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M ATÉRIAUX POLYMÈRES NANOCOMPOSITES POUR L ’ ISOLATION DES CÂBLES DU

3. C ARACTÉRISATION ET DÉVELOPPEMENT DE MATÉRIAUX

3.2. M ATÉRIAUX POLYMÈRES NANOCOMPOSITES POUR L ’ ISOLATION DES CÂBLES DU

CÂBLES DU FUTUR.

3.2.1. INTRODUCTION

Depuis peu, les nanotechnologies font progressivement leur apparition dans le domaine de l'isolation pour les futures liaisons en haute tension courant continu (HTCC). Les matériaux nanocomposites étudiés sont issus de produits commerciaux, tels que le Polyéthylène Haute Densité (PEHD) et le Polyéthylène Réticulé

Chimiquement (PRC), dans lesquels ont été ajoutées des nanoparticules de SiO2. Les paramètres analysés dans

cette partie, relatifs aux nanoparticules, sont la teneur en poids de nanoparticules de silice et le traitement de surface de ces particules. Après l’analyse de la dispersion des nanoparticules dans la matrice à l’aide d’un microscope électronique à balayage (MEB), l’analyse structurelle des échantillons a été assurée par spectroscopie diélectrique à large bande

[DAV 11] [SAM 09]

. Enfin, la faculté des différents matériaux à accumuler les charges d’espace en fonction de la tension appliquée pendant le conditionnement électrique et la durée d’application de la contrainte a été étudiée. Les résultats obtenus ont, dans certains cas, été confortées par des mesures de conductivité électrique en courant continu. Le but d’une telle étude est de révéler une teneur idéale en nanoparticules et l’intérêt ou non de traiter les nanoparticules. Le traitement réalisé sur les

nanoparticules de silice (présentes sous forme de fumée) est une fonctionnalisation

[TAN 11]

. Si au final, nous

démontrons des améliorations des propriétés de ces matériaux par rapport aux matériaux de référence sans nanoparticule, ces « nouveaux » matériaux pourraient bien augurer des applications futures dans le domaine des

câbles HT et THT extrudés

[CAS 11a]

.

3.2.2. PRÉSENTATION DES ÉCHANTILLONS

Les matériaux nanocomposites à base de PEHD/nSiO2 étudiés ici on été réalisés à l’aide d’une extrudeuse

à double vis Rheomix 600 pour différents contenus de nanoparticules 0, 1, 2 et 4% en poids. Les nanoparticules de SiO2 (appelées nSiO2) ont été fournis par l'industrie chimique Nissan dans une solution colloïdale de

l'isopropanol sous la forme de sphères de 15 nm de diamètre avec une pureté de 99,9%. Le PEHD sans aucun additif a été fourni par la société Dow Chemical (Pétromont) sous la forme d'une poudre fine. Le polyéthylène et les nanoparticules ont été préalablement mélangés mécaniquement avant leur introduction dans l'extrudeuse.

Les granulés obtenus après extrusion ont ensuite été pressés à chaud à 160 °C sous 5 MPa. Les échantillons se présentent sous forme de plaques de 10 cm de côté et 1 mm d'épaisseur. Afin d'éviter l'effet de l'humidité sur les propriétés électriques, tous les échantillons ont été conservés dans le four pendant 48 h avant les mesures.

La dispersion des particules dans la matrice polymère a été observée à l’aide d’un Microscope Électronique à Balayage (MEB) (Figure 38). Nous avons volontairement choisi le cas le moins favorable avec le plus fort contenu en nanoparticules de silice (4% en poids) qui présente un risque important d’agglomérat. Il semble que les nanoparticules de silice de 15 nm n’aient pas été dispersées convenablement dans le PEHD. Les additifs nanométriques peuvent conduire à des réactions supplémentaires, et une intimité différente avec la matrice.

a) b)

Figure 38 : Identification des particules de silice dans la matrice PEHD pour une teneur de 4% en poids de

particules par imagerie MEB a) échelle 100 µm, b) échelle 200 µm.

La première image (Figure 38-a) montre une cartographie au MEB de l'identification de la silice. Elle montre que des structures micrométriques sont formées dans l’échantillon. Dans la deuxième image (Figure 38-b), une plus grande surface est montrée donnant l'occasion d'apprécier la dispersion de la silice. Il y apparaît des structures micrométriques parmi les nanostructures de silice dispersées. Cependant, nous verrons par la suite qu’un mélange de particules micrométriques et nanométriques peut conduire à de bonnes propriétés

3.2.3. ACCUMULATION DES CHARGES DESPACE

Les mesures de charges d’espace ont été réalisées pour différents champs électriques appliqués et pour différentes durées de conditionnement électrique. Ces mesures ont pour but de suivre l’évolution de la charge d’espace accumulée dans les PNC en fonction du champ appliqué et de la durée de conditionnement.

Le protocole expérimental des mesures de charges d’espace sur les échantillons avec et sans nSiO2 est le suivant :

• Conditionnement électrique jusqu’à 30 kV/mm (5, 10, 20 and 30 kV/mm) à 70°C pendant 40

heures;

• Conditionnement électrique jusqu’à 894 heures (40, 220, 400, 584, 728 and 894 heures) à 70°C sous 30 kV/mm.

Figure 39 : Évolution de la charge totale piégée QT = (Q +) + (Q-) en fonction champ électrique appliqué

Remarque: La charge totale présentée dans les Figures 39 et 40 correspond à la somme des charges positives et négatives contenues dans l’isolant. Une charge totale QT proche de zéro ne signifie pas que l'échantillon n'a pas accumulé des charges d'espace. Ce type d'approche permet de révéler une charge totale dominante.

L’échantillon contenant 1% de poids de nSiO2 accumule moins de charges d’espace quel que soit le champ électrique appliqué pendant le conditionnement (Figure 39). Une augmentation de la charge totale piégée est observée pour l'échantillon de référence, en particulier après un conditionnement sous 10 kV/mm. Pour ce même échantillon, nous pouvons également observer une charge négative dominante probablement due à un phénomène d'injection d'électrons à la cathode.

Figure 40 : Évolution de la charge totale piégée QT = (Q+) + (Q-) en fonction de la durée de conditionnement

Tout au long de la durée de conditionnement, l'échantillon contenant 1% en poids de nSiO2 présente la

plus faible charge totale piégée (Figure 40). Des variations importantes de la charge totale sont observées pour l'échantillon de référence pour lequel une charge négative dominante probablement caractéristique d’une

injection d'électrons à la cathode est observée

[CAS 10]

. Il semble donc ressortir un pourcentage « idéal » de

nanoparticules conduisant à une plus faible accumulation de la charge d’espace

[KRI 12] [CAS 11a]

.

Des mesures semblables ont également été réalisées sur les échantillons de PRC chargés de nanoparticules de SiO2 dans le but d’étudier l’influence de la fonctionnalisation des nanoparticules pour obtenir une meilleure affinité avec la matrice polymère sur l’accumulation de la charge d’espace. Ces échantillons destinés à l’isolation des câbles de transport d’énergie haute tension ont été préparés par la société Dow

Chemical

[TAN 11]

.

Trois types de matériaux ont ainsi été étudiés : un matériau de référence (matrice PRC), un matériau

contenant 5% de nSiO2 non fonctionnalisée et un dernier contenant 5% de nSiO2 fonctionnalisée dans la matrice

PRC.

La charge de silice de haute pureté est un dioxyde de silicium stoechiométrique (SiO2) dont la taille moyenne est d'environ 12 nm et la surface a été fonctionnalisée par un agent de couplage chimique spécifique afin d’améliorer la dispersion dans le polyéthylène pour le dernier matériau listé ci-avant. Le mélange des nanoparticules dans le polyéthylène a été réalisé dans un malaxeur pour mélange intensif de façon à maximiser la dispersion et à minimiser l'agrégation des particules de nSiO2. Les nanoparticules ont été dispersées dans du polyéthylène avant l’ajout des agents réticulants.

Les plaques de matériaux de 1 mm d’épaisseur ont été préparées par pressage à chaud dans un moule de 200 mm de coté et 1 mm d’épaisseur. Les échantillons ont été initialement maintenus à 120 °C pendant 10 minutes dans la presse, pour permettre un écoulement uniforme de la plaque dans le moule, puis réticulés à 180 °C pendant 30 minutes. Avant toute mesure électrique, les échantillons ont ensuite été maintenus à 60 °C pendant une semaine.

Le protocole expérimental est exactement le même que celui évoqué précédemment puisque les mesures ont été réalisées en même temps que celles sur les échantillons à base de PEHD.

Les résultats obtenus sont présentés dans les Figures 41 et 42.

Figure 41 : Évolution de la charge totale piégée QT = (Q +) + (Q-) en fonction champ électrique appliqué

La Figure 41 montre l’évolution de la charge totale piégée en fonction du champ électrique appliqué lors du conditionnement jusqu’à 30 kV/mm pendant 40 heures à 70 °C.

La charge accumulée dans l’échantillon de référence augmente à mesure que le champ électrique augmente. Par contre, elle tend à être beaucoup plus limitée lorsque le polymère est nanostructuré ; hormis pour l’échantillon de PRC chargé de particules fonctionnalisées pour un champ appliqué de 30 kV/mm où la charge piégée tend à augmenter à nouveau. La charge piégée dominante dans l’échantillon de référence est négative et de ce fait probablement représentative d’une injection d’électrons à la cathode.

Figure 42 : Évolution de la charge totale piégée QT = (Q+) + (Q-) en fonction de la durée de conditionnement

La Figure 42 montre l’évolution de la charge piégée en fonction de la durée de conditionnement électrique jusqu'à 897 heures sous un champ appliqué de 30 kV/mm à 70°C.

Le matériau de référence présente toujours la plus forte quantité de charge piégée. Cette charge est majoritairement négative et pourrait ainsi être issue d’un phénomène d’injection d’électrons à la cathode (homocharges).

Une diminution significative de la charge accumulée est observée quand la durée de conditionnement augmente dans l’échantillon chargé de particules fonctionnalisées. A la vue des distributions de champ électrique, non présentées ici, il semblerait dans le cas de l’échantillon chargé de particules fonctionnalisées qu’il y ait une double injection d’électrons à la cathode et de « trous » à l’anode

[TAN 11]

. Ainsi, les charges se compenseraient au fur et à mesure que la durée de conditionnement augmente.

3.2.4. MESURES DE COURANTS DE CONDUCTION

Les courants de conduction ou caractéristiques I = f (V) mesurées dans le mode quasi-stationnaire permettent l'identification des mécanismes de conduction d’un matériau. Ce paragraphe exploite seulement l’évolution de la densité de courant J par rapport au champ électrique appliqué E.

pA

alimentation HT stabilisée électromètre anneau de garde échantillon étuve régulée

Figure 43 : Système de mesure du courant de polarisation.

Le système de mesure du courant de conduction (Figure 43) est composé d'un électromètre (Keithley 6517A) et d’une alimentation 35 kV DC dotée d’une faible ondulation résiduelle de la tension de sortie (Fug HCP140-35000). Les mesures de courant de polarisation ont été effectuées pour des tensions allant de 6 à 30 kV sous 70 °C. Les caractéristiques courant-tension ont été tracées à partir des courants de conduction relevés lorsque ceux-ci se trouvaient dans un état quasi-stationnaire au bout de 2 heures d’application de la tension.

Figure 44 : Évolution de la densité de courant en fonction du champ appliqué à 70°C

La Figure 44 présente la caractéristique J = f(E) des échantillons de PEHD chargés ou non de nanoparticules de SiO2 pour des teneurs en particules allant jusqu'à 4% en poids. Les résultats montrent des phénomènes de conduction similaires pour chaque échantillon jusqu'à 20 kV/mm. Au delà de 20 kV/mm, les échantillons nanocomposites suivent tous la même pente alors que le PEHD de référence reflète un courant limité par charge d’espace, sans doute en raison d’une quantité significative de charges d'espace injectées qui tendent à limiter le courant de conduction. Ce résultat coïncide clairement avec le phénomène d'injection majoritaire observé lors des résultats de charge d'espace.

Figure 45 : Courants transitoires en fonction de la teneur en nanoparticules sous 30 kV à 70 °C.

La présence de nanoparticules semble fortement influencer l’allure du courant transitoire en particulier pour des champs électriques élevés (Figure 45). Ce courant transitoire nous renseigne sur l'effet capacitif ajouté à l’effet du courant de conduction et du piégeage des charges. Ces effets sont mis en évidence pour le matériau de référence PEHD intitulé 0% où l'on peut observer une combinaison d'injection et de piégeage de charges : en

effet, le courant augmente puis diminue

[TOU 76]

. Le contenu de nanoparticules influence peu l’amplitude du

courant de conduction (Figure 44) cependant, pour le champ le plus élevé, on observe une conductivité plus élevée pour l’échantillon contenant 1% en poids de nSiO2. Dans ce cas, la faculté du matériau à écouler la charge

d’espace pourrait être favorisée par rapport HDPE de référence. Ce résultat est en adéquation avec les résultats relatifs à la charge d’espace car c’est ce matériau qui tend à accumuler le moins de charges d’espace.

3.2.5. CONCLUSION

Les résultats présentés dans cette partie montrent des différences significatives entre un échantillon PEHD de référence et les échantillons chargés en nano particules. Le PEHD tend à accumuler plus de charges d'espace, et révèle également un phénomène d'injection dominant, en particulier à la cathode. D'autre part, les échantillons contenant des nanoparticules montrent un comportement relativement stable vis à vis des charges d'espace quel que soit le champ électrique appliqué et la durée de polarisation. Ils accumulent toujours moins de charges d’espace que l’échantillon de référence sans nanoparticule.

Il semble que l'échantillon de PEHD contenant 1% en poids de nanoparticules de silice résiste mieux à l'accumulation des charges d'espace. Ceci est probablement dû à la plus forte conductivité de ce matériau, en particulier pour des champs électriques élevés, qui pourrait faciliter leur écoulement.

Des phénomènes semblables ont été observés avec les matériaux nanocomposites à base de PRC où la présence de nanoparticules de SiO2 tend à limiter l’accumulation de la charge d’espace.

Un effet bénéfique à été observé au fur et à mesure que la durée de conditionnement augmente sur l’échantillon contenant des particules fonctionnalisées. Il semble que, grâce à une double injection de charges à l’anode et à la cathode, celles-ci se neutralisent et donnent un bilan de charges accumulées très faible.

Compte tenu de ces résultats, et dans la mesure où les particules sont dispersées convenablement, les matériaux nanocomposites à base de PEHD et/ou de PRC pourraient convenir pour les isolations des câbles d’énergie du futur.