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Cadre éthique et déontologique, précautions méthodologiques dans la recherche

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 124-127)

La démarche méthodologique amène à poser un certain nombre de problèmes éthiques et déontologiques pour tenter d’assurer une validité scientifique à la recherche.

Cette démarche nécessite de se référer aux règles éthiques définies par la communauté scientifique, en se rapportant à la loi Huriet (1988, modifiée et actualisée en 2004), qui a pour fonction de protéger les personnes contre les risques de l’expérimentation et de la recherche biologique ou médicale, mais aussi au code de déontologie des psychologues (1996) ou encore au code de conduite des chercheurs établi par Caverni (1998). Le chercheur doit d’autre part prendre appui sur sa propre éthique, c’est-à-dire agir en fonction de ce qu’il pense être bien pour le sujet.

Dans tous les cas, la question est d’effectuer ses choix dans le respect des droits de la personne, en assurant notamment sa dignité, sa liberté et sa protection.

L’accès à la population et l’utilisation des données fournies par nos groupes de référence impliquent un consentement éclairé des sujets pour participer à la recherche (Benony, 1999).

Chaque sujet adolescent, et ses parents lorsqu’il était mineur, ont pu exprimer un consentement informé et libre. Au-delà des critères d’information concernant les objectifs et la procédure de la recherche, la garantie de l’anonymat et de la confidentialité, le droit de se retirer à tout moment, et le droit au feed-back, le fait de veiller au consentement des personnes sollicitées nous a amené à nous interroger sur la valeur de ce consentement et l’intérêt que présente la recherche pour le sujet. « Quelles sont les conséquences d’une évaluation psychologique sur la personne ? A-t-on le droit de réveiller chez certains sujets des souvenirs enfouis, douloureux, qui ne demanderaient qu’à être oubliés alors que l’objectif de la recherche n’est pas thérapeutique, même si incidemment il peut l’être ? » (Benony, 1999).

Dans quelques cas, et notamment au niveau du groupe d’étude clinique, il nous a semblé que le consentement de certains sujets pouvait s’expliquer par une forme de loyauté familiale. Comme le souligne Pedinielli (1994), les motivations conscientes et inconscientes qui amènent une personne à accepter de participer à une recherche peuvent revêtir des significations variées voire ambiguës. Afin de prendre en compte les diverses attentes et désamorcer les éventuelles craintes des sujets participant, il a été précisé à chacun que les conclusions de la recherche ne

seraient envisagées que de manière générale et qu’il ne serait question de compte-rendu personnalisé.

En fin de protocole, une synthèse du contenu des deux séances a été réalisée, et nous avons proposé à chaque sujet de s’exprimer sur la manière dont il avait vécu la passation. Il n’a pas semblé nécessaire de proposer un soutien psychologique extérieur. Cependant, quelques sujets ont pu faire part de leur surprise face à certaines questions qu’ils ne s’étaient jamais posés et qui les amenaient dès lors à ouvrir leur champ de réflexion. Nous supposons que ces rencontres ont pu avoir des répercussions sur le vécu des frères et sœurs en question, mais nous n’avons pas les moyens de les évaluer directement.

Le recueil des données, qui constitue un des moments fondamentaux où la subjectivité du chercheur est sollicitée (Bourguignon, 1995), a donné lieu à un questionnement sur notre positionnement.

En effet, les outils cliniques et projectifs induisent une implication du psychologue, lequel doit tenter de faire la part entre ce qui lui appartient et ce qui relève de la situation clinique en elle-même. L’entretien clinique implique toujours une asymétrie entre les interlocuteurs (Chiland, 2002). En situation de recherche, la demande émane du chercheur et non pas du sujet, il s’agit de s’assurer que le sujet parvient à déployer sa propre subjectivité. Cette démarche suppose d’être attentif aux aspects relationnels, à ce que le chercheur peut provoquer ou induire chez le sujet.

La relation avec quelques sujets adolescents a nécessité de lever certaines résistances pour pouvoir favoriser leur engagement dans une dynamique intersubjective. Quelques aménagements dans le protocole se sont révélés nécessaires. Le Rorschach, initialement proposé lors de la première séance, a été reporté à la deuxième séance en inversant l’ordre de passation avec le TAT. Sachant que le Rorschach induit une régression plus forte que le TAT compte tenu de la nature de son matériel (Emmanuelli, 2001), cette modification nous a permis de mieux préparer son introduction et de lui consacrer plus de temps. La réalisation de l’activité d’écriture, qui s’est révélée coûteuse pour un nombre important de sujets, nous a amené à nous interroger sur le cadrage de la consigne dans l’espace et dans le temps : offrir la possibilité ou non de différer le retour après l’investigation, proposer plusieurs moyens de transmission (voie postale, voie électronique plus congruente avec les pratiques actuelles des adolescents), donner ou non une indication sur les dimensions du texte attendu. Tout au long de l’investigation auprès des adolescents, une question récurrente a été celle de faire la part entre ce que le sujet

voulait nous transmettre et ce qu’il pouvait réellement élaborer, la difficulté étant d’apprécier quelles pouvaient être les limites de notre intervention pour éviter de se montrer intrusif.

A l’inverse, l’investigation auprès des parents du groupe d’étude clinique a nécessité parfois d’adopter une attitude de fermeté pour pouvoir inscrire l’entretien dans une durée limitée. La difficulté ici a été surtout de pouvoir être suffisamment contenant dans une position de neutralité bienveillante, sans outre passer nos fonctions d’étudiant-chercheur, face à la souffrance exprimée et à la demande d’aide qui pouvait être sous-jacente. La recherche d’une position de « bonne distance » (Benony, 1999) a supposé une analyse de nos propres contre-attitudes et des émotions engagées dans la relation.

Dans une démarche de co-construction du sens tel que l’entend Blanchet (1989), le sujet et le chercheur construisent ensemble le sens du discours en apportant chacun leurs investissements, leurs désirs, leurs représentations par rapport à l’objet d’étude. Par la prise en compte de sa subjectivité, le chercheur analyse la relation instaurée pour tenter de saisir la réalité psychique du sujet. Aussi, il doit combiner à sa rigueur méthodologique l’analyse de ces dimensions transférentielles pour accroître la pertinence de ses interprétations. Or, toute la difficulté peut-être, comme le souligne Devereux (1980), de pouvoir gérer l’angoisse que peut susciter les données pour le chercheur, sans s’accrocher à une méthodologie rigide et à une théorie

« idéologique » sécurisante inspirée par le contre-transfert, mais au contraire en prenant conscience de cette angoisse et en tentant de la comprendre dans ses diverses significations.

Une question majeure qui s’est posée au cours de la recherche a été celle du choix d’arrêter le recueil de données à un moment donné. Cherchant à contrôler les facteurs d’échantillonnage définis pour rendre les deux groupes comparables, la taille des deux groupes de sujets s’accroissait sans jamais parvenir à remplir l’ensemble des critères posés au départ. Le parti pris a été alors celui de faire le deuil d’un idéal méthodologique pour éviter de se perdre sous la masse des données, et d’accepter que par la complexité des variables prises en compte la recherche clinique ne peut prétendre démontrer les causalités, généraliser ses résultats (Bourguignon, 1995).

Dans le document The DART-Europe E-theses Portal (Page 124-127)

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