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CHAPITRE 2 FRONTIÈRE DES CONNAISSANCES

2.6 Méthodes de caractérisation

2.6.3 Bioactivité (in vitro)

Culture cellulaire sur substrats biofonctionnalisés

Les cellules généralement utilisées pour ce type d’étude sont les cellules endothéliales humaines issues de cordons ombilicaux ou HUVEC (Nachman, 2012). Cette lignée est majoritairement utilisée pour les études in vitro de par leur disponibilité et facilité d’extraction, contrairement aux cellules endothéliales progénitrices (EPC) (Kawahara & Matsuda, 2012). Il faut cependant avoir à l’esprit qu’elles peuvent présenter de légères différences avec d’autres lignées cellulaires (Porter et al., 2011a, 2011b), en particulier avec les EPC (Bompais et al., 2004; Liu et al., 2014). En particulier, les HUVEC prolifèrent moins que les autres cellules endothéliales et deviennent rapidement sénescentes (Bompais et al., 2004), ce qui peut être amélioré par l’utilisation d’un milieu de culture défini approprié (e.g. EGM-2) (Bala, Ambwani, & Gohil, 2011).

L’évaluation de la réponse cellulaire sur le substrat biofonctionnalisé se fait généralement dans un milieu de formulation modifiée. Par exemple, pour un test d’adhésion, un milieu sans sérum est généralement utilisé, évitant ainsi le biais apporté par les protéines adsorbées (Zhu et al., 2001). Cependant, bien que ces conditions soient pertinentes à la détermination de la bioactivité des molécules greffées, elles ne sont pas représentatives des conditions réelles, où les protéines du sérum vont effectivement s’adsorber sur l’implant et possiblement masquer l’effet de la biomolécule greffée. Si le revêtement adsorbe peu de protéines (e.g. PEG), il peut être ainsi préférable de procéder à un test d’adhésion en milieu complet, et de rincer par la suite les protéines adsorbées et cellules faiblement adhérées (Zhu et al., 2001).

Des questions similaires se posent pour les essais de prolifération. L’utilisation de milieux définis tels que le milieu EGM-2 permettent de retirer les facteurs de croissance solubles du milieu, ce qui est fait dans la plupart des études. Une autre procédure rarement employée est également bénéfique pour les tests de prolifération : le sevrage des cellules. Ce dernier se fait dans un milieu avec une faible quantité de sérum (< 1%) et permet à la fois de synchroniser le cycle cellulaire et de se débarrasser de la majorité des protéines endogènes. D’autre part, en présence d’une faible quantité de sérum, les HUVEC se retrouvent à l’état quiescent, nous rapprochant ainsi un peu plus des conditions réelles (Staton, Reed, & Brown, 2009). La densité de départ des cellules est aussi importante pour les tests de prolifération, et est généralement choisie autour de 10 000 cellules/cm²

(Hu et al., 2012; Porter et al., 2011a; Shin et al., 2012). Si plusieurs revêtements sont comparés, il est également important de dissocier les effets d’adhésion et de prolifération.

Quantité de cellules

Pour évaluer la colonisation cellulaire de notre matériau, nous aurons à évaluer l’adhésion et la prolifération des cellules endothéliales ensemencées. Ces évaluations peuvent se faire au moyen d’un simple compte cellulaire à un temps donné. Dans la littérature, on trouve plusieurs familles de tests permettant le compte cellulaire :

Essais basés sur la coloration d’acides nucléiques : La coloration est permise par de nombreuses molécules (e.g. CyQuant® (Moreno et al., 2011), Sytox® (Murschel et al., 2013)). Ces tests sont généralement associés à une lyse cellulaire, ou une fragilisation de membrane avec des agents comme le Triton X-100 ou le Tween 20, pour que la molécule puisse pénétrer dans les cellules et atteindre le noyau. Dans le cas contraire, ces tests permettent de compter les cellules mortes, dont la membrane fragilisée est perméable à ces composés. Il existe d’autres molécules comme DAPI (Yang & Proweller, 2011) ou Hœchst (Lee et al., 2012) qui peuvent traverser la membrane cellulaire, que celles-ci soient vivantes ou non. Également utile pour évaluer la prolifération, l’ajout d’une base azotée étiquetée (BrdU, (Dorafshar et al., 2003; Jacot & Wong, 2008; Shin et al., 2012)

3H-thymidine (Li et al., 2009; Ma et al., 2007)), qui va être incorporée dans l’ADN au moment de

sa réplication, permet de quantifier les cellules prolifératrices.

Essais mesurant l’activité métabolique des cellules : Le composé principal de ces tests est transformé par les enzymes produites dans les cellules vivantes et forment un produit absorbant ou fluorescent.

 Par spectrométrie : MTT (Lin et al., 2012; Wei et al., 2011), XTT (Shen et al., 2008), WST (Murschel et al., 2013), MTS (Phelps et al., 2013). Le produit de ces réactions se retrouve, naturellement ou non, dans le milieu extracellulaire à la fin du test. L’activité métabolique est alors mesurée par absorbance ou fluorescence. Cette mesure est généralement considérée comme proportionnelle à la quantité de cellules vivantes, mais une calibration est nécessaire pour trouver la corrélation entre les deux (si besoin). Le test basé sur la résazurine (Alamar Blue® et Vybrant®) suit un principe similaire, à ceci près qu’il est basé sur le pouvoir

réducteur des cellules vivantes plutôt que sur une activité enzymatique. (Moreno et al., 2011; Seifalian, Salacinski, Punshon, Krijgsman, & Hamilton, 2001).

 Par imagerie : CFDA-AM (Chiu & Radisic, 2010; Moreno et al., 2011), Calcéine-AM (Ceylan et al., 2011; Plouffe et al., 2007), fluorescéine de diacétate (Lin et al., 2012; Wei et al., 2011). Le réactif de ces réactions traverse la membrane cellulaire mais pas le produit fluorescent issu de la réaction enzymatique. La fluorescence reste ainsi localisée à l’intérieur des cellules vivantes, et permet le compte direct des cellules colorées sans calibration (Ma et al., 2007).

Que ce soit pour la prolifération ou l’adhésion, il n’y a donc pas de méthode étalon pour le compte cellulaire. Pour être aussi rigoureux que possible, il est généralement recommandé de procéder à plusieurs tests pour déterminer le nombre de cellules (Staton et al., 2009) :

 Un compte direct des cellules viables (e.g. CFDA-AM) ou prolifératives dans le cas d’un test de prolifération (e.g. BrdU) ;

 Un compte direct des cellules mortes (e.g. iodure de propidium) ;

Une mesure de l’activité métabolique (e.g. résazurine). Phénotype cellulaire

Plus complexe qu’un simple compte cellulaire, le phénotype cellulaire peut être corrélé à différents paramètres. Dans un premier temps, la distribution des cellules peut être observée, par exemple grâce aux tests permettant d’imager les cellules viables (cf. partie 2.6.3.1).

Ensuite, on a généralement recours à l’immunofluorescence pour détecter la présence de certains composants clés du phénotype. Le principe est basé sur l’interaction antigène/anticorps, l’antigène étant le composant en question. La détection est généralement faite en deux étapes : un premier anticorps s’attache à l’antigène, puis un second anticorps étiqueté d’un colorant détecte le complexe antigène/anticorps (Ma et al., 2007).

On associe généralement différents tests pour colorer le noyau cellulaire ainsi que les composants liés à la morphologie cellulaire et à l’ECM (e.g. actine) (Moreno et al., 2011). D’autres colorations plus spécifiques sont aussi menées, pour analyser les images en termes de points focaux d’adhésion (vinculine, paxilline, FAK) (Bacakova et al., 2011; Chollet et al., 2009) de jonctions entre les cellules endothéliales commençant à former un tissu (CD31) (Chiu & Radisic, 2010; Hu et al., 2012; Lee et al., 2012), etc. Il peut aussi être intéressant d’évaluer l’expression de facteur de von

Willebrand (vWF), spécifique aux cellules endothéliales (Chiu & Radisic, 2010; Hu et al., 2012; Nachman, 2012).

Autres tests

Production de NO : L’oxyde nitrique étant impliquée à la fois dans la thrombose et l’hyperplasie (cf. partie 2.2.3.2), c’est un facteur important de la signalisation des cellules endothéliales et sa production est parfois quantifiée (Wei et al., 2013; Z. Yang et al., 2012; Z. L. Yang et al., 2012). La production de NO est notamment régulée par la présence de VEGF (Figure 2-7). La caractérisation de la quantité de NO sécrétée par les EC dans le milieu de culture s'effectue en quantifiant les nitrites et les nitrates, produits de la dégradation de NO (Miranda, Espey, & Wink, 2001). Les nitrites sont quantifiés directement grâce au réactif de Griess, tandis que les nitrates doivent d’abord être convertis en nitrites sous l’action d’une enzyme ou d’un agent chimique (Miranda et al., 2001).

Voies de signalisation et production de cytokines : Pour aller plus loin dans l’interprétation des résultats cellulaires obtenus, on peut étudier les voies de signalisation impliquées (Figure 2-7). Un contrôle de l’activation de certaines voies peut être réalisé en bloquant un récepteur visé, que ce soit par l’ajout d’un analogue du ligand immobilisé en solution ou d’antagonistes spécifiques (e.g. anticorps anti-VEGFR-2) (Byzova et al., 2000). Pour détecter la production de certaines protéines par les cellules (e.g. PGI2), on peut aussi avoir recours aux tests ELISA ou aux immuno-buvardages

de type Western.

Migration cellulaire : La migration des cellules endothéliales est également étudiée, considérant qu’une endothélialisation trans-anastomotique peut s’opérer in vivo et contribuer à l’accélération du recouvrement cellulaire. La migration peut être évaluée en ajoutant un masque d’une zone surfacique lors de l’adhésion cellulaire, qui sera retiré une fois la confluence obtenue sur le reste de la surface (Lee et al., 2012). On peut alors imager la surface dans le temps et traiter les images pour obtenir la vitesse de migration.

Influence du cisaillement : La force de cisaillement correspond à la force de tension de l'afflux sanguin agissant sur la paroi d'un vaisseau et qui augmente lors de la division de ceux-ci en deux embranchements ou plus (Grand Dictionnaire Terminologique).

Il est intéressant d’étudier l’influence du cisaillement selon deux points de vue. Le premier est de vérifier que les propriétés adhésives de la matrice utilisée suffisent pour retenir les cellules endothéliales sous l’effet du cisaillement (Kawahara & Matsuda, 2012). Le second est d’étudier la mécano-transduction de signaux dans les cellules (Chatzizisis et al., 2007; Li, Haga, & Chien, 2005). Plusieurs études discutent du rôle athéroprotecteur du cisaillement et de son implication dans l’athérosclérose (Chatzizisis et al., 2007; Hergenreider et al., 2012). D’autre part, des études montrent qu’un pré-conditionnement au cisaillement des prothèses ensemencées aide à la rétention des cellules endothéliales (Baguneid et al., 2004).

Les conditions physiologiques du cisaillement sont très variables au sein du système sanguin. Elles vont dépendre notamment de la taille et la géométrie du conduit (embranchement). Pour les artères de large diamètre, il dépasse rarement 1 dyn/cm² mais cette valeur augmente quand le diamètre des vaisseaux diminue (Ballermann, Dardik, Eng, & Liu, 1998). C’est pourquoi dans la littérature, les tests in vitro sont menés avec des valeurs de l’ordre de 10-20 dyn/cm² (10 dyn/cm² (Baguneid et al., 2004), 12 dyn/cm² (Chiu et al., 2003), 15 dyn/cm² (Wallace & Truskey, 2010) et 20 dyn/cm² (Hergenreider et al., 2012)). Des montages dédiés sont disponibles pour l’étude du cisaillement sur les structures tubulaires (Mohebbi-Kalhori et al., 2012; Moreno et al., 2011) et planes, tels que celui présenté Figure 2-13.

Figure 2-13 : Système d'étude en condition de cisaillement (Anderson & Knothe Tate, 2007). A

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