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La bière artisanale au Québec : Seulement une question de variété ?

Les efforts de créativité, d’innovation et d’enracinement local sont au cœur du phénomène microbrassicole québécois. Ils inspirent le travail de nos artisans-brasseurs, organisent le marché brassicole et définissent les habitudes de consommation des amateurs de bière artisanale. Depuis la fin des années 1980, des centaines de brasseurs québécois mettent au point et diffusent en collectivité un savoir-faire unique s’inspirant des nombreuses traditions et tendances brassicoles d’Europe et des États-Unis. Insatiables devant cet afflux constant de nouveaux produits locaux de qualité, des consommateurs de plus en plus éduqués par rapport à la bière maintiennent cette dynamique en marche et incitent les microbrasseries à toujours les surprendre davantage. Cette course pour la diversité et la nouveauté serait-elle le seul moteur du succès des microbrasseries au Québec?

La tradition brassicole belge : Pierre d’assise du savoir-faire brassicole québécois

En 1998, le biérologue Mario D’Eer écrit que la « […] renaissance de la bière "de goût" au Québec [est] un phénomène tout à fait original [qui] ne possède aucun équivalent passé. »124 En réaction à des amateurs de bière désirant s’éloigner de l’offre des industriels, les brasseurs québécois s’appliquent en effet depuis la fin des années 1980 à construire leur propre tradition brassicole en puisant leur inspiration au sein de traditions européennes remises au goût du jour, ou plutôt au « goût du territoire » québécois. Le Cheval Blanc, désirant replacer le goût, les textures et le caractère de la bière sous les projecteurs, est un des pionniers de ce mouvement en devenant en 1987 la première brasserie artisanale de la province. Le succès est immédiat. Ayant savamment pris le pouls de cette nouvelle base de consommateur en offrant plusieurs produits importés depuis 1983, année où il devient

124 Mario D’Eer dans Mathieu Tremblay, Du territoire au boire : la bière artisanale au Québec, mémoire de

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propriétaire de l’établissement125, Jérôme Denys sait alors exactement quelle carte jouer pour plaire à sa clientèle tout en évitant de dérouter les plus sceptiques : « Notre marque de commerce s’est beaucoup fait sur nos bières de types belges, c’est-à-dire blanches ou à base de blé. Elles étaient différentes de ce que connaissaient les Québécois. Ils recherchaient cette différence. »126 Les bières belges sont effectivement caractérisées par une rondeur en bouche, un taux d’alcool plus élevé, des arômes épicés plus présents ainsi qu’une signature olfactive particulière apportée par les souches de levure belge. Ces produits, à des années-lumière des Molson Export et Labatt Bleue, comblent alors les amateurs de bières québécois à la recherche de nouveauté en plus d’ébaucher les fondations de la « renaissance de la bière de goût au Québec » : la tradition brassicole belge.

Jusqu’au milieu des années 2000, les Québécois apprennent en effet principalement à déguster et apprécier la bière artisanale au travers d’une tradition brassicole belge réinterprétée par nos artisans-brasseurs locaux tout en restant encadrée par de véritables brasseurs d’origine belge. Pierre Rajotte et Alain Fiset, deux amis de Jérôme Denys, entreprennent par exemple en 1987 des démarches auprès de la brasserie La Chouffe fondée en 1982 dans le village belge d’Achouffe pour convaincre ces derniers d’exporter leurs produits au Québec via le réseau de la SAQ. Deux ans plus tard, on retrouve une blonde ainsi qu’une brune de La Chouffe sur les tablettes de la société d’État, contribuant ainsi à la diffusion de ces saveurs et textures si particulières au travers de bières belges véritablement « traditionnelles ». Dès 1995, ces deux produits sont brassés dans les nouveaux locaux du Cheval Blanc avec l’accord de La Chouffe. Respectant les recettes et ingrédients originaux utilisés en Belgique, Jérôme Denys se familiarise avec les techniques de la tradition belge en plus de permettre à « plusieurs brasseurs maison du Québec [d’emprunter] les levures belges »127 qu’il utilise. Dans le même ordre d’idées, Unibroue, l’une des plus emblématiques microbrasseries de la province, mise elle aussi sur l’expertise de brasseurs belges pour mettre au point des bières originales encore jamais vues sur le marché québécois. En 1992, André Dion et Serge Racine fondent Unibroue à partir de l’ancienne brasserie Massawippi de

125 David Sparrow, 2012, op. cit., p. 14 : « En 1940, la taverne est achetée par Gerolamo Catelli qui la cède à

l’un de ces fils, Angelo, en 1945. Ce dernier conserve la taverne et son orientation jusqu’à sa mort en 1983. N’ayant pas d’héritier direct, la taverne est alors léguée au neveu d’Angelo, le jeune Jérôme Catelli Denys. »

126 Olivier Artis, « Première brasserie artisanale au Québec : Le Cheval Blanc est venu, a vu et a vaincu », Bières et plaisirs, 2, 1 (2010), p. 10

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Lennoxville. Désirant se démarquer, les deux hommes se lancent dans la production de bières belges conditionnées en bouteilles en s’assurant notamment les services du brasseur belge Gino Vantieghem128. Leurs produits uniques font rapidement fureur auprès d’une clientèle impressionnée par l’originalité du processus brassicole caractéristique d’Unibroue : « Il n’y avait pas de bière refermentée au Québec ; la blanche n’était pas connue et les bières de dégustation de longue durée non plus. »129 Aussi l’utilisation d’une iconographie puissante – le fort Chambly par exemple – ainsi que l’association avec le populaire Robert Charlebois contribuent-elles à convaincre les consommateurs d’essayer ces nouveaux produits, mais aussi de les adopter en tant que symbole de résistance face aux brasseurs industriels. Les différents noms donnés aux bières d’Unibroue parviennent d’ailleurs à les insérer dans le contexte québécois tout en leur permettant de respecter les codes centenaires de la tradition brassicole belge. La première bière produite par la microbrasserie – la Blanche de Chambly – illustre par exemple très bien cette manière de procéder : « Selon les Belges, la première bière que l’on doit brasser est une bière blanche. De plus, elle porte habituellement le nom de la ville d’où elle provient… Blanche de Chambly! »130 La Maudite est un autre exemple de juxtaposition entre tradition brassicole belge et référent culturel québécois: « En Belgique, certains brasseurs avaient l’habitude de nommer leurs bières fortes avec des noms de Satan… On souhaitait respecter cela, mais avec une touche québécoise et on avait l’expression "maudit" en tête… »131 En ajoutant sur l’étiquette le fameux canot volant de la Chasse- Galerie, Unibroue venait de créer la plus québécoise des bières belges. Même les microbrasseries ne se lançant pas dans la confection de bières belges sont influencées par les codes de cette tradition. Par exemple, la première bière lancée en 1989 par la Brasserie McAuslan, une microbrasserie établie la même année par le brasseur de descendance irlandaise Peter McAuslan sur la rue Saint-Ambroise à Montréal132, s’appelle la Saint- Ambroise Pale Ale. Cette bière, une pale ale issue de la tradition brassicole anglaise, est ainsi nommée en empruntant à la tradition belge la pratique voulant que la première bière d’une brasserie rende honneur à sa ville d’origine. McAuslan opte alors probablement pour le nom

128 Sneath, op. cit., p. 267

129 David Sparrow, « Chez Unibroue, les légendes courent toujours », Bières et plaisirs, 1, 4 (2009), p. 11 130 Ibid. : Témoignage de Sylvain Bouchard, sommelier en bière chez Unibroue

131 Ibid.

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de la rue sur laquelle il est installé pour ne pas froisser les autres microbrasseries de Montréal comme le Cheval Blanc.

L’influence de la tradition brassicole belge ne s’arrête pourtant pas qu’aux styles préconisés par les artisans-brasseurs ou aux noms qu’ils donnent à leurs bières. Certaines microbrasseries semblent en effet miser sur la popularité des bières belges pour attirer des consommateurs dont le premier contact avec la bière artisanale québécoise est susceptible d’avoir été avec ce genre de produit, notamment par l’entremise de brasseries influentes comme Unibroue. La microbrasserie Saint-Arnould fondée par les frères Vidal intègre par exemple plusieurs influences de la tradition belge allant au-delà des bières elles-mêmes. Déjà, le nom de la brasserie est choisi en référence directe à Saint-Arnould, le saint-patron belge de la bière133. Par la suite, le menu présentant les choix de bières et de nourriture aux clients arbore une myriade de références à la tradition belge. Sur sa page couverture, quatre petits personnages ressemblant au Manneken Pis de Bruxelles encadrent une représentation de Saint-Arnould, une chope de bière à la main et adossé à un tonneau de bière sur lequel repose un fourquet de brasseur. Un court texte complète la page couverture du menu. Rédigé dans une police d’écriture renvoyant à la calligraphie de vieux manuscrits médiévaux, le texte de quelques lignes se trouve être en fait la légende d’Arnould de Metz, selon laquelle les pèlerins transportant ses reliques vers la cathédrale de Metz l’auraient « prié pour voir leurs cruches et outres vides se remplir miraculeusement de bière désaltérante. »134 La police d’écriture « médiévale » reste une constante tout au long du menu jusqu’à la dernière page sur laquelle est imprimée une seconde légende, celle-ci étant toutefois inventée par les frères Vidal. On y raconte comment ces derniers, guidés par de vieilles cartes tracées au 17e siècle, trouvent une source mystérieuse de laquelle jaillit une eau aux doux arômes de houblon sur le site qui allait héberger leur microbrasserie. Cette source, selon la légende, serait en fait la source perdue de Saint-Arnould lui-même et contiendrait ainsi une eau « sacrée » pouvant

133 Mathieu Perron, « Les saints patrons de la bière », Bières et plaisirs, 6, 3 (2014), p. 34 : Il existe dans les

faits deux Saint-Arnould dans le monde brassicole francophone. Le plus connu, Arnould de Soisson, aurait vécu au 11e siècle en Belgique. « On dit qu’il encouragea le brassage de bières dans son abbaye et qu’il fit la

promotion de sa consommation auprès des paysans. On raconte encore que, se rendant compte que beaucoup mourraient après avoir consommé de l’eau polluée de la rivière d’un village, il fit réunir un jour tous les habitants dans la maison du brasseur. » Le second, Arnould de Metz, aurait vécu aux 6e et 7e siècles en France.

Il est notamment au cœur d’une légende impliquant la multiplication de la bière lors du transfert de son corps à Metz.

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potentiellement produire une bière divine. Une représentation de Gambrinus Vidal135, explorateur du 17e siècle et ancêtre fictif des fondateurs de la brasserie, accompagne enfin le texte. L’ensemble du menu et, par extension, de la microbrasserie baigne ainsi dans une tradition brassicole belge qui n’est tout de même pas respectée à la lettre par ses fondateurs. Le nom de leurs bières, notamment la P’tit train du nord et la Rivière rouge, évoque en effet très bien leur désir de mettre en valeur leur localité, son histoire et ses particularités. De plus, ils décident consciemment de ne pas suivre les codes de la tradition belge comme l’ont notamment fait Unibroue avec leur Blanche de Chambly : « La Blanche des anges, ben je ne voulais pas l’appeler la Blanche de Saint-Jovite, ça faisait campagne et avec Tremblant qui s’en venait... Ç’aurait pu être la Blanche de Tremblant... On a fait une couple de tests pour l’étiquette [avec le nom] Blanche des Anges et ça a passé! »136 Par la manière dont il construit l’image de sa brasserie et de ses bières, Serge Vidal montre une volonté de se détacher des normes de la tradition belge tout en étant conscient du pouvoir d’attraction qu’elle peut avoir sur des consommateurs peu à l’aise avec la bière artisanale.

La tradition belge n’est tout de même pas la seule source d’inspirations de nos artisans- brasseurs. La microbrasserie Brasal, dont il a été question plus haut, est fondée en 1989 par Marcel Jagermann, un immigrant allemand, qui est rejoint quelques années plus tard par son fils Etan. Leur maître-brasseur, Harald Sowade, lui aussi d’origine allemande, y travaille en respectant scrupuleusement la Reinheitsgebot, une loi bavaroise remontant à 1516 évoquant la pureté des ingrédients en plus d’utiliser du matériel spécialisé importé directement d’Allemagne137. Un peu à la manière d’Unibroue avec ses bières belges, Brasal se donne ainsi comme mission d’élargir les horizons des Québécois en matière de bière « de goût » : « Leur contribution a permis à de nombreux consommateurs de s’initier à de la bonne bière, que, par tradition, l’on apprivoisait à coup de lampées belges. »138 Les brasseurs du côté de l’Amère à boire, microbrasserie fondée en 1996 sur la rue Saint-Denis à Montréal, proposent quant à eux dès le départ des produits d’inspiration britannique ainsi qu’une « bière de fermentation basse élaborée selon la recette et avec la levure typique des bières des

135 Le nom Gambrinus n’est d’ailleurs pas anodin dans la création du personnage de l’explorateur. En effet,

Gambrinus est le nom du roi laïc de la bière dans les pays européens. Il est l’alter ego laïc de Saint-Arnould.

136 Serge Vidal, loc. cit.

137 Anne Marie Parent, « Brasal : Une entrevue avec Etan Jagermann, D.G. », BièreMAG Online,

http://www.bieremag.com/bm-i-m.html

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Montagnes noires de Moravie, que l’on baptise cernà. »139 Les grandes traditions brassicoles européennes enferment pour ainsi dire moins les artisans-brasseurs québécois dans un cadre restreint qu’elles ne les guident dans la construction de notre propre tradition brassicole québécoise. Elles se présentent comme des garde-fous, des lignes directrices, que nos brasseurs utilisent comme canevas de base assurant une certaine cohérence à leurs créations. Alain Geoffroy résume très bien cette tendance à la réinterprétation, attitude qui semble d’ailleurs particulièrement présente chez les brasseurs québécois :

« On dit qu’on fait des bières "à la belge" parce qu’on s’inspire de ces styles et on essaie d’expliquer aux gens leur provenance. [Ici, on] est à la frontière de l’Ontario et on peut voir un peu la différence ; avec les bières de spécialité, on est beaucoup plus créatifs. On va travailler avec les herbes locales par exemple. Toutes les bières sont un peu interprétées à notre saveur. Par exemple, les pale ale brassées ici ne sont pas des pale ale d’origine, elles sont plutôt nord-américaines, plus houblonnées, plus franches, plus crisp, alors que la pale ale à l’origine est assez maltée et contient des styles de houblon qu’on utilise pas ici. On réinvente les styles quelque part. »140 Somme toute, les traditions brassicoles européennes jouent un rôle triple dans l’établissement des microbrasseries au Québec et le perfectionnement du savoir-faire brassicole québécois. Premièrement, elles encadrent le travail de nos brasseurs qui, surtout au début du mouvement, ne disposent que de peu de formation officielle. Ensuite, elles assurent un certain gage de qualité aux consommateurs qui peuvent alors « plonger dans l’inconnu » en sachant tout de même qu’un savoir-faire et des techniques éprouvées depuis des centaines d’années sont derrière la boisson qu’ils s’apprêtent à boire. Enfin, elles comblent le désir de nouveauté et de diversité des amateurs de bière artisanale en leur offrant des produits aux saveurs et textures variées, tout en ne se révélant pas trop prononcées, voire rebutantes, pour les non- initiés. Des styles très forts en amertume, en acidité ou même en salinité comme les IPA, les sour et les gose apparaissent en effet beaucoup plus tard sur le marché québécois afin de répondre à la demande de bières toujours plus surprenantes et innovantes141. Les amateurs

139 Mario D’Eer, « L’Amère à boire », BièreMAG Online, http://www.bieremag.com/bm-i-m.html 140 Alain Geoffroy, loc. cit.

141 Sylvain Robitaille, loc. cit. : « Honnêtement, jusqu’à l’arrivée des IPA, les bières belges ont eu toute la place.

Ici aussi! Là, on a commencé depuis une coupe d’année à se lancer là-dedans. Aujourd’hui il doit y avoir plus de styles d’inspiration britannique que belge en tout cas. »

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québécois de bière artisanale semblent d’ailleurs particulièrement ouverts et curieux aux autres styles si on les compare à leurs homologues des autres pays francophones d’Europe. Les Belges par exemple, fiers d’une tradition142 riche et influente dans le monde brassicole, se révèlent plutôt conservateurs et chauvins dans leur consommation.143 Du côté de la France, « la majorité des Français ne possède pas de connaissance brassicole. La bière [y] vit dans l’ombre du vin, quasi indétrônable. »144 La bière québécoise y est d’ailleurs perçue comme imaginative, créative et très savoureuse, les styles de bières ainsi que les goûts marqués sortant de l’ordinaire145 pour les consommateurs français. Le talent, et surtout, la créativité de nos artisans-brasseurs n’est plus à prouver. Ces derniers ont su perfectionner de manière collective au cours des trois dernières décennies un savoir-faire brassicole unique fondé sur l’originalité et l’adaptabilité à même d’assouvir la soif de nouveauté des amateurs.

Le savoir-faire brassicole québécois : Une entreprise collective et créative

En 2012, 190 des 3.500 bières les plus prisées au monde provenaient du Canada. De ce chiffre, 117 produits étaient brassés au Québec. Au même moment où la province ne compte environ que 33% des microbrasseries au pays, ses brasseurs produisent 60% de ses meilleures bières146. Encadrant nos artisans-brasseurs depuis la fin des années 1980, les brasseurs européens posent incontestablement les bases de notre propre tradition brassicole. Au fil des années, leurs « élèves » deviennent ainsi à leur tour les maîtres d’autres brasseurs amateurs et s’engagent à leur transmettre des compétences techniques, certes, mais aussi leur inventivité, leur rigueur et leur désir de se surpasser.

La bière est une boisson alcoolisée pouvant prendre toute une panoplie de couleurs, de saveurs et de textures. En profitant de techniques de bases reconnues depuis plusieurs décennies, lesquelles sont par la suite adaptées au contexte québécois par nos artisans- brasseurs, ces derniers parviennent à créer une panoplie de produits de qualité qui, dans leur

142 La culture de la bière en Belgique est par ailleurs entrée en 2016 sur la Liste représentative du patrimoine

culturel immatériel de l'humanité.

143 Anne-Marie Luca, « Le reste du monde sait-il que le Québec brasse ? », Bières et plaisirs, 7, 3 (2015), p. 7. 144 Ibid.

145 Ibid.

146 Sylvain Cloutier, « Bières québécoises : les meilleures au Canada ? », Bières et plaisir, 4, 4 (2012), p. 7 : Il

est d’ailleurs intéressant de noter que la quasi-totalité des meilleures bières d’inspiration belge canadienne en 2012 sont brassées au Québec.

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extravagance, savent tout de même conserver une ligne directrice claire. Cette tendance à l’appropriation de différents styles brassicoles et à leur réinterprétation est une des clefs de voûte du succès de nos brasseurs auprès de consommateurs avides de variété. Stéphane Rollin, ancien brasseur aux Brasseurs du Temps, parle d’expérience en illustrant le caractère fortement modulable de la bière :

« La bière à la base reste une recette assez basique. Il y a mille variantes et plus de la même recette, mais ça va être la touche de la maison qui va faire la différence. Tu sais, une bière anglaise, belge, allemande, peu importe où elle sera brassée, devrait ressembler au style de référence. C’est ce que tu voulais faire, pi c’est ce à quoi le client s’attend. Une brown ale, je sais ce que ça va goûter. Par contre, je ne sais pas ce que celle-là goûte (en insistant sur la pinte qu’il a à la main). Sortir vraiment des– pas que c’est difficile, mais la bière va rester la même à la base. Un gâteau à la vanille va rester un gâteau à la vanille. Tu peux mettre des bonbons dedans, ça va le rendre spécial. Tu peux mettre des pépites de chocolat dedans, mais le gâteau va

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