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CHAPITRE 2. CADRE THÉORIQUE

7. Apprentissage mobile

7.6. Cadre théorique de l’apprentissage mobile

Rappelons que Vygotsky (1978) annonçait que les interactions des apprenants avec leur environnement ne sont pas directes, mais médiatisées par l'utilisation des outils et des signes. Ces outils peuvent être physiques, par exemple, les ordinateurs de poche en réseaux

sans fil, ou intellectuels, par exemple, les règles et les rôles affichés sur les ordinateurs de poche. Les outils physiques sont utilisés pour traiter ou manipuler des objets tandis que les outils intellectuels peuvent être utilisés pour influencer un comportement. Cette idée a été développée par Leont'ev (1981) en proposant un modèle hiérarchique pour l'analyse d’une activité. Inspiré par cette analyse, Engeström (1987) a étendu la conceptualisation originale de Vygotsky sur la relation médiatisée entre le sujet et l'objet, en introduisant une version élargie du modèle de triangle d'activité qui intègre également les concepts de Leont'ev. Ainsi, Engeström propose un modèle général de l'activité appelé « Activity theory » (AT) pour analyser les pratiques humaines en tant que processus de développement à la fois individuel et social (Kuutti, 1996) et qui reflète sa nature collaborative. Le modèle AT apporte des contributions importantes aux domaines de la CSCL (Bodker, 1997; Mwanza, 2001; Nardi, 1996); il ne peut être ni compris ni analysé en dehors du contexte dans lequel il se produit. Les composants du modèle, illustrés dans la figure 4, sont : 1) l'objet de l'activité, c’est-à-dire les buts et les intentions; 2) les participants à l'activité, à savoir les personnes engagées; 3) les outils de médiation de l'activité, physiques comme les ordinateurs de poche, ou mentales, comme les modèles; 4) les règles, notamment les normes qui limitent l'activité; 5) la répartition du travail, par exemple, les actions des membres au sein du groupe par rapport aux tâches qui relèvent de la responsabilité du groupe; 6) la communauté, c’est-à-dire les personnes impliquées directement ou indirectement, dans l’activité; et 7) le résultat, plus précisément les résultats et les produits finaux des objectifs définis.

Figure 4. Modèle de la théorie de l’activité (AT) ( Engeström, 1987)

Puisque le modèle AT est un outil descriptif, il est orienté vers la pratique. Il incarne une approche qualitative qui offre un angle différent pour l'analyse d'un processus d'apprentissage et de ses résultats, en se concentrant sur les activités de personnes engagées.

Pour étudier une situation d'apprentissage utilisant une analyse basée sur le modèle AT, les conditions suivantes doivent être remplies (Jonassen et Rohrer-Murphy, 1999) : 1) l'analyse doit être appliquée dans une période de temps suffisante pour que les activités pratiques du sujet puissent être examinées d’une manière appropriée; 2) les chercheurs devraient d'abord chercher les grandes tendances et ensuite chercher les fragments épisodiques étroits; 3) un ensemble varié de méthodes de collecte de données (entretiens, observations et enregistrements vidéo) et de points de vue (le sujet, la communauté et les outils) doit être inclus.

Jonassen et Rohrer-Murphy (1999) ont proposé un cadre théorique basé sur le modèle AT pour la conception des activités collaboratives. En se basant sur l'expérience de Jonassen et Rohrer-Murphy (1999), Zurita et Nussbaum (2007) proposent un cadre conceptuel pour les applications mobiles en apprentissage collaboratif (figure 5), en utilisant comme base le modèle théorique descriptif AT, pour spécifier les composantes du cadre et leurs relations. Ce cadre, comme le montre la figure 5, est constitué de trois grandes composantes : « réseau », « rôles et règles », « activité de collaboration ».

 Dans la composante « réseau », nous faisons la distinction entre les composantes sociale et technologique. La première est composée de la communication face à face entre les membres, tandis que la seconde se compose de communications entre les membres et leurs ordinateurs de poche et/ou seulement entre les ordinateurs de poche des membres. La mobilité offerte par les ordinateurs de poche et l'utilisation de communication sans fil renforcent les interactions sociales de type face-à-face.

 La composante « rôles et règles » contient toutes les normes individuelles ou collectives qui gouvernent l'activité : définir les règles, analyser les règles et les rôles de médiateurs et de médiation. Elle est divisée en composantes sociale et technologique. La composante sociale définit les relations collaboratives entre les membres, tandis que la composante technologique détermine les règles gouvernant le réseau sans fil des ordinateurs de poche qui établit les relations collaboratives entre les membres. La composante des rôles et des règles fournit la responsabilité individuelle et les facteurs de soutien mutuel nécessaire à un apprentissage collaboratif efficace.

 La composante « activité de collaboration » définit notamment les activités éducatives d’apprentissage collaboratif. L'objectif est l'activité qui est l'équivalent de l'objet dans le modèle AT. Les tâches définissent la division du groupe de travail en attribuant la responsabilité des tâches de l’activité et en décrivant la façon dont le groupe sera organisé. Enfin, notons trois types d'activités d’apprentissage collaboratif face à face qui encouragent l'interaction sociale : la gestion, la construction et l'échange. La composante de l’activité de collaboration remplit la responsabilité individuelle, le soutien mutuel et les facteurs d'interdépendance positive pour l'efficacité d’apprentissage collaboratif.

L'élément distinctif du cadre représenté dans la figure 5 est qu'il intègre les pratiques des apprenants et leur interaction avec les objets technologiques à partir du point de vue du modèle AT. Il spécifie également les composantes de la structure. Les deux principales caractéristiques de ce cadre sont: 1) de permettre l'analyse des pratiques humaines avec ces objets, par exemple, la conception de logiciels et les caractéristiques des ordinateurs de poche à partir du point de vue du modèle AT et 2) de préciser la structure, les composantes et les interrelations entre les activités de collaboration, en utilisant les ordinateurs de poche sans fil connectés en mode réseau, pour soutenir les interactions face- à-face entre les membres du groupe.

Figure 5. Cadre théorique basé sur le modèle de la théorie de l’activité d’Engeström (Zurita et Nussbaum, 2007)

7.7. Récapitulation

Dans ce travail, nous avons défini l’apprentissage mobile comme un apprentissage à travers un contexte centré sur l’apprenant et utilisant une technologie fixe ou mobile. Notons également les nombreux avantages de l’utilisation de ces dispositifs. Citons par exemple l’accès à l’information ou aux connaissances, quels que soient le lieu et le moment. La mobilité et la portabilité nous offrent de nouvelles opportunités pour planifier

des activités beaucoup plus efficaces; en effet, elles permettent un apprentissage omniprésent, une interaction sociale en face à face. Les étudiants auront un moyen pour interagir directement, échanger des données et collaborer face à face. En revanche, nous avons identifié quelques limites de l’usage de ces technologies, par exemple la taille de l’écran, la limite de la mémoire, la connexion et les coûts. Nous avons passé en revue les différentes théories pédagogiques utilisées comme supports à des activités d’apprentissage avec des dispositifs mobiles. Nous avons ensuite identifié quelques problématiques distinctes dans le domaine de l’apprentissage mobile : problématique de l’apprentissage contextuel, problématique du conflit entre apprentissage informel personnalisé et l’apprentissage traditionnel en classe, problématique de conception des activités sur des dispositifs mobiles, problématique de l’évaluation de l’apprentissage, problématique de l’intégration des connaissances, problématique de l’usage des dispositifs mobiles en classe en situation de collaboration. Les dispositifs permettent une meilleure communication en face à face et une discussion plus efficace entre les étudiants. C’est dans ce contexte que nous souhaitons explorer l’apport de ces technologies pour l’apprentissage en physique. En effet, nous allons élaborer une activité basée sur une simulation pour créer un déséquilibre cognitif chez l’étudiant et ensuite nous examinons l’apport de technologies mobiles pour soutenir une discussion plus efficace dans le but d’aider les étudiants à mieux gérer ce déséquilibre. La résolution de ce conflit peut mener à une construction de nouvelles connaissances. Pour concevoir des activités MCSCL et pour analyser les besoins, les tâches et les résultats, nous optons pour le modèle AT en nous basant sur le cadre conceptuel de Zurita et Nussbaum (2007).

Plusieurs questions de recherche se posent maintenant pour définir des activités pédagogiques qui favorisent l’apprentissage, en tenant compte des nouvelles possibilités offertes par les technologies mobiles. Aucune recherche n’a abordé la question de l’usage d’une simulation comme outil de modélisation scientifique dans des environnements mobiles d’apprentissage collaboratif. De plus, l’intégration des connaissances est vue comme un défi pour un environnement d’apprentissage orchestré par les dispositifs mobiles.