CHAPITRE V : ETUDE SUR LES HUMINES
V.3. C. Caractéristiques physico-chimiques
V.3.C.1. Modification morphologique de la pâte à papier prétraitée 211
V.3.C.2. Modification chimique 213
V.3.C.3. Modification de la porosité de la pâte à papier prétraitée 214
V.3.C.4. Profils de dégradation thermique des substrats 215
V.4. Conclusion 217
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V.1.Introduction
Les prétraitements chimiques ou physico-chimiques, en conditions d’auto-hydrolyse ou en
présence d’acide, permettent majoritairement l’hydrolyse des hémicelluloses afin de rendre la
cellulose plus accessible aux enzymes. Il a été vu que, pour des conditions opératoires de plus en plus
sévères, les hémicelluloses se dégradent rapidement en monomères puis en produits de dégradation. Si
les conditions de prétraitement sont encore plus poussées, il a été observé la formation de composés de
dégradation « ultime », nommées humines, qui conduisaient à une diminution drastique de la réactivité
des substrats à l’hydrolyse enzymatique. La présence des humines a ainsi été décrite dans différentes
études, généralement de manière indirecte, grâce à leur caractère insoluble qui conduisait à une
augmentation de la teneur en lignine Klason (Donohoe et al. (2008) ; Sievers et al. (2009) ;
Sannigrahi et al. (2011)). Leurs mécanismes de formation, leur nature chimique et leur impact sur la
réactivé à l’hydrolyse enzymatique restent cependant encore peu étudiés dans la littérature car
l’objectif de la majorité des articles consiste principalement à optimiser les conditions opératoires afin
d’obtenir les meilleurs rendements en sucres totaux après prétraitement ou après hydrolyse
enzymatique sans chercher à étudier les phénomènes sous-jacents. Ces derniers points apparaissent
donc comme nécessaires à approfondir.
Afin d’étudier la formation des humines et leur impact sur la réactivité à l’hydrolyse
enzymatique, il a été choisi de travailler, dans un premier temps, sur des substrats modèles qui soient
représentatifs des trois composants majoritaires (cellulose, hémicelluloses et lignine) d’une biomasse
lignocellulosique : la cellulose Avicel, le xylane d’épis de maïs et la lignine de paille de blé. Ces 3
substrats modèles ont alors subi, chacun à leur tour, une étape de cuisson acide dans des conditions
sévères de prétraitement afin de favoriser la formation des humines. Ensuite, les mêmes substrats ont
été mélangés deux à deux avant d’être à nouveau prétraités dans les mêmes conditions, cette fois-ci
pour étudier les effets synergiques potentiels. Finalement une cuisson acide du mélange complet,
constitué des 3 substrats modèles, a été opérée pour parachever l’étude.
Dans un second temps, afin de se rapprocher d’un substrat plus réaliste, une pâte à papier
(substrat délignifié contenant de la cellulose et des hémicelluloses) a été précuite à des sévérités
croissantes de prétraitement et comparée aux résultats obtenus sur de la paille de blé dans des
conditions identiques.
L’objectif de cette étude étant de mieux comprendre la formation des humines et leur impact
sur l’hydrolyse enzymatique, les caractérisations physico-chimiques se sont principalement focalisées
sur la fraction solide qui est récupérée après prétraitement.
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V.2.Etude sur les substrats modèles
V.2.A.Stratégie expérimentale
L’objectif de cette étude est de comprendre l’influence des constituants majoritaires de la
biomasse lignocellulosique sur la formation des humines. Il a donc été choisi de travailler sur trois
substrats modèles représentatifs des fractions cellulosique, hémicellulosique et ligneuse d’une
biomasse :
- la cellulose Avicel PH101 (Sigma Aldrich) qui est une cellulose très cristalline souvent
utilisée dans la littérature
- le xylane d’épis de maïs (Roth) qui se rapproche le plus de la composition des hémicelluloses
de paille de blé
- la lignine Protobind qui provient de l’extraction de la lignine d’une paille de blé.
La composition chimique des substrats modèles utilisés dans cette étude est fournie dans le
Tableau V.1. Les potentiels en galactose, mannose et arabinose ne sont pas donnés ici car les valeurs
sont en dessous du seuil de détection. Les résultats d’analyse montrent que la cellulose Avicel est très
pure (95.7 %pds de cellulose sur base sèche). Le xylane d’épis de maïs est, quant à lui, moins
homogène puisqu’il possède une quantité non négligeable d’unités glucose (13.2 %pds sur base sèche)
en plus de ses unités xylose (92.0 %pds sur base sèche). Enfin la lignine de paille de blé Protobind est
principalement constituée de lignine insoluble (84.5 %pds sur base sèche).
La séparation des fractions solide et liquide après cuisson étant réalisée sur des filtres en quartz
à 11 µm, il a été nécessaire de réaliser des blancs sur chacun des substrats modèles afin d’en évaluer la
fraction « réellement » solide (c’est-à-dire non soluble et ne passant pas un filtre 11 µm). Pour ce faire,
chaque substrat modèle a été introduit dans une quantité d’eau suivant un ratio massique de 1 pour 10.
Le mélange a été maintenu 1 h à 50°C puis filtré sur Büchner en utilisant un filtre en quartz de 11 µm.
Les résultats montrent que la cellulose Avicel PH101 et la lignine Protobind sont fortement insolubles
et constituées de particules de taille supérieure à 11 µm puisque les fractions récupérées sur le filtre
sont respectivement de 99.97 et 94.25 %pds.A l’inverse, le xylane d’épis de maïs semble se solubiliser
facilement car le filtre ne retient que 1.89 %pds.
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Tableau V.1 : Analyse compositionnelle des substrats modèles
Cellulose Avicel PH101 Xylane d’épis de maïs Roth Lignine de paille de blé Protobind Potentiel glucose/MS %pds 106.33 ±2.93 13.18 ±1.32 sd* Potentiel xylose/MS %pds sd* 91.96 ±5.12 sd*
Teneur en composés insolubles/MS %pds sd* sd* 84.49 ± 0.69
Teneur en cendres/MS %pds 0.13 ± 0.01 0.19± 0.04 1.63± 0.09
Masse de solides récupérés après
filtration (filtre 11µm) %pds 99.97 ± 0.10 1.89 ±0.76 94.25 ±0.22
* seuil limite de détection
Pour étudier l’influence de ces 3 substrats modèles et dans l’optique d’une comparaison finale
à de la paille de blé, ces derniers ont été introduits dans les différents mélanges réactionnels (400 g à
10 %MS) en conservant les proportions relatives présentes dans la paille de blé de l’étude (Tableau
V.2). Au total, sept cuissons acides ont ainsi été réalisées, 3 en utilisant les substrats modèles seuls, 3
en les couplant deux à deux et la dernière en utilisant le mélange des trois. La quantité de liqueur
d’imprégnation a, quant à elle, toujours été fixée à 360 mL pour chaque cuisson. En conséquence, la
teneur en matière sèche des mélanges réactionnels varie d’un essai à l’autre. Par exemple, pour le
mélange mécanique cellulose + lignine, 16.61 g de cellulose Avicel, 6.04 g de lignine Protobind et
360 mL de liqueur d’imprégnationont été introduits dans le réacteur avant de réaliser l’opération de
cuisson : la teneur en matière sèche du mélange réactionnel a donc été de 6.31 %pds.
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Tableau V.2 : Quantités introduites de chaque substrat modèle
Mélange de référence basé sur la paille de
blé Mélange de substrats modèles
Equivalent polymérique /MS (%pds) Masse dans 40 g de mélange à 10%MS (g) Masse de cellulose Avicel*(g) Masse de xylane Roth*(g) Masse de lignine Protobind*(g) Cellulose 39.82 15.93 C 16.65 - - X - 9.96 - Xylane 24.43 9.77 L - - 6.11 C+L 16.61 - 6.04 Lignine 14.43 5.77 C+X 16.68 9.96 - X+L - 9.90 6.02 C+X+L 16.62 9.86 6.11 *
Prise en compte de la MS des substrats modèles pour la cellulose Avicel (95.50 %pds MS) pour le xylane Roth (97.87 %pds MS) et pour la lignine Protobind (95.21 %pds MS)