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B. Evolution orogénique du domaine atlasique

CONTEXTE GEOLOGIQUE

II.5. B. Evolution orogénique du domaine atlasique

A partir de la fin du Crétacé inférieur/début du Crétacé supérieur, l’Afrique entame sa remontée vers l’Europe (Rosenbaum et al., 2002). Les preuves de déformation au Crétacé supérieur

55 sont rares, et proviennent de l’observation de quelques discordances locales, sans structures tectoniques de grande ampleur (Froitzheim, 1984 ; Charrière et al., 2009). L’essentiel de la topographie a été acquise au Cénozoïque (Laville et Piqué, 1992 ; Frizon de Lamotte et al., 2000, 2008). Jusqu’à l’Eocène moyen, la stratigraphie du domaine atlasique est dominée par des dépôts de mer épicontinentale, mer qui couvrait le Nord du Maroc (Fig. II-24 ; Tabuce et al., 2005 ; Charrière et al., 2009).

Figure II-24 : Carte paléogéographique du Nord du Maroc pendant le Maastrichtien-Eocène moyen (Frizon de Lamotte et al., 2008, d’après Herbig et Trappe, 1994).

La sédimentation change à partir de l’Eocène supérieur, et passe de marine à continentale (voir El Harfi et al., 2001 pour une synthèse dans le bassin de Ouarzazate). Contrairement à l’Algérie et la Tunisie, les dépôts post-éocènes sont peu représentés au Maroc, érodés, ou continentaux et mal datés. Ainsi, le calendrier tectonique des déformations au Maroc est mal établi. Frizon de Lamotte et al. (2000) proposent un calendrier unifié à l’échelle de tout l’Atlas, mettant en jeu deux événements tectoniques principaux : (1) le premier à l’Eocène supérieur, en se basant sur des arguments de sédimentologie (El Harfi et al., 2001) et le fait que toutes les formations marines antérieures à l’Eocène supérieur se retrouvent surmontés de dépôts continentaux ; (2) le second du Pliocène à l’actuel, sur la base d’arguments structuraux.

Cependant, d’autres études évoquent une déformation continue depuis l’Oligo-Miocène (Beauchamp et al., 1999 ; Benammi et al., 2001 ; Tesón et Teixell, 2008 ; Tesón et al., 2010).

56 L’élément clef qui permettrait de trancher une fois pour toute réside dans la datation, complexe, des formations continentales et la reconnaissance précise des géométries entre ces différents corps sédimentaires.

Figure II-25 : Carte montrant les principaux domaines géologiques du Maroc (Missenard et al., 2006).

La déformation sur les fronts et dans la chaîne atlasique a été décrite dans plusieurs études, synthétisées par Frizon de Lamotte et al., 2008. La chaîne est étroite et le taux de raccourcissement reste toujours plutôt faible, entre 10-20 % au niveau du Haut Atlas de Marrakech à 35 % dans le Haut Atlas Central vers l’Est (Teixell et al., 2003 ; Frizon de Lamotte et al., 2008). Le style tectonique associé à ces déformations est majoritairement « thick-skinned » (i.e. impliquant le socle) mais d’étroites régions du front exhibent par endroits des portions de chaînes plissées d’avant-pays (par exemple dans la zone sub-atlasique à l’Est du bassin de Ouarzazate ; Saint-Bezar et al., 1998 ; Frizon de Lamotte et al., 2000 ; Teixell et al., 2003 ; Tesón et Teixell, 2008).

L’amplitude de la déformation d’âge éocène supérieur est difficile à évaluer, car aucun argument structural n’est visible dans les bassins d’avant-pays où sont conservés des sédiments de cette période. De plus, pour le Haut Atlas de Marrakech (entre Haut Atlas occidental et central ; fig. II-25) ainsi que les deux autres domaines central et occidental, le cœur de la chaîne ne conserve pas de sédiments récents permettant de contraindre l’âge précis de cette phase de déformation.

57 Néanmoins, les dépôts détritiques, parfois grossiers, nécessitent l’existence d’une paléotopographie à cette époque, probablement liée à une chaîne de montagne plus étroite que l’actuelle.

A partir de l’Oligo-Miocène, les bassins d’avant-pays montrent que le style de la déformation change le long des fronts, selon l’héritage structural et la puissance des niveaux de décollement (Fig. II-26 ; Missenard et al., 2007). Vers l’intérieur de la chaîne, l’accommodation se fait par le biais de failles de socle, comme c’est le cas du Front Sud Atlasique (SAF), qui montre un rejet kilométrique pendant le Cénozoïque (Missenard, 2006).

Figure II-26 : Evolution des styles structuraux le long du Front Sud Atlasique depuis le Haut Atlas Central (A), en passant au Sud du Haut Atlas de Marrakech (B) jusque dans le Haut Atlas Occidental (C) (Missenard et al., 2007).

Ainsi, la majorité de la topographie actuelle est post-Eocène. D’après leur étude structurale dans la zone sub-atlasique au Nord du bassin d’Ouarzazate, Tesón et Teixell (2008) proposent que la première étape tectonique ait lieu au Miocène inférieur(?)-moyen, suivie d’une déformation plus ou moins continue jusqu’à l’actuel. D’autres auteurs ont mis en évidence l’existence d’une déformation pendant le Miocène, à partir du registre sédimentaire (El Harfi et al., 2001 ; Tesón et al., 2010), de la répartition des dépôts mio-pliocènes (Babault et al., 2008), d’arguments structuraux (Tesón et Teixell, 2008) et d’arguments de thermochronologie basse température (Missenard et al., 2008 ;

58 Balestrieri et al., 2009). Malgré tout, le calendrier tectonique des déformations n’est pas encore totalement admis.

Enfin, des éléments de géophysique, de géologie structurale et de sismique ont proposé que les Atlas au Maroc présentent une topographie anormalement élevée en raison d’une anomalie thermique dans le manteau lithosphérique (Seber et al., 1996 ; Teixell et al., 2003 ; Frizon de Lamotte et al., 2004 ; Teixell et al., 2005 ; Zeyen et al., 2005 ; Missenard et al., 2006). D’après ces études, il est accepté qu’une part non-négligeable de la topographie est due au fait qu’une portion de lithosphère est amincie sous les Atlas et contribue à environ un kilomètre additionnel de topographie (Fig. II-27 ; Missenard, 2006).

Figure II-27 : Carte topographique du Nord-ouest du Maroc à gauche, et la même, corrigée de l’anomalie lithosphérique à droite (de Missenard, 2006). Les profils à gauche sont ceux utilisés par Missenard et al. (2006) pour contraindre la géométrie de l’amincissement lithosphérique sous le Maroc. En blanc transparent est superposée la position approximative de l’anomalie d’épaisseur. A droite est présentée une échelle des altitudes, en mètres.

59 La mise en place de l’anomalie lithosphérique est considérée d’âge miocène (Missenard et al., 2008 ; Babault et al., 2008) et coïnciderait ainsi avec la phase de déformation que certains auteurs envisagent (voir ci-dessus). Enfin, la déformation se poursuit actuellement et des formations d’âge mio-pliocène peuvent même être déformées par des événements récents (Sebrier et al., 2006 ; Fig. II-28).

pliocènes sont recouvertes en discordance par des terrasses quaternaires horizontales, elles-mêmes soulevées par rapport au bassin actuel.

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Partie 3

THERMOCHRONOLOGIE

BASSE TEMPERATURE SUR