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Calcul de groupes de Galois en caractéristique nulle et résolubilité par radicaux

Dans le document Algèbre Avancée R. Abdellatif (Page 50-55)

Théorie de Galois

XI. Calcul de groupes de Galois en caractéristique nulle et résolubilité par radicaux

XI-A. Groupes de Galois des polynômes entiers

Soit p un entier premier. Si P Z[X], désignons par π(P) le polynôme de Fp[X] obtenu par réduction modulopdes coefficients deP. La connaissance deGalFp(π(P))peut-elle nous donner des informations surGalZ(P)?

XI-A- 1. Norme d’un entier algébrique

Rappelons tout d’abord que si a∈Cest entier sur Z, son polynôme minimal surQest en fait à coefficients dansZ[X], comme on peut le voir par division euclidienne.

Par ailleurs,NQ/Q(a) =Nl/Q(a)Zoùl=DQa,Q), et, siaest rationnel,aest entier.

SoitP Q[x]un polynôme unitaire séparable de degrénestkun corps de décomposition deP. Soient x1, . . . , xn l’ensemble des racines de P dans k, et soit A := Z[x1, . . . , xn]. Soit pun entier premier.

PosonsAp :=A/pA (l’anneau quotient, pas une extension d’anneaux...). Vérifions déjà queAp n’est pas l’anneau nul :

Proposition XI.1.Ap n’est pas l’anneau nul.

Démonstration de la proposition.Supposons par l’absurde que Ap soit l’anneau nul. Ainsi, il existe a A\{0} tel que 1 = pa. On a donc, via K = F r(A) = Q(x1, . . . , xn), 1 = NK/Q(1) = NK/Q(p)NK/Q(a). MaisNK/Q(p) =p[K:Q] etNk/Q(a)N, ce qui est absurde.

□ Par construction,Ap est un anneau de caractéristiquep. Il est naturellement muni d’une structure deFpespace vectoriel et le fait queAsoit unZ-module de type fini (puisqu’engendré par des éléments entiers) implique queAp est unFp-espace vectoriel de dimension finie.

Soitpun idéal maximal deAp. Soitp le noyau du morphisme d’anneaux naturels h:AApAp/p=:kp

On peut montrer que siqest un autre idéal maximal deFp, alorskp=kq. Le corps résiduel ne dépend donc que de l’entier premierpchoisi, ce qui mène à noterkp au lieu dekp. Ainsi,A/p∼=kp et doncp est un idéal maximal deAcontenant pA. Commekp est unFp espace vectoriel de dimension finie et qu’il s’agit d’un corps,kpest un corps fini.

Finalement, remarquons quepZ=pZ. En effet, pZp etp(Z/pZ)est le noyau du morphisme de corps (donc injectif) g :Z/pZ →A/p. kp est engendré par les xi modp donc kp est un corps de décomposition deπ(P)surFp. Comme l’extension kp/Fp est une extension finie d’un corps fini, elle est galoisienne, et on peut considérer son groupe de Galois Gal(kp/Fp). On a également une action naturelle

Galk(P)↷A=Z[x1, . . . , xn] et on dispose du diagramme commutatif suivant :

Galk(P)↷ AAp

↓↓ ↓↓

A/p kpGal(kp/Fp)

On aurait envie de factoriser l’actionZ-linéaireGalk(P)↷Aen une actionFp-linéaire.Galk(P)↷kp. Pour faire cela, il faut respecter les théorèmes d’isomorphismes et imposer la condition suivante :

∀σ∈Galk(P), σ(p)p (5)

Cette condition s’avère bien trop restrictive, et justifie que l’on s’intéresse aux éléments du groupe de Galois stabilisant globalementp.

Définition XI.1.{Groupe de décomposition} Le groupe de décomposition dep est le sous-groupe

Lemme XI.1.L’applicationep est surjective.

Démonstration du lemme.Par le théorème de l’élément primitif (ou par cyclicité du groupe mul-tiplicatif des corps finis), on peut choisirx∈kp tel que kp=Fp[x].

Ce polynômeQest invariant sous l’action deGalk(P). Il est donc à coefficients rationnels. Lélément g(y) étant entier sur Z pour tout g Galk(P), par les relations coefficients-racines, les coefficients deQsont entiers surZ. Il s’agit donc d’entiers naturels, Zétant intégralement clos. On peut donc le regarder après réduction modulop. Danskp[X],Qs’écrit

gDp

(X−g(y))

g /Dp

X

Le polynôme minimal dexsurFp est

µ(X) = ∏ (en passant au quotient dansQ(y) = 0) on en déduit queµdivise

Théorème XI.1.Supposons de plus π(P) séparable sur Fp. Alors ep est un isomorphisme de groupes compatible aux plongements dansSn: siGal(π(P))contient une permutation,Dpcontient une permutation du même type.

Démonstration du théorème.Il suffit d’observer le fait suivant : si π(P) est à racines simples La flèche diagonale est donc injective, d’où le résultat.

□ XI-A- 2. Quelques exemples d’applications

Considérons le polynôme P := X4+X+ 1. Soit P2 le réduit deP dans F2. P2 est irréductible sur F2. Il est donc séparable par perfection des corps parfaits. On peut donc considérer son groupe de GaloisGalk(P)2.Galk(P)2peut se voir comme un sous-groupe deS4puisqu’il agit transitivement surZ(P). Comme c’est un groupe cyclique d’ordre 4 (comme groupe de Galois d’une extension finie de corps finis), il contient un 4-cycle. Par critère d’irréductibilité modulaire3,P est irréductible dans Q[X].Donc Galk(P)est un sous-groupe deS4 et contient un 4-cycle, donc |Galk(P)|est un multiple

=:Q3(X)irréductible car de degré 3 sans racines dansF3

Ainsi, Gal(P3)=Gal(Q3) (immédiat) maisGal(Q3)=Gal(F27/F3) =Z/3Z.Galk(P) a donc pour cardinal un multiple de 12. Donc Galk(P) est S4 ou A4. Mais si Galk(P) = A4, comme Galk(P) contient un 3-cycle, on aboutit à une absurdité. DoncGalk(P) =S4.

XI-B. Résolubilité par radicaux XI-B- 1. Extensions radicales

DéfinitionXI.2.Soitl/kune extension de corps. Elle est dite radicale élémentaire s’il existeα∈l un élément primitif de l’extension et un entier naturel non nul ntel queαn∈k.

L’extension est dite radicale s’il existe une suite finie d’extensions de corps k=:k0k1⊆ · · · ⊆kn:=l

telle que pour tout i [|0;n−1|] l’extension ki+1/ki soit radicale élémentaire, i.e il existe α1, . . . , αn ∈l etj1, . . . , jn N tels que l=k(α1, . . . , αn) et tels que pour touti∈ {0, . . . n1} αjii ∈k.

Par exemple, toute extension cyclotomique est une extension radicale élémentaire.

Prenons quelques conventions : soit l/k une extension radicale et k0k1 ⊆ · · · ⊆ kn =l la suite d’extensions associée. On dit qu’il s’agit d’une tour radicale.

Pour touti∈[|0;n−1|], il existeαi ∈ki+1 et ji N tels queki+1 =kii)et que αjii ∈ki. On dit que la suite(α1, . . . , αn)est une suite radicale de l’extension.

Étudions, comme d’habitude, la transitivité de cette notion :

Proposition XI.2.Soientl/k etm/l deux extensions de corps. Alors : 1. Sil/kest radicale et si m/l est radicale,m/k est radicale.

3. Rappelons-le : Sipest un entier premier, si la réduction d’un polynômeQZ[X]modulopest irréductible sur Z/pZ, alorsP est irréductible dansQ[X]et donc dansZ[X]s’il est primitif.

2. Sim/k est radicale, alorsm/lest radicale, maisl/k n’est en générale pas radicale.

La preuve est laissée à titre d’exercice.

Proposition XI.3.Soitm/k une extension de corps et soient l1/k etl2/k deux extensions intermé-diaires. Alors :

1. Sil1/k etl2/k sont radicales, l1l2/k est radicale.

2. Si m/k est radicale, il existe une extension de corps m/m˜ telle que l’extension m/k˜ soit une extension radicale normale.

Démonstration de la proposition. 1. Soient(α1, . . . , αr)et(β1, . . . , βn)deux suites radicales respectivement associées àl1/ket àl2/k. Soientk0⊆k1· · · ⊆kr=l1etk0⊆k1⊆ · · · ⊆kn=l2 les tours radicales associées. Posons alors, pour tout i Nn, kr+i := krki = kr+i1i). Les extensions(kj+1/kj)j∈{0,...,n+r}sont bien radicales élémentaires et forment une tour radicale de l’extension l1l2/k, qui est donc une extension radicale.

2. SoitΩune clôture algébrique dem. La clôture normalem˜ demest une extension normale dek par construction et, comme

˜

m= ∏

σHomk(m;Ω)

σ(m) l’extension m/k˜ est radicale.

Théorème XI.2. Soit k un corps contenant une racine primitive n-ème de l’unité ξ, n 2.

Alors :

Sil/kest une extension radicaleélémentaire admettant{α}comme suite radicale, sir∈Nest le plus petit entier non nul tel queαr∈k, l’extensionl/kest galoisienne cyclique etα|Gal(l/k)|∈k.

Si l/k est une extension galoisienne cyclique, alorsl/k est une extension radicale élémentaire et admet une suite radicale{α}vérifiant αn ∈k.

On démontrera ce théorème dans le dernier Td.

XI-B- 2. Résolubilité par radicaux

DéfinitionXI.3.Soitkun corps etP un polynôme non constant à coefficients dansk. On dit que P est résoluble par radicaux s’il existe une extension radicalel/k dek dans laquelle P soit scindé.

On suppose désormais quek est de caractéristique nulle.

ThéorèmeXI.3.{Théorème de Galois} Pour toutP ∈k[X], les assertions suivantes sont équi-valentes :

i) P est résoluble par radicaux.

ii) Galk(P)est un groupe résoluble.

Par exemple, P =X4+X+ 1est résoluble par radicaux sur Q. En revanche, le polynôme X5 10X+ 5n’est pas résoluble par radicaux.

XI-B- 3. L’équation générique de degré n

On s’intéresse ici à des polynômes irréductibles de la formeP =Xn+an1Xn1+· · ·+a1X+a1 Q[X] . Peut-on résoudre "génériquement" l’équation P(x) = 0? On va considérer les coefficients a0, . . . , an1 comme des indeterminées.

Définition XI.4.Soit k := Q(a0, . . . , an1). Le polynôme générique de degré n est le polynôme P =Xn+an1Xn1+· · ·+a1X+a1 vu dansk[X]. On le note aussiQ.

Proposition XI.4.Qest irréductible sur k etGalk(Q)=Sn.

Démonstration de la proposition.Soitl:=Q(X1, . . . , Xn).lest naturellement muni d’une action de Sn dont les points fixes sont les polynômes de Q(Σ1, . . . ,Σn) où Σ1, . . . ,Σn sont les polynômes symétriques élémentaires. Par le théorème d’Artin,l/lSn est galoisienne de groupe de GaloisSn. Par ailleurs, les relations coefficients-racines permettent d’identifier Q(Σ1, . . . ,Σn)et Q(a1, . . . , an), viaDk(Q)carQest séparable.

Ainsi, Galk(P) = Gal(Dk(P)/k) = Gal(l/lSn) = Sn. Mais S5 n’est pas résoluble, donc l’éqution générique de degré 5 n’est pas résoluble par radicaux.

□ On peut également montrer que, si l’on tire au hasard chacun des coefficients deP uniformément dans[−N;N], en fixant toujoursdeg(P) =n, alors

P[P est irréductible sur Qet de groupe de GaloisSn] −→

N+1

Dans le document Algèbre Avancée R. Abdellatif (Page 50-55)

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