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Texte M arie-Josèplie Luisier Photos O. Ruppen et Ph. M ahassen

Une odeur de tronc fendu et de copeaux dans un b ruit de m achines et le décor d’une usine électrique d’avant-guerre : Bois Homogène S. A. à Saint-Maurice. De la route canto­ nale, on devine à peine, à travers les arbres, les chem inées et l’enchevê­ trem ent des tuyaux de la fabrique. Mais dans la cour, comme on est petit, face aux stères de bois qui s’accum ulent avant d’être hachés m enu ! Ce bois sent encore la forêt lorsqu’il s’agit des « bas m orceaux » de feuillus ou de résineux, en pro­ venance du Valais, de Vaud et de la Haute-Savoie. Cependant, su r les 60 000 stères annuels q u ’ingurgite l’usine, les trois quarts consistent en déchets de scierie.

Un peu plus que le temps d’une visite approfondie... et voilà les troncs et les déchets de bois transform és en pan­ neaux de particules.

- « Panneaux de particules » ? Q u’est- ce que c’est ? Je croyais que l’on disait tout sim plem ent du bois homo­ gène !

A cette réflexion, le directeur Jean- Louis Frachebourg ne peut s’em pê­ cher de sourire. Sourire amusé du spécialiste, mais sourire satisfait aussi du responsable de la fabrica­ tion d’un produit dont le nom propre devient nom com m un dans le langage courant, à l’in star du frigidaire, du larousse, du solex, de l’éternit. - L’expression « panneaux de particu­ les » désigne les panneaux formés de copeaux agglomérés avec de la résine synthétique, utilisés dans l’ébéniste- rie, l’am énagem ent intérieu r et dans les stru ctu res du bâtim ent lui-même

comme parois porteuses, sous-plan- chers, sous-toitures, élém ents de façades, etc.

L’industrie des panneaux de particu­ les dém arre à la fin de la seconde guerre mondiale et suit la même croissance rapide que celle des plas­ tics. C’est en 1954 que s’engagent les prem iers pourparlers en vue de l’ins­ tallation d’une usine à Saint-Mau­ rice.

- Pourquoi Saint-M aurice?

- Le choix s’est porté su r ce lieu, dit M. Frachebourg, parce qu’il y avait possibilité d’utiliser les bâtim ents vacants de l’ancienne usine de la ville de Lausanne, situés au Bois-Noir et aussi en raison de facilités d’approvi­ sionnem ent à proximité. Il n ’existait pas d’au tre s fabriques de ce genre en Suisse rom ande. A ujourd’hui, nous sommes encore les seuls.

En 1957, Bois Homogène S.A. com­ m ence sa production. La progression sera rapide. Dès 1959, on passe à la m arche continue à trois équipes. En 1966, le rem placem ent de la chaîne initiale par u n m atériel nouveau dou­ ble le débit. Un atelier p our le ra in u ­ rage des panneaux est créé en 1975. Cette année, on a rationalisé à nou ­ veau la chaîne de production, élargi la capacité de débitage, agrandi les halles de stockage, puis installé, à la fin août, le d ern ie r né des ordina­ teurs IBM, le système 34.

- Avec nos 30 000 m 3 p a r an, nous avons une capacité modeste face aux 180 000 m:! d’autres entreprises suis­ ses du genre, déclare le directeur Jean-Louis Frachebourg. Les trois quarts de notre production sont

ven-dus en Suisse, mais nous exportons, depuis quelques années, en Italie du Nord, en Savoie ainsi q u ’en direction de pays en voie de développem ent tels que l’Iran, la Turquie, le Viet­ nam du Nord, la Tunisie, le Nigèria... Financée d’abord p ar un industriel de Berne, l’usine de Saint-Maurice intéresse très tôt la Banque Canto­ nale du Valais. En 1964, celle-ci pos­ sède la majorité des actions qu’elle cède en 1974 au groupe Pavatex, pro­ priétaire de fabriques à Cham (ZG) et à Fribourg (Fibres S.A.). Le chiffre d’affaires de Bois Homogène S.A. s’est élevé, en 1977, à 14 millions de francs.

- Comme toutes les entreprises liées à la construction, nous subissons les effets de la récession, ajoute M. Fra- chebourg. La concurrence est im por­ tante, car il y a surcapacité générale. C’est pourquoi nous avons spécialisé notre production.

A ujourd’hui, l’usine de Saint-Mau­ rice s’est créé u ne solide réputation dans la fabrication des panneaux Homogen PH conçus p our ré sister à l’hum idité de l’air, des panneaux prêts à la pose destinés particulière­ m ent aux planchers et aux sous-toitu- res, des panneaux ignifugés, des p an ­ neaux traités contre les champignons et les term ites, expédiés dans les pays tropicaux.

Des contrôles journaliers étendus sont effectués au laboratoire où l’on teste la résistance m écanique des bois agglomérés, leu r réaction face au feu ou aux champignons, etc. Des orientations nouvelles sont tentées par M. B ernard Pochon, diplômé du

A g a uche, co m m a n d e d e la p res s e c h a u ff a n te

En bas, d e g a u c h e à d r o it e : la m a tiè r e p r e m i è r e (les dosses d e scierie) ; v ue g é n é ra le de la ha lle d e fab r ic a tio n ; les c o p e a u x so n t ta m isé s à la so rtie d e s séchoirs.

technicum du bois de Rosenheim (Allemagne) et responsable du sec­ te u r « recherche et développem ent ». Soixante-cinq personnes travaillent à Bois Homogène S.A. Les ouvriers se re cru ten t de Martigny à Vouvry et font trois équipes de h uit heures, l’usine n ’a rrêtan t ses m achines que le dimanche, d u ra n t quinze jours en été et une sem aine à Noël. Les jeunes qui com m encent sont rapidem ent ini­ tiés au m aniem ent des machines autom atiques et des engins.

Il y a, dans cette usine de Saint-Mau- rice, un mélange assez étrange d’ancien et de moderne, de dim en­ sions hum aines et gigantesques. On pourrait y to u rn e r u n film de science- fiction.

Les escaliers qui grim pent six étages, les m urs gris, les fenêtres rom anes de la vieille usine électrique contrastent avec les broyeuses, les tapis roulants su r lesquels sautent les copeaux, les chaudières, les énorm es va-et-vient, les silos de stockage et les séchoirs. Il faut plus de quinze opérations dif­ férentes p our que le tronc devienne p anneau de particules. Les bois am e­ nés dans la cour par camion sont d’abord stockés pour leu r faire

per-Page de g a uche, de h a u t en bas : c la ir-o b s c u r d a n s la halle d ’u s in a g e ; scie de g r a n d déb it c o m m a n d é e é le c tro n iq u e ­ m e n t ; à la so rtie de la p resse , les p a n n e a u x s o n t refro id is d a n s u n « reg is tre » d e g r a n d form at.

dre une partie de leu r hum idité, puis déchiquetés et fragmentés. Ils sont ensuite raffinés, séchés et triés, stoc­ kés à nouveau puis encollés.

On forme alors des « gâteaux de copeaux » de l’épaisseur désirée. Ingrédients quotidiens de cette tarte : 300 stères de bois et 10 tonnes de colle ! Pressés et chauffés jusqu'à 200 degrés, les « gâteaux » sont m ainte­ n an t des panneaux de particules qui passent aux opérations de finition telles que pesage, délignage, ponçage, débitage ainsi que rain urag e et profi­ lage selon les dem andes. Enfin, c’est à nouveau le camion qui ferm e la boucle et am ène le produit fini à son destinataire.

Une fine poussière de bois su r le nez, des copeaux tièdes comme des m èches de cheveux dans la main, on pourrait se croire dans l’atelier d’un m enuisier. Mais les machines énor­ mes et bruyantes, les plafonds hauts, les panneaux qui s’em pilent ju squ’à form er de petites montagnes nous ra m ènent aux dim ensions d’une usine que l’on parcou rt les poings fer­ més, comme si l’u n e de ces scies à l’allure folle allait soudain nous débi­ ter les doigts !

M arie-Josèphe Luisier.

Ci-dessous, u n é c h a n tillo n ; à droite, M. B e r n a rd Pochon devant le sc h ém a de f a b r ic a tio n ; les h a lle s d e sto ck ag es d é b o u c h a n t s u r la r o u te ca n to n a le .

2 Stockage

3 Broyage

4 Séchage

5 Triage

7 Encollage

8 Formation

pressage

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