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Le marsouin commun (Phocoena phocoena Linné, 1758) est un mammifère, de l’ordre des Cétacés et de la famille des Phocoenidae. C’est un des plus petits cétacés avec une taille maximale de 2 m et un poids compris entre 25 et 90 kg. La femelle est en moyenne plus grande que le mâle. Il a une tête ronde et sans rostre, contrairement aux dauphins communs par exemple ; le corps est trapu de couleur sombre sur le dessus et claire sur le dessous, les nageoires pectorales sont petites et ovales et la nageoire dorsale triangulaire. La longévité du marsouin commun peut atteindre 24 ans mais l’espérance de vie se situe autour de 12 ans (Lockyer et al. 2001). Le marsouin commun vit en solitaire ou en petit groupe. Les deux sexes atteignent la maturité sexuelle entre 3 et 4 ans, la gestation dure environ 11 mois et la période de naissance n’est pas très étendue (2 mois) mais elle varie en fonction du lieu concerné. Certaines femelles sont en gestation durant l’allaitement du petit précédent (Read, 1999).

Le marsouin commun est un prédateur supérieur qui se nourrit principalement de poissons et de céphalopodes. Son régime alimentaire est basé sur un nombre d’espèces limité mais celles ci sont variables en fonction du lieu et/ou de la saison (Santos & Pierce 2003). Par exemple en Ecosse il est basé sur les lançons (Ammodytidae) et le merlan (Merlangius

merlangus) (Santos et al. 2004) alors que en Bretagne on ne trouve aucune de ces deux espèces mais principalement du chinchard commun (Trachurus trachurus) (Méheust et al. soumise). Parce que c’est un endotherme marin, avec un rapport surface/volume élevé, vivant dans des eaux froides, le marsouin commun dépense beaucoup d’énergie pour maintenir sa température. De plus, il possède peu de réserves énergétiques, il ne peut donc survivre sans nourriture, que pendant de courtes périodes (Kastelein et al.). Une disponibilité constante de proies est donc primordiale et le moindre changement d’accessibilité des proies aura un impact sur les réserves d’énergies et la survie (MacLeod et al. 2007).

Les connaissances sur les déplacements journaliers et annuels du marsouin commun sont peu nombreuses, notamment en raison du caractère discret de l’animal qui limite les observations. Ce n’est pas une espèce sédentaire, ce sont des animaux très mobiles pouvant parcourir plus de 50 km par jour (Read & Westgate 1997), et l’abondance varie souvent au cours de l’année dans les zones de présence, mais aucun schéma de migration régulier n’est connu. C’est par exemple le cas le long des côtes néerlandaises où l’observation de marsouin commun est beaucoup plus importante entre Novembre et Mars (Camphuysen 2004) ou dans la partie centrale de la façade est de la mer du Nord où, entre 2002 et 2004, les observations sont très irrégulières au cours de l’année sans lien avec les saisons (Thomsen et al. 2007). Les travaux de poses de balises montrent des comportements individuels variés. C’est le cas, à l’échelle de la journée, de 3 marsouins équipés de balises dans les eaux danoises qui se comportent très différemment, que ce soit en terme de distance parcourue, de profondeur ou

97 de nombre de plongée (Linnenschmidt et al. 2013). C’est aussi le cas, à l’échelle de la saison, pour des individus équipés de balises dans la baie de Fundy, qui présentent des déplacements, des vitesses et des profondeurs très différentes (Read & Westgate 1997). Sveegaard et al., trouvent des résultats similaires dans les eaux danoises : les individus équipés de balises présentent des déplacements variés au cours de l’année. Par contre, les auteurs montrent des comportements réguliers : une plus grande dispersion des immatures, des zones occupées préférentiellement malgré ces déplacements variés et bien que les individus du Skagerrak et ceux des eaux danoises intérieures se mélangent peu (Sveegaard, Nabe-Nielsen, et al. 2012b). De plus, il semblerait que certaines zones géographiques soit spécifiques. Par exemple une zone de la côte ouest du Danemark semble être une zone de nurserie avec un taux de présence de juvéniles très important (Sonntag et al. 1999).

Les causes de mortalité du marsouin commun sont nombreuses, qu’elles soient d’origine naturelle ou anthropique. Les principales causes naturelles observées sur les marsouins échoués sont la maigreur morbide, le parasitisme et les infections des voies respiratoires. Mais on trouve aussi des lésions hépatiques, gastro-intestinales cardiaques et des épizooties (Jauniaux et al. 2002 ; Siebert et al. 2006). Une autre cause de mortalité, qui peut être importante en fonction des zones géographiques, est l’agression par d’autres espèces telles que l’orque, le grand dauphin ou même le phoque gris. Cotter et al. (2012) indiquent que 35 % des marsouins communs échoués en Californie présentaient des traumatismes liés à des attaques par des grands dauphins (Cotter et al. 2012). Les causes de mortalité sont souvent multiples pour un même animal et il est difficile de savoir quelle en est la cause et quelle en est la conséquence. Par exemple un animal, souffrant d’une pneumonie, aura des difficultés à chasser ; ce qui va entraîner une maigreur importante mais un individu maigre sera aussi plus sensible à une infection. De plus, même si ces causes sont naturelles, elles peuvent être liées indirectement aux modifications, d’origine anthropique ou non, de l’environnement. Par exemple la maigreur peut être due à une diminution importante des proies (Jauniaux et al. 2002) causée par la surpêche ou un déplacement des proies. Il a été prouvé par une approche cas-témoin que les marsouins communs, présentant un forte contamination en PCB, étaient plus sensibles aux infections, les PCB provoquant une dépression immunitaire (Hall et al. 2006).

Les mortalités d’origine anthropiques impactent aussi beaucoup les populations de marsouin commun. Il s’agit de la chasse, par exemple en Turquie (Tonay & Öztürk 2012) mais surtout des captures accidentelles. Cette cause de mortalité est connue depuis longtemps et est beaucoup étudiée. Jefferson et Curry, en 1994, estimaient que les captures accidentelles pouvaient être une des causes du déclin de l’espèce et la principales menace (Jefferson & Curry 1994). Par exemple en Allemagne, 46 % des marsouins communs échoués présentent des traces de captures accidentelles (Siebert et al. 2001). En mer Baltique, il a été estimé que les captures accidentelles étaient supérieures à la limite de mortalité maximum permettant un maintien de l’espèce (Berggren et al. 2002). En plus de ces menaces directes, de nombreuses activités humaines ont des impacts indirects sur les marsouins communs, comme le trafic

98 maritime (Herr et al., 2005), la mise en place de structures en mer comme les éoliennes off shore (Gilles et al. 2009) ou la pollution (Pierce et al. 2008). Ces menaces indirectes sont rarement des causes de mortalité mais par contre elles impactent souvent les populations en les fragilisant et/ou en les exposant à d’autres causes de mortalité.

Répartition

Le marsouin commun est présent dans les eaux froides et tempérés de l’hémisphère Nord. C’est une espèce de faible profondeur (maximum 200m), qui vit le long des côtes et au dessus du plateau continental. On le retrouve dans trois bassins différents : le Pacifique Nord, l’Atlantique Nord et la mer Noire (Gaskin 1984). Dans le Pacifique Nord, on retrouve des marsouins communs du Japon à la Californie (Taguchi et al. 2010), dans l’Atlantique, de la Caroline du Nord à la Mauritanie (Tolley & Rosel 2006) et en mer Noire dans l’ensemble du bassin et dans la mer Egée (Viaud-Martínez et al. 2007). La présence du marsouin commun le long des côtes africaines est la moins bien documentée, cependant il a été montré qu’ils étaient présents des côtes marocaines aux côtes sénégalaises et que leur présence était liée à un upwelling apportant des eaux fraîches et productives (Boisseau et al. 2007). Les trois bassins océaniques sont séparés géographiquement et il n’y actuellement aucune migration entre eux (Rosel et al. 1995).

Au niveau de la façade atlantique européenne, on le retrouve de l’Islande à Gibraltar, autour des Iles Britanniques ainsi que dans la mer Baltique (Gaskin 1984). Le marsouin commun est l’espèce la plus commune (Hammond et al. 2002) et la campagne SCANS 2 effectuée en juillet 2005 estime le nombre d’individus à 386 000 (Hammond et al. 2013). Cette campagne montre une présence importante autour des Iles britanniques et en mer du Nord avec des zones de fortes abondances bien ciblées au niveau de la mer Celtique, du nord ouest de l’Ecosse, de l’est de l’Angleterre et autour du Danemark. Cette campagne, qui apporte beaucoup d’informations, reste une vision ponctuelle (le mois de juillet 2005) qui a besoin d’être étayée par des suivis temporels. De nombreuses études locales ou européennes confirment la présence de marsouins communs en grand nombre, en mer du Nord et autour des iles Britanniques, par exemple : (Donovan & Bjorge 1995 ; Siebert et al. 2006 ; Thomsen

et al. 2007). En péninsule Ibérique la campagne SCANS 2 ne détecte qu’une faible présence de marsouins communs mais des études locales nous apportent plus d’informations. C’est une espèce commune mais pas la plus importante. Ainsi, c’est la troisième espèce en nombre d’observations et d’échouages (7% ) en Galice et cette proportion est stable au cours des années (Lopez et al. 2002 ; Pierce et al. 2010). Des marsouins communs sont aussi observés au Portugal (Wise et al. 2007).

Si cette aire de répartition recouvre toute la façade atlantique européenne, l’abondance du marsouin commun y est très variable, avec des zones de fortes abondances qui se déplacent

99 avec le temps, des régions qui connaissent une raréfaction et d’autres un retour important du marsouin commun. La campagne SCANS de 2005 (Hammond et al. 2013) était la 2eme campagne globale d’observation des cétacés dans la mer du Nord et les mers adjacentes. Une première campagne, SCANS 1, a eu lieu en juillet 1994 (Hammond et al. 2002). Cette première campagne couvrait une zone un peu plus réduite qui ne comprenait pas le golfe de Gascogne, la péninsule Ibérique et la partie nord ouest des Iles britanniques. Les deux campagnes estiment un nombre de marsouins communs dans la zone d’étude équivalent (autour de 340 000 en 1994 et autour de 385 000 en 2005), il n’y a donc pas eu de variation notable du nombre d’individus dans les eaux européennes en 11 ans. Cependant la comparaison des deux campagnes montre un déplacement global des zones d’abondance du marsouin commun. En 1994 les zones d’abondance se situaient autour du Danemark et à l’est de la Grande Bretagne. En 2005 on observe les zones d’abondance dans la baie sud de la mer du Nord, en mer Celtique, au nord de l’Ecosse et autour du Danemark. Il semble y avoir un déplacement de l'espèce vers le sud de la zone étudiée. La zone d’abondance de la mer Celtique comprend la pointe Finistère (Hammond et al. 2013).

Ces variations d’abondance ne sont pas récentes, il y a eu aussi des variations au milieu du 20ème siècle avec notamment une diminution importante le long de certaines côtes européennes. Reijnders (1992) décrit la raréfaction du marsouin commun le long de la côte est de la mer du Nord, des côtes françaises et du Portugal. Cette raréfaction se fait dans les années 50 dans des régions où l’espèce était considérée comme commune avant. Cependant il y a assez peu d’informations disponibles sur ces périodes et il est difficile de savoir précisément quelle a été l’évolution de cette raréfaction. Les périodes plus récentes présentant le retour du marsouin commun dans certaines zones sont beaucoup mieux documentées surtout par des études locales :

• Le long des côtes allemandes et danoises, le retour date des années 80 (Reijnders 1992).

• Le long des côtes néerlandaises, le retour a été suivi grâce à de l’observation systématique sur plus de 30 ans entre 1972 et 2004 (Camphuysen 2004). Le déclin aurait commencé dans les années 40, ensuite le marsouin commun est complètement absent des côtes jusqu’à la fin des années 80. Enfin, le nombre d’individus observés augmente régulièrement jusqu'à 2004. Le taux moyen d’augmentation est de 40% par an ce qui est bien supérieur au taux maximum de recrutement de l’espèce (10%). La majorité des observations se fait en hiver dans cette zone (Camphuysen 2004).

• En Cornouailles britannique, le suivi des observations opportunistes montre une augmentation forte à partir de 1995 et celui des échouages montre une augmentation statistiquement significative et régulière de la proportion de marsouin commun entre 1991 et 2008 (Pikesley et al. 2011).

• En Belgique, le retour du marsouin commun a été prouvé par l’augmentation de la proportion d’échouage de l’espèce à partir de 1997 (Kiszka, Haelters, et al. 2004a).

100 • En France, la raréfaction avait déjà été supposée en 1977 (Duguy 1977). Le retour le long des côtes de la Manche est montré par des observations opportunistes (Kiszka, Hassani, et al. 2004b), suivi des échouages (Kiszka, Haelters, et al. 2004a) et transect maritime (Kiszka et al. 2007).

• Dans le sud de la France les données d’échouages montrent une augmentation importante du nombre de marsouins communs à partir de 1997 (données RNE, obtenues sur le site http://crmm.univ-lr.fr). Ces études locales confirment bien ce qui avait été supposé à partir de la comparaison des deux campagnes SCANS : le marsouin commun a connu un déplacement global en Europe au cours des 15 dernières années.

Plusieurs observations semblaient indiquer un retour du marsouin commun en Bretagne, c'est pour cela qu’un travail de compilation et d’analyse d’une campagne d’observation par survol aérien, des données d’échouages et d’observations opportunistes entre 1997 et 2007 a été effectué en 2008. Ce travail n’a pas été réalisé durant ma thèse mais par l’ensemble de l’équipe pendant mes stages de master 1 et 2. Il est placé ici car il est une pièce importante dans la compréhension des déplacements de marsouins communs en Bretagne et la base de nos travaux de génétique : Jung et al., Harbour porpoises (Phocoena

phocoena) in north-western France: aerials surveys, opportunistic sightings and strandings monitoring. 2009

Harbour porpoises (Phocoena phocoena)