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Le motif en « doigt de zinc » de type C2H2 a été initialement découvert dans le facteur de transcription TFIIIA chez Xenopus laevis où il est nécessaire à la transcription de l’ARN 5S par l’ARN polymérase III. En effet, lors de la purification de TFIIIA, il a été mis en évidence qu’il renfermait un motif répété d’environ 30 acides aminés présentant des résidus cystéine et histidine conservés. L’analyse de la séquence primaire de TFIIIA fait apparaître une séquence consensus dans ce motif répété : Ф-X- Cys-X2-5-Cys-X3-Ф-X5-Ф-X2-His-X3-5-His (où X représente un acide aminé variable et Ф un résidu

hydrophobe).

La structure en solution de ce motif a été résolue (Lee et al., 1989) et montre une structuration en doigt de zinc qui adopte une conformation ββα. Les deux premiers résidus cystéine impliqués dans la coordination du zinc sont retrouvés dans la boucle située entre les deux brins β alors que les deux résidus histidine sont retrouvés dans la partie C-terminale de l’hélice α (Figure 17). Dans ce domaine, l’ion zinc joue un rôle structural important pour le maintien de la structure tertiaire. Cette structure tertiaire est aussi stabilisée par un cœur hydrophobe.

Le doigt de zinc est retrouvé dans des protéines eucaryotes impliquées dans des fonctions diverses telles que la prolifération cellulaire, la différentiation ou le développement (Pabo and Sauer, 1992). Ce type de domaine est généralement retrouvé en répétition en tandem chez les eucaryotes mais aussi chez des procaryotes comme chez certaines bactéries associées aux eucaryotes. Le mode de reconnaissance de l’ADN de ce type de domaine de liaison à l’ADN a été caractérisé suite à la résolution de la structure du complexe formé par une protéine murine Zif268, qui comporte trois doigts de zinc successifs, et sa cible ADN (Pavletich and Pabo, 1991) (Figure 18A). Chaque doigt de zinc utilise la partie N-terminale de l’hélice pour contacter les bases de l’ADN dans le grand sillon. Ainsi, la liaison de ces doigts de zinc successifs conduit la protéine à s’enrouler autour de l’ADN. Les trois doigts de zinc sont orientés de telle façon que le premier se trouve près de l’extrémité 3’ du brin sens du site cible et le troisième près de l’extrémité 5’.

Peu de contacts sont réalisés par les brins β qui sont situés à l’extérieur de la double hélice, cependant un résidu arginine situé en position 1 du premier brin β contacte le squelette de l’ADN. Un autre contact avec les phosphates de l’ADN est réalisé par la chaîne latérale du premier résidu histidine impliqué dans la coordination du zinc. Ces deux interactions contribuent au bon positionnement du doigt de zinc afin que celui puisse interagir de façon spécifique avec les bases de l’ADN.

Chaque doigt de zinc se lie à l’ADN de façon similaire et réalise des contacts spécifiques avec quatre paires de bases qui se chevauchent sur la dernière paire de bases. Quatre positions de l’hélice α vont être utilisées pour contacter l’ADN. Les positions -1, 3 et 6 de l’hélice α sont impliquées dans des contacts avec le brin sens du site cible alors que le résidu en position 2 contacte l’autre brin (Figure

Figure 17 : Le motif en doigt de zinc C2H2

Structure en solution du doigt de zinc, code PDB 1znf (Lee et al., 1989). Les brins β sont colorés en rouge et l’hélice α est colorée en bleu. Les chaînes latérales du motif C2H2 sont colorées en mauve.

18B-C). Pour chacun des doigts de zinc, les positions -1 et 2 sont identiques et correspondent respectivement à un résidu arginine et un résidu aspartate. L’arginine en position -1 est impliquée dans la mise en place d’une liaison hydrogène bidentée avec la guanine en position 3’ de chaque site. Cette interaction est stabilisée par le groupement carbonyle de la chaîne latérale de l’aspartate qui contacte aussi une adénine ou une cytosine sur le brin complémentaire sur la paire de bases précédent la guanine. Les autres interactions bases spécifiques sont réalisées par les positions 3 et 6 qui sont identiques pour le premier et le troisième doigt de zinc mais diffèrent pour le deuxième. Dans les doigts de zinc 1 et 3, la position 3 est occupée par un glutamate qui contacte une cytosine via des contacts hydrophobes. Dans le second doigt de zinc, la position 3 est occupée par un résidu histidine qui génère une liaison hydrogène avec une guanine et forme des contacts de Van der Waals avec le groupement méthyle de la thymine. Pour la position 6, on retrouve un résidu arginine pour les doigts de zinc 1 et 3 qui contacte une guanine en 5’ de chaque sous site de reconnaissance. Par contre, pour le second doigt de zinc, cette position est occupée par un résidu thréonine qui ne contacte pas l’ADN.

Figure 18 : Reconnaissance spécifique réalisée par Zif268.

(A) Structure cristallographique de Zif268 lié sur sa cible ADN, code PDB 1zaa, (Pavletich and Pabo, 1991). (B) Schéma explicatif de la reconnaissance spécifique réalisée par Zif268. Les liaisons hydrogène sont marquées par des flèches alors que les contacts de Van der Waals sont repérés par des flèches à bout rond, (Wolfe et al., 2001). (C) Alignement des séquences protéiques des trois doigts de zinc de Zif268, (Wolfe et al., 2001).

Figure 19 : Classification des doigts de zinc de type C2H2.

Les doigts de zinc « canoniques » ont un mode de reconnaissance semblable à celui de Zif268 alors que les doigts de zinc dits « non standard » proposent des contacts avec l’ADN différents (Wolfe et al., 2001).

Le mode de reconnaissance relativement simple de la protéine Zif268 a permis de générer des doigts de zinc artificiels permettant de cibler de nouvelles séquences ADN (Pabo et al., 2001). De plus, la nature modulaire de la reconnaissance permet de générer des unités protéiques capables de cibler quatre paires de bases, ces unités pouvant ensuite être reliées afin de moduler la longueur de la nouvelle cible ADN. Ces domaines de liaisons à l’ADN artificiels peuvent être fusionnés à un domaine trans-effecteur, régulant directement la transcription. Ainsi, il est désormais possible de générer des facteurs de transcription artificiels qui pourront avoir des visées thérapeutiques (Papworth et al., 2006). Dans cette optique, de nouveaux facteurs de transcription, capables d’induire une activation de la transcription sur le promoteur du gène VEGF-A (in vitro), ont permis la formation de néo-vaisseaux sanguins in vivo chez la souris (Pasqualini et al., 2002, Rebar et al., 2002).

De nombreuses structures de complexes doigt de zinc - ADN ont été résolues et ont révélé que tous les doigts de zinc ne se lient pas à l’ADN exactement comme Zif268. Il peut y avoir des variations dans l’orientation du domaine vis-à-vis de l’ADN, des variations dans les contacts spécifiques mais aussi des variations dans l’espacement entre les sous sites reconnus par les différents motifs doigts de zinc d’une même chaîne polypeptidique. De ce fait, une classification a été établie : la première classe regroupe les doigts de zinc « canoniques » qui se lient à l’ADN comme Zif268 et les doigts de zinc « non standards » qui diffèrent dans leurs interactions avec l’ADN (Figure 19). En effet, dans la plupart des cas, les interactions réalisées par les positions 3 et 6 sont conservées et les différences se font plutôt au niveau des positions -1 et 2. Ces différences ouvrent de nouvelles portes afin de concevoir des motifs doigts de zinc artificiels utilisant des motifs non standards afin d’augmenter la sélectivité et la spécificité de reconnaissance (Wolfe et al., 2001).