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a. Propriétés physiques des ondes ultrasonores

Par définition, les ondes ultrasonores sont des ondes acoustiques mécaniques dont la fréquence d’émission est supérieure à la fréquence audible par l’oreille humaine soit environ 15 kHz. Au delà de 15 GHz, on parle d’hypersons. Les fréquences ultrasonores utilisées dans le milieu médical sont habituellement comprises entre 1 et 15 MHz. L’utilisation d’ultrasons avec une fréquence > à 1 MHz permet l’obtention d’un faisceau ultrasonore. Différents paramètres physiques sont nécessaires pour décrire une onde ultrasonore : l’axe de déplacement des particules, l’amplitude du mouvement particulaire, la célérité et l’énergie transportée.

Selon la nature du milieu traversé (fluide ou solide), une onde peut être décrite par une grandeur vectorielle par le déplacement particulaire qu’elle engendre. Dans ce cas, l’onde se comporte comme une onde élastique. Selon la nature du milieu traversé, différents types d’ondes élastiques peuvent se propager : onde de compression et onde de cisaillement.

Pour une amplitude A0 donnée, la vitesse de déplacement des particules autour de leur position de repos est proportionnelle à la fréquence de l’onde. Cette notion ne doit pas être confondue avec la célérité de l’onde ultrasonore, c. La propagation d'une onde dans un milieu non absorbant permet de relier la célérité, c, aux propriétés mécaniques du milieu que sont la densité ρ, et le module d’élasticité, E:

c = (E ρ -1)1/2

Ainsi, la célérité d’une onde ultrasonore ne dépend que de la nature du milieu traversé défini par sa compressibilité (c'est-à-dire l’aptitude à reprendre la forme originale après déformation) et sa masse volumique.

Une onde ultrasonore qui se propage transporte de l’énergie. L'énergie e d'une masse m qui oscille de part et d'autre d'une position d’équilibre, est à chaque instant la somme de son énergie cinétique et de son énergie potentielle. En l'absence de frottement, e est indépendant du temps. Lorsque la vitesse u est nulle, l'énergie cinétique, 1/2 mu2, est nulle aussi et l'énergie potentielle est maximum. Inversement, lorsque la vitesse passe par son maximum, u0, l'énergie cinétique est maximum et l’énergie potentielle est nulle. A chaque instant, l'énergie totale de la particule est donc :

o Ondes de compression-dilatation

Dans un milieu fluide, seules les ondes de compression-dilatation peuvent se propager. L’onde se propage en comprimant puis en détendant de proche en proche des tranches de fluide sans déplacement de matière (Figure 10). La direction de déplacement des particules est appelée polarisation. Dans ce cas, l’axe de déplacement des particules est parallèle à l’axe de propagation de l’onde. Ces ondes prennent aussi le nom d’ondes longitudinales. Habituellement, le module de compression K est constant dans la plupart des tissus traversés qu’ils soient sains ou pathologiques. Cette relative homogénéité permet ainsi de considérer que la vitesse des ondes de compression varie peu entre différents tissus mous, environ 1540 m/s. Le module K exprime la variation relative du volume du solide lorsqu’il est soumis de tous cotés à une surpression. Or les tissus humains sont très peu compressibles et le module K est donc très élevé, environ 109 Pascals [51].

Figure 10 : Onde longitudinale, axe de déplacement des particules parallèle à l’axe de propagation de l’onde [51]

o Ondes de cisaillement

Dans un solide isotrope, deux types d’ondes peuvent se propager : des ondes de compression longitudinales et des ondes de cisaillement. Ces dernières se propagent sans variation de volume avec une polarisation perpendiculaire à la direction de propagation, et sont aussi appelées ondes transversales (Figure 11). La vitesse de propagation de l’onde de cisaillement cS est toujours inférieure à celle de l’onde de compression cP. Typiquement cP est égal à 1540 m/s et cS à 10 m/s. La vitesse dépend ainsi de trois paramètres, la densité ρ, le module de compression K et le module de cisaillement μ. Dans les tissus mous, il existe un important contraste entre le module de cisaillement et le module de compression en lien avec le fort pourcentage d’eau entrant dans leur composition. Ces tissus se comportent de manière quasi incompressibles. Ainsi, lors de l’exploration d’un tissu avec des ondes ultrasonores à hautes fréquences, les tissus mous se comportent comme des fluides visqueux dans lesquels seules les ondes de compression peuvent se propager. A basse fréquence, les tissus ont un comportement proche de celui d’un gel, se déformant sans changer de volume. Dans cette dernière

situation, l’amplitude des ondes de compression-dilatation est négligeable comparée à l’amplitude des ondes de cisaillement.

Figure 11 : Onde de cisaillement, polarisation perpendiculaire à la direction de propagation [51]

o Module de cisaillement et module de Young

L’élasticité d’un tissu peut être décrite par le module de cisaillement μ ou le module de Young E, tous les deux exprimés en kiloPascal. D’un point de vue physique, le module μ caractérise la déformation d’un tissu soumis à une contrainte de cisaillement. Les modules de Young et de cisaillement peuvent être reliés par l’équation suivante :

μ : module de cisaillement, E : module de Young, v = coefficient de poisson

Le coefficient de poisson renseigne sur la compressibilité du milieu. En mécanique des mileux continus, les propriétés élastiques d’un milieu peuvent être décrites par deux coefficients : coefficients de Lamé μ (module de cisaillement) et λ (premier coefficient de Lamé). Ces deux coefficients s’expriment en fonction du module de Young E et du coefficient de poisson v selon les formules suivantes :

On peut exprimer le module de Young E en fonction de ces deux coefficients de Lamé par l’équation suivante :

Les tissus peuvent être caractérisés par leurs capacités à être déformés. Le module de compressibilité K, représente la difficulté à modifier le volume d’un tissu en lui impliquant une contrainte. Les tissus biologiques sont composés essentiellement d’eau et sont finalement quasi incompressibles. Toutefois, même si un tissu est peu compressible et il peut être tordu ou cisailler. Par conséquent, la compressibilité K d’un tissu biologique peut être négligé par rapport au module de cissailement μ (Figure 12). Dans un tissu incompressible, on considère que v vaut 0,5. Ainsi si on tient compte des différentes équations détaillées ci dessus, il est possible de simplifier l’expression de E par l’équation [52]:

E = 3μ

Hors, le module de cisaillement μ est relié à la célérité de l’onde de cisaillement Cs et de la masse volumique ρ du tissu par la formule suivante

Il est donc possible de déterminer le module de Young en calculant la vitesse de propagation de l’onde de cisaillement car

E = 3 μ = 3 Cs2

Figure 12 : Modules élastiques de compressionK, cisaillement μ et Young E

Le module de Young est donc proportionnel au module de cisaillement. Le calcul du module de cisaillement permet donc de déduire E est d’obtenir une estimation de l’élasticité tissulaire. Dans les tissus mous, μ est de l’ordre de 102 à 107 Pascals, bien inférieur au module de compression.

Cependant, les variations du module de cisaillement au sein des tissus sont bien plus importantes que celles du module de compression ce qui en fait une propriété intéressante pour différencier les tissus entre eux (Figure 13). Ainsi l’élastographie permet de suivre les déformations causées par le passage d’une onde de cisaillement générée par une onde ultrasonore de basse fréquence, puis de déterminer par différentes méthodes de calcul au module de Young.

Figure 13 : Variations des modules de cisaillement et de compression dans les tissus bilogiques. Les variations du module de compression sont limitées par rapport aux modules de cisaillement [53].

o Constructions de l’image d’élastographie

Quel que soit le mode d’élastographie utilisé, on retrouve d’abord une phase d’excitation du milieu puis une seconde étape d’observation du mouvement généré. Lorsqu’une sonde d’échographie émet une impulsion basse fréquence, une onde de cisaillement est émise dans le plan de la barrette échographique. Le milieu étudié est ensuite exploré avec une onde ultrasonore haute fréquence donnant une image « gelée » du milieu de propagation. Le champ ultrasonore reçu par cette onde haute fréquence réfléchie est une « empreinte fidèle » du milieu. La propagation de l’onde de cisaillement va venir perturber le tissu biologique en le déformant localement. Il y a donc une modification du champ ultrasonore initial. Ces perturbations vont permettre de quantifier et localiser l’amplitude du déplacement engendré par le passage de l’onde de cisaillement. Ainsi, l’ensemble des particules (déterminées par leur coordonnées x,y) qui subissent le passage de l’onde de cisaillement vont être sensiblement déplacés, modifiant partiellement le champ acoustique ultrasonore rétrodiffusé. Ces perturbations vont permettre de quantifier et de localiser l’amplitude du déplacement. Afin de détecter le déplacement, on compare le signal ultrasonore à l’instant « t » puis à l’instant « t+1 » sur un ensemble de ligne du champ permettant d’obtenir un film de déplacement des particules. A partir de ce film, il est possible de déterminer la vitesse de propagation de l’onde de cisaillement par autocorrélation du champ de déplacement. Le calcul s’effectue profondeur par profondeur. En pratique, les deux grandeurs étudiées sont l’amplitude du déplacement Us associé à l’onde de

cisaillement et la position dans l’axe y de ce déplacement. La position y est alors convertie en temps d’arrivée des ultrasons.

La mesure du déplacement en tout point du milieu traversé permet de suivre la propagation de l’onde de cisaillement. Les mesures de vitesse locales sont ensuite effectuées. La mesure du module de cisaillement μ est calculée en faisant l’hypothèse que la densité tissulaire ρ est constante selon la formule :

μ = ρ cS2

L’obtention d’une cartographie de vitesse permet ainsi d’obtenir une cartographie du module de Young.