• Aucun résultat trouvé

Bilan de l’exploration des matériaux locaux renouvelables

À travers cette exploration des matériaux issus de filières courtes, on constate qu’il existe des ressources naturelles avec des potentiels intéressants pour la production d’habitat durable, qui pourrait devenir accessible financièrement si les conditions sont réunies pour valoriser et optimiser le recours à ces matières premières.

Dans le cas de la filière bois, l’intérêt commun des acteurs locaux (publics et privés) pour mener une politique cohérente de développement de filières courtes créatrices d’emplois a permis la structuration et la modernisation de cette filière. Des recherches sont en cours, afin de résoudre un des freins majeurs au renforcement de la filière : le prélèvement des grumes à l’intérieur du Parc National.

Un foisonnement d’actions et de dynamiques portées par divers acteurs, surtout associatifs, caractérisent les micro-filières locales issues des matières végétales telles que le bambou et le vétyver. Toutefois, la méconnaissance des matériaux en construction, la production artisanale et le manque de main-d’œuvre qualifiée sont les

principaux obstacles à la croissance de l’offre et par conséquent de la demande.

La filière émergente, du parement Haclave a bénéficié d’un soutien politique permettant la mise en place d’études et d’un projet expérimental dans le logement social. Cependant, la filière semble avoir du mal à intégrer le marché du fait de sa production artisanale.

Bien que largement exploitée, la pierre ne dispose pas actuellement de filières permettant sa mise en œuvre dans la production d’habitat. À l’image du bambou et du vétyver, la méconnaissance de cet usage est un frein majeur.

Ainsi, en faisant la synthèse des obstacles, on constate que sur presque toutes ces filières analysées, le manque de reconnaissance des matériaux et des compétences associées est un des principaux freins au développement des filières. Cet obstacle est plus prégnant pour les filières du bambou et du vétiver dont l’étude sera approfondie par la suite.

Les micro-filières bambou et vétyver

Comme nous l’avons vu, ces filières présentent des similitudes et notamment sur la méconnaissance des matériaux et de leur potentiel dans l’architecture, liée à la disparition progressive des traditions constructives propres à la Réunion. De fait, la capitalisation culturelle, scientifique et technique des savoirs et savoir-faire pour maintenir et faire évoluer ces savoirs et techniques est rendue plus complexe. À cela, s’ajoute le fait qu’il n’existe pas de réseau, ni de mutualisation au sein de ces filières. Les artisans porteurs de savoirs mènent leurs actions et activités assez discrètement dans le secteur privé.

L’analyse SWOT offre une perception globale sur les caractéristiques communes de ces filières et fait ressortir les domaines dans lesquels les actions devraient être menées.

Par la suite, l’arbre des problèmes communs à ces micro-filières hiérarchise les liens logiques entre les causes et les conséquences.

L’arbre est subdivisé en 4 sous-arbres qui permettent de mieux appréhender les obstacles majeurs dans les domaines du réseau, la capitalisation scientifique et technique, la formation et la communication.

Forces

 préservation des savoir-faire locaux par le biais d’initiatives volontaires (associations de promotions des techniques traditionnelles, actions pour préserver des connaissances techniques, des patrimoines)

 dynamique de sensibilisation à travers la « redécouverte des techniques anciennes »  le secteur de la construction dispose des

institutions, laboratoires de recherche (CIRBAT), de bureau de contrôle qui pourrait participer à la valorisation des matériaux issus de ces filières

Faiblesses

 L’absence d’une culture du “travail en commun” de la mutualisation des compétences et des savoirs

 Méconnaissance des matériaux, des savoir- faire et des potentiels dans l’architecture

 Matériaux non reconnus par la réglementation

 Pas assez de personnes formées  Une taille très réduite du marché

 faible capacité des petites entreprises à pénétrer les marchés publics

 peu d’études et de démarches de certification d’origine (produits “péï”…) pour valoriser la production locale en développant les études techniques

Menaces

 les expérimentations sur les éco-constructions n’utilisent pas les matériaux locaux (structuration insuffisante de la filière face au monopole des industriels)

 montée en puissance des pressions foncières et des conflits d’usages malgré un système de protection du foncier agricole

Opportunités

 attitude volontariste des politiques publiques pour développer la formation des jeunes, des demandeurs d’emploi

 partenariat en cours entre CIRBAT et centre de formation des ingénieurs sur matières végétales locales (biomasse)

 enjeu contemporain maitrise de l’énergie et/ou réhabilitation énergétique du bâti

La structuration des filières est essentielle à la diffusion des connaissances et des savoirs

Tout comme le projet de mix énergétique qui peut rendre viable l’atteinte de l’autonomie en énergie, par la diversité des sources d’énergies renouvelables (solaire, éolien, biomasse, etc.). Pour la construction, il semble clair que l’usage unique d’une matière première naturelle n’est pas durable au vue des contraintes et des enjeux du territoire. Au regard de cette première analyse, la présence de ressources naturelles végétales et des savoir-faire pour les transformées et les mettre en œuvre apparait être une alternative constructive en proposant un “mix matériaux locaux et matériaux importés ” qui pourrait considérablement participer à l’abaissement des coûts des matériaux et de construction tout en limitant l’empreinte écologique du bâti.

Pour cela, il est plus que nécessaire de structurer les “micro-filières” locales, d’en améliorer les connaissances techniques et culturelles, pour permettre un développement qui favoriserait leur emploi par les acteurs de la construction. En effet, à l’image du Cryptomeria avant les études de caractérisation, les matières premières végétales, sont encore victimes de leur image passéiste et “éphémère” à l’opposé des matériaux modernes. Un des enjeux primordiaux est donc la

reconnaissance des caractéristiques et spécificités de ces matériaux.

De plus, un des freins au développement de chaque filière locale semble être le manque d’organisation des acteurs au sein de la filière qui limite considérablement la diffusion des connaissances et des savoirs au sein des filières mais aussi auprès du public. Actuellement, il n’existe pas d’organisation interprofessionnelle qui permettent une mutualisation et la création de synergies des acteurs de ces micro-filières locales.

Or force est de constater que le dialogue entre toutes les acteurs, de l’extraction de la matière première à la mise en œuvre du matériau fini est essentiel et facilite l’appropriation et la généralisation des matériaux au sein d’une filière, mais peut aussi favoriser l’émergence d’autres filières. Les producteurs de matière et de matériau, les prescripteurs, les formateurs, les bureaux d’étude, laboratoires de recherche et les décideurs locaux doivent avoir un intérêt commun à fournir des réponses efficaces et sur le long terme pour structurer une filière complète capable de répondre à la construction de logements économiques et de qualité sur le territoire.