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Le besoin d’un nouveau récit

Un regard critique sur la communication de la CCIP

3. Vers un nouveau modèle ?

3.3. Le besoin d’un nouveau récit

À partir des éléments décrits dans les paragraphes précédents, j’estime qu’il est possible de créer un nouveau récit dont l’argument central serait basé sur une

« définition par défaut »56.

Lorsqu’un client potentiel de la CCIP, soit un chef d’entreprise, restaurateur ou un autre acteur, parmi les sept cents catégories de métier dont j’ai fait mention précédemment, dit : « la CCIP n’est pas pour moi, je suis petit, ça, c’est pour les grands », il se place en dehors de tout dialogue possible. Or la définition par défaut consiste à établir un dialogue précisément à partir de son inexistence. Il s’agit de définir une relation et de l’expliquer parce qu’elle n’est pas. Autrement dit, il s’agit de faire appel à des éléments que le client potentiel érige en obstacle par rapport au récepteur.

Le récepteur d’un message peut être placé dans une position où il aura une influence – même très limitée – sur le déroulement du récit. Ce faisant, chaque lecture détermine un « récit particulier » issu de l’ensemble de possibles plus au moins déterminé par un dispositif qui permet de registrer ses choix. En d’autres termes, il appartient au récepteur du message, le client potentiel de la CCIP, de construire son propre récit à partir des caractéristiques qu’il estime comme propres. Ainsi, même à

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Champion, Baptist, vers l’actualisation d’un « récit fantôme » ? Réflexions sur les nouvelles formes de récit et leur réception. p 129.

travers la négation « je suis petit, ce n’est pas pour moi », et à l’aide d’un dispositif de communication adéquat, le client choisit le message qu’il veut recevoir en fonction de sa perception de lui-même. Le message se structure donc selon des choix faits par le récepteur du message.

Ce type de construction suppose la coexistence de deux narrations, une générale et une secondaire construite par le récepteur de façon parallèle. De plus, les deux narrations supposent l’existence d’une méta-structure technique capable de contenir les deux univers.

Lors de ma recherche j’ai constaté à quel point l’univers des clients potentiels PME de la CCIP se trouve dispersé, tant sur le plan de la diversité de la nature des activités que sur celui des caractéristiques propres à chaque entreprise. Gabriel Tarde rappelle qu’il existe des liens entre les « individus » dispersés. « Chose étrange, les hommes qui s'entraînent ainsi, qui se suggestionnent mutuellement ou plutôt se transmettent les uns aux autres la suggestion d'en haut ces hommes-là ne se coudoient pas, ne se voient ni ne s'entendent : ils sont assis, chacun chez soi, lisant le même journal et dispersés sur un vaste territoire. Quel est donc le lien qui existe entre eux? Ce lien, c'est, avec la simultanéité de leur conviction ou de leur passion, la conscience possédée par chacun d'eux que cette idée ou cette volonté est partagée au même moment par un grand nombre d'autres hommes ». Ce lien existe parmi les chefs d’entreprises de PME, comme en témoigne l’étude de l’institut français d’opinion publique élaborée en 2008.

Afin de trouver ce lien et en tirer des éléments utiles pour la communication de la CCIP, il me semble que les supports numériques sont le moyen le plus adéquat pour

y parvenir en raison de ses « capacités expressives nouvelles »57. Les moyens

numériques et particulièrement l’internet offrent la possibilité de construire des messages selon des règles différentes, qui peuvent avoir des effets distincts sur le récepteur, du fait de la différence de forme.

Les chefs d’entreprise constituent une « communauté épistémique »58 basée sur leur

expertise entendue comme un « savoir-faire». Il ne s’agit pas ici d’un « savoir

57 Ibid. 58

quoi » qui renverrait à un argument d’autorité fondé sur les compétences, mais à un partage d’intérêts fondé, par exemple, sur leur capacité à réagir, immédiatement et sans calcul dans une situation économique complexe.

Les moyens numériques permettent d’évaluer et de suivre en temps réel l’évolution des intérêts et des problématiques qui touchent le public, et peuvent s’ériger aussi en source de nouvelles idées et solutions. J’y reviendrai dans le chapitre suivant.

Conclusion

L’ensemble des éléments analysés au long de cette partie met en évidence une certaine défaillance de la communication de la CCIP quant à la transmission de messages clairs et capables d’interpeller le public PME. A travers des outils empruntés à la théorie de l’argumentation, j’ai analysé la rhétorique du discours de la CCIP contenue dans les supports adressés aux entreprises. Ce faisant, il ressort que l’hypothèse défendue lors de cette partie, id est, la CCIP communique

insuffisamment avec ses clients en raison d’un discours centré sur elle-même qui n’intègre pas assez les caractéristiques du public cible, a été validée. Le

modèle proposé afin de pallier cet inconvénient suppose l’adoption d’une approche différent de la part des communicants de la CCIP. Il serait à cet égard souhaitable d’étendre l’utilisation de moyens de communication plus adaptés, permettant à la fois de transmettre un message et de récolter des informations de l’émetteur. A mon avis, cette démarche permettrait d’instaurer les modalités d’un dialogue plus performant entre la CCIP et les PME, en raison de l’intégration des caractéristiques de ces dernières dans la stratégie de communication et dans le contenu des supports utilisés par la CCIP.

PARTIE III

De la foule au public : vers une communication plus proche

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