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Comme il a été mentionné, les évènements de bruit de fond et de signal utilisés dans la comparaison des données à notre modèle sont simulés, à l'exception du bruit fond dit QCD. Il est appelé ainsi car il est lié à la présence de jets (potentiellement de bas pT) dans l'évènement, ce qui est typique des collisionneurs hadroniques.

Le bruit de fond QCD est un bruit de fond dont l'origine est physique mais dont la présence s'explique par des eets instrumentaux2. Comme il a été discuté en détail dans la section 4.5, des

désintégrations semi-muoniques peuvent survenir dans les jets de b. Le muon ainsi produit est a priori rejeté par la sélection lâche de l'analyse W H, puisqu'on demande que le muon ne soit pas dans un jet. Le détecteur DØ n'étant pas parfait, le jet qui contient le muon peut ne pas être reconstruit, surtout si son impulsion transverse est faible. C'est la raison pour laquelle les critères d'isolation serrés sont introduits. Comme ils reposent sur l'activité autour du muon dans le trajectographe et le calorimètre et non sur les jets reconstruits, ils permettent de rejeter beaucoup plus de bruit de fond QCD. Bien sûr ces critères d'isolation ne sont pas parfaits, et du bruit de fond QCD, c'est-à-dire des muons qui ne proviennent pas de la désintégration d'un W , subsiste encore.

Comme c'est un eet de détection qui contamine notre échantillon, il est très dicile, voire im- possible de simuler le bruit de fond QCD. On a donc recourt à une technique d'estimation statistique appelée méthode de la matrice, que l'on applique sur les données.

5.7.1 La méthode de la matrice

Soit Nloose et Ntight le nombre de muons observés avec les critères d'isolation lâche et serrés respectivement. Nloose est la somme du nombre de muons provenant d'un W , Nµ et du nombre de muons provenant d'un jet NQCD:

Nloose= Nµ+ NQCD (5.32)

On peut écrire l'expression de Ntight de façon similaire, mais

1. il faut pondérer Nµ par l'ecacité des critères d'isolation serrés sur des muons vraiment isolés, notée tight

2. il faut pondérer NQCD par la probabilité qu'un muon provenant d'un jet passe les critères d'isolation serrés, notée pµjet. On l'appelle aussi fake rate

On obtient donc l'équation

Ntight = tightNµ+ pµjetNQCD (5.33) tight et pµjet sont des paramètres que l'on mesure sur les données en fonction de l'impulsion transverse du muon, comme on va le voir au paragraphe 5.7.2. Dès lors qu'on les connait, on peut résoudre le système constitué des équations 5.32et5.33:

Nµ=

Ntight− pµjetNloose tight− pµjet

NQCD=

tightNloose− Ntight tight− pµjet

(5.34) En plus de NQCD il faut aussi obtenir la forme de la distribution du bruit de fond QCD. Pour cela, on procède de la manière suivante :

1. comme les critères d'isolation serrés dépendent de pµ

T, on applique la méthode de la matrice dans huit plages de pµ

T, listées dans le tableau 5.16. Pour chaque zone, la valeur centrale est choisie pour estimer tight et pµjet

2. Notons que dans le canal W H → eνb¯b, des jets mal identiés comme des électrons constituent le bruit de fond QCD

Zone pµT 1 15 - 20 GeV 2 20 - 25 GeV 3 25 - 30 GeV 4 30 - 40 GeV 5 40 - 50 GeV 6 50 - 60 GeV 7 60 - 70 GeV 8 >70 GeV Tab. 5.16  Zones de pµ

T dans lesquelles on applique la méthode de la matrice.

2. an d'obtenir la forme du bruit de fond QCD dans chaque distribution, la méthode de la matrice est appliquée sur chacun des histogrammes que la chaîne d'analyse produit. Dans chacun de ces histogrammes, la méthode de la matrice est appliquée bin à bin. Ainsi on connait la contribution du bruit de fond QCD dans chaque bin et on obtient donc sa distribution

3. lorsque l'on veut comparer données et simulation, on resomme toutes les zones en pµ T

5.7.2 Estimation de tight et pµjet

Il est nécessaire de connaître tight et pµjet pour pouvoir résoudre l'équation 5.34 et calculer la contribution du bruit de fond QCD dans les échantillons lâche et serré. Ces quantités sont des para- mètres que l'on estime à partir des données.

Rappelons que nous utilisons les critères d'isolation serrés appelés TopP14 (voir section3.1), qui sont traces X ∆R(traces,µ)<0,5 ptraceT pmuon T < 0,06 cellules X 0,1<∆R(cellules,µ)<0,4 ETcellule pmuonT < 0,08 ∆R(jet,µ) > 0,5 (5.35)

Les deux premières coupures dépendent de l'impulsion transverse du muon ; par conséquent, nous estimons tight et pµjet en fonction de pµ

T. tight

tight est l'ecacité des critères d'isolation serrés sur des muons qui proviennent vraiment d'un boson vecteur W ou Z0. Autrement dit, il s'agit simplement de l'ecacité de la coupure serrée par rapport à la coupure lâche. Elle est montrée sur la gure 5.50. tight est estimé sur des données Z0 → µµ. On constate que la dépendance en pµT n'est pas du tout négligeable. L'ecacité moyenne des critères TopP14 est de 89%.

Fig. 5.50  Le paramètre tight en fonction de l'impulsion transverse du muon. Les carrés verts représentent l'ecacité des critères TopP14. À titre de comparaison, la courbe d'ecacité est également montrée pour les isolations TopScaledLoose (cercles bleus) et NPTight (triangles rouges). L'ecacité moyenne de la coupure TopP14 est de 89%.

pµjet

L'estimation de pµjet est faite à partir des données qui sont utilisées dans l'analyse. La question à laquelle on veut répondre est simple : si l'on se place dans une zone de l'espace des phases de notre échantillon qui ne contient que des évènements QCD, quelle proportion passera les critères d'isolation serrés? An de se retrouver dans cette zone de l'espace des phases nous eectuons les mêmes sélections que dans l'analyse proprement dite, à deux exceptions près:

1. on demande une énergie transverse manquante petite an d'exclure les vrais évènements W + jets. Si 6ET est petite, alors on devrait rejeter les évènements avec un neutrino, donc réduire la contamination provenant des W . On demande 6ET < 10 GeV

2. on n'applique pas la coupure triangulaire. Celle-ci est en eet pensée pour tuer le bruit de fond QCD ; si on l'applique avec 6ET < 10 GeV, la statistique obtenue est trop faible pour pouvoir en tirer une conclusion

En outre, on utilise dans l'échantillon à trois jets l'estimation obtenue dans les évènements à deux jets.

Comme la contamination par des muons provenant d'un W ou d'un Z0 est toujours possible, on utilise les processus simulés pour évaluer cette contribution. On applique le même ensemble de coupures aux processus simulés, puis on soustrait leur contribution normalisée à leur section ecace respective, en tenant compte du facteur de normalisation pour les processus W et Z0+ jets.

L'analyse est eectuée sur l'échantillon avec isolation lâche et sur celui avec isolation serrée. pµjet étant la probabilité qu'un muon QCD passe les coupures d'isolation serrées , on dénit pµjet comme le rapport du nombre de muons serrés à celui de muons lâches, après soustraction de la contamination

W et Z0: pµjet = N µ,tight data − N µ,tight simu

Ndataµ,loose− Nsimuµ,loose (5.36) On ajuste ensuite une fonction de pµ

T sur le rapport obtenu. Les points expérimentaux ainsi que le résultat de l'ajustement sont montrés sur la gure5.51. La fonction retenue est un polynône de premier degré. Après ajustement, on a

pµjet = −0,0271 + 0,00664 · pµT (5.37)

Fig. 5.51  Le paramètre pµjet en fonction de l'impulsion transverse du muon. Les points noirs (bleus) représentent les valeurs de pµjet sans (avec) soustraction de la contamination W et Z0. Après soustraction, on ajuste un polynôme de premier degré sur les points expérimentaux.

Processus 2 jets 3 jets W H + ZH 3,23 ± 0,68 0,82 ± 0,17 W Z 303,8 ± 63,8 65,8 ± 13,8 W b¯b 403,1 ± 100,8 135,0 ± 33,8 t¯t 105,3 ± 22,1 166,4 ± 34,9 Single-top 57,6 ± 12,1 18,4 ± 3,9 QCD Multijet 465,5 ± 102,4 173,6 ± 38,2 W + jj + W + cj + W + cc 8 910 ± 1 425 1 823 ± 291 Total attendu 10 246 (n.a.d.) 2 383 (n.a.d.)

Total observé 10 246 2 383

Tab. 5.17  Nombre d'évènements attendus, par processus, pour mH = 115 GeV, et nombre d'évène- ments observés avant étiquetage des jets de b. Le signal n'est pas compté dans la normalisation. Sont montrés les chires correspondants aux échantillons à exactement deux ou trois jets. n.a.d signie normalisé aux données ; par construction, le nombre d'évènements attendus est donc égal au nombre d'évènements observés.