• Aucun résultat trouvé

Chapitre 1 : Etat de l’art

2.4 Les Piles à combustible

2.4.2 Les Biopiles à combustible

2.4.2.2 Les Biopiles abiotiques

2.4.2.2.2 Biopiles abiotiques in vivo

Historiquement, les premières biopiles qui ont été implantées étaient abiotiques. Pour exemple, on peut citer les travaux de Drake et al. [67] qui développèrent une biopile abiotique dont le système et les électrodes étaient séparés via un jeu de membranes en silicone et de dialyse permettant la séparation des molécules d’oxygène et des glucides. Leur système fut implanté en sous-cutané dans un chien et fonctionna in vivo sur une période de 30 jours, donnant une performance stable de 2,2 µW.cm-2.

Quelques temps après, une autre biopile abiotique fut présentée par P. Malachesky et al. lors de la septième conférence inter société sur l’ingénierie de la conversion d’énergie. Cette biopile fut capable de fonctionner in vivo dans la veine d’un mouton donnant une densité de puissance de 40 µW.cm-2, malheureusement, moins d’une heure après l’implantation, la biopile ne fonctionnait plus.

Quelques années après, Weidlich et al. décrivent dans leurs travaux en 1976 [68], un système de biopile abiotique constitué d’une anode métallique d’aluminium et d’une cathode métallique d’argent (figure 32a). Un total de 6 Bfc ont été implantées entre les muscles abdominaux internes et externes obliques de chiens. Les auteurs expliquent que 4 de ces Bfc ont démontré des d.d.p. trop faibles pour être mesurées par induction. Une de ces Bfc a pu être implantée durant 180 jours (figure 32b), durant lesquels la puissance délivrée n’était pas stable, diminuant de 60 à 20 µW les 30 premiers jours, puis augmentant jusqu’à 50 µW avant d’osciller pendant les 100 derniers jours[68].

Figure 32: a/ Bfc abiotique de Weidlich et al. composée d’une anode métallique d’aluminium et d’une cathode métallique de d’argent b/Puissances des bfc implantées dans des chiens : 1/ 180 jours, r=5 KOhms ; 2/ 40 jours et in vitro pendant 110 jours, r= 13,25 kOhms [68]

Malgré les efforts mis en place, ces dispositifs n’offrent pas des puissances suffisamment intéressantes pour alimenter les DMIas. Les auteurs de ces travaux se sont également heurtés à des soucis de biocompatibilitéet de bio encrassement. Ils ont toutefois proposé des optimisations de leur Bfc via de nouveau enrobage à base de résine époxy [68] (figure 33a) ainsi qu’en entourant l’anode d’aluminium par deux cathodes composées de charbon actif jouant le rôle de catalyseur de l’ORR. Le fait d’entourer l’anode de cathode a limité la réaction parasite de l’ORR à l’anode.

Weidlich et al. ont pu ainsi implanter deux Bfc et mesurer une d.d.p. sur 380 et 809 jours (figure 33b). Les auteurs indiquent que l’une des deux Bfc (figure 33b-1) a entrainé une forte inflammation et l’expérience a dû être stoppée, la d.d.p. mesurée avant la fin de l’expérience semblait se stabiliser vers 330 mV. A contrario, la seconde Bfc implantée n’a engendré aucune complication, et une tension moyenne a pu être mesuré à 775 mV pour une puissance moyenne de 73 µW. Toutefois, l’allure des courbes observées sur la figure 33b semble montrer des systèmes mettant un certain temps à se stabiliser.

Figure 33: a/ Schéma de la pile abiotique implanté de Weidlich et al. composée d’une anode d’aluminium et de deux cathodes de charbon actif b/ Tensions de bfc implantées dans des chiens : 1/ 330 jours, r=4,7 kOhms ; 2/ 809 jours, r=8,2 kOhms [68]

3

Conclusion et problématique

Aujourd’hui, l’alimentation électrique des dispositifs médicaux implantables actifs est un verrou majeur dans le développement des nouveaux DMIas. Les piles à lithium sont encore aujourd’hui considérées comme une solution satisfaisante pour l’alimentation des DMIas. Toutefois, les développements et progrès stagnentquant à optimiser drastiquement les performances des piles au lithium. De plus, les piles au lithium atteignent leurs limites en termes de densité énergétique et sont de moins en moins en mesure d’assurer les besoins électriques des nouveaux DMIas, plus sophistiqués et plus énergivores. Ceci combiné à une demande croissante de miniaturisation fait que les piles au lithium actuelles atteignent leurs limites. Pour ces raisons, la recherche s’oriente vers l’exploration de nouvelles solutions alternatives aux piles au lithium implantables. Parmi ces alternatives, il existe des systèmes de récupération d’énergie du corps humain. En effet, le corps humain possède diverses sources d’énergies sous différentes formes : mécanique (battements du cœur, compression/décompression de la cage thoracique lors de la respiration…) ; gradient de température ; ou encore de manière chimique. De toutes sources d’énergies exploitables, la voie chimique est la plus prometteuse. En effet, cette voie offre théoriquement une grande quantité d’énergie. Un moyen de transformer cette énergie chimique en énergie électrique est l’utilisation d’une biopile à combustible. Cette biopile est capable de transformer les espèces glucose et oxygène, toutes deux présentes dans le corps humain, en énergie électrique et ainsi alimenter un DMIa faiblement énergivore tel que le pacemaker. Le diagramme de Ragone (figure 34) met en évidence les densités de puissances et d’énergies des différents systèmes produisant de l’énergie et montre les besoins énergétiques du pacemaker :

La biopile à combustible à glucose et oxygène peut-être constituée de deux types de catalyseurs afin d’oxyder le glucose et réduire l’oxygène, soit un catalyseur enzymatique ou bien, un catalyseur abiotique. Aujourd’hui l’utilisation de catalyseur enzymatique pour les biopiles implantables est la plus explorée et cela du fait des avantages de la catalyse enzymatique en termes de sélectivité et capacité à fonctionner dans l’organisme vivant. Les biopiles enzymatiques citées en amont de ce chapitre possèdent de grands avantages (cinétique de réaction élevée, réaction spécifique à une espèce chimique, performances plus élevées…) cependant, les biopiles enzymatiques souffrent de la faible stabilité des enzymes. En effet, ces catalyseurs sont sensibles à leur environnement et peuvent se dénaturer, se désinhiber ou bien se désorber selon le pH, la température et les inhibiteurs environnants. Aussi, afin de fournir de l’énergie de manière constante et suffisante une biopile abiotique seraitune option prometteuse. Toutefois, les biopiles abiotiques développées par le passé ont montré des électrodes peu sélectives, diminuant les performances électrochimiques mais aussi la stabilité dans le temps. Ce phénomène est d’autant plus important pour la cathode, électrode où a lieu la réaction de réduction de l’oxygène (ORR), du fait de la faible quantité d’oxygène disponible in vivo. Le platine, catalyseur bien connu de l’ORR dans la littérature, peine à démontrer des stabilités et des performances électrochimiques en condition physiologique pouvant rivaliser avec celles des piles au lithium actuellement sur le marché. De plus, les contraintes liées à l’implantation font que les piles abiotiques implantées par le passé ont pu générer des infections ou des rejets.

Dans ce contexte, le sujet de cette thèse propose de développerune biocathode abiotique capable de procéder à la réduction de l’oxygène en conditions physiologiques. La réaction de l’ORR aura pour objectif d’être effectuée de manière sélective afin d’offrir une stabilité améliorée par rapport à celle du platine. Une première partie sera consacrée au choix des matériaux composant cette cathode tout en respectant une biocompatibilité en vue de l’implantation chez l’homme. Dans cette première partie, les matériaux sélectionnés seront alors architecturés de manière à laisser diffuser l’oxygène et ainsi fournir des densités de courant optimales. Différentes cathodes seront alors comparées entre elles afin de fournir les meilleures performances électrochimiques et stabilités dans le temps. Dans une deuxième partie, les composés de cette électrode seront les sujets d’études biologiques afin de vérifier la biocompatibilité des matériaux. Cette même étude sera faite sur les composés sous forme d’électrode. Cette deuxième partie étudiera aussi l’impact de la cathode sur l’animal afin de limiter les réactions d’inflammation et éviter les réactions de rejet. L’étude in vivo permettra également d’étudier l’impact du vivant sur la biocathode. Enfin, dans une troisième partie, ce manuscrit cherchera à montrer les performances électrochimiques de cette cathode connectée à différents types d’anodes. Cette troisième partie montrera également une étude in vivo en implantant des biopiles comportant la cathode développée dans le corps de rats. Les biopiles en fonctionnement permettront ainsi de comparer les performances obtenues avec celle de la littérature.

Chapitre 2 : Fabrication d’une biocathode abiotique