1060 Fr acti on v ol um iqu e d'austén ite for m ée (% ) 0 20 40 60 80 100

Figure 3-53 : évolution de la fraction de phase austénitique au cours d’un chauffage, de température maximale 1214°C, vitesse de chauffage 65 °C/S. Température (°C) 0 200 400 600 800 1000 1200 1400 dL /Lo 0,000 0,002 0,004 0,006 0,008 0,010 0,012 0,014 0,016 0,018 0,020

Figure 3-54 : courbe de dilatométrie de l’essai dont la température maximale est proche de 1214°C.

La forme de la courbe indique que l’un des capteurs de déplacement a vibré lors du refroidissement rapide, obtenu par injection de gaz.

Les valeurs de Ac1 et Ac3 mesurées sont respectivement 908°C et 1045 °C, à 1% et 99% de phase

formée. La précision des mesures obtenues par cette méthode de dilatométrie est de +/- 10 °C.

Ac

3

Ac

1 99 %

150

Ces valeurs sont positionnées par rapport aux valeurs mesurées sur du Grade 91 [Gaffard et al., 2005] et présentées sur le graphique de la Figure 3-55.

Vitesse de chauffage (°C/s) 0,1 1 10 100 1000 T em p ér atu re C) 800 850 900 950 1000 1050 1100

Ac1 (Gaffard, Grade 91) Ac3 (Gaffard, Grade 91) Ac1 de l'acier Grade 92 Ac3 de l'acier Grade 92 Ac1 (Matsui et al., Grade 92) Ac3 (Matsui et al., Grade 92)

Figure 3-55 : évolution de Ac1 et Ac3 avec la vitesse de chauffage pour l’acier Grade 91 *Gaffard et al., 2005+ et l’acier Grade 92 de l’étude.

Le domaine intercritique de l’acier Grade 92 est décalé vers les plus hautes températures par rapport à celui de l’acier Grade 91. A cette vitesse de chauffage pour l’acier Grade 91, Ac1 est d’environ 860 °C et Ac3 vaut environ 970 °C.

A une vitesse de chauffage de 0,33°C/s sur un acier Grade 92, Matsui et al. [Matsui et al., 2001] ont mesuré des valeurs de Ac1 de l’ordre de 850 °C et de Ac3 d’environ 920 °C. D’après la Figure 3-55, Ac1

et Ac3 tendent à conserver des valeurs constantes pour des vitesses de chauffage basses, inférieures

à 10°C/s. Ainsi, la valeur de Ac1 mesurée par Matsui et al. semble du même ordre de grandeur que

celles mesurées sur le Grade 91 mais Ac3 semble supérieure. La tendance vers les plus grandes

valeurs de Ac3 de l’acier Grade 92 semble donc se confirmer aux plus basses températures de

chauffage. Comme cela a été évoqué dans le chapitre précédent 3.3.2.3, la dissolution des carbures est retardée dans l’acier Grade 92 par rapport au Grade 91. Ainsi, la quantité de carbone en solution augmente à des températures plus élevées dans l’acier Grade 92 par rapport à l’acier Grade 91, ce qui peut expliquer une fin de transformation austénitique retardée. Abe et al. [Abe et al., 2010] ont étudié l’influence du bore sur l’évolution de la microstructure d’un acier Grade 92 soumis à un cycle thermique proche de celui de la FGHAZ, suivi d’un PWHT (740°C pendant 4,7h). Ils ont constaté que la présence d’atomes de bore retarde le début de la transformation austénitique. Les auteurs expliquent que la ségrégation du bore aux joints de grains réduit leur énergie, ce qui a pour conséquence de réduire l’efficacité des joints de grains en tant que sites de germination.

Différents cycles ont ensuite été réalisés jusqu’à 35%, 50% et 75 % de la transformation austénitique. Les températures maximales des cycles ont été estimées à partir de la Figure 3-53. Une trempe à l’hélium refroidi est appliquée une fois la température maximale atteinte. Les cycles thermiques imposés sont présentés sur la Figure 3-56. Chaque échantillon subit un unique cycle.

151 Temps (s) 0 10 20 30 40 T em ratu re (°C) 0 200 400 600 800 1000 1200 1400 35 % de phase transformée 50 % de phase transformée 75 % de phase transformée 100 % de phase transformée

Figure 3-56 : cycles de températures imposés.

Cette étape a une seconde fois été réalisée mais en imposant un cycle plus arrondi autour de la température maximale, afin de permettre le maintien et l’homogénéisation de la température. Le sommet du cycle vu par le thermocouple TC1 a été reproduit pour réaliser cet arrondi. L’objectif est de simuler de manière plus réaliste la continuation de la transformation de phase au cours du pic de température, voire au début du refroidissement. Les cycles thermiques avec et sans homogénéisation de la température et pour 50 % de phase transformée, sont comparés sur la Figure 3-57. 0 2 4 6 8 10 12 14 700 750 800 850 900 950

1000 Cycle sans homogénéisation

de la température (50 % de phase transformée)

Cycle avec homogénéisation de la température (50 % de phase transformée) T emp érature (°C) Temps (s)

Figure 3-57 : comparaison des cycles thermiques avec et sans homogénéisation de la température, pour 50 % de phase transformée.

65°C/s

-125°C/s Δt8->5=2s

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En dernier lieu, le cycle thermique correspondant au cycle vu par le thermocouple TC3 a été réalisé. La température maximale vue par ce thermocouple est d’environ 953°C.

Un traitement thermique simulant le détensionnement de 2 h à 760 °C a été appliqué à l’ensemble de ces éprouvettes, après le cycle thermique sur le dilatomètre. A nouveau, la section transversale d’une des éprouvettes a été examinée et aucune trace de décarburation n’a été révélée.

Afin de déterminer le cycle thermique à retenir, des mesures de dureté Vickers ont été faites sur l’ensemble des microstructures simulées. La dureté a été évaluée dans la section transversale de l’éprouvette au niveau des thermocouples soudés. En moyenne quatre empreintes réparties sur toute la surface ont été réalisées pour chaque microstructure. Aucune différence notable de dureté n’a été constatée entre le cœur et l’extrémité de la surface de coupe des éprouvettes. Ces données sont comparées avec la dureté de la zone adoucie de la ligne de fusion, dont la température est mesurée par le thermocouple TC3. Ces données sont reportées sur la Figure 3-58. Les valeurs moyennes sont données sur la Figure 3-59.

Les microstructures simulées jusqu’à une température maximale comprise entre 955 et 960°C, ce qui correspond à 35% d’austénite formée à la température maximale (Tmax), présentent des valeurs

de dureté proches, que l’homogénéisation de la température à Tmax soit imposée ou non. Ainsi, on

peut déduire que le refroidissement n’influence pas notablement la dureté résultante (après PWHT), bien qu’une transformation de la martensite initiale en austénite soit encore possible au tout début de refroidissement.

Le paramètre déterminant semble donc être la température maximale atteinte au cours du cycle simulant le soudage.

La dureté diminue quand Tmax augmente et atteint un minimum autour de 980°C. Au-delà de cette

température, la dureté augmente de nouveau. L’évolution de la dureté est attribuée à la dissolution des carbures au cours du cycle thermique. Elle est fonction de la teneur en carbone, pour une vitesse de chauffage de 65°C/s et pour cet acier. La dissolution débuterait donc autour de 985°C et progresse considérablement avec l’augmentation de la température.

153 Température maximale (°C) 920 940 960 980 1000 1020 1040 1060 1080 1100 1120 Du reté HV 0, 5 200 210 220 230 240 250

Cycles sans homogénéisation de la température

Cycles avec homogénéisation de la température

Cycle du TC3 reproduit (Deltat8->5=33s)

TC3 Grade 91 (Deltat8->5=33s)

Figure 3-58 : ensemble des valeurs de dureté en fonction de la température de pic appliquée (Détensionnement de 2h à 760 °C). Température maximale (°C) 920 940 960 980 1000 1020 1040 1060 1080 1100 1120 Du ret é H v 0,5 200 210 220 230 240 250

Cycles sans homogénéisation à la température de pic

Cycles avec homogénéisation à la température de pic

Cycle du TC3 reproduit (Deltat8->5=33s)

TC3 Grade91 (Deltat8->5=33s)

Figure 3-59 : évolution de la dureté moyenne en fonction de la température de pic appliquée (Détensionnement de 2h à 760 °C)..

Par ailleurs, les valeurs de dureté des éprouvettes de dilatométrie cyclées avec une température de pic de 955°C et 981°C sont proches et également proches de la valeur de l’éprouvette en acier Grade 92 qui a subi le cycle du TC3. Cet intervalle de température correspond donc à la gamme de cycles thermiques imposée dans la zone intercritique. Des mesures de dureté sur des plus gros volumes de matière en microstructures simulées vont permettre d’affiner cet intervalle et d’obtenir la température de pic la plus représentative. En outre, ce constat suggère que la vitesse de

Grade 92 cycles interrompus : Chauffage : 65 °C/s Δt8->5 = 2s Grade 92 cycles interrompus : Chauffage : 65 °C/s Δt8->5 = 2s

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refroidissement n’a pas d’effet sur la dureté des matériaux. En effet, les Δt8->5 des cycles interrompus

sont de quelques secondes alors que le Δt8->5 de l’éprouvette cyclée avec TC3 est de 33s.

Sur la Figure 3-59, l’écart entre les éprouvettes dénotées « TC3 Grade 91 » et « TC3 reproduit » est de l’ordre de 5 Hv0,5. Cette différence n’est pas significative compte-tenu de la dispersion des

mesures (Figure 3-58).

Les valeurs de dureté mesurées sont cependant éloignées de la dureté de la zone adoucie réelle, évaluée à +/- 200 Hv0,5.

3.4.4 Evolutions métallurgiques lors du cycle thermique de soudage et première