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Calcul de la puissance induite : la théorie du disque sustentateur

2.2 Modélisation de niveau 1

2.2.1 Module de performances de vol : les équations du bilan de puissance

2.2.1.1 Calcul de la puissance induite : la théorie du disque sustentateur

Le rôle du disque sustentateur est de compenser la somme des forces extérieures s’exerçant sur l’appareil afin de permettre le vol. Cette force compensatrice développée par le rotor est la traction notée T . Dans le cadre du niveau 1, nous avons précisé que les forces extérieures que doit équilibrer le rotor, sont uniquement le poids et la traînée du fuselage dans l’axe du mouvement. Toutefois, pour simplifier les calculs nous avons décidé de découpler la part du poids et de la traînée dans le calcul de la traction. Dans les équations suivantes, T ne compense que le poids. La traînée est prise en compte

séparément et la puissance à dépenser par le rotor principal est calculée avec le terme Pf us. Cette hypothèse se justifie si l’on considère que l’appareil vole à plat pour toutes les vitesses d’avancement horizontal. De plus pour prendre en compte correctement l’effet de la traînée du fuselage au niveau du rotor, il faut pouvoir calculer la force générée par les éléments stabilisateurs arrière donc les moments. Ceci entre dans le domaine de définition du niveau 2 et de la mécanique du vol complète. Au niveau 1, ce sont donc les puissances qui sont sommées et non pas les forces.

La théorie du disque sustentateur est développée à la fin du 19ème siècle par W.J.M. Rankine (1865), A.G. Greenhill (1888) et R.E. Froude (1889). Elle considère un rotor composé d’un nombre infini de pales d’épaisseurs infiniment petites. Le rotor se trouve dans une veine d’air que l’on considère être un gaz parfait et dont les conditions amont et aval sont définies à l’infini selon le schéma de la figure 2.20. Entre ses deux faces est observée une différence de pression, de gradient infini, induisant un champ de vitesse se traduisant par une force T qu’il est nécessaire de fournir au rotor pour élever un appareil. Il peut être calculé à l’aide de méthodes de mécanique des fluides complexes (Euler, Navier-Stokes). Cependant dans le cadre du niveau 1, nous utilisons les équations de Bernoulli.

Figure 2.20: Tube d’air entourant le rotor considéré comme un disque plein d’épaisseur infiniment petite. V0, T0, V1, T1, V2, T2 sont les vitesses et tractions développées respectivement, à l’infini amont, sur le disque rotor et à l’infini aval. Vi est la vitesse induite au niveau du disque rotor.

Pour définir la force exercée (T ) par le disque, considérons premièrement la conservation de la quantité de mouvement. Celle-ci implique que la force exercée par le disque sustentateur est équivalente à la différence des forces à l’infini amont et aval. De plus, le long de la veine d’air on suppose qu’il n’y a pas de déperdition de matière, on a donc conservation des débits. On obtient finalement l’équation de T en fonction des trois vitesses caractéristiques de la veine d’air immergeant le rotor.

− →

T =T0T2

= ˙m ×V0− ˙m ×V2

2.2. MODÉLISATION DE NIVEAU 1 89 ˙m = ρair· Srotor· |V1| (2.22) − → T = −ρair· Srotor· |V1| ·V2V0  (2.23) La puissance dépensée par le rotor s’exprime en fonction de la force dépensée multipliée par la vitesse de l’air soufflé par le disque.

P = −T ·V1 (2.24)

On peut introduire une formulation de V1 en fonction de V0 en définissant la vitesse induite moyenne Vim. La puissance dépensée par le rotor s’écrit :

−−→

Vim=V1V0 (2.25)

P = −T · (−−→Vim+V0) (2.26) Le théorème de Bernoulli décrit la conservation de l’énergie totale mise en jeu dans la veine d’air entre les infinis amont et aval. Le calcul de l’énergie cinétique transmise à l’air par le rotor permet d’obtenir une seconde formulation de la puissance.

ρair.V02 = 1 2ρair − → V22 Ec = 1 2ρair − → V22−1 2ρair −→ V02 P = Ec · Srotor· − → V1 = Q 2 −→ V22V02  P = −T −→ V0+V2  2 (2.27)

En égalisant les deux formulations de la puissance que nous venons d’obtenir on peut calculer Vim en fonction des vitesses amont et aval. Vim est toujours orthogonale au disque rotor et de sens contraire à la force de portance.

−−→ Vim=

−→ V2V0

2 (2.28)

D’où :V2 =V0+ 2 ·−−→Vim. C’est le résultat principal de la théorie de Froude, couramment utilisée pour décrire les rotors et les hélices en vol axial. Si nous revenons sur l’équation 2.23 définissant T

en utilisant les formules 2.25 et 2.28, on obtient une nouvelle expression de la traction seulement dépendante des conditions infinies amont.

− →

T = −2 · ρair· Srotor·

(V0+−−→Vim

·−−→Vim (2.29)

En considérantV0 = (Vh, Vz);Vi = (0, Vim);V0+−−→Vim= (Vh, VZ+Vim), on peut donc définir la force créée pour le vol d’un rotor considéré comme un disque sustentateur. Ainsi on obtient l’expression2.30 de T dite formulation de Coleman-Glauert.

T = 2 · ρair· Srotor r V2 h + Vz+ Vim2 · Vim (2.30)

La puissance à fournir au rotor pour générer la force T est couramment notée puissance induite :

Pind=T ·V0+−−→Vim



Pind= T ·

V0· sin(90 − α) + Vim

(2.31)

Dans la pratique T est égal en valeur absolue à la somme des forces exercées sur l’appareil que le rotor principal doit compenser, donc typiquement le poids de l’hélicoptère et sa traînée. On cherche alors à calculer Vimpour déterminer la puissance requise. Une résolution analytique de cette équation n’est pas possible sans solveur numérique. Cependant dans des cas de vols particuliers, on parvient à une solution analytique simple. Les équations suivantes résument les résultats que l’on peut obtenir selon que l’on considère un vol stationnaire, une montée, un vol en palier. La vitesse induite pour le vol oblique doit se résoudre numériquement.

En vol stationnaire : Vh = Vz= 0 d’où Vim= Vim0= s T 2 · ρair· Srotor et Pind= Pi0= T · Vim0 (2.32) En montée verticale : Vh = 0, Vz > 0 Vim= 1 2 · q V2 z + 4 · V2 im0− Vz et Pind= T · (Vz+ Vi) (2.33) En vol en palier : Vz = 0 Vim= r 1 2· q V4 h + 4 · V4 im0− V2 h  et Pind= T · Vim (2.34)

2.2. MODÉLISATION DE NIVEAU 1 91

Il est intéressant de noter que la puissance induite, à travers la vitesse induite dépend uniquement de la surface du disque rotor, de la densité de l’air et des vitesses (Vh, Vz, Vim). Plus le rayon rotor est grand plus la puissance induite à dépenser sera faible.

Concernant la descente, les problématiques sont plus complexes. Lors d’une descente à vitesse importante, la théorie du disque sustentateur représente une bonne approximation. La descente rapide concerne les régimes d’autorotation et de moulinet-frein où l’air traversant le rotor de bas en haut, entraîne ses pales en rotation comme dans le cas d’un éolienne. La puissance à dépenser pour le vol est alors nulle.

En descente rapide : Vz < 0; Vim> 0; |Vz| > 2Vim  Vz Vim0 + Vim Vim0  · Vim Vim0 = −1 et Pind= Pi0 Vim/Vim0 < 0 (2.35)

Dans le cas d’une descente lente, la théorie décrite ci-dessus ne constitue plus une bonne ap-proximation. Dans la réalité le sillage créé au-dessus du rotor à faible vitesse forme des anneaux tourbillonnaires. Leur description à l’aide des équations de Froude ou de Glauert est impossible et on ne peut pas calculer la puissance induite. Dans ce cas, il faut faire appel à des modélisations plus com-plexes telles que présentées dans la thèse de Jimenez [39]. Dans le cadre du calcul des performances à l’équilibre, les cas complexes tels que la descente lente ne sont pas abordés.

Les facteurs correcteurs : krpf et κmr

La puissance théorique que nous venons de calculer s’avère inférieure à la puissance induite réelle. En effet la théorie du disque sustentateur utilise des hypothèses simplificatrices ayant tendance à négliger des phénomènes consommateurs de puissance. La théorie décrite ici considère un fluide de viscosité nulle donc n’introduisant aucune déperdition énergétique en passant à travers le rotor. Avec un fluide réaliste, des tourbillons se forment notamment en bout de pale, réduisant ainsi l’efficacité des pales (pertes de portance en bout de pale). De plus la vitesse induite à travers le rotor est supposée uniforme avec le terme moyenné Vim alors que sa distribution est en réalité plus complexe [40]. Il est nécessaire d’introduire un coefficient d’efficacité induite. Dans le cadre de C.R.E.A.T.I.O.N., nous avons choisi d’utiliser une formulation adoptée par le NDARC [1]. La puissance induite utilisée dans les calculs de performances de vol suit donc l’expression suivante où κmr est le coefficient correcteur de la vitesse induite créée par le rotor principal, Pi0est la puissance induite théorique que nous avons déterminé :

Pind= κmr· Pi0= κmr· T · Vim (2.36) Un autre facteur correctif peut être implémenté pour tenir compte de l’interaction entre le souffle d’air généré par le rotor et le fuselage. Le rotor éjecte de l’air à une vitesse de l’ordre d’une dizaine de mètres par seconde. Cela crée une force de déportance non négligeable sur le haut du fuselage qu’il

faut compenser. Cela se traduit dans le modèle par une augmentation du poids de quelques pourcents et affectant la traction. Ce pourcentage diminue progressivement avec la vitesse horizontale car le souffle du rotor s’incline vers l’arrière avec la vitesse incidente et finit par ne plus être en interaction avec le fuselage. Le facteur correcteur est noté krp/f us. Il suit l’équation suivante :

krp/f us = krp/f us0·1 − sin2( Vh Vtran ·π2) si Vh < Vtran 0 si Vh > Vtran (2.37)

Dans ce système d’équation Vtran est une vitesse d’avancement à partir de laquelle, il n’y a plus d’interaction entre le souffle du rotor et le fuselage. krp/f us0est le pourcentage maximum d’interaction, généralement inférieur à 8%. Cela affecte la traction de la manière suivante :

T = Wmto· g · (1 + krp/f us) (2.38) La figure 2.21 montre les évolutions des vitesses et puissances induites respectivement Vim et Pind en fonction de la vitesse d’avancement Vh. En fonction de Vh, Vim diminue. Intuitivement cela correspond au fait qu’il y a moins d’énergie à communiquer au flux d’air traversant le disque rotor pour générer la portance. La baisse de Vim en fonction de Vh implique une baisse de la puissance induite. Cette tendance est visible sur la figure2.21. On observe à haute vitesse une remontée de Pind entièrement due au coefficient d’efficacité induite soulignant que le rotor est moins efficace dans ces conditions. Dans les modèles de vitesse induites plus élaborés, la vitesse induite moyenne réaugmente à grande vitesse d’avancement contrairement à ce qui est prévu par la théorie de la quantité de mouvement [41]

-(a) (b)

Figure 2.21: La courbe (a) présente l’évolution de la vitesse induite en fonction de la vitesse d’avan-cement Vh. La courbe (b) montre l’évolution de la puissance induite en fonction de Vh.

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