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LES ATELIERS GENRIMAGES, POUR APPRENDRE À DÉCRYPTER LES IMAGES SEXISTES ET LGBT-PHOBES

Entretien avec Nicole Fernandez Ferrer, déléguée générale, et Laetitia Puertas, réalisatrice et formatrice du centre audiovisuel Simone de Beauvoir, à Paris.

Divers acteurs de terrain utilisent les images pour déconstruire les idées reçues sur les rapports sociaux de sexe, le genre ou encore l’homosexualité. L’association Genrimages s’est spécialisée dans cette question, en mettant en place des ateliers destinés aux jeunes et aux professionnels.

Comment est née l’idée des ateliers Genrimages ?

Dès que nous commençons à regarder nos premières images, c’est-à-dire très jeunes, nous sommes soumis à une avalanche de stéréotypes sexués, sexistes, racistes, homophobes, lesbophobes… Plutôt que de nous priver de salles de cinéma, de nos ordinateurs et de nos tablettes, nous pensons qu’il est préférable d’apprendre à les décrypter afin de mieux maîtriser les mécanismes et les ressorts de ces stéréotypes et des discriminations qu’ils entraînent. Le centre audiovisuel Simone de Beauvoir a donc choisi de croiser l’éducation à l’image et l’analyse des représentations sexuées au travers des ateliers Genrimages. L’objectif est d’amener les participants à réfléchir aux normes véhiculées par les médias audiovisuels et au rôle de l’image dans la construction et la représentation des différences hommes- femmes, du genre et de l’orientation sexuelle ; ceci tout en partageant le plaisir d’une activité des plus quotidiennes.

Quels sont les publics auxquels vous vous adressez ?

La majorité des ateliers est organisée avec des jeunes, en classe ou en dehors du temps scolaire. Les interventions fixées dans le cadre scolaire vont habituellement du collège à l’université mais depuis 2013 nous avons aussi lancé des actions à titre expérimental dans les écoles primaires. Nous nous appuyons sur des supports sensiblement différents suivant l’âge des élèves, le temps dont on dispose et le travail effectué en cours avec les professeurs autour du sujet, s’il y en a un. Nous avons également développé des ateliers destinés aux adultes, dans le cadre de leur activité professionnelle, et nous proposons aujourd’hui, en plus des ateliers de sensibilisation, des ateliers d’écriture et de réalisation de courts métrages de fiction ou documentaires sur le thème de l’égalité femmes-hommes.

Concrètement, comment se déroulent les ateliers ?

Le principe est d’intervenir deux fois deux heures pour permettre aux participants de réfléchir entre les deux phases de l’atelier et d’apporter des éléments audiovisuels à analyser lors de la seconde séance par exemple. Nous partons toujours sur une base de travail collaborative, qui est le visionnage de documents audiovisuels (fictions, extraits d’émissions, journaux télévisés, publicités, documentaires, courts métrages pédagogiques), suivie d’échanges. Il s’agit alors d’amener notre public à décortiquer des images ou des sons en travaillant à la déconstruction des personnages, des situations et des tech- niques de réalisation, afin de mettre au jour les mécanismes à l’œuvre dans le film et les idées qu’ils sous-tendent. Le travail d’explicitation du vocabulaire – les notions de « stéréotypes » et de « discrimi- nations » notamment –, des injures et des mots péjoratifs utilisés au quotidien est important également. De même, nous sommes amenés à aborder des notions spécifiques au monde de l’audiovisuel et à expliquer les enjeux de la prise de vue et de son.

Quel est l’intérêt du site internet que vous avez lancé en parallèle des ateliers ?

Pour aider concrètement nos intervenants et d’autres dans leur travail de déconstruction des stéréo- types et leur permettre de développer un argumentaire efficace, nous avons mis en place le site Genrimages. Il propose avant tout une sélection d’outils audiovisuels adaptés à différents publics et formats d’intervention, avec possibilité d’accéder à des extraits, des propositions d’exploitation péda- gogique et des exercices. Des ressources complémentaires pouvant enrichir le travail avec les élèves

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sont également disponibles : lexiques, chronologies, quiz sur les droits des femmes, bibliographie, filmographie, matériel pédagogique (cdroms, études, rapports, articles…) ainsi que des liens vers des sites internet classés par thèmes. On y trouve aussi des entretiens filmés réalisés avec des universitaires et autres spécialistes, qui permettent d’étoffer la réflexion sur les représentations des rôles sexués et de l’homosexualité dans le cinéma ou encore la littérature.

Avez-vous la possibilité d’évaluer la réception de vos ateliers ?

L’éducation à la citoyenneté est très difficile à évaluer… Nous lançons des pistes, nous semons des « petits cailloux » qui, peut-être, ne s’articuleront que plus tard avec le vécu ou les intérêts des enfants. Également, le temps de l’atelier est un temps où la parole individuelle des jeunes dans le débat est incluse dans le « collectif » de la classe et on sait bien qu’on ne se positionne pas de la même façon dans le cadre d’un groupe, notamment à l’adolescence et sur ces questions précisément. Jusqu’à présent, les évaluations et bilans se faisaient avec l’enseignant et/ou l’équipe pédagogique, quelques semaines après l’intervention, pour essayer d’appréhender la résonance des ateliers sur le quotidien, les paroles et les relations des élèves. Nous sommes actuellement en train d’élaborer un questionnaire d’évaluation à destination des enfants. Il sera à remplir quelque temps après et pas « à chaud » ou trop rapidement à la suite de l’intervention…

www.genrimages.org

www.centre-simone-de-beauvoir.com

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Bilan et propositions

CÉCILE CHARTRAIN

L’enquête de terrain sur laquelle s’est appuyée l’écriture de cet ouvrage de la collection « Cahiers de l’action » a permis de dégager des pistes de réflexion, d’amélioration pour ac- compagner les jeunes et les éducateurs dans la lutte contre les LGBT-phobies (lesbiennes, gays, bi, trans), ce qui nous permet ici de dresser une synthèse des axes restant à dévelop- per. Par ailleurs, puisque d’autres pays sont particulièrement engagés sur ces questions, nous souhaiterions apporter un éclairage sur les programmes innovants ou initiatives inté- ressantes qui existent d’ores et déjà à l’échelle européenne. Nous évoquerons également le cas du Québec, où une collaboration fructueuse entre chercheurs et représentants associa- tifs s’est mise en place au profit de la lutte contre les LGBT-phobies.