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La gamétogenèse et la période précoce post-fécondation représentent

respectivement des fenêtres critiques de perturbation de la mise en place et du

maintien de l’empreinte par des facteurs environnementaux. Une fréquence plus

élevée d’AMP a été notée dans les séries de SBW et de SRS, suggérant que celle-ci

puisse avoir une incidence sur les anomalies de l’empreinte (DeBaun et al., 2003;

Gicquel et al., 2003; Johnson et al., 2018; Kagami et al., 2007; Maher et al., 2003).

En effet, le risque de SBW est 6 à 9 fois plus élevé chez les enfants issus d’AMP que

ceux issus de grossesse spontanée (Soejima and Higashimoto, 2013). Un fait

particulier est que dans les désordres de l’empreinte parentale décrits après AMP,

l’épimutation implique majoritairement une perte de méthylation, qu’il s’agisse de

l’allèle maternel ou paternel. Dans les SBW, il s’agit d’une perte de méthylation de

l’allèle maternel au niveau du centre d’empreinte ICR2 (KCNQ1OT). En revanche,

c’est une déméthylation de l’ICR1 paternel qui a été montrée dans le miroir clinique

qu’est le SRS. Chez les animaux (ovins et bovins) une autre pathologie d’empreinte

associée à l’AMP a été décrite : le « Large Offspring Syndrome » (LOS) caractérisé

par une croissance excessive et lié à une perte de méthylation de l’ICR2 (locus

KCNQ1OT1) (Chen et al., 2013; Sinclair et al., 2000). Les causes à l’origine de ces

anomalies d’empreinte ne sont pas connues. Il peut s’agir d’une des procédures de

l’AMP aussi bien que de la stimulation ovarienne (la fin de la mise en place de

l’empreinte de l’ovocyte se réalise lors de la période qui précède l’ovulation) ou de la

cause de l’infertilité. Pour l’instant, les premières études n’ont pas pu imputer ces

anomalies à une technique d’AMP particulière puisque ces anomalies d’empreinte

ont été mises en évidence dans chacune.

Ainsi, il se pourrait que la survenue de défauts de marquage de l’empreinte durant la

gamétogenèse puisse être à l’origine de l’apparition de ces syndromes chez les

enfants. En effet, l’empreinte parentale se met en place durant la gamétogenèse, de

manière opposée en fonction du sexe de l’individu (chapitre II.1.B.2) et se maintien

après la fécondation lors de la reprogrammation du génome embryonnaire. De plus

d’après des études réalisées chez des hommes pris en charge en AMP, il existerait

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une association entre infertilité masculine, principalement pour les hommes

oligozoospermiques, et des défauts de méthylation de l’ADN spermatique notamment

au niveau des GSE (Boissonnas et al., 2010; Hammoud et al., 2010; Houshdaran et

al., 2007; Kobayashi et al., 2007; Laurentino et al., 2015; Marques et al., 2004, 2008;

Montjean et al., 2013, 2015; Poplinski et al., 2010; Santi et al., 2017; Sato et al.,

2011).

Afin d’évaluer cette hypothèse, nous avons analysé le statut de méthylation des

spermatozoïdes de pères d’enfant présentant une pathologie liée à l’empreinte

parentale : SRS ou SBW. Sept pères ont accepté de participer à l’étude, dont un

père qui avait eu recours à une FIV dans le cadre d’une endométriose et pour un

second sa femme avait bénéficié d’une stimulation simple de l’ovulation. L’analyse de

la méthylation de l’ADN spermatique a été réalisée sur 6 DMRs, impliquées dans les

SBW et les SRS, et connus pour être fréquemment associées à l’oligozoospermie.

Compte tenu du nombre limité d’échantillons analysés nous nous sommes restreint à

réaliser des analyses descriptives qui n’ont pas mis en évidence de différence

notable notamment entre les syndromes d’origine génétique et épigénétique.

Analyse des profils de méthylation des spermatozoïdes de pères d’enfant atteint de

pathologies liées à l’empreinte parentale

Protocole exploratoire

Sélection du sperme sur gradient de densité

Vérification : absence de contamination par des cellules somatiques

Extraction de l’ADN et traitement au bisulfite

Pyroséquençage

SBW

Mutation

n=1

SBW

Isodisomie

n=3

SRS

LOS

n=1

SBW

LOS

n=2

(1 post AMP)

Pères d’enfant atteint d’un syndrome de l’empreinte

parentale

Epimutation « Mutations »

génétiques

Témoins

Témoins fertiles appariés

sur l’âge et les paramètres

spermatiques

(3 pour 1 cas)

Analyse de la méthylation de l’ADN : 6 DMRs

H19/IGF2: IG-DMR (CTCF3 & CTCF6); IGF2-DMRs (DMR0 &

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Matériels et méthodes

Inclusion des pères d’enfant atteint de pathologie à l’empreinte

A partir, du registre des enfants pris en charge par le service de génétique du CHU

de Dijon, 15 enfants atteints de pathologies liées à l’empreinte (SBW et SRS) ont été

recensés. Seuls 7 pères ont souhaité participer à l’étude, trois pères ont exprimé leur

refus (problème de distance, vécu difficile de la maladie), trois pères sont restés

injoignables ou ne sont pas venus pour réaliser le recueil et un enfant est né de père

inconnu.

Nous avons pu inclure trois pères d’enfant présentant un syndrome lié à l’empreinte

parentale par Loss Of Methylation (LOM) : 2 cas de SBW liés à une hypométhylation

de l’ICR2 (locus KCNQ1OT1) et 1 cas de SRS lié à une hypométhylation de l’ICR1

(locus H19-IGF2) ainsi que trois cas de SBW liés à une isodisomie paternelle de la

région 11p15 (gain méthylation ICR1 et perte méthylation ICR2) et 1 cas de SBW par

mutation CBKN1C héritée de la mère (niveau de méthylation normale de la région

11p15).

Pour chaque père, nous avons inclus 3 témoins fertiles appariés sur l’âge et les

paramètres spermatiques (numération et mobilité spermatique).

Analyse et sélection du sperme

Après 30 minutes de liquéfaction les paramètres spermatiques (numération, mobilité,

vitalité et morphologie, présence de cellules rondes) ont été analysés selon les

recommandations de l’OMS. Les spermatozoïdes ont été sélectionnés sur gradient

de densité (90/45% de puresperm (JCD)) afin d’éliminer toute contamination par des

cellules rondes, leucocytes, cellules épithéliales, débris cellulaire. La pureté de la

fraction sélectionnée (10l) a été vérifiée sous microscope. Les échantillons ont été

conservés à -80°C avant de réaliser l’extraction de l’ADN.

Extraction de l’ADN spermatique

L’extraction de l’ADN a été réalisée selon le protocole modifié de Marques

(Marques et al, 2004). Brièvement, 500 µl de solution de lyse, contenant 10mM

Tris-HCl pH 7.5, 10 mM EDTA, 0.2% SDS, 50 mM NaCl, 1 mM DTT and 0.2 mg/ml

proteinase K (Fermentas), a été ajoutée aux échantillons de sperme suivi d’une

incubation à 55°C durant une nuit. L’ADN spermatique a ensuite été isolée par un

l’aide d’éthanol froid (Sigma Aldrich), rincé et solubilisé dans de l’eau purifiée. La

quantité et la qualité de l’ADN ont été évaluées à l’aide du spectromètre nanodrop

(Invitrogen).

Analyses de la méthylation de l’ADN spermatique

Le niveau de méthylation de l’ADN spermatique a été analysé sur 6 DMRs :

H19/IGF2: IG-DMR (CTCF3 & CTCF6); IGF2-DMRs (DMR0 & DMR2); SNURF

:TSS-DMR; KCNQ1OT1:TSS-DMR par pyroséquençage après traitement de l’ADN au

bisulfite de sodium. L’ADN génomique (500 ng) a été modifié après traitement au

bisulfite de sodium à l’aide du kit EpiTect (Qiagen). Préalablement au

pyroséquençage, l’ADN bisulfité (25 ng) a été amplifié par PCR. Les primers utilisés

sont disponibles dans l’article I (Bruno et al., 2015). Les réactions ont été réalisées à

l’aide du PyroMark Q24 System (Qiagen) avec le kit PyroGold SQA reagent kit selon

les instructions du fournisseur (Pyrosequencing AB, Uppsala, Sweden). Les produits

de PCR biotinylés ont été purifiés et dénaturés à l’aide de Pyrosequencing Vacuum

Prep Tool (Qiagen). Le pyroséquençage a été réalisé sur le Pyroséquenceur Q24

(Qiagen). Le niveau de méthylation a été calculé en fonction du ratio des pics de C et

T au niveau de chaque dinucléotide CpG inscrit dans le pyrogramme à l’aide du

logiciel: Pyromark Q24 Software v.2.0.6 (Qiagen).

Analyse de la méthylation de l’ADN des enfants

L’analyse de la méthylation de l’ADN avait été réalisée par la méthode décrite par

Gicquel et co, (Gicquel et al, 2005) au niveau de l’ICR1 et l’ICR2 (Tableau 8).

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Analyse de la méthylation du locus 11p15 Analyse génétique

Région ICR1 Région promoteur H19 Région ICR2 SNP /puce ADN

CGHarray

séquençage gène

CDKN1C

(exons codants et des

jonctions intron-exon)

Techniques SB SB MSqPCR

illumina

HumanCytoSNP-12v2 Séquençage

cas 1 N N perte de méthylation isolée NR NR

cas 2 N N perte de méthylation isolée NR NR

cas 3 perte de méthylation isolée perte de méthylation isolée N N NR

cas 4 gain de méthylation NR perte de méthylation

perte hétérozygotie

segmentaire de la région

11p15.2ptel en mosaïque

NR

cas 5 gain de méthylation NR perte de méthylation

perte hétérozygotie

segmentaire de la région

11p15

NR

cas 6 gain de méthylation NR perte de méthylation NR NR

cas 7 N NR N N délétion dans l'exon 2

c,641delC/p,P214RfsX58

Tableau 8 : Analyses de la méthylation de l’ADN et moléculaires réalisées chez les enfants atteints de pathologies liées à

l’empreinte

Aucune anomalie de la méthylation de l’ADN n’a été détectée chez les parents de ces enfants (analyse de la région ICR1 et ICR2)

N : normal, NR : non réalisé ; SB : southern blot