• Aucun résultat trouvé

Augmentation polynomiale de la m´emoire

Dans cette section, nous prouvons qu’une augmentation polynomiale du nombre d’´etats d’un automate entraˆıne une augmentation de sa capacit´e d’exploration des graphes. Plus pr´ecis´ement, le r´esultat principal de cette section est le suivant.

Th´eor`eme 4.1 Il existe une fonction polynomiale f : IN → IN, telle que GK est stricte-ment inclus dans Gf(K), pour tout K >0.

Dans cette section, nous n’utilisons pas la m´ethode de l’automate r´eduit, d´ecrite dans le chapitre 2, mais une nouvelle m´ethode, la m´ethode des pseudo-palindromes, pour construire des pi`eges. Nous commen¸cons par les principales d´efinitions et propri´et´es.

Une suiteLd’´etiquettes (num´eros de port) est unpseudo-palindromesi l’une des deux conditions suivantes est v´erifi´ee : (1) L=∅, ou (2) L =L ◦(ℓ, ℓ)◦L′′, o`u L ◦L′′ est un pseudo-palindrome, ℓ est une ´etiquette, et◦ est l’op´erateur de concat´enation.

Une suiteLest uner´eductiondeLsiL =A◦B etL=A◦L′′◦B o`uL′′est un pseudo-palindrome non vide, et A etB sont deux suites arbitraires (´eventuellement vides). Une

4.2. AUGMENTATION POLYNOMIALE DE LA M ´EMOIRE 93 suite est dite pp-libre si elle n’admet aucune r´eduction. Une suite L est la pp-r´eduction

d’une suiteLsiL est pp-libre et obtenu `a partir deLpar r´eductions successives. On peut ais´ement v´erifier que la pp-r´eduction d’une suite finie est unique (voir, par exemple, la section 1.7 de [Bud78]). Par exmple, la pp-r´eduction de 1122121121322331131332311221 est 1231. De fa¸con ´evidente, ´etant donn´e un quelconque graphe homog`ene G= (V, E) et un sommet u ∈V, toute suite L de num´eros d’arˆetes d´efinit un chemin P depuisu dans

G. Si L est un pseudo-palindrome, alors P commence et finit en u.

Le principal outil pour prouver le th´eor`eme 4.1 est le lemme suivant, qui pr´esente par ailleurs un int´erˆet propre.

Lemme 4.1 Pour tout K > 0 il existe un graphe planaire r´egulier G de degr´e 3, ayant

O(K3) sommets, tel que G6∈ GK.

Preuve. Pour K = 1 le lemme d´ecoule des Propositions 4.1 et 4.2 de la section suivante. Fixons un entier K >1. 3k x 1 x 2 y1 y 2 y y’ u1 u2 u3k u’ 1 u’ 2 u’ 3k Fig. 4.1 – Le sous-graphe T

Nous d´efinissons d’abord un graphe T qui est utilis´e comme sous-graphe de G (cf. Figure 4.1). Le graphe T a 6K + 6 sommets x1, x2, y, y, y1, y2, u1, . . . , u3K, u

1, . . . , u 3K et 9K + 7 arˆetes {x1, x2}, {x2, u1}, {x2, u 1}, {y1, y2}, {y, y1}, {y, y2}, {y, y1}, {y, y2}, {y, u3K}, {y, u 3K}, {u3K, u 3K} et {ui, u i}, {ui, ui+1}, {u i, u i+1} pour tout 1 ≤ i < 3K. Tous les sommets sont donc de degr´e 3 sauf x1 qui est de degr´e 1. Le sous-graphe de T

induit par les sommets y, y, y1, y2 est appel´e la queuedu graphe T.

SoitGbune chaˆıne de cycles disjoints de toutes les tailles de 3 `a 3K. Plus pr´ecis´ement, soient vp et v

p deux sommets diff´erents du cycle de longueur p, pour 3 ≤ p ≤ 3K. Connectons les cycles par les arˆetes {v

p, vp+1}, pour 3 ≤ p < 3K. Maintenant attachons un graphe T `a tout sommet w de Gb de degr´e 2 en identifiant w de Gb et x1 de T. Soit G le graphe obtenu. G est r´egulier de degr´e 3. Puisque T a O(K) sommets, le graphe G a

O(K3) sommets.

Il reste `a prouver queG6∈ GK. Fixons un automateAavecK´etats (K >1). Notre but est de trouver une orientation locale deG, un sommet de d´epart et un port d’entr´ee initial, tel que l’automate A ne visite pas tous les sommets de G. Nous utilisons une orientation locale sp´ecifique qui est partiellement `a arˆetes color´ees. L’automate A ne traversera que des arˆetes color´ees, mˆeme si toutes les arˆetes du graphe ne le sont pas.

Si un automate ne traverse que des arˆetes color´ees dans un graphe r´egulier, alors la trajectoire de l’automate (la suite de num´eros de port) et sa suite d’´etats d´ependent

94 CHAPITRE 4. TAILLE M ´EMOIRE ET CAPACIT ´E D’EXPLORATION

toutes deux exclusivement de la paire (s0, i0), o`u s0 est l’´etat initial et i0 le num´ero de port d’entr´ee initial. En particulier, apr`es 3K + 1 ´etapes au plus, l’automate arrive sur un sommet dans un ´etat s par le port i, tels que la paire (s, i) a d´ej`a ´et´e rencontr´ee sur un certain sommet pr´ec´ed´emment visit´e. Donc, apr`es cette ´etape, la suite des ´etats et la suite des couleurs d’arˆetesL={an}n≥0 sont p´eriodiques. Il existeq etp, avecq+p≤3K, tels que pour tout i≥q, on a ai =ai+p. SoitL =b1, b2, . . . la pp-r´eduction de la suite L. Nous avons i1 < i2 < . . . tels que br =air.

Supposons d’abord que la suiteL est finie. Alors la suiteaq+1, . . . , aq+2p est un pseudo-palindrome. Choisissons un sommet quelconque w dans le cycle de taille 3 de Gb. Choisis-sons un 3-coloriage propre arbitraire des trois arˆetes du cycle. Nous ´etendons maintenant le 3-coloriage propre au reste du graphe except´e pour la queue de chaque T. (Ceci peut facilement ˆetre fait, alors qu’un 3-coloriage propre des arˆetes du graphe entier, mˆeme du sous-graphe T, est impossible). Etiquetons arbitrairement les ports restants du graphe (les ports dans les queues des copies de T) par les entiers 0,1,2 en chaque sommet. Il reste `a calculer le sommet de d´epart de l’automate. Depuis le sommet w, traversons les arˆetes color´ees aq, aq−1, . . . , a1. Ce parcours m`ene `a un sommet u0. Nous affirmons que l’auto-mate, d´emarrant en u0 avec le port initial i0, ne visite jamais aucune queue d’une copie de T et donc ´echoue dans l’exploration de G. Pendant lesq premi`eres ´etapes, l’automate est `a distance au plus 3K de w car q ≤ 3K. A l’´etape q+ 2rp, pour r ≥ 0, l’automate est toujours en wcar aq, aq+1, . . . , aq+2p est un pseudo-palindrome. Puisquep≤3K, l’au-tomate est de nouveau `a distance au plus 3K de w. Puisque w est sur l’un des 3K−2 cycles, l’automate ne visite jamais aucune queue d’une copie de T, et donc ne traverse jamais des arˆetes non color´ees. Par cons´equent, A ne r´eussit pas `a explorer G.

Nous supposons `a partir de maintenant queL est infini. AlorsL h´erite de la propri´et´e de p´eriodicit´e : il existeq ≤q etp ≤3Ktels quebr =br+p′ pour toutr ≥q. Si la p´eriode est 2, nous choisissons p = 4 pour ´eviter les arˆetes multiples (un cycle de longueur 2). En commen¸cant d’un de ses sommets u, ´etiquetons les arˆetes du cycle de taillep dans G

avec les couleurs bq′+1, bq′+2, . . . , bq′+p′. Nous ´etendons maintenant le coloriage au reste du graphe except´e pour la queue de chaque copie de T. Etiquetons arbitrairement les ports restants du graphe par les entiers 0,1,2 en chaque sommet. Il reste `a calculer le sommet de d´epart de l’automate. Depuis le sommet u, traversons les arˆetes color´ees bq′, bq′−1, . . . , b1. Ce parcours m`ene `a un sommet u0. Nous affirmons que l’automate, d´emarrant en u0 avec le port initial i0, ne visite jamais aucune queue d’une copie de T et donc ´echoue dans l’exploration de G. Pendant les iq′ premi`eres ´etapes, l’automate est `a distance au plus 3K deu car iq′ ≤3K. A l’´etape iq′, l’automate est en u et il revient ensuite en u toutes les p´etapes car uest sur le cycle de longueur p, qui est ´etiquet´e pour pi´eger l’automate. Puisque p ≤ 3K, l’automate est de nouveau `a distance au plus 3K de u. Comme u est sur l’un des 3K−2 cycles, l’automate ne visite jamais aucune queue d’une copie deT et par cons´equent ne r´eussit pas `a explorer G.

Pour tout automate `aK´etats, nous avons construit une orientation locale, un sommet de d´epart u0 et un port d’entr´ee initial i0 tels que l’automate ne r´eussit pas `a explorerG.