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Le criblage primaire et secondaire d’une collection de mutants EMS résistants à la galvestine-1 a permis de sélectionner 15 lignées gali. Pour la plupart, les mutations sont dominantes ce qui n’est pas classique pour ce type de criblage. Il s’agirait donc de mutations de type gain de fonction, qui apportent une résistance contre la galvestine-1, comme dans le cas d’une enzyme mutée modifiant sa conformation et son activité par exemple.

Il n’a pas été possible de déterminer le type de mutation pour les lignées gali8, gali12 et gali25 (Tableau C1 1). Cette difficulté peut être due à un problème de pénétrance de la mutation, c’est-à-dire que certaines plantes peuvent contenir la mutation conférant la résistance à la galvestine-1, mais ne pas exprimer le phénotype de résistance. Des mutations parasites peuvent être à l’origine de ce problème de pénétrance. Plusieurs backcross pourraient permettre de s’affranchir de ces mutations parasites et de résoudre ce problème de pénétrance.

Sachant que les mutations sont dominantes pour la majorité des lignées gali, il n’a pas été possible de réaliser des tests d'allélisme. Ce test consiste à croiser deux lignées. Si des plantules présentent un phénotype de résistance dans la génération F1, alors les lignées sont considérées comme des mutants alléliques.

Le fait d’avoir isolé, à partir du criblage, un nombre peu élevé de lignées résistantes pourrait indiquer qu’un faible nombre de voies spécifiques soient touchées. Plusieurs lignées gali pourraient être mutés dans la même voie ou être alléliques. La redondance des phénotypes lipidique des lignées gali1 et gali2 (Figure C1 9 et Figure C1 22) semble cohérente avec cette hypothèse. Une caractérisation plus précise des différentes lignées au niveau lipidique, protéique et transcriptomique sera réalisée sur des plantules homozygotes

issues d’un 3ème backcross pour ces lignées.

Enfin, les gènes candidats mutés identifiés par séquençage NGS de la lignée gali1 ont été confirmés par séquençage direct. Pour l’instant, il est difficile de savoir quel gène muté confère la résistance à la galvestine-1, un test de co-ségrégation est en cours pour répondre à cette question. Il s’agit d’un test évaluant quelle mutation co-ségrége avec le phénotype de résistance. Ce test est prévu également pour la lignée gali34, avec les gènes candidats mutés identifiés suite à l'analyse cartographique.

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b) Gali1

La lignée gali1 est similaire au WT au niveau de l’anatomie de la plante (Figure C1 7). Cependant, une floraison précoce de quelques semaines est observée chez la lignée gali1 (non quantifié). Les tissus foliaires contiennent des chloroplastes ne présentant pas de différences phénotypiques comparés au WT. Cette observation devra être réalisée en présence de galvestine-1. L’analyse lipidique montre que la lignée gali1 contient un niveau de MGDG plus élevé comparé à une plante standard en présence de galvestine-1 (Figure C1 9, B). En réponse à la présence de galvestine-1 qui induit une forte diminution de la synthèse des galactolipides, la lignée gali1 met en place des mécanismes augmentant la production de MGDG. La mutation pourrait donc être localisée sur une enzyme impliquée dans la synthèse des galactolipides, modifiant ainsi son activité ou son affinité pour un substrat, ce qui impliquerait donc cette augmentation de la production de MGDG. Le séquençage des gènes des MGDG synthases ne montre pas de mutation et suggère qu’il pourrait s’agir d’un acteur en amont des MGDG synthases. Le niveau de DGDG ne diminue pas dans la lignée gali1 contrairement à une plante standard traitée en présence de galvestine-1. Ce phénomène est peut être lié à l’augmentation de la synthèse de MGDG dans la lignée gali1, maintenant une production de DGDG stable. Enfin, le niveau de PG est augmenté dans la lignée gali1 en présence de galvestine-1, tandis que le niveau de PG est stable chez la plante contrôle. L’analyse du profil en acyls montre une augmentation du C16:1 du PG, ce qui est caractéristique du PG thylacoïdien (C16:1t) (Wada and Murata, 2007). Chez Arabidopsis, environ 85% du PG thylacoïdien provient de l’AP procaryotique (Browse et al., 1986). Une désaturase spécifique du PG catalyse ensuite l’ajout d’une double liaison en conformation

trans sur le C16:0 en position sn-2, produisant alors du C16:1t (Haverkate and van Deenen,

1965). De plus, des études ont montrées que le PG était un activateur de MGD1, conduisant à une stimulation de la synthèse de MGDG (Dubots et al., 2010). La mutation conférant la résistance à la galvestine-1 dans la lignée gali1 pourrait donc toucher la voie procaryote au niveau de la synthèse du PG, qui activerait alors MGD1, augmentant donc la production de MGDG et maintenant la production de DGDG, compensant ainsi les effets de la galvestine-1. Chez Arabidopsis, la proportion de MGDG, de DGDG et de PG est fortement régulée, dû à la présence de mécanismes établissant et contrôlant l’homéostasie lipidique des membranes thylacoïdiennes, selon le contexte environnemental et physiologique de la plante (Boudiere et al., 2013). De plus, ces glycérolipides sont associés spécifiquement avec des complexes protéiques incluant les photosystèmes et sont essentiels pour les structurer (Loll et

145 al., 2007; Mizusawa and Wada, 2012). Les proportions relatives de MGDG, DGDG et de PG sont également importantes pour obtenir une forme optimale des thylacoïdes. En effet dans les membranes thylacoïdiennes, le rapport MGDG/DGDG est important car le MGDG induit une courbure des membranes et le DGDG un effet stabilisateur (Bruce, 1998). La proportion de PG est en équilibre avec celle du sulfolipide SQDG, un autre lipide essentiel des membranes thylacoïdiennes. Ces deux lipides confèrent une charge négative à la membrane ce qui joue sur les propriétés physico-chimiques des membranes (Chow et al., 2005). Ainsi dans la lignée gali 1 en présence de galvestine-1, l’augmentation de la production de MGDG, de DGDG et de PG, corrélée à la présence de la mutation, maintiendrait la forme optimale des thylacoïdes, préservant la structuration des photosystèmes, ce qui permettrait préserver le fonctionnement de la photosynthèse. Une mesure de l’activité photosynthétique de plantules gali1 est prévue prochainement. L’observation en microscopie électronique des membranes thylacoïdiennes de la lignée pourrait également permettre d’apporter des informations complémentaires sur la structure des thylacoïdes.

Une caractérisation plus profonde devra être effectuée sur la lignée gali1 purifié par un 3ème backcross et homozygotes pour la mutation de résistance à la galvestine-1. Cette étude permettra de vérifier les phénotypes observés à ce jour et éliminera d’éventuelles mutations parasites pouvant interférer avec les phénotypes.

L’analyse bio-informatique du séquençage NGS de la lignées gali1 a permis d’identifier un gène muté codant pour la protéine ZKT. Cette protéine est composée d’un domaine PDZ, d’une boite K et d’un domaine tétratricopeptide (Ishikawa et al., 2005). D’après la littérature, les domaines PDZ lient une partie de la région C-terminale de polypeptides modulent les interactions protéines-protéines ou protéines–lipides. Ce type de motif est retrouvé dans de nombreuses protéines de la signilisation (Jelen et al., 2003). La région contenant une boite K joue un rôle dans la formation de multimères (Riechmann and Meyerowitz, 1997). Le domaine tétratricopeptide (TPR, Tetratrico Peptide Repeat) est composé de motifs de 34 amino-acides répétés et médie les interactions protéines-protéines et l’assemblage de complexes multiprotéiques (D'Andrea and Regan, 2003). Les protéines contenant ces différents domaines sont appelées protéines adaptatrices et sont responsable de la transduction de signaux pour induire une réponse biologique. Après une blessure chez

Arabidopsis, la protéine ZKT est sur-exprimée et phosphorylée sur des résidus thréonine et

sérine (Ishikawa et al., 2005), ce qui induit un processus de signalisation, avec le recrutement de partenaires protéiques. La mutation est située au niveau d'une proline à la limite du

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domaine tétratricopeptide, devenue alors une sérine.La proline joue un rôle important dans la

conformation des protéines car elle induit la formation de coudes rigides dans la chaîne peptidique. Une sérine n’introduit pas de coudes dans la structure et peut être phosphorylée. Donc la mutation de la proline en sérine au niveau du domaine tétratricopeptide pourrait induire un changement de conformation de la protéine ZKT, provoquant une modification de son affinité avec plusieurs protéines partenaires et donc modifier la transduction des signaux. De plus, la protéine ZKT est prédite pour être localisée dans le chloroplaste chez Arabidopsis (Emanuelsson et al., 2000). Une hypothèse envisageable serait que la mutation du gène codant pour la protéine ZKT pourrait modifier la formation de complexes protéiques au niveau du chloroplaste, ce qui induirait des modifications de la transduction des signaux et conduire indirectement à une modification de la synthèse des galactolipides, expliquant ainsi les phénotypes de la lignée gali1. De plus, d’après les données transcriptomiques de plantes traitées en présence de galvestine-1 pendant 13 jours (Botte et al., 2011), seul le gène codant pour la protéine ZKT est sous-exprimée parmi tous les gènes candidats identifiés dans la lignée gali1.

La mutation dans le gène codant pour ZKT a été confirmée par séquençage direct de la région non recombinante identifiée par l’analyse bio-informatique du séquençage NGS. Cependant, les deux autres gènes candidats mutés codant pour la protéine de la famille des

core-2/1 branching

β

-1,6N-acétylglucosaminyltransferase et pour une protéine de la famille

des facteurs de terminaison de la transcription mitochondriale ont également été confirmés par séquençage direct. Les 4 autres candidats nouvellement identifiés par une seconde analyse n’ont pas été étudiés à ce jour. Un séquençage de ces gènes est en cours. Un test de co- ségrégation du phénotype et des mutations est en cours pour établir quelle mutation confère la résistance à la galvestine-1.

c) Gali2

L’étude préliminaire de la lignée gali2 a permis de caractériser en partie la mutation conférant la résistance à la galvestine-1. Après les 3 backcross, les plantules gali2 cultivées en terre sont similaires au WT (Figure C1 20) et aucun phénotype n’est observé au niveau des chloroplastes (Figure C1 21). Cette observation préliminaire des chloroplastes sera effectuée plus finement à partir de plantules homozygotes provenant de la lignée gali2 purifiée. Afin de

147 mieux observer les effets de la galvestine-1 sur les chloroplastes des différentes lignées gali, l’observation sera réalisée directement après 15 jours de culture en présence de galvestine-1.

L’analyse des lipides de la lignée gali2 montre que le niveau de MGDG, de DGDG et de PG thylacoïdien est plus élevé comparé à une plante contrôle. Lors de l’analyse de la lignée gali1, nous avons vu que ces lipides sont vitaux pour la plante et sont en lien étroit avec la photosynthèse (Loll et al., 2007; Mizusawa and Wada, 2012). Ces teneurs pourraient expliquer la résistance à la galvestine-1. L’analyse lipidique a été réalisée sur des plantules de la lignée gali2 provenant d’un backcross; il sera nécessaire d’effectuer à nouveau cette analyse sur des plantules issues de 3 backcross pour éliminer un maximum de mutations parasites interférant avec les phénotypes.

Bien que ces observations au niveau lipidiques soient redondantes avec celles de la lignée gali1, il est possible que la mutation soit différente. En effet, le séquençage de 3 des 7 gènes identifiés lors de l’analyse bio-informatique indique qu’aucune mutation n’est retrouvée dans la lignée gali2. Le séquençage des 4 gènes identifiés lors de la deuxième analyse des données de la lignée gali1 est prévue. Le séquençage des MGDG synthases indique qu’aucune mutation n’est retrouvée dans MGD1, MGD2 ou MGD3. Le gène muté pourrait donc coder pour une protéine impliquée dans un processus en amont des MGDG synthases. Une stimulation de MGD1 par le PG (Dubots et al., 2010) pourrait être un des éléments reliant le niveau le plus élevé de PG dans la lignée gali2 et la teneur en MGDG. Le maintient de la production de MGDG, de DGDG et de PG thylacoïdien pourrait permettre au chloroplaste de préserver ses structures et de garder un fonctionnement de la photosynthèse optimal malgré la présence de galvestine-1. Une mesure de l’activité photosynthétique de plantes gali2 est prévue prochainement. L’observation en microscopie électronique des membranes thylacoïdiennes de la lignée pourrait également permettre d’apporter des informations complémentaires sur la structure des thylacoïdes.