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Les Bonsi et la Réforme catholique dans le diocèse de Béziers

Dans le document Le rapport à l'autre dans l'ancienne France (Page 62-112)

Passion et rêve jamais assouvis, l’Italie, napolitaine ou milanaise, échappe aux tentatives répétées de mainmise des rois Valois. Mais si l’Italie ne devient pas fran-çaise, la France s’italianise au  siècle, attirant nombre de Florentins, de Romains et autres transalpins qui, dans les affaires, les arts, la religion, la politique, apportent leur savoir-faire, leur habileté, leur expérience, leur dévouement, à la Cour et dans les provinces¹. Béziers n’a pas échappé à cette invasion péninsulaire qui, pendant et après les guerres d’Italie, investit le royaume comme l’écume d’un renoncement, un peu comme la vague couscoussière qui déferla sur la France, après l’effacement de l’Algérie française. Comme bien des diocèses, surtout méridionaux, avec Narbonne, Carcassonne, Saint-Pons, Mende, Saint-Papoul, Agde, Viviers pour se limiter au Languedoc², Béziers accueille une succession familiale de prélats « étrangers »,

. Voir le livre, informé et passionnant, de Jean-François D,La France italienne. - siècle, préface de Daniel R, Paris, Aubier, , VII- p. (« Coll. historique »). À com-pléter par : Jules M, « Le clergé italien en France au  siècle »,RHEF,  a., t. XI, , octobre-décembre , p. -.La France et l’Italie au temps de Mazarin, Jean S (dir.), Grenoble, Presses univ. de Grenoble, ,  p. Marc V, « Évêques italiens et pastorale dans la France du  siècle », dansÉchanges religieux entre la France et l’Italie du Moyen Âge à l’époque moderne, Michele M et André V (dir.), Genève, Slatkine, , p. -. Jean B, « L’Italie française ».Italianisme et antiitalianisme en France à la fin du  siècle, thèse de doctorat d’État, univ. Paris IV, ,  p. Hélène D, « L’entourage des Concini : les étrangers et leur image entre  et  », dansLe sentiment national dans l’Europe moderne, Paris, Presses de l’univ. de Paris-Sorbonne, , p. - (Bull. de l’association des historiens modernistes des Uniersités, n ). Jacqueline B,Présence italienne à Lyon à la Renaissance, Lyon, Éd. Lugd, s. d. [],  p. Jean-François D, « Les Italiens dans les villes françaises, - siècles », dansLes immigrés et la ville. Insertion, intégration, discrimination, - siècles, Denis M et Jean-Luc P (éd.), Paris, L’Harmattan, , p. -.Passer les monts. Français en Italie, l’Italie en France, -, Jean B (éd.), Paris, Champion-Firenze, Edizioni Cadmo, ,  p.

. Michel P,Les évêques de l’ancienne France, Lille, Atelier de reproduction des thèses — Paris, Champion, , t. I, p. , , , , ,  et t. II, p. .

 L   ’  ’ F

immigrés du parti français en Italie : un Strozzi et un Médicis de  à ¹; cinq Bonsi, Florentins, comme les Strozzi et les Médicis, de  à . Formant chaîne et presque dynastie, quatre générations de Bonsi se succèdent sur le siège épisco-pal biterrois², pendant près d’un siècle, et constituent la plus longue série d’évêques italiens du royaume. La dernière nomination d’un membre du lignage intervient dans la deuxième moitié du  siècle, en , en la personne de Pierre Bonsi, deux ans avant la translation d’un autre péninsulaire, Hyacinthe Serroni, d’Orange à Mende³.

Au vrai, sont-ils Italiens, ces cinq, et presque six, Bonsi qui, pendant un siècle, tiennent Béziers, devenu une sorte d’apanage religieux : omas I de  à ⁴, Jean de  à ⁵, omas II de  à ⁶, Clément de  à ⁷, Pierre

. Mathilde B D,Les évêques italiens de l’ancien diocèse de Béziers (-), t. I, Toulouse, Édouard Privat-Paris, Alphonse Picard, , p. - (Laurent Strozzi, -), - ( Julien de Médicis, -).

. Marie-Hyacinthe L o.p., art. « Diocèse de Béziers », dansDHGE, t. VIII, , col. - (carte, col. ).

. André C o.s.b. et Fernand C c.m., « France. Épiscopologe », dans

DHGE, t. XVIII, Paris, Letouzey et Ané, , col. -.

. omas I Bonsi (Florence, -Béziers,  décembre ), évêque de Béziers de  à  :

DHGE, t. XI, , col. .DBF, t. VI, , col. .Dizionario biografico degli Italiani, t. XII, Roma, Istituto della Enciclopedia italiana, , p. - (Bernard B, art. « Tommaso Bonsi »).

Pierre A,Catalogue des Evesques de Beziers, À Beziers, Par Jean Martel, , p. -. ÉmileSabatier,Histoire de la ville et des évêques de Béziers, Béziers, Carrière-Paris, J.-B. D, , p. -. M. B D,Les évêques italiens de l’ancien diocèse de Béziers[...], t. I, Toulouse-Paris, , p. -. Frédéric-J. B,Change and Continuity in the French Episcopate. e Bishops and the Wars of Religion (-), Durham, Duke University Press, , p. -.

. Jean Bonsi (Florence, -Rome,  juillet ), évêque de Béziers (-), cardinal ( août ) :DHGE, t. IX , col. .DBF, t. VI, , col. .Dizionario biografico degli Italiani, t. XII, , p.  - (Bernard B, art. « Giovanni Bonsi »).

P. A,Catalogue des Evesques de Beziers, Béziers, , p. -. É. S,Histoire de la ville et des évêques de Béziers, Béziers-Paris, , p. -. M. B D,Les évêques italiens de l’ancien diocèse de Béziers[...], t. I, Toulouse-Paris, , p. -.

. omas II Bonsi (-Béziers,  août ), évêque de Béziers (-) :DHGE, t. IX, , col. .DBF, t. VI, , col. .Dizionario biografico degli Italiani, t. XII, , p. - (Bernard B, art. « Tommaso Bonsi »).

P. A,Catalogue des Evesques de Beziers, Béziers, , p. -. É. S,Histoire de la ville et des évêques de Béziers, Béziers-Paris, , p. -.

. Clément Bonsi (-Béziers,  octobre ), évêque de Béziers (-) :DHGE, t. IX, , col. .DBF, t. VI, , col. -.Dizionario biografico degli Italiani, t. XII, Roma, , p. - (Bernard B, art. « Clemente Bonsi »).

P. A,Catalogue des Evesques de Beziers(armes de Clément Bonsi au titre), Béziers, , p. -. É. S,Histoire de la ville et des évêques de Béziers, Béziers-Paris, , p. -.

U « F  » 

de  à ¹et un évêque inabouti, Dominique², le coadjuteur de Jean ? Tous voient le jour au-delà des monts ; naissance à Florence certaine au moins pour trois d’entre eux : omas en ³, Jean en ⁴, le coadjuteur Dominique en ⁵; probable pour omas en , Clément en , Pierre en  ; mais ils échappent à la condition d’aubain et deviennent naturels français⁶, après coup, pendant leur épiscopat ou, à partir de la troisième génération, avant leur nomina-tion. Ainsi Jean Bonsi reçoit du roi Henri IV des lettres de naturalité en août ⁷; Dominique, en septembre ⁸; omas II, à l’âge de huit ans, en mars ⁹.

. Pierre Bonsi (Florence,  avril -Montpellier,  juillet ), évêque de Béziers (-), archevêque de Toulouse (), cardinal ( février ), archevêque de Narbonne () :DHGE, t. IX, , col. -.DBF, t. VI, , col. -.Monspeliensia. Recueil de pièces rares ou inédites des  et  siècles, Montpellier, Société des bibliophiles de Montpellier,  (« La Rose et la Violette », fable, ).

Michel P  L R,Oraison funèbre de M l’illustrissime et eminentissime Pierre de Bonzy[...], Montpellier, Jean Martel, ,  p. (Bibl. mun. Montpellier,   / ). S-S,

Mémoires[...], Yves C (éd.), Paris, Gallimard, t. II, , p. -, « Bibliothèque de la Pléiade », . É. S,Histoire de la ville et des évêques de Béziers, Béziers-Paris, , p. -. En attendant une étude d’ensemble du dernier des Bonsi (quelques documents rassemblés par Paul C, « Pierre de Bonzi, cardinal-archevêque de Narbonne, président des États de Langue-doc »,Recherches languedociennes, UTT Montpellier, Groupe d’études languedociennes, n , ,  p.), seule la période de Narbonne a inspiré quelques travaux sur des points particuliers : Xavier A, « Pierre de Bonzi, abbé commendataire de Sainte-Marie de Valmagne (-) et les prieurs de Montagnac »,Bulletin des amis de Montagnac, n , octobre , p. -. Jean P, « Les demoiselles de Gévaudan et la marquise de Ganges »,Revue du Gévaudan, des Causses et des Cévennes, n.s., n , juillet-décembre , p. -. Xavier A, « Une assemblée des évêques du Languedoc au sujet des Nouveaux Convertis.  », dansFédération historique du Languedoc méditerranéen et du Roussillon. XXX et XXXI congrès (Sète-Beaucaire, -), Montpellier, Impr. Paul Déhan, [], p. -. Robert S, « Les évêques du Bas-Languedoc et la Révocation », dansLa réocation de l’édit de Nantes et le protestantisme ançais en , Roger Z et Laurent T (éd.), Paris,SHPF, , p. - (en part., p. -).

. Dominique Bonsi (Florence, -Béziers,  avril ), évêque coadjuteur de Béziers (-) :DHGE, t. IX, , col. .DBF, t. VI, , col. .Dizionario biografico degli Italiani, t. XII, , p. - (Bernard B, art. « Domenico Bonsi »).

P. A,Catalogue des Evesques de Beziers, Béziers, , p. -. É. S,Histoire de la ville et des évêques de Béziers, Béziers-Paris, , p. . M. B D,Les évêques italiens de l’ancien diocèse de Béziers[...], t. I, Toulouse-Paris, , p. -.

. Dizionario biografico degli Italiani, t. XII, , p. . . Dizionario biografico degli Italiani, t. XII, , p. . . Dizionario biografico degli Italiani, t. XII, , p. .

. Jean-François D, art. « Étrangers en France », dansDictionnaire de l’Ancien Régime[...], Lucien B (dir.), Paris, PUF, , p. -.

. Arch. nat., X¹A , fol.  r.- r., lettre de naturalité de Jean Bonsi enregistrée au Parlement de Paris le  février .

. Arch. nat., X¹A , fol.  v.- v., lettre de naturalité de Dominique Bonsi, septembre , enregistrée par le Parlement de Paris, le  mars . M. B D,Les évêques italiens de l’ancien diocèse de Béziers[...], t. I, Toulouse-Paris, , p. -.

. Arch. nat., X¹A , fol.  v.- v., lettre de naturalité de omas Bonsi, mars , enregistrée par le Parlement de Paris, le  mai 

 L   ’  ’ F

Chacun, « estrangier natif de Florence et non originaire des pais, terres et seigneu-ries » de France, désire continuer, à « limitation de [leurs] ancestres », les « fidelles services » au roi et « vivre et mourir en cestuy [...] Royaulme » comme « vray et loyal subiect¹».

Au-delà de cette francisation formelle, les Bonsi se détachent de la terre mère, se désitalianisent, afin de donner à leur mainmise sur Béziers force et durée. Loin d’ex-hiber leur origine, de la cultiver, de la protéger et de la perpétuer, ils cherchent à se différencier le moins possible de leurs homologues français de souche, à se fondre dans le milieu où ils sont appelés à évoluer. Même s’ils continuent à avouer dans leur corps une possible ethnicité péninsulaire et familiale², trois signes montrent leur volonté d’intégration. Leur formation, italienne pour les deux premiers de la dynastie (padouane pour Jean, docteurin utroque jure³), devient française dès Dominique, amené dans le royaume pour embrasser la carrière ecclésiastique⁴, et omas II, conduit en France à l’âge de six ans, qui fait ses humanités chez les jésuites du collège royal de La Flèche⁵. Pourquoi ces transferts de garçons si jeunes ? Pour alimenter le vivier Bonsi et, en tenant prêts desbambini, frères ou neveux, éle-vés à la française, faire face à une éventuelle disparition inopinée du titulaire, et à la perte consécutive du siège. Les premiers Bonsi, Jean, Dominique et omas II, choisissent, pour lieu de sacre, Rome, manifestant par là leur attachement au Saint-Siège : le  septembre , pour Jean ; le  juin , à Saint-Louis-des-Français, pour Dominique ; le  avril , à La Trinité-des-Monts, pour omas II. Le der-nier de la dynastie, Pierre, abandonne, par volonté d’intégration, Rome pour Paris et l’église Saint-Étienne-du-Mont ; des consécrateurs italiens pour des évêques lan-guedociens (François Bosquet, évêque de Montpellier, Michel Tubeuf, évêque de Saint-Pons, et Louis Fouquet, évêque d’Agde⁶). Enfin, même dans le choix de leur entourage, volontiers péninsulaire au départ, les Bonsi ne tardent pas à épouser le Languedoc biterrois.

Le concordat de Bologne, conclu en  entre François I et Léon X, réserve au roi la nomination aux évêchés⁷. La dévolution d’un diocèse et de ses revenus sert

. Arch. nat., X¹A , d’après la lettre de naturalité de Dominique Bonsi.

. Raoul B et Claude M,Portraits des évêques biterrois des ,  et  siècles, préface de Michel P, Béziers, , p. - ( Jean, omas II, Clément, Pierre : huiles sur toile conservées dans la sacristie de la cathédrale Saint-Nazaire de Béziers) : « le front large, le nez long sont des Bonsi » (p. ).

. Dizionario biografico degli Italiani, t. XII, , p. . . Dizionario biografico degli Italiani, t. XII, , p. .

. Dizionario biografico degli Italiani, t. XII, , p. .

. A. C et F. C, « France. Épiscopologe », dansDHGE, t. XVIII, , col. -.

. M. P,Les évêques de l’ancienne France, Lille-Paris, , t. I, p. - ; « Pouvoir et épiscopat dans le Languedoc moderne »,Études sur l’Hérault, t. XIII, , , p. - (en part., p. ).

U « F  » 

au monarque à assurer des dévouements à la couronne. Dans le cas particulier de Béziers, un cousin germain de la reine Catherine de Médicis, Laurent Strozzi, passe les Alpes en  et obtient, pour services rendus, le siège de Béziers. Il ne lâche sa prise que pour la remettre à son beau-frère, Jules de Médicis, en  qui lui-même voit lui succéder en , après une vacance du siège de quelques années, son vicaire général, omas Bonsi, cousin des Strozzi et des Médicis par les Soderini¹. Ces cousinages des Bonsi, non pas parents des Bourbons mais leurs alliés, les engagent envers la famille royale : Catherine de Médicis achève ses lettres à omas I par l’af-fectueuse souscription avant signature : « Votre bonne cousine²», et Louis XIV lui-même donne toujours du « Mon cousin » à Pierre, le dernier de la dynastie, dans une lettre datée du  septembre . Au-delà des liens de l’apparentement, la constance de la faveur royale pour les Bonsi tient à la double assurance que donne au monarque ce lignage. Par son origine transalpine, il échappe aux enracinements, aux solidarités et aux compromissions avec les féodalités locales. Devant tout au roi, sa naturalité et son assise sociale et financière, il doit en retour au souverain une obéis-sance sans faille. De surcroît, bien en cour à Rome, il ne peut qu’être attentif aux initiatives et impulsions romaines et, à l’occasion, si nécessaire, servir de médiateur entre le roi et le Souverain Pontife.

Au nom de la raison, la postérité sépare le politique du religieux et, dans le cas précis des Bonsi, qui se donnent et se dévouent au roi et à Dieu, elle oppose les deux domaines. Si, en matière de service du monarque, les Bonsi, de l’avis com-mun, atteignent l’excellence au risque d’être jugés à la botte du pouvoir royal, leur action pastorale, comme évêque inspire des jugements contradictoires, le plus sou-vent embarrassés, persifleurs, voire ironiques. Évêque de Montpellier et de Béziers, le futur cardinal de Cabrières cède, en , aux préjugés anti-Bonsi, formés par un  siècle nationaliste et gallican, en les réduisant à « des seigneurs mondains, des négociateurs habiles, d’adroits ambassadeurs³». Connaisseur avisé de l’Hérault religieux, et non moins sévère, Gérard Cholvy craint que les Bonsi n’aient été, pour l’inauguration de la Réforme catholique dans le diocèse de Béziers, moins une aide qu’un lourd handicap : « On peut se demander si une telle succession fût de la meilleure inspiration pastorale⁴. » En sens inverse, dans un brillant chapitre de l’Histoire de Béziersdirigée par Jean Sagnes, Michel Fournier voit dans la succession

. M. B D,Les évêques italiens de l’ancien diocèse de Béziers[...], t. I, Toulouse-Paris, , p. , . Voir figure I, p. , « Les Bonsi et leurs alliances ».

. Catherine de Médicis à omas I Bonsi, Paris,  juin . M. B D,Les évêques italiens de l’ancien diocèse de Béziers[...], t. I, Toulouse-Paris, , p. .

. François-Marie-Anatole R  C, « Lettre-préface » à M. B D-,Les évêques italiens de l’ancien diocèse de Béziers[...], t. I, Toulouse-Paris, , p. XI.

. Gérard C, « Le legs religieux de l’Ancien Régime au département de l’Hérault »,

 L   ’  ’ F

des évêques italiens « un grand argument » pour le triomphe de la foi dans la ville et dans le diocèse¹.

Sans réduire les avancées de la religion, comme au bon vieux temps de l’histoire épiscopale, aux seules initiatives des évêques, faut-il créditer les Bonsi du mérite d’avoir engagé leur diocèse dans la voie de la Réforme et poussé sa tridentinisation assez loin pour faire de leur ville épiscopale un bastion de la foi²? Et s’ils l’ont entre-pris et réussi, ces anciens aubains, oncle, neveux et frères confondus, l’ont-ils fait par souci d’importer des réalités d’outre-monts, d’italianiser leur nouvelle patrie, ou par adhésion au mess age conciliaire, par volonté d’affirmer leur double fidélité de bons Français au roi et à l’Église ?

Pour les Bonsi, comme pour leurs contemporains nés natifs, pour Richelieu et pour Mazarin, comme pour ceux de l’ombre, le service de Dieu et du prince vont de pair et, loin de contrarier l’enrichissement personnel et le profit du clan, ils les autorisent et les postulent. Jusqu’à l’obsession, le souci, — et le génie —, des Bonsi est de durer, de faire série, d’enter³la famille sur l’Église de Béziers, de conserver à ses proches le bénéfice biterrois octroyé par le collateur royal, d’un rapport d’en-viron   écus en ⁴, de   livres à la fin du  siècle⁵. Deux formes de cooptation leur permettent d’atteindre cette fin et de conjurer le risque d’une rupture de la succession dynastique sur le siège de Béziers : la résignationin fao-rempassée devant notaire qui permet à omas I de transmettre de son vivant la charge épiscopale à son neveu Jean en , sept ans avant sa mort qui n’intervient que le  décembre  ; la coadjutorerie qui suppose d’obtenir du roi la nomi-nation d’un coadjuteur avec promesse de succession⁶. Jean Bonsi croyait avoir fait œuvre de prévoyance en obtenant, pour son neveu Dominique, la charge de pre-mier aumônier de la reine Marie de Médicis⁷. En , il fait de lui son coadjuteur,

. Michel F, « Mentalités et culture aux  et  siècles » (chap. X), dansHistoire de Béziers, Jean S (dir.), Toulouse, Privat, , p.  (« Pays et villes de France »).

. M. F, dansHistoire de Béziers, Toulouse, , p. .

. P. A,Catalogue des Evesques de Beziers, Béziers, . Dédicace à Clément de Bonsi. Enter : greffer en insérant un scion.

. Marc V, « Les rapports de visitesad liminades évêques de Béziers », dansFoi, fidélité, amitié en Europe à la période moderne. Mélanges offerts à Robert Sauzet, Brigitte M (éd.), Tours, Public. de l’université de Tours, , t. I,Du Languedoc à la Touraine. Les clercs, spiritualité et vie matérielle, p. .

. Mémoire pour l’instruction du duc de Bourgogne, Françoise M (éd.), Paris, CTHS, , p. .

. M. P,Les évêques de l’ancienne France, Lille-Paris, , t. I, p. . M. V, « Évêques italiens et pastorale dans la France du  siècle », dansÉchanges religieux entre la France

et l’Italie du Moyen Âge à l’époque moderne, M. M et A. V (dir.), Genève, , p. .

. Jean Bonsi, grand aumônier de la reine Marie de Médicis depuis  ; Dominique Bonsi, aumô-nier (-), premier aumôaumô-nier () de la reine Marie de Médicis. J.-F. D,La France italienne[...], Paris, , p. .

U « F  » 

un évêquein partibusde Césarée en Cappadoce, un abbé de Saint-Aphrodise de Béziers¹. L’année suivante, le  juin , pour le préparer à ses futures responsa-bilités, il l’associe à la gestion du diocèse en le nommant vicaire général, il lui cède, la même année , l’administration temporelle d’Aniane et de Saint-Guilhem-le-Désert². Tout est prêt pour que Dominique succède à Jean dans la plénitude de ses revenus et de ses charges, quand, le  avril , l’imprévisible survient : la mort, à Béziers, après une brève maladie, du neveu deux mois et cinq jours avant que ne décède, à Rome, l’oncle cardinal « aymé et estimé pour sa grande bonté et suffi-sance³». Aussitôt parvenue à Rome la triste nouvelle, Jean s’entremet auprès du secrétaire d’État, Paul Phélypeaux de Pontchartrain pour obtenir du roi la « coadju-torerie » et les deux abbayes de Saint-Guilhem et d’Aniane pour un autre sien neveu qui, épiscopable improvisé, n’a pas suivi, à la différence de son frère aîné Dominique, de carrière pré-épiscopale :

Monsieur, J’envoie exprés en court mon secrétaire pour les causes qu’il vous fera entendre et luy ay commandé de vous aller visiter de ma part et vous prier que, sui-vant l’affection que vous m’avez tousjours tesmoignée, il vous plaise de m’assister de vostre faveur et protection auprès du Roy affin que Sa Majesté accorde à mon nep-veu de Vaillan, la coadjuterie de mon evesché et de mes deux petites abbayes, estant ladicte coadjuterie cessée par le décès de l’Evesque de Césarée, son frère. J’espère que sa dicte Majesté aura agréable de me consoler en ceste mienne affliction, m’octroiant ladicte grâce, dont je luy demeureray très obligé, et à vous aussy de ce qu’il vous plaira y contribuer et me remettant à ce que mon dict secrétaire vous dira de plus⁴[...].

Le temps presse, la mort de Dominique afflige le cardinal. La goutte le tourmente et l’accable. Malgré la souffrance, la plume court sur le papier. Après le ministre, il sollicite la reine mère, sa cousine, en faveur de omas II. Il réunit ses dernières forces pour en appeler à l’autorité suprême, le roi Louis XIII, dont le bon plaisir pourrait assurer à son neveu, parfait praticien de la langue française, la succession de l’évêché et de l’une des deux abbayes languedociennes, Saint-Guilhem-le-Désert. Obsédé par le souci d’éviter « la ruyne de [sa] maison » et de la « maintenir avec honneur asprez [lui⁵] », il avance, sans donner son nom, un autre neveu, un autre neveu Bonsi (Clément, chanoine de Saint-Pierre de Rome), qu’il place en réserve du siège de Béziers et qui, en cas de nouveau malheur, pourrait remplacer omas.

. Antonin S, « État monastique de Béziers avant . Notices sur les anciens cou-vents d’hommes et de femmes d’après des documents inédits »,Bulletin de la Société archéologique, scientifique et littéraire de Béziers,  s., t. XIV,  livraison, , p. .

. Arch. nat., V⁵ , fol.  v.- r.

. Bibl. nat. Fr., ms. fr. , fol.  v., Raby à Puysieulx,  juillet . M. B D,

Les évêques italiens de l’ancien diocèse de Béziers[...], t. I, Toulouse-Paris, , p. .

. Jean Bonsi à Paul Phélypeaux de Pontchartrain, Rome,  mai . Philippe T  L-, « Trois lettres inédites de deux évêques et d’un coadjuteur de Béziers »,Bull. de la Soc. archéol., scient. et litt. de Béziers,  s., t. VIII,  livraison, , p. .

 L   ’  ’ F

Afin de lui donner quelque racine et intérêt en Languedoc, il demande au roi de lui

Dans le document Le rapport à l'autre dans l'ancienne France (Page 62-112)