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Le placement ordonné dans le cadre pénal peut l’être à tous les stades de la procédure : avant jugement dans le cadre de l’instruction préparatoire, lors du jugement par la juridiction qui se prononce sur la culpabilité, au stade de l’application des mesures et des peines. Cette décision émane donc d’instances spécialisées mais différentes : le juge des enfants pour la plupart (à tous les stades), le juge d’instruction ou la juridiction collégiale de jugement (en première instance comme en appel).

Dans tous les cas, cette mesure est toujours de nature éducative, même si elle intervient parfois en complément d’une peine ou en tant que réponse au non respect d’une mesure de contrainte telle que le contrôle judiciaire, ou à l’inexécution d’une sanction éducative.

De ce fait, l’ensemble des exigences posées par la loi n° 2002-2 du 2 janvier 2002 relative aux droits des usa-gers dans le cadre des établissements et services sociaux et médico-sociaux, s’applique aux établissements de la Protection judiciaire de la jeunesse accueillant des mi-neurs et des jeunes majeurs au titre de l’ordonnance du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante1.

1 _ Note interne du 16 mars 2007 relative à la mise en œuvre de la loi du 2 janvier 2002 rénovant l’action sociale.

Ainsi, ont été développés dans ces établissements les documents indivi-duels de prise en charge ou contrat de séjour et le règlement de fonc-tionnement, ainsi qu’une politique d’audit et d’évaluation interne, dont la mise en place récente ne permet pas encore d’en analyser l’efficience.

La Protection judiciaire de la jeu-nesse gérait directement, en 2009 2, 116 établissements de placements éducatifs, auxquels s’ajoutaient 804 structures du secteur associa-tif habilité à accueillir des jeunes au titre de l’ordonnance de 1945. Pour l’année 2008, 9 040 mesures de placement pénal étaient ordonnées (3 860 confiées au secteur public et 5 180 au secteur habilité).

En revanche, les orientations ac-tuelles de la protection judiciaire de la jeunesse étant de recentrer les accueils sur les seuls enfants délin-quants et par conséquent de ne plus prendre en charge les enfants dans le cadre de l’assistance éducative, le projet pour l’enfant, tel qu’il résulte de la loi du 5 mars 2007, ne leur est pas applicable.

Néanmoins, le placement des en-fants délinquants pose de façon spécifique la question des droits de l’enfant du fait de la nature pénale de la mesure.

Sur le plan de la perception du placement

Le placement pénal s’inscrit dans un contexte procédural strict, sur le fondement d’une infraction expres-sément visée par la décision de justice, et fait suite à un acte judi-ciaire qui relie l’acte à l’adolescent (la mise en examen ou la condam-nation). De ce fait, le placement est ressenti symboliquement comme une contrainte, l’approche éduca-tive n’étant plus perçue dans sa fonction première d’assistance et de protection, trop abstraite pour ces jeunes3.

À cette première difficulté s’ajoute le fait que, dans l’esprit de ces ado-lescents, le placement est souvent vécu comme plus contraignant que l’emprisonnement. Cela peut s’expli-quer notamment par deux constats : - d’une part, les efforts demandés quotidiennement aux jeunes placés sont importants. Ainsi, cette étude4 identifie « ce qui fait réellement peine » pour la majorité des mineurs entendus en trois éléments : la sépa-ration (d’avec la famille et les amis), la souffrance causée aux parents et l’accomplissement d’efforts dans un temps donné.

- d’autre part, comme l’indiquait le rapport de la Défenseure des enfants relatif aux « Enfants délinquants pris en charge dans les centres édu-catifs fermés » (juin 2010), « pour beaucoup d’adolescents, la prison est vécue comme une « sanction » personnelle acceptable au regard de l’acte commis. En revanche, le placement est une « sanction » familiale puisqu’elle induit que les parents ne sont pas en capacité de gérer le comportement de leur enfant. Or, il est très difficile pour

ces adolescents, quelle que soit la qualité de leur relation avec leurs parents, d’accepter que l’institution pointe une quelconque défaillance de leur part. De ce fait, l’adhésion au placement est bien plus difficile à obtenir. »

Focus

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2 _ Source : Chiffres clés de la Justice 2009.

3 _ Aspects de l’ordonnance du 2 février 1945 vue par 331 mineurs, 18 avril 2008 : étude réalisée par l’inspection de la DPJJ.

Extrait : « … prendre en compte le fait que la plupart des mineurs entendus sont très mal à l’aise avec le maniement des abstractions.

Tout se passe comme s’il était plus facile de nous parler spontanément de peine ou de punitions, sous la forme d’actions concrètes et « simples », ayant un début et une fin. L’éducation est, elle, une notion plus abstraite, complexe et dont la mise en œuvre est plus diluée dans le temps. ».

4 _ Aspects de l’ordonnance du 2 février 1945 vue par 331 mineurs, 18 avril 2008.

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Sur le plan strictement juridique

Du fait de ce contexte procédural et psychologique particulier, la place donnée aux droits de l’enfant devrait être essentielle. Ils sont néanmoins conditionnés, pour nombre d’entre eux (accès aux loisirs, liberté d’ex-pression, maintien des liens fami-liaux, etc.), par la procédure en cours dont la nature même conduit les magistrats, gardiens des libertés individuelles, à en limiter expressé-ment la portée.

La vigilance de la Direction de la protection judiciaire de la jeunesse doit donc porter sur le fait, qu’en dehors d’une décision judiciaire, l’ensemble de ces droits soit bien respecté dans les établissements de placement éducatif, tant sur le plan théorique au sein des cahiers des charges, projets de service, etc., qu’au quotidien dans les pra-tiques éducatives mises en œuvre.

À titre d’exemple, elle avait réalisé en 2003 une analyse des droits aux-quels le placement en centre édu-catif fermé porte potentiellement atteinte. La Défenseure des enfants avait d’ailleurs préconisé que ce travail de qualité fasse l’objet d’une publicité particulière par le biais d’une annexe au cahier des charges des centres éducatifs fermés5. Parallèlement, la Direction de la pro-tection judiciaire de la jeunesse a poursuivi son effort de développe-ment des droits des jeunes usagers tout en renforçant l’accompagne-ment de ses personnels, notaml’accompagne-ment en matière de gestion de la violence 6. Quelques exemples des démarches réalisées par la Direction de la pro-tection judiciaire de la jeunesse pour garantir les droits des enfants accueillis.

Le maintien des liens familiaux – La circulaire d’orientation sur l’action d’éducation dans le cadre pénal du 2 février 2010 7 rappelle la place essentielle des parents dans l’ac-tion éducative : « Outre le respect de la loi du 2 janvier 2002 et de ses obligations, l’action d’éduca-tion garantissant la réelle impli-cation des représentants légaux contribue à préserver leur place et leur rôle dans l’éducation de leur enfant. Place et rôle que les mineurs acceptent le plus souvent et attendent, même s’ils les mettent à l’épreuve de façon fréquemment

« Le principe de participation relève de la mission d’action éducative car participer, c’est non seulement prendre la parole, mais également écouter, s’intéresser, donner un avis et argumenter. La participation ne se décrète pas, elle s’apprend. Cette démarche peut permettre un rap-prochement parents-jeunes-service.

C’est un outil favorisant le « faire avec » le jeune et non plus seule-ment pour le jeune. De la même façon, ces instances de participa-tion peuvent constituer un levier au changement des pratiques, un lieu d’apprentissage de la démocratie et de la citoyenneté au même titre que l’éducation à la citoyenneté mise en avant dans le cadre de l’éducation nationale par la loi d’orientation sur l’éducation de 1989 ».

Sur le plan des parcours L’ensemble des efforts accomplis en termes de droits vise à garantir à l’adolescent confié une protection dans le cadre de sa prise en charge.

Or, une telle protection n’est réelle

que si elle tient compte de l’ensemble du parcours du jeune. Dans le cadre pénal, la question du parcours est particulièrement prégnante puisque la réponse judiciaire intervient consé-cutivement au passage à l’acte de l’adolescent (réel ou présumé) et doit se garder de constituer elle-même une forme de passage à l’acte violent en réaction à ce comportement.

Au niveau de la prise en charge édu-cative, la Direction de la protection judiciaire de la jeunesse a toujours cherché à harmoniser les parcours, notamment en instituant des services

« fils rouges ». Néanmoins, la Défen-seure des enfants8 a rappelé combien la question des parcours était liée à celle de la cohérence du dispositif glo-bal de prise en charge, tant au regard du nombre de places disponibles que de l’articulation entre les procédures pénales et d’assistance éducative. Sur ce dernier point, elle appelait l’atten-tion sur le risque de stigmatisal’atten-tion de l’adolescent confié pénalement à un établissement et revendiquait le droit, pour celui-ci, de ne pas subir de discri-mination en se voyant fermer l’accès à des établissements de protection de l’enfance ou accueillir de façon diffé-rente par l’équipe éducative en raison des affaires pénales dans lesquelles il était impliqué.

5 _ Enfants délinquants pris en charge dans les centres éducatifs fermés : 33 propositions pour améliorer le dispositif (proposition n°8).

6 _ Cf. Note interne de la DPJJ du 9 mars 2009 relative à l’accompagnement d’équipes confrontées à des situations de violence, mission confiée au comité de pilotage de la mission violence de la DPJJ.

7 _ NOR JUS F 1050001.

8 _ « Enfants délinquants pris en charge dans les centres éducatifs fermés : 33 propositions pour améliorer le dispositif », juin 2010.

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