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Chapitre IV : TRANSFERTS DANS LA PATE DE CIMENT

1.1 Le béton, matériau du Génie Civil

1.1.1 Un matériau complexe

Le béton est, juste après l’eau, le matériau le plus consommé au monde, chaque habitant de la planète en consomme en moyenne un mètre cube par an (Cudeville, 2011).

La littérature concernant les bétons présentée ici provient des travaux du génie civil (Houst et Wittmann, 1986 et 1989; Gagné, 2000 ; Baroghel-Bouny et al., 2002 et 2005; Reynouard et

Pijaudier-Cabot, 2005 ; Ollivier et al., 2008). Le béton est un mélange de ciment, d'eau et de granulats, avec

quelques adjuvants possibles en faible proportion.

Le ciment anhydre est essentiellement composé de clinker (constituant, qui résulte de la cuisson d'un mélange composé d'environ 75 % de calcaire et de 25 % de silice), dont la composition majeure

est donnée dans le Tableau IV.1. Lorsque de l’eau est ajoutée au ciment anhydre, une réaction d’hydratation a lieu et forme des produits hydratés solides et poreux :

- 50 à 70% de Silicates de Calcium hydratés (C-S-H), aussi appelé « gel », quasiment amorphes et formant un composé colloïdal ;

- 25 à 27 % de Portlandite (Ca(OH)2), qui cristallise essentiellement en plaquettes hexagonales ;

- 7 à 10% d’Aluminates de Calcium et Sulfo-aluminates de Calcium hydratés.

Après durcissement, un béton est donc constitué de grains juxtaposés, enrobés et liés par la

pâte cimentaire et plus ou moins enchevêtrés. C’est un matériau complexe, pouvant être assimilé à

une matrice solide à travers laquelle peuvent percoler des phases fluides.

Le béton est également un matériau particulièrement évolutif, qui subit de profondes transformations physico-chimiques au cours du temps, et ce, dès les instants qui suivent sa préparation (notamment la réaction d’hydratation, ainsi que le phénomène de prise).

Considérant le béton en situation stabilisée, trois phases peuvent être identifiées :

- solide : pâte cimentaire (7 à 14 % du volume total) liant les granulats (50 à 80 % du volume total) ;

- liquide : eau libre, absorbée ou capillaire (10 à 20 % du volume total) ;

- gazeuse : air, vapeur d’eau (1 à 6 % du volume total) et polluant éventuel, dans notre étude.

L’eau est un ingrédient fondamental du béton, introduite dans le béton lors de sa fabrication, elle va remplir deux fonctions essentielles : une fonction physique qui confère au béton frais les propriétés rhéologiques d’un liquide et une fonction chimique qui contribue au développement de la réaction d’hydratation (Laghcha, 2006). L’eau est présente sous de multiples états dans le béton « fini » :

- l’eau chimiquement liée : c’est l’eau consommée au cours des réactions d’hydratation, combinée avec d’autres composants dans l’hydratation. Elle ne joue aucun rôle dans les phénomènes de transfert dans le béton ;

- l’eau adsorbée : il s’agit principalement des premières couches d’eau soumises au champ des forces superficielles au niveau des surfaces du réseau poreux ; la teneur en eau adsorbée se met en équilibre avec l’humidité relative de l’air ambiant.

- l’eau capillaire : elle est constituée de la phase condensée remplissant le volume poreux au-delà de la couche adsorbée et séparée de la phase gazeuse par des ménisques, elle obéit aux lois de capillarité et peut être éliminée par séchage;

- l’eau libre : elle n’est liée au solide par aucune force d’interaction. Sous l’action d’un gradient de pression, elle peut percoler à travers le milieu poreux, et peut facilement être éliminée par séchage.

Dans notre étude, nous travaillerons sur des échantillons de béton ou pâte de ciment séchés en étuve, et nous les considérerons comme secs ; pour des estimations hautes de pollution (condition la plus favorable aux transferts de polluant), et de façon à faciliter la répétabilité des expériences ; donc nous ne nous soucierons pas de l’eau dans le béton (ceci permet par ailleurs de simplifier les équations de transport et échanges entre phases). A noter que la notion de milieu sec concerne l’absence d’eau libre et capillaire, qui pourrait occuper de manière significative l’espace poral et donc modifier aussi les propriétés de transports comme la perméabilité apparente au gaz

.

Il existe une grande variété de bétons, selon les matériaux de base (type de grains), mais également selon le rapport eau/ciment (E/C) utilisé lors de la fabrication. Les échantillons de béton avec lesquels cette étude a été réalisée ont été fournis par le CSTB, partenaire du projet FLUXOBAT. Il s’agit d’un béton communément nommé « B40 », béton assez largement utilisé dans les constructions actuelles, composé de graviers calcaires et de sable siliceux, avec un rapport E/C de 0.54 et une résistance à la compression de 40 MPa (cf. composition en Tableau IV. 1)

Tableau IV. 1 : Composition du béton utilisé

Composition du béton Composition (majeurs) chimique

du ciment CEMII/A (%)

Composants Dosage (kg.m-3)

Ciment (CEM II/A 32,5 CE CP2 NF) 350 CaO 62.38

Sable 0/8 (« Bouaffle Recomposé ») 982 SiO2 15.58

Gravier (« 4/14 RC La Brosse ») 814 Al2O3 4.16

Superplastifiant (Chrystoplast Oméga 132) 2 SO3 2.83

Eau 196 Fe2O3 1.81

MgO 0.79

K2O 0.78

1.1.2 Propriétés du béton

La porosité et la perméabilité du béton sont des caractéristiques très importantes dans le génie civil puisqu’elles gouvernent la durabilité du béton. En effet, plus la porosité et la perméabilité sont faibles, plus la pénétration de l’eau ou d’autres agents potentiellement agressifs (sulfates, chlorures, dioxyde de carbone, etc.) est ralentie.

La porosité du béton est constituée de plusieurs familles de vides dont les dimensions sont comprises entre quelques millimètres et quelques dizaines d’Angström. Les plus petits pores du béton sont un million de fois plus petit que les plus gros ! Les pores présents dans la pâte de ciment

durcie ont donc une géométrie complexe et des dimensions très étalées. Par ordre décroissant de taille (diamètre), nous trouvons :

- Les vides d’air occlus et les défauts de compaction (Ø > 1 mm) - Les bulles d’air entraînées (10 µm < Ø < 1 mm)

- Les pores capillaires (0,01 µm < Ø < 5 µm)

- Les pores de gel (Ø < 4.10-9 m.) contiennent de l’eau, en partie adsorbée. Cette eau est relativement stable et il est difficile de l’extraire par séchage.

Il est important de noter que les conditions de stockage du béton influent fortement sur ses propriétés. En l’occurrence, si le béton est constamment conservé à l’humidité, il est possible de considérer que les pores capillaires sont remplis d’eau. Si le béton est soumis à un séchage, les pores capillaires peuvent contenir de l’air. Ce sont le volume total et la dimension des pores capillaires

qui influencent le plus la perméabilité du béton.

Le rapport E/C exerce une grande influence sur la porosité de la pâte de ciment hydraté, car il gouverne directement l’espacement initial entre les grains de ciment en suspension et l’eau de gâchage. Plus ce rapport est faible, plus les grains de ciments sont initialement rapprochés les uns des autres ; les espaces inter-granulaires sont alors réduits, comme les possibilités de créer des pores. Le rapport E/C joue sur la porosité, mais d’autres facteurs, tel que l’âge du béton ainsi que sa durée d’hydratation sont également importants.

Afin de travailler sur une porosité la plus stable possible, nous avons effectué nos mesures sur des bétons âgés de plus de 90 jours. (NB : dans le génie civil, les essais normalisés sont réalisés à 28 jours exactement, mais nos échantillons de béton provenant tous de la même dalle, il aurait fallu effectuer tous nos essais le même jour, ce qui n’était pas réalisable).